Qumrân : quelques repères géographiques et historiques
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Qumrân : quelques repères géographiques et historiques
Qumrân : quelques repères géographiques et historiques
Le site de Qumrân est coincé entre la mer Morte à l'est et l'important escarpement rocheux des montagnes du désert de Juda à l'ouest à partir duquel cette photo a été prise. C'est dans des grottes aménagées dans ces escarpements que quelques habitants de la communauté de Qumrân vivaient. C'est aussi dans ces grottes que l'on a découvert le plus important lot de ce qu’il est maintenant convenu d’appeler les manuscrits de la mer Morte. Le point noir au centre de la photo est la plus connue de ces grottes (grotte 4).
Nous avons ici une vue du plateau marneux où la communauté de Qumrân avait élu domicile. L'endroit est presque totalement désert. Il pousse bien quelques arbres, aidés par un système d'irrigation moderne, mais anciennement, seule la petite oasis d'Ein Feshka, située à proximité, permettait de pratiquer une forme modeste d'agriculture, subvenant ainsi aux besoins des habitants de cet établissement désertique.
Les alentours sont composés presque exclusivement de marne, ce qui explique la teinte blanche du sol partout autour du site. Le site de Qumrân lui-même, c'est-à-dire là où l'on a exhumé les restes de ce que l'on a appelé le « monastère » (mais ce terme fait un peu trop chrétien!), se trouve juste devant la touffe d'arbres, à gauche de la photo. On y décèle aussi en bas, le wadi (d’où nous vient le mot oued) Qumrân, sorte de rivière sèche en été mais torrentielle à la saison des pluies. Les habitants de Qumrân ont su utiliser au maximum l'eau qui s'écoulait de ce wadi à la saison des pluies, en la canalisant vers des citernes sur le site.
Le wadi Qumrân coule, durant la saison des pluies, dans la gorge formée entre les deux montagnes. Il se transforme en chute d'eau avant d'atteindre le fond de la vallée d'où il s'écoule jusqu'à la Mer Morte. Les ingénieurs de Qumrân avaient trouvé le moyen d'en canaliser une partie de l'eau vers les citernes du site grâce à des barrages érigés sur le parcours de l’eau. La petite tache verte, dans le fond, montre ce qu’il reste d’eau en juillet, après plusieurs mois sans pluie.
Un peu d’histoire
Qumrân n'a pas une très longue histoire, et le site ne fut pas occupé de façon continue. L'essentiel de son histoire se déroule de la fin de la période hellénistique à la chute de Jérusalem en 70.
Dans la prochaine chronique, nous allons nous promener dans les ruines de Qumrân pour essayer de comprendre comment les habitants y vivaient.
(photos : Sébastien Doane)
Le site de Qumrân est coincé entre la mer Morte à l'est et l'important escarpement rocheux des montagnes du désert de Juda à l'ouest à partir duquel cette photo a été prise. C'est dans des grottes aménagées dans ces escarpements que quelques habitants de la communauté de Qumrân vivaient. C'est aussi dans ces grottes que l'on a découvert le plus important lot de ce qu’il est maintenant convenu d’appeler les manuscrits de la mer Morte. Le point noir au centre de la photo est la plus connue de ces grottes (grotte 4).
Nous avons ici une vue du plateau marneux où la communauté de Qumrân avait élu domicile. L'endroit est presque totalement désert. Il pousse bien quelques arbres, aidés par un système d'irrigation moderne, mais anciennement, seule la petite oasis d'Ein Feshka, située à proximité, permettait de pratiquer une forme modeste d'agriculture, subvenant ainsi aux besoins des habitants de cet établissement désertique.
Les alentours sont composés presque exclusivement de marne, ce qui explique la teinte blanche du sol partout autour du site. Le site de Qumrân lui-même, c'est-à-dire là où l'on a exhumé les restes de ce que l'on a appelé le « monastère » (mais ce terme fait un peu trop chrétien!), se trouve juste devant la touffe d'arbres, à gauche de la photo. On y décèle aussi en bas, le wadi (d’où nous vient le mot oued) Qumrân, sorte de rivière sèche en été mais torrentielle à la saison des pluies. Les habitants de Qumrân ont su utiliser au maximum l'eau qui s'écoulait de ce wadi à la saison des pluies, en la canalisant vers des citernes sur le site.
