L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
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L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Découverte des berbères dans la Bible
Tadmayt - La reine Amazighe Kahina
Kahena, Dihya. Reine Berbère
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L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
L'histoire des Berbères
Tadmayt - La reine Amazighe Kahina
Kahena, Dihya. Reine Berbère
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime son semblable a accompli [la] loi. Romains 13:8
Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
LA DÉCOUVERTE DES JUIFS BERBÈRES
Daniel J. Schroeter
in Relations Judéo-Musulmanes au Maroc : perceptions et réalités, edited by Michel Abitbol, Paris: Editions Stavit, 1997, pp. 169-187
Parmi les travaux et domaines d’études concernant le passé des Juifs marocains, l’histoire des Juifs dans les régions à dominance berbère occupe une très faible place. Cela provient en partie de la nature fragmentaire des sources historiques provenant des zones rurales du pays [1]. Comparée à la documentation sur les Juifs parlant arabe, vivant dans les régions urbaines du Maroc et qui ont produit un nombre considérable d’écrits, les données historiques sur la vie des Juifs berbères ou vivant parmi les Berbères, avant la période coloniale, sont très éparses, presque toujours de seconde main, et sont souvent basées sur des mythes d’origines et des légendes. Les voyageurs étrangers en visite au Maroc dans la période pré-coloniale, qui ont établi, quoique de façon inexacte, les listes des tribus et des " races " du pays ont rarement fait la distinction entre Juifs berbérophones et Juifs arabophones [2]. Les Juifs ont été considérés comme une catégorie à part, aux côtés des Maures ou Andalous, des Arabes, des Berbères et shleuh. Peu d’Européens ont voyagé à l’intérieur du Maroc avant le XXe siècle, et ceux qui le firent, comme John Davidson (qui fut tué) en rapportèrent des informations peu fiables. James Richardson, un militant anti-esclavagiste britannique, qui a visité le Maroc en 1840, a poussé plus loin les observations de Davidson ; il a été le premier à désigner les Juifs de l’Atlas comme des " juifs shelouh ", parlant berbère et dont les coutumes et caractéristiques étaient les mêmes que celles de leurs voisins non-juifs [3].
Cette référence aux Juifs berbères est, cependant, encore très inhabituelle et de fait, elle n’a pas donné lieu à des hypothèses hasardeuses sur les origines berbères des Juifs.
D’après la plupart des visiteurs européens du XIXe siècle, les communautés juives elles-mêmes se revendiquent fermement comme descendant des Juifs de l’Ancien Israël. Les seules distinctions qu’on y trouve sont celles relatives aux clivages entre Juifs espagnols et Juifs autochtones, un clivage que les Juifs du Maroc eux-mêmes mentionnent par les termes " d’expulsés " et de " résidents " (megorashim et toshavim).
A la fin du XIXe et au XXe siècles, les voyageurs et ethnographes " découvrent " un grand nombre de communautés dispersées et donnent de ces Juifs vivant parmi les Berbères une image totalement différente de celle des communautés juives des régions urbaines. Sous le protectorat français, l’image des Juifs berbères va être définitivement établie conformément aux études qui leur seront consacrées par l’ethnographie coloniale, ainsi que par les hommes de l’Alliance israélite universelle. Enfin, la société israélienne va y ajouter sa touche, reflétant l’apport sioniste et le développement de stéréotypes à l’égard des Juifs marocains, dont la plupart ont immigré en Israël entre 1950 et 1960.
Mon propos concerne la façon dont a été formulée la perception des relations judéo-berbères aux XIXe et XXe siècles en me référant tout particulièrement à la documentation sur les Juifs d’Iligh, une communauté qui vivait avec les Berbères dans une région de langue tashelhit, du Sous [4].
La découverte des Juifs berbères
L’intérêt des Européens pour les Juifs des régions apparemment " éloignées " du monde n’est pas une invention du XIXe siècle ; ce qui est nouveau, c’est la signification conférée à cet intérêt. La recherche sur les tribus perdues n’est plus motivée uniquement par des considérations d’ordre messianique, car à l’ère du colonialisme triomphant, la recherche ethnographique sur les communautés lointaines d’Orient est devenue un moyen de gouvernement.
De plus, pour les Juifs européens, la découverte de coreligionnaires primitifs n’évoque pas seulement le souvenir des tribus perdues mais leur révèle aussi d’anciennes coutumes disparues, à un moment où eux-mêmes commencent à se considérer comme une nation et se tournent vers les terres bibliques du Levant pour restaurer la souveraineté juive [5].
Au début du XXe siècle, l’orientaliste et hébraïsant Nahum Slouschz parcourut l’Afrique du Nord pour y étudier les origines et l’histoire des communautés juives. Il a été le premier à étudier sérieusement l’histoire des communautés vivant dans les régions intérieures du Maghreb. Slouschz croyait que pendant les siècles qui ont précédé l’expansion arabe en Afrique du Nord, les Juifs, originaires de Palestine, se sont répandus parmi la population berbère et en sont devenus un élément dominant [6]. Durant l’époque coloniale, ses opinions sur les origines berbères des Juifs vont avoir force de loi [7]. En 1906, Slouschz fut envoyé en mission au Maroc par la Mission scientifique du Maroc, grâce à ses relations avec son directeur, Le Chatelier [8]. La mission, parrainée par le Comité de l’Afrique française, a publié les premiers travaux importants sur la société marocaine. Slouschz faisait partie de ce cercle et ses idées influencèrent largement la vision française du judaïsme marocain. Après l’établissement du protectorat français, il retourna au Maroc et fut chargé par les autorités coloniales d’étudier les communautés juives et de soumettre ses conclusions au Résident-Général Lyautey en vue de leur réorganisation. Slouschz était sioniste et, en tant que tel, voulut " régénérer " le judaïsme marocain et réveiller sa conscience nationale juive. C’est en partie à cause de ses idées sionistes que les autorités françaises décidèrent de le relever de ses fonctions officielles [9].
Les tendances sionistes de Slouschz et ses efforts pour découvrir le passé juif berbère pré-arabe du Maroc procédaient d’une vision très cohérente. La population juive urbaine des grandes villes arabes du Maroc était très attachée à ses savants autant qu’à ses traditions. Pour Slouschz, ce sont les Juifs descendant des Berbères (comme il le croyait), avec leurs manières primitives et pénétrées d’influences locales, qui représentent les " vrais " Juifs nord-africains
" maintenant que l’Afrique est entrée également sous l’égide de l’influence occidentale ", écrit-il, " la pénétration de la civilisation française et l’émancipation de nos frères de Tunisie et du Maroc, suivant en cela l’exemple des Juifs algériens, vont faire disparaître le caractère spécifique du juif africain. Comme c’est déjà le cas dans les grandes villes françaises d’Afrique, les changements sociaux ont eu un effet radical sur les masses de la population, qui perdent rapidement leur individualité et leurs traditions millénaires [10] ".
Une fois ces coutumes abandonnées, grâce aux bienfaits de l’éducation occidentale, le judaïsme marocain aura-t-il une autre alternative que celle de rejoindre la nation juive moderne ?
C’est H. Z. Hirschberg qui le premier a mis en doute la thèse admise – établie d’abord par Slouschz et adoptée ensuite par de nombreux chercheurs de l’époque coloniale – selon laquelle les Juifs d’Afrique du Nord descendraient des tribus berbères converties au judaïsme dans 1’Antiquité. Hirschberg étudia systématiquement les traditions anciennes et parvint à la conclusion qu’il y a peu de preuves confirmant la thèse des Berbères judaïsés. D’après lui, la plupart des communautés se formèrent beaucoup plus tard, grâce à l’arrivée de commerçants juifs à l’intérieur du pays. Bien qu’il n’exclut pas qu’il ait pu exister des Berbères judaïsés, Hirschberg est sceptique quant à l’importance de ce phénomène [11]. Dans une étude récente basée sur des données linguistiques et ethnographiques importantes, Paul Wexler a réexaminé cette question, pour aboutir à la conclusion que la grande majorité des Juifs sépharades descendraient d’habitants d’Afrique du Nord convertis au judaïsme et installés en Espagne12. Si l’hypothèse de Wexler était exacte, il en découlerait que la plupart des Juifs marocains (toshavim comme megorashim) descendraient de Berbères convertis.