Le wadi Qumrân coule, durant la saison des pluies, dans la gorge formée entre les deux montagnes. Il se transforme en chute d'eau avant d'atteindre le fond de la vallée d'où il s'écoule jusqu'à la Mer Morte. Les ingénieurs de Qumrân avaient trouvé le moyen d'en canaliser une partie de l'eau vers les citernes du site grâce à des barrages érigés sur le parcours de l’eau. La petite tache verte, dans le fond, montre ce qu’il reste d’eau en juillet, après plusieurs mois sans pluie.
Un peu d’histoire
Qumrân n'a pas une très longue histoire, et le site ne fut pas occupé de façon continue. L'essentiel de son histoire se déroule de la fin de la période hellénistique à la chute de Jérusalem en 70.
- VIIIe siècle. Une petite forteresse israélite occupe le sommet du plateau. Certains pensent qu'il s'agit de la Ville de sel dont il est question dans Jos 15,61-62, mais cette association n'est pas certaine. La forteresse restera en activité jusqu'à la fin de la monarchie judéenne alors que les Babyloniens emmènent le peuple en exil en 587.
- -150 à -134 (?) Après une longue période d'abandon, le site est réoccupé (phase 1b) par un petit groupe de personnes qui réutilisent les installations du VIIIe siècle, en y ajoutant quelques nouvelles commodités. Il est difficile de préciser la date exacte de leur arrivée, certains la situant à l'époque de Simon Maccabée (142-134 av.), d'autres de Jonathan (152-142 av).
- - 134. Sous le règne de Jean Hyrcan, le site atteint sa plus grande expansion et sa forme à peu près définitive. La communauté est au plus fort de son évolution et pousse ses liens jusqu'à Damas, peut-être même au-delà.
- - 31. Un important tremblement de terre détruit les installations. Le site est abandonné. (Il subsiste des questions quant à la durée de l'abandon du site. Certains proposent plusieurs décennies, d'autres, à peine quelques années.)
- + 4 à 68. Le site est réoccupé par la même communauté, sans changement majeur dans sa configuration.
- 68. Vespasien et ses troupes romaines mettront fin à la vie de la communauté en 68, lors de la Première révolte juive.
- 68 à 73. Une garnison romaine est stationnée à Qumrân, gardant la voie de passage entre Jéricho et Massada. Une partie du site seulement est utilisée. La garnison sera retirée de Qumrân après la chute de Massada en 73.
- 132 à 135. Aucune nouvelle construction sur le site, mais présence de quelques rebelles associés aux résistants de Bar Kochba, chef de la Deuxième révolte juive.
Dans la prochaine chronique, nous allons nous promener dans les ruines de Qumrân pour essayer de comprendre comment les habitants y vivaient.
Re: Qumrân : quelques repères géographiques et historiques
Qumrân : des ruines à explorer
Ah, le site mythique de Qumrân. Nous allons nous promener dans les ruines de ce lieu où l’on a découvert les fameux manuscrits de la mer Morte, pour essayer de comprendre comment les habitants y vivaient.
Bien des choses se sont écrites sur Qumrân, sa communauté, ses règles, sur les liens possibles, probables ou inexistants entre Jean-Baptiste, Jésus et les Esséniens, sur les pouvoirs magiques des Esséniens, et même, dans certains livres ésotériques, sur leur pouvoir de lévitation! Il n’est pas dans mon intention d’entrer dans toutes ces hypothèses et théories, sérieuses ou farfelues. Le sujet est complexe et mériterait à lui seul une session complète de discussions et de recherches, mais nous en tiendrons, pour l’essentiel, aux questions archéologiques.
Le plan général présente le site de Qumrân dans sa plus grande extension. Il ne s’agit pas d’un grand site puisque l’essentiel du complexe tient dans un rectangle de 100 m par 80 m. Mais ceci n’inclut pas l’occupation des grottes avoisinantes ni la possibilité que des tentes aient été érigées à proximité des installations communautaires.
Rare dans cette région, l’eau de pluie qui déferlait dans le wadi Qumrân au sud du plateau était canalisée vers les citernes communautaires. Cette eau arrivait d’abord dans un premier bassin (3 sur le plan) à l’entrée nord-ouest du site. Juste à côté de cette entrée on avait aménagé un mikveh (bain rituel) qui servait aux ablutions rituelles des membres de la communauté (2), très stricts sur les questions de pureté rituelle. À l’Est de l’entrée, le grand enclos devait servir à garder quelques moutons et chèvres.
Une fois passé l’enclos, on entre dans le « complexe ». Une imposante tour de garde s’impose à l’entrée (10). À l’ouest de la grosse tour on trouve la citerne ronde qui a alimenté les installations humaines depuis l’époque du Fer jusqu’à la destruction en 70 (7; la seule citerne de forme ronde). Juste à l’est de la grosse tour on voit une salle rectangulaire avec trois petits piliers au centre. C’était la cuisine communautaire (11). Au Sud de la grosse tour : la longue salle du scriptorium (12) et, à la gauche de ce dernier, une salle carrée à trois pièces avec des banquettes aux murs, ce qui donne à penser à une salle de réunion du conseil (13).
Complètement au Sud, une grande pièce rectangulaire orientée est-ouest devait servir de salle d’assemblée et de réfectoire (20), tandis que la petite salle à gauche du réfectoire, avec un petit pilier, servait de remise (21). Dans le coin sud-est, proche de la grosse citerne rectangulaire, on a trouvé des installations de potier et des fours pour cuire les poteries (17).
Le reste du plateau au Sud n’a rien révélé de particulier. Cependant, à l’est du monastère, on a identifié un cimetière comptant environ 1300 tombes. Quelques-unes seulement ont été fouillées. Elles ont permis de constater que ce sont presque exclusivement des hommes qui y avaient été enterrés, ce qui viendrait confirmer que nous sommes en présence d’une communauté d’hommes, tel que semblent le proposer les manuscrits édictant les règles de la communauté. Cependant, la découverte de quelques squelettes de femmes et d’enfants pose question. S’agit-il de parents proches d’un membre de la communauté qui ont demandé à être enterrés près de lui? S'agit-il de sympathisantes de la communauté qui voulaient être enterrées à proximité du lieu de rassemblement de la communauté? Ceci reste encore une énigme.
Dans le prochain article, nous allons voir quelques endroits particuliers où nous pourrons pousser plus à fond nos investigations.
(photo : Sébastien Doane)
Ah, le site mythique de Qumrân. Nous allons nous promener dans les ruines de ce lieu où l’on a découvert les fameux manuscrits de la mer Morte, pour essayer de comprendre comment les habitants y vivaient.
Bien des choses se sont écrites sur Qumrân, sa communauté, ses règles, sur les liens possibles, probables ou inexistants entre Jean-Baptiste, Jésus et les Esséniens, sur les pouvoirs magiques des Esséniens, et même, dans certains livres ésotériques, sur leur pouvoir de lévitation! Il n’est pas dans mon intention d’entrer dans toutes ces hypothèses et théories, sérieuses ou farfelues. Le sujet est complexe et mériterait à lui seul une session complète de discussions et de recherches, mais nous en tiendrons, pour l’essentiel, aux questions archéologiques.
Le plan général présente le site de Qumrân dans sa plus grande extension. Il ne s’agit pas d’un grand site puisque l’essentiel du complexe tient dans un rectangle de 100 m par 80 m. Mais ceci n’inclut pas l’occupation des grottes avoisinantes ni la possibilité que des tentes aient été érigées à proximité des installations communautaires.
Illustration de G. Le Nohazic
Near Eastern Archaeology 63/3 (2000)
Near Eastern Archaeology 63/3 (2000)
Rare dans cette région, l’eau de pluie qui déferlait dans le wadi Qumrân au sud du plateau était canalisée vers les citernes communautaires. Cette eau arrivait d’abord dans un premier bassin (3 sur le plan) à l’entrée nord-ouest du site. Juste à côté de cette entrée on avait aménagé un mikveh (bain rituel) qui servait aux ablutions rituelles des membres de la communauté (2), très stricts sur les questions de pureté rituelle. À l’Est de l’entrée, le grand enclos devait servir à garder quelques moutons et chèvres.