Les rares preuves contemporaines de l’existence de communautés juives en Afrique du Nord à l’époque pré-islamique ne permettent pas d’affirmer avec assurance l’importance démographique et culturelle du judaïsme parmi les Berbères. La première source historique évoquant des tribus juives berbères date du XIVe siècle. C’est le Kitab al-cibar d’Ibn Khaldoun [13]. Certes il y a également de nombreuses légendes locales sur les Juifs berbères au Sud marocain préislamique. Jacques Meunié, par exemple, est convaincu de l’authenticité de ces traditions et légendes, même si nombre d’entre elles n’ont été consignées que récemment [14]. Quelle que soit notre opinion au sujet de la conversion des tribus berbères au judaïsme dans l’Antiquité, on peut affirmer que des mythes sur les Juifs berbères ont existé au Moyen Age et que ces mythes concernaient également l’origine des Berbères dans leur ensemble. Ces mythes ont été élaborés afin de légitimer le pouvoir mérinide au XIVe siècle [15], avant d’être reformulés durant la période coloniale. L’historicité des légendes sur l’expansion du christianisme et du judaïsme parmi les Berbères à l’époque pré-islamique a pu servir les besoins de l’administration coloniale dans sa volonté de séparer les Berbères des Arabes. Comme l’écrit Jacques Meunié : " malgré la précarité des indications que nous possédons sur l’extension ancienne du christianisme et du judaïsme dans le Sud marocain, [ces traditions] méritent cependant d’être retenues parce qu’elles peuvent aider à connaître les divers éléments de populations berbères et leurs usages anté-islamiques, au cours de siècles plus récents, et même jusqu’à l’époque actuelle [16] ".
Exhumer les séquelles du passé berbère judéo-chrétien est un moyen parmi d’autres visant à justifier le régime colonial au Maroc.
Relations judéo-berbères : un cas particulier ?
Les études sur le Maroc des premières années du Protectorat français soulignent les différences existant entre les régions contrôlées par le Makhzen et les régions non soumises au contrôle du gouvernement central : bilad al makhzen / bilad al-siba. Considérée comme une division entre Arabes et Berbères, cette perception prédominante de la société marocaine développée par les ethnographes coloniaux et perpétuée – largement – par l’ethnographie post-coloniale, a été sérieusement remise en question [17]. Peu d’attention a été accordée à la façon dont ce dualisme simpliste entre makhzen et al-siba a influencé les débats sur le judaïsme marocain.
L’affirmation selon laquelle les relations judéo-berbères étaient complètement différentes des relations arabo-juives est liée de très près à cette vision d’une dichotomie entre makhzen et siba. On cite en exemple la protection efficace des commerçants juifs par les chefs tribaux, ou les patrons berbères, au point de les rendre intouchables. " Tout juif de bilad al-siba appartient corps et biens à son seigneur, son sid ", écrit Charles de Foucauld, dont les relations avec les communautés juives du Maroc font partie du corpus historique sur le judaïsme marocain [18]. Bien que le Juif soit protégé, Foucauld le décrit comme un être servile, exploité sans merci par son maître. Comme les régions berbères appartiennent au bilad al-siba, les Juifs se doivent d’obtenir la protection de chefs locaux et indépendants du Sultan. Slouschz considère la situation des Juifs du bilad al-siba à la manière de Foucauld : " à Tililit commence, pour les Juifs, le pays du servage, on pourrait même dire de l’esclavage. Tout ce que les Juifs possèdent appartient au Qaid, qui a droit de vie et de mort sur ses sujets. Il peut les tuer en toute impunité, il peut les vendre si tel est son désir... En échange de la perte de tous ses droits, le juif jouit de la sécurité, que le maître lui assure au risque de sa propre vie... Un Juif qui veut se marier doit acheter sa future femme au sid auquel appartient le père de la fille et qui est l’unique maître de son destin [19] ".
Alors que certains écrivains de la période coloniale considèrent la vie des Juifs dans les territoires berbères comme plus difficile que dans les régions citadines arabophones, d’autres au contraire, influencés par la thèse développée par l’ethnographie coloniale selon laquelle les Berbères étaient plus libres, plus démocrates et plus indépendants que les Arabes, qualifient la condition des Juifs dans les régions berbères de " meilleure " que parmi les Arabes. Cette idée avait des précurseurs depuis la première moitié du XIXe siècle. D’après Davidson, par exemple, les Juifs du Sous et du Rif étaient la " propriété des Maures ", mais " ils bénéficiaient néanmoins d’une plus grande liberté qu’à Tanger [20] ". De plus, d’après Davidson " les Juifs de l’Atlas sont de loin supérieurs, physiquement et moralement à leurs frères résidant au sein des Maures. Leurs familles sont nombreuses, et chacune d’elles est sous la protection immédiate d’un Berbère (les habitants originels d’Afrique du Nord), d’un patron, ou d’un seigneur. Ils ont par ailleurs leur propre sheikh, un juif, à la décision duquel tous les cas sont soumis. À la différence des Juifs résidant parmi les Maures, qui sont soumis à la loi musulmane, ils ne vivent pas dans le même état d’avilissement ou de servitude ; ils développent des relations de type patron/client [avec leurs voisins], tous ont les mêmes privilèges, et le Berbère est tenu de défendre la cause du juif en cas d’urgence. Ils disposent d’armes, et servent leurs patrons à tour de rôle [21] ".
Famille juive devant la porte de sa maison du
mellah d'Illigh, Anti-Atlas, 1953
En un lieu indéfini au sud de l’Atlas que Davidson n’a pas pu atteindre durant son voyage, on rapporte que 3 000 à 4 000 Juifs " vivent en toute liberté, et pratiquent tous les métiers ; ils possèdent des mines et des carrières qu’ils exploitent, ont de grands jardins et d’immenses vignobles, et cultivent plus de maïs qu’ils ne peuvent en consommer ; ils disposent de leur propre forme de gouvernement, et possèdent leurs terres depuis l’époque de Salomon [22] ". Faisant sien le point de vue de Davidson, Richardson y ajoute que les pratiques religieuses de ces Juifs, datent de l’époque pré-exilique, et de ce fait " ils redisposent les parties du Pentateuque et de la Torah dans le même ordre que celui de l’ensemble des Juifs ". Vivant isolés, ils considèrent leurs frères des autres parties du Maroc comme des hérétiques [23]. Les Juifs de l’Atlas jouissent d’une " quasi indépendance vis-à-vis de l’autorité impériale ", comme leurs voisins berbères. De plus, ces Juifs " possèdent toutes les caractéristiques des montagnards... ils portent le même costume qu’eux, et on ne peut pas les distinguer [de leurs voisins musulmans [24]]".
L’une des raisons pour lesquelles certains écrivains de la période coloniale considéraient la situation des Juifs parmi les Berbères comme meilleure que parmi les Arabes venait de l’idée que les Juifs étaient totalement intégrés à la société berbère, partageant nombre de coutumes de leurs voisins musulmans. On considérait que les Juifs du Haut-Atlas, par exemple, vivaient en paix et en symbiose avec les Musulmans [25]. Les chercheurs contemporains se sont appuyés souvent sur la littérature ethnographique coloniale pour décrire les relations entre Musulmans et Juifs dans l’intérieur du pays. Malheureusement peu de Juifs originaires des zones berbères ont été interrogés sur leur expérience. Aussi loin que l’on remonterait, on découvrirait sans doute une variété d’expériences que l’on ne saurait ramener à une simple dichotomie arabo-berbère ou à un clivage entre zones citadines et rurales. Les sources dont nous disposons sur les relations entre Musulmans et Juifs à Iligh pendant la période pré-coloniale offrent à cet égard une image très contrastée de ces relations.
Les sources provenant d’Iligh montrent que la communauté juive de cette localité, aussi bien que la communauté voisine d’Ifran, étaient étroitement liées au chef de la puissante famille du Sharif de la famille Abu Dami’a. Les signatures et parfois les déclarations en judéo-arabe des Juifs d’Iligh et d’Ifran quand ils recevaient des acomptes du Shanf ou quand ce dernier leur payait ses dettes, sont consignées dans deux livres de comptes appartenant à Husayn b. Hashim [26]. Les Juifs d’Iligh, qui voyageaient souvent à Essaouira pour leur commerce, étaient considérés comme des protégés du Sharif. S’ils étaient dévalisés ou tués, le Sharif punissait en représailles la localité à laquelle appartenaient les criminels. Parallèlement, le Sultan étendait sa protection à ses tujjar qui voyageaient à Iligh pour le commerce ou pour recouvrer leurs dettes. Les Juifs entretenaient avec les puissants chefs d’Iligh des relations comparables à celles des Juifs du Sultan. Dans un rapport envoyé d’Essaouira (Mogador) à l’A.l.U, en 1874, par Abraham Corcos il y est relaté que les Juifs d’Iligh considéraient le Sharif comme tout puissant. " Étant donné que ce gouverneur... n’est pas soumis à l’autorité de notre roi du Maroc, tout est objet de prières et de suppliques [27] ". Ce qui y était en cause cependant n’était pas l’oppression du Sharif, mais celle dont la responsabilité en incombait à leur propre Shaykh (Nagid en hébreu) qui était fondé de pouvoir du Sharif. Le Nagid Mas’ud b. Bokha, est décrit comme étant " une personne non civilisée et inculte, qui soutire d’eux (les Juifs d’Iligh) des amendes pour rien ou pour les moindres choses [28] ". Nous y apprenons également que ce personnage même, Mas’ud b. Bokha avait des relations d’affaires étroites avec le Sharif Husayn b. Hashim [29]. Ce qui compte ici, c’est le fait qu’un appel ait été fait à Essaouira, en parfaite connaissance de l’influence exercée par l’Alliance israélite universelle. Sachant l’indépendance virtuelle du Sharif Husayn, les Juifs d’Iligh avaient compris que ce n’était pas au Sultan qu’ils pouvaient demander assistance. Mais vue l’interdépendance économique entre Iligh et Essaouira, c’est par le truchement des Corcos et de l’Alliance qu’ils avaient cru obtenir l’intervention du Sharif contre le Nagid.
Dans les années 1880, les relations entre les Juifs d’Iligh et les autorités d’Iligh changèrent de nature. Désormais, opprimés par le Sharif plutôt que par leur Shaykh, ils firent appel à l’Alliance et à l’opinion juive d’Europe de l’Ouest : sous le joug du puissant Sharif Muhammad b. Husayn b. Hashim, ils pouvaient être dépouillés à tout moment de leurs biens et de leur argent, et quand ils voyageaient pour leur commerce, leurs femmes et leurs enfants étaient tenus en otages sur place. En 1889, un commerçant prospère d’lligh, Isaac Souissa, se plaignit d’avoir été battu à mort par ordre du Sharif, le 9 Av. Il s’enfuit à Essaouira, où il demanda l’aide de l’A.I.U., de l’Anglo-Jewish Association et des consulats étrangers, pour obliger le Sharif d’Iligh à libérer sa femme et ses enfants et les autoriser à le rejoindre à Essaouira. Suivant les témoignages émanant de Juifs de cette localité, la plupart des Juifs du Sous vivaient en paix avec leurs voisins berbères à l’exception d’lligh et de son chef tyrannique [30]. Foucauld, qui visita cette région à la même période, explique que chez les Berbères disposant d’institutions démocratiques, chaque Juif y avait son patron, au contraire de la situation prévalant sous le régime des Shaykhs puissants, comme au Tazerwalt (c’est-à-dire à lligh), où les Juifs appartenaient corps et biens au Shaykh[31].
Plusieurs remarques s’imposent au sujet de ces témoignages. Le fait qu’ils aient été transmis à Essaouira, avec laquelle les Juifs d’Iligh avaient des liens étroits, montre que les Juifs étaient conscients de l’influence des organisations juives étrangères et recherchaient leur intervention. Il faut également souligner le fait que l’indépendance du Sharif d’Iligh fut compromise vers 1880 par les harka du Sultan Moulay al-Hasan [32]. Muhammad b. Husayn fut même nommé Qayid du Makhzen,recevant une maison à Essaouira [33]. Investi de l’autorité du Sultan, son pouvoir dépendait du Makhzen. Ce fut à cette période également que la ville de Tiznit devint le principal centre politique du Sous. Certains Juifs d’Iligh voulurent tirer profit de cette évolution et déménagèrent à Tiznit ou à Essaouira où ils pouvaient bénéficier de nouvelles possibilités commerciales. C’est ainsi que Isaac Souissa vint à la mahalla du Sultan pendant la harka de 1886 pour implorer la protection royale et demander au Sultan la permission de s’installer avec les siens à Tiznit. Il semble toutefois que le Sultan ne souhaitait pas porter atteinte à ses nouvelles relations politiques avec Iligh en provoquant la chute de son économie qui dépendait des commerçants juifs. Ainsi, invoquant le prestige du Murabit d’Iligh, le Sultan évita de faire pression sur le Sharif afin qu’il laisse partir les Juifs. Isaac Souissa et sa famille continuèrent à vivre à Iligh jusqu’au moment où Isaac parvint à s’enfuir à Essaouira en 1889. Le Sharif nia avoir maltraité Isaac ou sa famille et refusa de les laisser partir. Plusieurs mois plus tard, il annonça au Sultan qu’il avait relâché les enfants d’Isaac pour mettre fin aux accusations fallacieuses de la communauté juive à son égard [34]. Le Sharif d’Iligh reconnut à cette occasion que, soumis à des pressions étrangères, le Sultan était désormais le garant de la dhimma (protection) des Juifs du Sous.
De même qu’on a tendance à considérer les relations judéo-musulmanes comme étant le reflet des relations entre le Sultan et ses sujets Juifs, on a aussi tendance à considérer les relations judéo-berbères comme étant l’extension des relations entre les chefs de tribus et leurs protégés juifs. Autant qu’on puisse en projeter le sens dans le passé, les études récentes sur Iligh et sur les Juifs d’Iligh montrent que les liens sociaux entre Juifs et Arabes d’Iligh étaient très étroits, peut-être plus étroits que l’impression qu’en laisse le tableau des relations entre le Sharif et la communauté juive. Il ressort des conversations effectuées en 1980 qu’il les avait souvent fréquentés. Il nous a montré un manuscrit qu’il avait écrit lui-même sur la communauté juive. Il y mentionne en tout début de texte que les Juifs vivant à Iligh ont quitté " notre pays (ou village) pour se diriger vers leur pays " kharaju min baladina ila baladihim, et recense ensuite chaque individu de la communauté, par son nom, sur huit pages, non seulement les chefs de famille, mais aussi leurs femmes et leur enfants. Il poursuit en décrivant les coutumes des Juifs, puis signale " leur knesset, qui s’appelle sla ", et indique par leurs noms les fêtes juives : Pessah, Souccot, Yom Kippour et Hanouka [35], les prières quotidiennes qu’il appelle cArbit (Macariv), Sahrit (shahrit) et Milha (minha), et au moment de la [nouvelle] année, écrit-il, ils font des prières appelées slihot, pour lesquelles ils doivent se lever au milieu de la nuit. Le Faqih nous a également raconté qu’il écrivait des amulettes pour les Juifs. Les Juifs d’Iligh interviewés à Casablanca et en Israël nous ont confirmé l’étroitesse de leurs liens sociaux avec les Musulmans, tout en refusant d’admettre que le Faqih leur fournissait des amulettes. Ainsi donc, à la suite de l’exemple de cette seule communauté juive, nous pouvons affirmer que les relations judéo-musulmanes étaient loin d’être statiques et inchangées.