Une fois passé l’enclos, on entre dans le « complexe ». Une imposante tour de garde s’impose à l’entrée (10). À l’ouest de la grosse tour on trouve la citerne ronde qui a alimenté les installations humaines depuis l’époque du Fer jusqu’à la destruction en 70 (7; la seule citerne de forme ronde). Juste à l’est de la grosse tour on voit une salle rectangulaire avec trois petits piliers au centre. C’était la cuisine communautaire (11). Au Sud de la grosse tour : la longue salle du scriptorium (12) et, à la gauche de ce dernier, une salle carrée à trois pièces avec des banquettes aux murs, ce qui donne à penser à une salle de réunion du conseil (13).
Complètement au Sud, une grande pièce rectangulaire orientée est-ouest devait servir de salle d’assemblée et de réfectoire (20), tandis que la petite salle à gauche du réfectoire, avec un petit pilier, servait de remise (21). Dans le coin sud-est, proche de la grosse citerne rectangulaire, on a trouvé des installations de potier et des fours pour cuire les poteries (17).
Le reste du plateau au Sud n’a rien révélé de particulier. Cependant, à l’est du monastère, on a identifié un cimetière comptant environ 1300 tombes. Quelques-unes seulement ont été fouillées. Elles ont permis de constater que ce sont presque exclusivement des hommes qui y avaient été enterrés, ce qui viendrait confirmer que nous sommes en présence d’une communauté d’hommes, tel que semblent le proposer les manuscrits édictant les règles de la communauté. Cependant, la découverte de quelques squelettes de femmes et d’enfants pose question. S’agit-il de parents proches d’un membre de la communauté qui ont demandé à être enterrés près de lui? S'agit-il de sympathisantes de la communauté qui voulaient être enterrées à proximité du lieu de rassemblement de la communauté? Ceci reste encore une énigme.
(photo : Wikispaces)
Dans le prochain article, nous allons voir quelques endroits particuliers où nous pourrons pousser plus à fond nos investigations.
Re: Qumrân : quelques repères géographiques et historiques
Les manuscrits de la mer Morte
On voit ici l’une des images les plus connues, reproduites dans presque tous les médias quand il est question de Qumrân. Il s’agit de l’une des onze grottes qui ont offert aux archéologues, et à l’humanité, de précieux manuscrits. Cette grotte 4 fut fouillée en 1952. On y découvrit l’une des plus importantes quantités de manuscrits, principalement des manuscrits associés à la vie de la communauté de Qumrân.
Malheureusement, une partie de son contenu avait déjà été découverte par des Bédouins qui, sachant la valeur de ces manuscrits sur le marché, n’hésitaient pas à aller les vendre pour en tirer profit. Combien de manuscrits sont disparus de cette façon? Difficile à évaluer. On espère aujourd’hui que l’on a recouvré la plus grande partie de ce qui était récupérable. Les autres grottes à manuscrits se trouvent dans un rayon d’environ trois kilomètres de Qumrân, mais sont moins visibles que la grotte 4 qui elle, se trouve juste en face du plateau, creusée dans la paroi marneuse.
L’importance des manuscrits de Qumrân
Voici quelques raisons qui font de ces manuscrits une des plus importantes découvertes archéologiques du XXe siècle.
Ce sont des milliers de manuscrits, dans un état souvent fragmentaire, que l’on a trouvés ici. Parmi ces manuscrits on a recensé des livres bibliques, des livres apocryphes, des commentaires, des écrits permettant de mieux comprendre le fonctionnement de cette communauté que l’on ne connaissait, avant 1947, que par les écrits de Flavius Josèphe. Ces documents permettent de mieux saisir les tensions religieuses et les espérances messianiques qui circulaient entre le IIe siècle av. J.C. et le IIe siècle ap. J.C. C’est la première fois qu’on se retrouvait en présence d’une bibliothèque aussi volumineuse offrant des manuscrits aussi anciens.
Par la découverte et le déchiffrement de ces manuscrits, la communauté scientifique dispose maintenant de la plus ancienne tradition manuscrite des textes bibliques. En effet, jusqu’en 1947, la plus ancienne édition de la bible hébraïque remontait au Xe siècle ap. J.C. Or, les textes de Qumrân sont plus de mille ans antérieurs au manuscrit de la Geniza du Caire (vers 970 ap. J.C.). En les découvrant, on comblait un vide majeur dans l’histoire de la transmission et de la copie des textes bibliques.