Le colonialisme et la question judéo-berbère
La politique coloniale française à l’égard des Berbères, telle qu’elle a été développée sous Lyautey avant d’atteindre son point culminant en 1930, avec la publication du Dahir berbère visant à séparer les Berbères des Arabes, reposait sur plusieurs stéréotypes. En premier lieu, celui de la résistance des Berbères indigènes du Maroc aux Arabes puis à toute forme d’autorité centrale, préservant jalousement leur liberté, leur individualisme et leurs institutions démocratiques. Deuxièmement, les Berbères n’auraient adopté que superficiellement l’Islam, conservant intactes ou presque leurs coutumes, leurs croyances et leurs superstitions pré-islamiques. Par conséquent, ils auraient résisté à l’application de la Sharia, maintenant farouchement leurs lois coutumières. Faute de respecter l’autorité suprême du Amir al-Mu’minin, les Berbères auraient " produit " leurs propres chefs marabouts. Le culte des saints, répandu chez les Berbères, serait le vestige d’une pratique pré-islamique. Fortement influencées par ces idées, les autorités françaises ont cru que les anciennes zones siba pourraient être assimilées à la culture française afin d’empêcher les progrès de l’arabisation [36].
Ces stéréotypes sur les Berbères furent d’une certaine façon reproduits à l’égard des Juifs vivant parmi les Berbères dont l’histoire, selon Slouschz, ne serait " que la quintessence de l’histoire des Berbères ". D’après lui, c’est " dans le blad es-siba, dans les qsour algériens et tripolitains, demeurés jusqu’ici inaccessible à l’infiltration européenne, qu’on peut retrouver le Judéo-Berbère dans un état à peu près semblable à celui des maghrabia tels que nous les représentent les littératures juives et arabe du Moyen Age ". A l’exemple de la population berbère musulmane qui est superficiellement islamisée, ces Juifs berbères primitifs " du judaïsme ne connaissent presque rien ". Là où il y a des saints judéo-berbères pré-islamiques, on trouve ces populations anciennes [37]. Slouschz se fait l’écho du discours colonial sur les Berbères, quand il écrit que les Juifs de l’Atlas font montre " d’une bonne dose de liberté [38] ". La dichotomie excessive entre makhzen et siba, élaborée pendant la période coloniale, est reproduite par Slouschz les Juifs du bilad al-makhzen reçoivent la protection royale de la dhimma, alors que ceux du bilad al-siba reçoivent celle de Sayyid individuels. Ces stéréotypes attachés aux Juifs vivant parmi les Berbères ont perduré pendant toute la période coloniale, pour devenir partie intégrante des idées reçues sur le Maroc traditionnel que l’on rencontre reproduites dans de nombreux ouvrages.
Toutefois il ne s’agissait pas seulement de représentations de l’Autre telles qu’elles avaient cours chez les Européens. Les Juifs marocains eux-mêmes ont fini par intérioriser ces stéréotypes, en particulier ceux d’entre eux ayant reçu une éducation française. Les Juifs du Haut-Atlas, du Sous et du Sahara – régions que les Français ont mis du temps à contrôler – étaient considérés par les Juifs marocains des villes comme des marginaux. Le mythe des Juifs berbères répercuté par les maîtres de l’Alliance et par les chercheurs français était devenu la réalité pour les Juifs marocains eux-mêmes. Dans l’étude la plus détaillée sur les conditions de vie des Juifs du Sud marocain, publiée peu après l’indépendance et basée essentiellement sur les informations fournies par les directeurs des écoles de l’Alliance, Pierre Flamand explique comment la " mentalité " des Juifs autochtones originaires des régions berbères a été façonnée par le milieu berbère. D’après lui, les Juifs appelés Shleuh sont faciles à identifier du fait de leurs noms, de leurs traits physiques et leur mode de comportement qui leur sont très typiques : leurs coreligionnaires d’autres extractions reconnaissent les Juifs dits shleuh à leurs patronymes : Abergel, Abouzaglo, Amoch, Assouline, Chriqui, Harrus, Oiknine, etc., et à quelques traits physiologiques et caractériels sommaires : larges épaules, fortes poitrines, yeux vifs dans des visages à traits fermes et droits, esprit d’entreprise, acceptation de rudes besognes [39].
L’épithète utilisé par les Juifs marocains pour désigner leurs coreligionnaires moins évolués, " fils de shleuh " avait une connotation péjorative. Répercutée chez Flamand cette image stéréotypique des Juifs ruraux s’est transportée en Israël par les immigrants juifs du Maroc et le terme shleuh est devenu synonyme de simplet en argot israélien.
Déjà à l’époque pré-coloniale, la migration des Juifs ruraux vers les villes a produit des clivages entre Judéo-berbères et Judéo-arabes. A Essaouira et à Marrakech, les Juifs " autochtones " se distinguaient de leurs coreligionnaires ruraux. Cependant une fois installés en ville, les Juifs berbères s’arabisaient et s’adaptaient à un environnement urbain plus civilisé [40]. Ce processus s’intensifia à l’époque coloniale, mais un certain nombre de Juifs vécurent dans leur région d’origine jusqu’à leur départ en Israël [41]. Par conséquent, les porte-parole de l’urbanisation et du progrès établirent une division hiérarchique entre les différents types de Juifs marocains que l’on retrouve souvent chez Slouschz et ses émules postérieurs. Ces différents types seraient les suivants Juifs hispanophones, à Tanger et dans les régions du Nord ; Juifs parlant français et arabe, sur la côte et dans les villes de l’intérieur ; groupe arabo-berbère du centre du pays ; groupe arabe et shleuh du sud ; Juifs arabophones du Sahara [42]. Les classifications postérieures adoptées par les chantres de l’occidentalisation, comme l’Alliance, ramenèrent ces divisions à quatre catégories essentielles hispanophones, francophones occidentalisés, arabophones et berbérophones.
Les divisions sociales, suivant le schéma tracé par Slouschz, correspondaient aux divisions entre : makhzen et siba, monde urbain / monde rural. Cette vision simpliste devait influencer un bon nombre de chercheurs ayant travaillé sur les Juifs marocains durant le Protectorat français [43]. Inventée ou réelle, elle influença pareillement la politique de l’organisation qui a marqué le plus la vie des Juifs marocains pendant le protectorat français : l’A.I.U et ses écoles qui distinguèrent entre les Juifs du bled, comme on appelait les Marocains ruraux, et ceux de la ville. Ces stéréotypes ont été intériorisés par les Juifs marocains eux-mêmes, qui considéraient les Juifs des régions parlant tashelhit spécialement ceux des montagnes de l’Atlas, comme des Shleuh primitifs, bien que ceux-ci aient eu généralement des conditions de vie plus saines que celle de leurs frères des mellah urbains. Pendant la période du Protectorat, des tensions très vives entre les différentes couches de la population, accompagnèrent l’arrivée de nombreux Juifs ruraux originaires de l’Atlas dans le mellah de Marrakech. Ce qui fit dire, en 1940, à un observateur vivant à Marrakech que les Juifs " étrangers ", d’origine espagnole qui étaient mieux éduqués, furent submergés par les Juifs berbères. Ces Juifs ruraux, pensait-on, " ne pratiquaient qu’un judaïsme très primitif approprié à leur mentalité. La culture de la Torah, l’observation de quelques rites extérieurs, l’aumône au rabbin de Palestine, le mépris et l’hostilité des populations qui l’entourent tels étaient les seuls liens qui les rattachaient à la famille d’Israël ". Ces Juifs berbères primitifs, une fois urbanisés, devinrent plus juifs. Mais " de ces origines surtout rustiques et montagnardes, le juif marrakchi semble avoir gardé quelque chose de farouche et de têtu. Parmi ces coreligionnaires marocains, c’est lui qui se rattache aujourd’hui avec le plus de force aux coutumes de ses ancêtres [45] ". Flamand, qui reprenait les idées de ses informateurs de l’Alliance, considérait que les traditions religieuses des Juifs du Sud avaient été contaminées par des influences " orientales ", déformées par un isolement millénaire des grands centres du judaïsme mondial, assimilant et intégrant concepts et symboles de l’Islam, ainsi que toutes sortes de rites païens tirant leurs sources d’un animisme agraire chargé de pratiques superstitieuses. Les Juifs restés dans les régions berbères, de plus en plus isolés du reste du pays au fur et à mesure que s’intensifiait l’urbanisation, étaient plus marginalisés encore, et cela d’autant plus que l’émigration les privait de leurs meilleurs éléments [47]. Le fossé entre ceux qui restaient dans les campagnes, parmi les Berbères, et ceux vivant en ville était plus profond que jamais : " entre le Juif espagnol ou oriental lettré érudit, urbain et le Juif berbère, fruste, primitif, attaché à son sol, l’opposition est saisissante [48] ".
Jeune femme
en tenu traditionnelle,
Tineghir, vallée du Todra, 1958
Ainsi, l’image du Juif berbère, " isolé du monde civilisé [49] ", descendant des tribus berbères autochtones et maintenant des coutumes primitives était parfaitement acceptée par la société coloniale. L’idée de trouver des Juifs shleuh a guidé initialement mes recherches dans le Sous. Une des questions à laquelle je voulais répondre était de savoir jusqu’à quel point les Juifs de l’Atlas et de l’Anti-Atlas utilisaient le berbère dans l’enseignement pour expliquer et traduire les textes religieux, ou pour réciter certaines prières seulement [50]. La question fut posée déjà par Galand et Zafrani avec la publication de la Haggada de Pessah de la communauté juive de Tinrhir, basée sur un texte oral en tamazight. Cette Haggada berbère a toutefois soulevé plus de questions qu’elle n’a apporté de réponses. Le paysage linguistique de la communauté juive, comme le souligne Zafrani, n’est pas net. La question de l’usage du berbère par cette communauté et par d’autres communautés judéo-berbères à des fins liturgiques est loin d’être élucidée.
Certaines preuves linguistiques semblent démontrer l’existence, au XXe siècle, de communautés juives éparses berbérophones. Certains chercheurs estiment que ce phénomène était beaucoup plus étendu que je ne le considérais moi-même. Des recherches récentes effectuées en Israël parmi les Juifs originaires de régions berbérophones m’ont confirmé cependant que très peu de communautés parlaient berbère à la maison avant la seconde guerre mondiale [51]. Peu d’observateurs des périodes antérieures se sont penchés sur la géographie linguistique juive du Maroc rural. Exception faite de Foucauld qui affirme : " les Israélites du Maroc parlent l’arabe. Dans les contrées où le tamazight est en usage, ils le savent aussi ; en certains points le tamazight leur est plus familier que l’arabe, mais nulle part ce dernier idiome ne leur est inconnu [52] ". Foucauld se réfère-t-il aux deux dialectes du Moyen-Atlas, le tamazight et le tashelhit ? Ce n’est pas clair. Mais ses observations datant de la fin du XIXe siècle, selon lesquelles la plupart des Juifs des régions berbérophones connaissaient aussi bien le berbère que l’arabe et que dans certains endroits le berbère était mieux connu que l’arabe, semblent plausibles. Il s’avère par ailleurs que nombre de communautés importantes du Sous et du Haut-Atlas étaient arabophones même si la plupart des Juifs y parlaient aussi le berbère [53]. C’était le cas d’Iligh dont les habitants juifs parlaient l’arabe. Bien qu’on connaisse mal leur passé lointain, les documents écrits montrent que le judéo-arabe était leur langue de culture, du moins depuis le début du XIXe siècle. L’hébreu aussi était connu de l’élite culturelle, mais il n’y a nulle part trace du judéo-berbère, ni dans les textes écrits, ni dans la tradition orale. On n’a retrouvé aucune tradition indiquant que le berbère était utilisé dans l’enseignement, dans la lecture de textes religieux ou dans la récitation des prières.
S’agissant encore de la communauté juive d’Iligh, ce qui est frappant dans son histoire relativement courte – moins de 400 ans – c’est son cosmopolitisme et son ouverture relative sur le monde. Ainsi, ses habitants eurent vent, au début du XVIIe siècle, de l’avènement de Shabtai Tzvi [54].
Iligh fut détruite par Moulay Rashid en 1670, mais retrouva sa position politique à la fin du XVIIIe siècle sous Sidi Hashim. En 1815, Sidi Hashim est ainsi décrit : " un homme entre 50 et 60 ans, possédant une grande richesse et un grand pouvoir ; il est très rusé et très brave mais rapace et cruel ; il a sous ses ordres 15 000 cavaliers des mieux armés... Toutes les caravanes qui traversent le désert... jugent nécessaire de s’assurer son amitié et sa protection par des présents. Entre ce chef et l’empereur du Maroc existent la plus implacable des haines et une jalousie continuelle qui, il y a quelques années, a éclaté en guerre ouverte [55] ". Assurément le chiffre de 15 000 soldats est exagéré, car un marin naufragé qui fut détenu pendant un certain temps dans l’Oued Noun parle de 600 Arabes " montés " seulement sillonnant le pays [56]. Mais les observateurs contemporains évoquent la puissance politique d’Hashim et le rôle prépondérant d’Iligh dans le commerce transsaharien. Grâce à ses commerçants juifs, Iligh était reliée à l’Europe par le port d’Essaouira [57]. Il n’y avait pas que les marchandises et les commerçants qui arrivaient du littoral à lligh. Des émissaires de Palestine, comme Haim Joseph Masliah, en 1817, passèrent également par Iligh [58], ainsi que des marins européens naufragés sur la côte et tenus en otage à Iligh. Grâce à leurs relations avec le port d’Essaouira, les Juifs d’Iligh servaient d’intermédiaires pour le rachat et la restitution de ces captifs aux consulats européens installés dans cette ville [59].