Avec les manuscrits de Qumrân, voilà qu’on peut désormais comparer les copies plus récentes avec des manuscrits anciens. Or, depuis que ce travail est commencé, on a observé quelque chose d’assez extraordinaire. En comparant les textes de Qumrân avec des copies du Xe siècle ap. J.C. on a remarqué que les différences étaient minimes entre les textes. Il y a bien sûr de légères différences, mais on constate qu’en général la tradition manuscrite a été passablement fidèle entre le Ier siècle et le Xe siècle. C’est là une observation très importante pour les études bibliques. D’où la place qu’ont occupée les manuscrits de la mer Morte depuis leur découverte. Et l’on n’a pas fini d’en parler, car bien que la grande majorité des manuscrits les plus volumineux ait été déchiffrée et traduite, il reste beaucoup de fragments sur lesquels un travail énorme reste à faire.
(photo : Sébastien Doane)
On voit ici l’une des images les plus connues, reproduites dans presque tous les médias quand il est question de Qumrân. Il s’agit de l’une des onze grottes qui ont offert aux archéologues, et à l’humanité, de précieux manuscrits. Cette grotte 4 fut fouillée en 1952. On y découvrit l’une des plus importantes quantités de manuscrits, principalement des manuscrits associés à la vie de la communauté de Qumrân.
Malheureusement, une partie de son contenu avait déjà été découverte par des Bédouins qui, sachant la valeur de ces manuscrits sur le marché, n’hésitaient pas à aller les vendre pour en tirer profit. Combien de manuscrits sont disparus de cette façon? Difficile à évaluer. On espère aujourd’hui que l’on a recouvré la plus grande partie de ce qui était récupérable. Les autres grottes à manuscrits se trouvent dans un rayon d’environ trois kilomètres de Qumrân, mais sont moins visibles que la grotte 4 qui elle, se trouve juste en face du plateau, creusée dans la paroi marneuse.
Reproduction du rouleau d'Isaïe, l'un des textes bibliques les mieux conservés
de la bibliothèque de Qumrân.
de la bibliothèque de Qumrân.
L’importance des manuscrits de Qumrân
Voici quelques raisons qui font de ces manuscrits une des plus importantes découvertes archéologiques du XXe siècle.
Ce sont des milliers de manuscrits, dans un état souvent fragmentaire, que l’on a trouvés ici. Parmi ces manuscrits on a recensé des livres bibliques, des livres apocryphes, des commentaires, des écrits permettant de mieux comprendre le fonctionnement de cette communauté que l’on ne connaissait, avant 1947, que par les écrits de Flavius Josèphe. Ces documents permettent de mieux saisir les tensions religieuses et les espérances messianiques qui circulaient entre le IIe siècle av. J.C. et le IIe siècle ap. J.C. C’est la première fois qu’on se retrouvait en présence d’une bibliothèque aussi volumineuse offrant des manuscrits aussi anciens.
Règle de la communauté (extrait), un document qui nous permet
de mieux comprendre le groupe qui vivait sur le site de Qumrân
Source : Musée d'Israël, Jérusalem
de mieux comprendre le groupe qui vivait sur le site de Qumrân
Source : Musée d'Israël, Jérusalem
Par la découverte et le déchiffrement de ces manuscrits, la communauté scientifique dispose maintenant de la plus ancienne tradition manuscrite des textes bibliques. En effet, jusqu’en 1947, la plus ancienne édition de la bible hébraïque remontait au Xe siècle ap. J.C. Or, les textes de Qumrân sont plus de mille ans antérieurs au manuscrit de la Geniza du Caire (vers 970 ap. J.C.). En les découvrant, on comblait un vide majeur dans l’histoire de la transmission et de la copie des textes bibliques.