Avec le déclin du commerce transsaharien et la ruine d’Essaouira comme port international à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, Iligh cessa d’être un centre de commerce international. Ceci porta atteinte à la communauté juive locale dont les relations avec le monde extérieur s’amenuisèrent. Cette situation s’aggrava davantage encore pendant la période coloniale et jusqu’à la seconde Guerre mondiale. Après la guerre, l’Alliance commença à développer son réseau des " écoles de bled ". Dans l’optique de ses dirigeants, cette expansion à l’intérieur du " vrai bled " devait englober les " villages isolés des vallées de l’Atlas, du grand Sud et des oasis pré-sahariennes [60] ". C’est donc vers la fin du Protectorat français qu’Iligh devait attirer l’attention de l’Alliance qui y créa sa première école en 1954 [61], aussitôt fermée avec le départ de la communauté quelques années plus tard. Pour marquer l’ouverture de l’école, on tourna un film : " Ils seront des hommes ". Lors de la projection du film, Jules Brunschvig, le vice-président de l’Alliance, proclama : " l’École tirera ces populations de leur misère [62] ". Un délégué de l’Alliance, en visite à Iligh, mentionna l’école comme " ’héroïne si l’on peut dire, du récent film de l’Alliance, et qui le mérite si bien [63] ". Toutefois, après l’indépendance du Maroc, l’idée de perpétuer les communautés juives des petits mellah du Sud marocain fut rapidement abandonnée, les dirigeants du judaïsme marocain ne pouvant faire grand-chose pour relever ces communautés rurales du Sud, pensant que celles-ci seraient mieux en Israël. " J’ai vidé les mellah ", me dit un membre important de la communauté en 1981.
Iligh était considérée comme éloignée du monde civilisé tant par les Juifs urbains que par l’Alliance. Sa communauté qui s’installa en Israël, entre la fin des années 1950 et le début des années 1960, n’était pas aussi éloignée du monde juif, comme les hommes de l’Alliance se l’imaginaient. Mais avant leur départ, les Juifs d’lligh ont enterré dans la vieille synagogue de leur localité une Geniza que j’ai fouillée en 1981. Malheureusement, presque tout son contenu était en décomposition à cause de l’humidité du sol. Il en restait quelques fragments datant de la période précédant le départ des Juifs. Des textes religieux, des livres de prières ainsi que des fragments de lettres et de livres de comptes en judéo-arabe. Certains fragments révélaient que quelques livres de prières en usage à lligh avaient été publiés en Pologne. Contrairement à l’idée prévalant en Israël, selon laquelle les Juifs de cette contrée étaient totalement ignorants du sionisme politique, la Geniza d’lligh nous a apporté la preuve de la diffusion de textes hébreux modernes et de pamphlets sionistes.
La recherche sur les Juifs vivant parmi les Berbères reste encore à faire et nous sommes conscients des lacunes qui restent à combler. Ce que j’ai essayé de montrer dans cette étude est que notre savoir sur les Juifs ruraux du Maroc reste largement tributaire des stéréotypes sur le Juif berbère, stéréotypes acceptés aussi bien par le colonisateur et que par les colonisés – reflétant les divisions internes existant au sein des communautés juives du Maroc sous le protectorat. Ces divisions ont été entretenues en Israël du fait de la pérennité des mythes concernant les Juifs berbères.
NOTES
Pour une carte préliminaire des communautés juives du sud marocain, voir l’étude ethnographique de Harvey E. Goldberg, " The Mellahs of Southern Morocco ", The Maghreb Review 8, 3-4,1983, pp. 61-69.
On peut en citer des dizaines d’exemples. Voir notamment la distinction entre Juifs parlant le berbère et juifs parlant l’arabe faite par Léon Godard, Description et histoire du Maroc, Paris. C. Tanera, 1860, p.15. L’auteur se réfère aux tribus berbères pratiquant le judaïsme dans l’Oued Noun et parmi les Amazigh. Il semble croire qu’i1s vinrent de Palestine dans de temps ancien. Il note que l’Oued Noun était une région arabophone.
Travels in Morocco, Londres. Charles J. Skeet. 1860. II. pp 7-10.
Nous avons publié avec le regretté Paul Pascon un premier article sur la communauté juive d’Iligh. " Le cimetière juif d’Iligh, 1751-1955 : étude des épitaphes comme documents d’histoire sociale ", Revue de l’occident musulman et de la Méditerranée. 34, 2, 1982, pp. 39-62. Une autre version de cet article a aussi été publiée dans Paul Pascon. La Maison d’Iligh et l’histoire sociale du Tazerwalt, Rabat, SMER, 1984. pp. 113-140.
Voir notre article " Orientalism and the Jews of the Mediterranean ", Journal of Mediterranean Studies, 4.2.1994, pp. 183-196.
Nahum Slouschz, Travels in North Africa, Philadelphia, The Jewish Publication Society of America, 1927, p. 274 ; idem, Un voyage d’études juives en Afrique, Paris, Librairie C. Klincksieck, 1909, pp. 3-15. L’hypothèse de l’origine berbère des Juifs à l’intérieur du Maroc a été émise par Moise Nahon, " Les Israélites du Maroc ", Revue des études ethnographiques et sociologiques, 2. 1909, p. 259. Slouschz avait déjà commencé à publier certaines de ses recherches dans Archives Marocaines, en 1905, mais Nahon ne les cite pas.
Voir, Abraham I Laredo, Berberes y hebreos en Marruecos, Madrid, Instituto de Estudios Africanos, 1954. Dans la période post-coloniale aussi, plusieurs chercheurs affirment que la plupart des Juifs indigènes de l’Afrique du Nord descendent des tribus berbères. Voir, par exemple, Gabriel Camps, Les Berbères : Mémoire et identité, Paris, Éditions Errance, 1995, p. 98.
Sur Le Chatelier et la Mission scientifique du Maroc, voir Edmund Burke, III, " La Mission scientifique au Maroc ", in Actes de Durham : Recherches récentes sur le Maroc moderne, Rabat, Publication du Bulletin économique et social du Maroc, 1978, pp. 37-56 ; idem, " The First Crisis of orientalism, 1890-1914 ", in Contemporary North Africa, éditeur Halim Barakat, Sydney, Croom Helm, 1985, pp. 217-219.
Sur la mission de Slouschz, voir Daniel Schroeter et Joseph Chetrit " The Reform of Jewish Institutions in Morocco at the Beginning of the Colonial Government (1912-1919) ", (en hébreu), Miqqedem Umiyyam, 6, 1995, pp. 77-81; voir aussi Mohammed Kenbib, Juifs et Musulmans au Maroc : 1859-1948, Rabat, Université Mohammed V, Publications de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, 1994, p. 411.
Slouschz Travels, p. ix.
H. Z. Hirschberg, " The problems of the Judaized Berbers ", Journal 0f African History, 4, 1963. pp. 312-339. D’après Norman Roth, la judéité des tribus berbères pré-islamiques est douteuse à cause de la répression du judaïsme durant l’occupation byzantine en Afrique du Nord. " The Kahina : Legendary Material in the Accounts of the Jewish Berber Queen ", The Maghreb Review, vol. 7, 5-6, 1982, p. 124. Tout en acceptant l’essentiel de sa thèse, Hirschberg a été critiqué pour avoir minimisé l’importance de la conversion des Berbères au judaïsme, en raison de ses travers européens. Hirschberg mêle, à son objectivité d’historien et d’orientaliste érudit, une certaine subjectivité de Juif occidental resté fidèle à ses traditions religieuses qui découragent le prosélytisme, (André Chouraqui. Histoire des Juifs en Afrique du Nord, Paris, Hachette, 1986, p. 65.) Par ailleurs, dans une étude sur les groupes sanguins marocains, il a été constaté que les juifs étaient différents de leurs voisins musulmans : certains auteurs en virent la preuve que si les Berbères ont été largement judaïsés à l’époque pré-islamique, la plupart ont été islamisés par la suite, et seuls les " juifs d’origine " ont conservé leur judaïsme. D. Mechali, J. Levêque, et P. Faure, " Les groupes sanguins ABO et Rh des Juifs du Maroc ", Bulletin de la Société d’anthropologie de Paris, série 10, 9, 1957, pp. 354-370.
The Non-Jewish Origins of the Sephardic Jews, Albany: State University of New York Press, 1996.
Histoire des Berbères, 4 vols, Paris, 1925-1956, vol. I, pp. 208-209.
D. Jacques-Meunié, Le Maroc saharien des origines au XVIe siècle, Paris, Librairie Klincksieck, 1982, pp. 173-188. Voir aussi Gabriel Camps, " Réflexions sur l’origine des Juifs des régions nord-sahariennes ", dans M. Abitbol, Communautés juives des marges sahariennes du Maghreb, Jérusalem, Institut Ben-Zvi, 1982, pp. 57-67.
Voir Maya Shatzmiller, L’Historiographie mérinide : Ibn Khaldun et ses contemporains, Leiden. E. J. Brill, 1982, p. 115ff.
Ibid, p. 188.
Voir en particulier Germain Ayache, " La fonction d’arbitrage du Makhzen ", dans Études d’histoire marocaine, Rabat, SMFR, 1979, pp. 159-176. Sur l’évolution de la perception des rapports entre makhzan et siba, dans l’ethnologie française du Maroc. voir Edmund Burke III, " The Image of the Moroccan State in French Ethnological Literature : a New Look at the Origin of Lyautey’s Berber policy ", dans Ernest Gellner et Charles Micaud, Arabs and Berbers (eds), Londres, Duckworth, 1973, pp. 175-199.
Reconnaissance au Maroc, 1883-1884, Paris, Challamel, p. 398.
Travels, p. 483.
John Davidson, Notes Taken during Travels in Africa, Londres, 1839, p. 165.
Ibid., p. 188.
Ibid., p. 192.
Richardson, Travels, 11, pp. 8-9.
Ibid, pp. 7-8.
Voir à ce sujet, " Jewish Existence in a Berber Environment ", dans Jewish Societies in the Middle East, ed. par Shlomo Deshen et P. Zenner, Wasbington DC, University Press of America, 1982, p. 107.
Archives d’Iligh. K3 et K10. Paul Pascon a examiné un choix d’extraits de ces livres de comptes d’Iligh, voir à ce sujet La Maison, pp. 80-81.
AIU/Maroc III. B. 14. Mogador 24 avril 1874, Abraham Corcos à AIU.
Ibid.
Extrait du registre K3, Archives d’Iligh.
Archives de l’Alliance israélite universelle (ci-après AIU)/Maroc III. C. 10 Mogador, le 19 juillet 1889, J de A Elmaleh à AIU ; Hamagid, 23 septembre 1889 ; " Yishaq b. Yais Halewi " dans Hasfirah 18, 1891: 573, 577. Le rapport du consul français ne mentionne pas les coups, mais suggère que les prêts constants qu’il était obligé de faire à Muhammad ont poussé Souissa à s’enfuir, Archives du Ministère des Affaires étrangères (Nantes), Tanger 95, Mogador, 23 août 1889, Lacoste.
Reconnaissance au Maroc, p. 400. Voir à ce sujet Allan R. Meyers, " Patrongage and Protection : The Status of Jews in Precolonial Morocco ", dans Jewish Societies in the Middle East, ed. par Shlomo Deshen et P. Zenner, Washington DC, University Press of America, 1982, pp. 99-100.
L. Justinard, Un petit royaume berbère : le Tazeroualt. Un saint berbère Sidi Ahmed ou Moussa, Paris, Maisonneuve, 1954, pp. 75-77 ; E. Gérenton, " Les expéditions de Moulay El Hassan dans le Sous, 1882-1886 ", Renseignements Coloniaux, (1924) : 265-286.
Moharned Ennaji et Paul Pascon, Le Makhzen et le Sous al-Aqsa, Paris, CNRS, 1988, pp. 125-126.
Ibid pp. 142, 169-170.
Il fait également référence à al-ashura al-kabira et al-sghira.
Voir Burke, " The Image of the Moroccan State ", pp. 193-194 et Kenneth Brown " The Impact of the Dahir Berbère in Salé ", dans Arabs and Berbers, op. cit., pp. 201-206.
Nahum Slouschz, " Hébraeo-phéniciens et judéo-berbères. Introduction à l’histoire des Juifs et du judaïsme en Afrique ", Archives Marocaines, 14, 1908, pp. 450-452.
Slouschz, Travels, p. 467.
Pierre Flamand, Diaspora juive en terre d’Islam. Les communautés israélites du sud marocain ; essai de description et d’analyse de la vie juive en milieu berbère, Casablanca, 1959, pp. 215-216.
Nahon, Les Israélites, p. 260.
Pour un exposé sur les mellah de l’Atlas dans les années 1930, voir Y. D. Semach, " Les saints de l’Atlas ", Paix et Droit, n° 10, décembre 1937, pp. 10-11, n° 1 janvier 1938, pp. 7-8, n° 2, février 1938, pp. 10-11.
Slouschz, Travels, pp. 377-379. Voir, par exemple, Manuel L. Ortega, Les Hebreos en Marruecos, Madrid. 1934, pp. 116-117 ; ces catégories, mutatis mutandis, sont reproduites intégralement par Michael M. Laskier, The Alliance Israélite universelle and the Jewish Communities of Morocco :1862-1962, Albany, State University of New York Press, 1983, pp. 20-21. Laskier s’appuie à ce sujet sur Nahon (Les Israélites, p. 260).
Voir, par exemple Doris Bensimon-Dorath, Évolution du Judaïsme marocain sous le Protectorat français, 1912-1956, Paris, Mouton & Compagnie, 1968, p. 13. Laskier The Alliance, pp. 14-16 ; idem, " Aspects of Change and Modernisation the Jewish Communities of Morocco’s Bled ", dans Communautés juives des marges sahariennes du Maghreb, édité par M. Abitbol, Jérusalem, Institut Ben-Zvi, 1982, pp. 331-332.
Cf. Flamand, Diaspora, pp 97-98.
José Bénech, Essai d’explication d’un mellah, s.d., pp. 29-30.
Diaspora, p. 306
Ibid., p 269.
Bénech, Essai, p. 11.
Goldenberg, Expédition, p. 27.
P. Galand-Pernet & Haïm Zafrani, Une version berbère de la Haggada de Pessah, Paris, Geuthner, 1970, p. 2.
Goldenberg, Mellahs of Southern Morocco, pp. 62-63.
Foucauld, Reconnaissance, p. 398.
A. Goldenberg, " Expédition dans le Haut-Atlas marocain ", Les Cahiers de L’Alliance Israélite Universelle, septembre 1952, p. 27. Pour Akka, voir Vincent Monteil, " Choses et gens du Bani ", Hespéris, 33, 1946, p. 39.
Adversaire notoire des Sabbatéens, Jacob Sasportas rapporte dans son ouvrage Zizat Nobbel Zvi, les rumeurs relatives aux dix tribus perdues circulant à Iligh : voir Hirschberg, The Problem, pp. 332-333.
Voir à ce sujet James Riley, An Authentic Narrative 0f the Loss 0f the American Brig Commerce, 1846, pp. 134-135.
Archibard Robbins, A Journal comprising an Account of the Loss of the American brig Commerce, 1851, pp. 213-214.
The narrative of Robert Adams, Londres, 1816, pp. 76-77, 150-152.
Archives Nationales d’Outre Mer, Aix-en-Provence : F80 1589A, dossier de Delaporte, Notes sur l’Afrique.
Public Record Office, F0 631/,4 avril 1816, Wiltshire ; Justinard, Un petit royaume, op. cit., pp. 64-67.
André Goldenberg, " Les Juifs du Maroc et l’Alliance : les écoles de bled ". Les Cahiers de l’Alliance israélite universelle, nouvelle série, n° 5 juin 1993, p. 24.
Elle comptait 42 élèves en 1954 : Flamand, Diaspora, p. 312. A la veille de l’Indépendance, l’Alliance était toujours intéressée par la perspective d’ouverture de nouvelles écoles dans les régions isolées du Sud. Voir Cochba Levy, " Notes de voyage dans l’extrême sud marocain ", Les Cahiers de l’Alliance Israélite Universelle, n° 83, mal 1954, pp. 26-32.