Avec les manuscrits de Qumrân, voilà qu’on peut désormais comparer les copies plus récentes avec des manuscrits anciens. Or, depuis que ce travail est commencé, on a observé quelque chose d’assez extraordinaire. En comparant les textes de Qumrân avec des copies du Xe siècle ap. J.C. on a remarqué que les différences étaient minimes entre les textes. Il y a bien sûr de légères différences, mais on constate qu’en général la tradition manuscrite a été passablement fidèle entre le Ier siècle et le Xe siècle. C’est là une observation très importante pour les études bibliques. D’où la place qu’ont occupée les manuscrits de la mer Morte depuis leur découverte. Et l’on n’a pas fini d’en parler, car bien que la grande majorité des manuscrits les plus volumineux ait été déchiffrée et traduite, il reste beaucoup de fragments sur lesquels un travail énorme reste à faire.
Re: Qumrân : quelques repères géographiques et historiques
Qumrân : un système ingénieux de canalisation
Pour survivre dans cette région désertique, il a fallu développer un système qui permettait de récupérer le maximum d’eau de pluie dans des citernes. Comme le site se trouve sur un plateau, et qu’un important wadi [1] coule au sud de celui-ci durant la saison des pluies, on a mis au point un système de canalisation qui déviait l’eau dévalant des montagnes du désert de Juda vers la mer Morte par le wadi Qumrân. En érigeant une petite digue au milieu de la descente, on pouvait ainsi faire bifurquer l’eau vers les bassins de décantation situés à l’entrée du site de Qumrân. Ce sont ces bassins (3 sur le plan) qui occupent la partie Nord-Ouest du site. Cette décantation était importante pour que les dépôts sablonneux et les scories restent au fond avant que l’eau ne s’achemine ensuite vers les diverses citernes.
Un système de canalisation avait aussi été aménagé à l’intérieur du site lui-même. Ainsi, une fois la première citerne remplie, l’eau débordait dans un petit canal relié à la prochaine citerne. La citerne ronde, la plus ancienne, une fois remplie, déversait son surplus qui allait ensuite remplir l’autre citerne, et ainsi de suite, jusqu’à ce que la grande citerne du sud-est soit pleine. On profitait aussi de ces canalisations pour remplir les deux mikveh [2] du site, sans qu’il soit besoin de transporter l’eau dans des cruches. On respectait ainsi les prescriptions rituelles qui voulaient que l’eau des mikvoth ne soit pas transportée par des hommes, mais qu’elle vienne directement d’une canalisation.
Comme il ne pleut pas souvent dans cette région, il était important, voire vital, de conserver le plus d’eau possible pour toute la période de la saison sèche. Il devait certainement y avoir un système de contrôle de la consommation pour éviter une pénurie qui aurait mis en péril la survie de la communauté entière. Il faut dire cependant que, dans la région immédiate de Qumrân, se trouve le site de Ein Feshka où l’on pouvait s’approvisionner temporairement à une source.
La citerne ronde
Cette citerne aura connu toute l’histoire de Qumrân puisqu’elle était déjà en opération dans la forteresse israélite du VIIIe siècle avant notre ère, et qu’elle le restera jusqu’à ce que les Romains chassent les combattants de Bar Kochba en 135.
La citerne craquée
Le site de Qumrân comptait au moins six citernes. Ces citernes étaient habituellement creusées en partie dans la roche marneuse, et l’on pouvait terminer la partie du haut en montant une paroi de pierres. Le tout était recouvert de plâtre imperméabilisant.
On pouvait descendre dans quelques citernes grâce à des marches sculptées à même la roche, elles aussi recouvertes de plâtre, bien sûr! J’attire votre attention ici sur deux choses. La première est très évidente : la citerne est craquée donc, inutilisable. Un tremblement de terre en l’an - 31 a causé cette faille. Cette citerne offre donc un témoignage visuel de cette catastrophe qui décima la communauté pendant quelques années.
Deuxième observation est plus technique. Dans la partie supérieure des marches, deux lignes de plâtre descendent presque parallèles dans les cinq premières marches. Regardez attentivement dans le coin droit supérieur. Il y a une petite rigole qui communique avec le haut de la citerne à la hauteur de la première marche. Cette rigole apportait l’eau depuis une autre citerne, située en amont, qui venait déverser ici son trop-plein. Pour éviter que l’eau, qui arrive parfois avec puissance, ne vienne perturber les dépôts qui reposaient dans le fond de la citerne, on construisait une sorte de brise-lame pour freiner l’ardeur de cette eau nouvellement arrivée. Si le flot était vraiment très puissant et passait par-dessus le premier brise-lame, le second terminait le travail. Ingénieux quand même ces anciens...
(photos : Sébastien Doane)
Pour survivre dans cette région désertique, il a fallu développer un système qui permettait de récupérer le maximum d’eau de pluie dans des citernes. Comme le site se trouve sur un plateau, et qu’un important wadi [1] coule au sud de celui-ci durant la saison des pluies, on a mis au point un système de canalisation qui déviait l’eau dévalant des montagnes du désert de Juda vers la mer Morte par le wadi Qumrân. En érigeant une petite digue au milieu de la descente, on pouvait ainsi faire bifurquer l’eau vers les bassins de décantation situés à l’entrée du site de Qumrân. Ce sont ces bassins (3 sur le plan) qui occupent la partie Nord-Ouest du site. Cette décantation était importante pour que les dépôts sablonneux et les scories restent au fond avant que l’eau ne s’achemine ensuite vers les diverses citernes.
Illustration de G. Le Nohazic
Near Eastern Archaeology 63/3 (2000)
Near Eastern Archaeology 63/3 (2000)
Un système de canalisation avait aussi été aménagé à l’intérieur du site lui-même. Ainsi, une fois la première citerne remplie, l’eau débordait dans un petit canal relié à la prochaine citerne. La citerne ronde, la plus ancienne, une fois remplie, déversait son surplus qui allait ensuite remplir l’autre citerne, et ainsi de suite, jusqu’à ce que la grande citerne du sud-est soit pleine. On profitait aussi de ces canalisations pour remplir les deux mikveh [2] du site, sans qu’il soit besoin de transporter l’eau dans des cruches. On respectait ainsi les prescriptions rituelles qui voulaient que l’eau des mikvoth ne soit pas transportée par des hommes, mais qu’elle vienne directement d’une canalisation.
Comme il ne pleut pas souvent dans cette région, il était important, voire vital, de conserver le plus d’eau possible pour toute la période de la saison sèche. Il devait certainement y avoir un système de contrôle de la consommation pour éviter une pénurie qui aurait mis en péril la survie de la communauté entière. Il faut dire cependant que, dans la région immédiate de Qumrân, se trouve le site de Ein Feshka où l’on pouvait s’approvisionner temporairement à une source.
La citerne ronde
Cette citerne aura connu toute l’histoire de Qumrân puisqu’elle était déjà en opération dans la forteresse israélite du VIIIe siècle avant notre ère, et qu’elle le restera jusqu’à ce que les Romains chassent les combattants de Bar Kochba en 135.
La citerne craquée
Le site de Qumrân comptait au moins six citernes. Ces citernes étaient habituellement creusées en partie dans la roche marneuse, et l’on pouvait terminer la partie du haut en montant une paroi de pierres. Le tout était recouvert de plâtre imperméabilisant.
On pouvait descendre dans quelques citernes grâce à des marches sculptées à même la roche, elles aussi recouvertes de plâtre, bien sûr! J’attire votre attention ici sur deux choses. La première est très évidente : la citerne est craquée donc, inutilisable. Un tremblement de terre en l’an - 31 a causé cette faille. Cette citerne offre donc un témoignage visuel de cette catastrophe qui décima la communauté pendant quelques années.
Deuxième observation est plus technique. Dans la partie supérieure des marches, deux lignes de plâtre descendent presque parallèles dans les cinq premières marches. Regardez attentivement dans le coin droit supérieur. Il y a une petite rigole qui communique avec le haut de la citerne à la hauteur de la première marche. Cette rigole apportait l’eau depuis une autre citerne, située en amont, qui venait déverser ici son trop-plein. Pour éviter que l’eau, qui arrive parfois avec puissance, ne vienne perturber les dépôts qui reposaient dans le fond de la citerne, on construisait une sorte de brise-lame pour freiner l’ardeur de cette eau nouvellement arrivée. Si le flot était vraiment très puissant et passait par-dessus le premier brise-lame, le second terminait le travail. Ingénieux quand même ces anciens...
[1] Le wadi (mot d’origine arabe) ou le oued est un un cours d'eau des régions semi-désertiques à régime hydrologique très irrégulier.
[2] Le mikveh (pluriel mikvoth) est un bain rituel utilisé pour l'ablution nécessaire aux rites de pureté.
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