Ibid., p. 314.
Levy, Notes, pp. 31-32.
http://www.mondeberbere.com/decouverte-juifs-berberes.html
Daniel J. Schroeter
in Relations Judéo-Musulmanes au Maroc : perceptions et réalités, edited by Michel Abitbol, Paris: Editions Stavit, 1997, pp. 169-187
Parmi les travaux et domaines d’études concernant le passé des Juifs marocains, l’histoire des Juifs dans les régions à dominance berbère occupe une très faible place. Cela provient en partie de la nature fragmentaire des sources historiques provenant des zones rurales du pays [1]. Comparée à la documentation sur les Juifs parlant arabe, vivant dans les régions urbaines du Maroc et qui ont produit un nombre considérable d’écrits, les données historiques sur la vie des Juifs berbères ou vivant parmi les Berbères, avant la période coloniale, sont très éparses, presque toujours de seconde main, et sont souvent basées sur des mythes d’origines et des légendes. Les voyageurs étrangers en visite au Maroc dans la période pré-coloniale, qui ont établi, quoique de façon inexacte, les listes des tribus et des " races " du pays ont rarement fait la distinction entre Juifs berbérophones et Juifs arabophones [2]. Les Juifs ont été considérés comme une catégorie à part, aux côtés des Maures ou Andalous, des Arabes, des Berbères et shleuh. Peu d’Européens ont voyagé à l’intérieur du Maroc avant le XXe siècle, et ceux qui le firent, comme John Davidson (qui fut tué) en rapportèrent des informations peu fiables. James Richardson, un militant anti-esclavagiste britannique, qui a visité le Maroc en 1840, a poussé plus loin les observations de Davidson ; il a été le premier à désigner les Juifs de l’Atlas comme des " juifs shelouh ", parlant berbère et dont les coutumes et caractéristiques étaient les mêmes que celles de leurs voisins non-juifs [3].
Cette référence aux Juifs berbères est, cependant, encore très inhabituelle et de fait, elle n’a pas donné lieu à des hypothèses hasardeuses sur les origines berbères des Juifs.
D’après la plupart des visiteurs européens du XIXe siècle, les communautés juives elles-mêmes se revendiquent fermement comme descendant des Juifs de l’Ancien Israël. Les seules distinctions qu’on y trouve sont celles relatives aux clivages entre Juifs espagnols et Juifs autochtones, un clivage que les Juifs du Maroc eux-mêmes mentionnent par les termes " d’expulsés " et de " résidents " (megorashim et toshavim).
A la fin du XIXe et au XXe siècles, les voyageurs et ethnographes " découvrent " un grand nombre de communautés dispersées et donnent de ces Juifs vivant parmi les Berbères une image totalement différente de celle des communautés juives des régions urbaines. Sous le protectorat français, l’image des Juifs berbères va être définitivement établie conformément aux études qui leur seront consacrées par l’ethnographie coloniale, ainsi que par les hommes de l’Alliance israélite universelle. Enfin, la société israélienne va y ajouter sa touche, reflétant l’apport sioniste et le développement de stéréotypes à l’égard des Juifs marocains, dont la plupart ont immigré en Israël entre 1950 et 1960.
Mon propos concerne la façon dont a été formulée la perception des relations judéo-berbères aux XIXe et XXe siècles en me référant tout particulièrement à la documentation sur les Juifs d’Iligh, une communauté qui vivait avec les Berbères dans une région de langue tashelhit, du Sous [4].
La découverte des Juifs berbères
L’intérêt des Européens pour les Juifs des régions apparemment " éloignées " du monde n’est pas une invention du XIXe siècle ; ce qui est nouveau, c’est la signification conférée à cet intérêt. La recherche sur les tribus perdues n’est plus motivée uniquement par des considérations d’ordre messianique, car à l’ère du colonialisme triomphant, la recherche ethnographique sur les communautés lointaines d’Orient est devenue un moyen de gouvernement.
De plus, pour les Juifs européens, la découverte de coreligionnaires primitifs n’évoque pas seulement le souvenir des tribus perdues mais leur révèle aussi d’anciennes coutumes disparues, à un moment où eux-mêmes commencent à se considérer comme une nation et se tournent vers les terres bibliques du Levant pour restaurer la souveraineté juive [5].
Au début du XXe siècle, l’orientaliste et hébraïsant Nahum Slouschz parcourut l’Afrique du Nord pour y étudier les origines et l’histoire des communautés juives. Il a été le premier à étudier sérieusement l’histoire des communautés vivant dans les régions intérieures du Maghreb. Slouschz croyait que pendant les siècles qui ont précédé l’expansion arabe en Afrique du Nord, les Juifs, originaires de Palestine, se sont répandus parmi la population berbère et en sont devenus un élément dominant [6]. Durant l’époque coloniale, ses opinions sur les origines berbères des Juifs vont avoir force de loi [7]. En 1906, Slouschz fut envoyé en mission au Maroc par la Mission scientifique du Maroc, grâce à ses relations avec son directeur, Le Chatelier [8]. La mission, parrainée par le Comité de l’Afrique française, a publié les premiers travaux importants sur la société marocaine. Slouschz faisait partie de ce cercle et ses idées influencèrent largement la vision française du judaïsme marocain. Après l’établissement du protectorat français, il retourna au Maroc et fut chargé par les autorités coloniales d’étudier les communautés juives et de soumettre ses conclusions au Résident-Général Lyautey en vue de leur réorganisation. Slouschz était sioniste et, en tant que tel, voulut " régénérer " le judaïsme marocain et réveiller sa conscience nationale juive. C’est en partie à cause de ses idées sionistes que les autorités françaises décidèrent de le relever de ses fonctions officielles [9].
Les tendances sionistes de Slouschz et ses efforts pour découvrir le passé juif berbère pré-arabe du Maroc procédaient d’une vision très cohérente. La population juive urbaine des grandes villes arabes du Maroc était très attachée à ses savants autant qu’à ses traditions. Pour Slouschz, ce sont les Juifs descendant des Berbères (comme il le croyait), avec leurs manières primitives et pénétrées d’influences locales, qui représentent les " vrais " Juifs nord-africains
" maintenant que l’Afrique est entrée également sous l’égide de l’influence occidentale ", écrit-il, " la pénétration de la civilisation française et l’émancipation de nos frères de Tunisie et du Maroc, suivant en cela l’exemple des Juifs algériens, vont faire disparaître le caractère spécifique du juif africain. Comme c’est déjà le cas dans les grandes villes françaises d’Afrique, les changements sociaux ont eu un effet radical sur les masses de la population, qui perdent rapidement leur individualité et leurs traditions millénaires [10] ".
Une fois ces coutumes abandonnées, grâce aux bienfaits de l’éducation occidentale, le judaïsme marocain aura-t-il une autre alternative que celle de rejoindre la nation juive moderne ?
C’est H. Z. Hirschberg qui le premier a mis en doute la thèse admise – établie d’abord par Slouschz et adoptée ensuite par de nombreux chercheurs de l’époque coloniale – selon laquelle les Juifs d’Afrique du Nord descendraient des tribus berbères converties au judaïsme dans 1’Antiquité. Hirschberg étudia systématiquement les traditions anciennes et parvint à la conclusion qu’il y a peu de preuves confirmant la thèse des Berbères judaïsés. D’après lui, la plupart des communautés se formèrent beaucoup plus tard, grâce à l’arrivée de commerçants juifs à l’intérieur du pays. Bien qu’il n’exclut pas qu’il ait pu exister des Berbères judaïsés, Hirschberg est sceptique quant à l’importance de ce phénomène [11]. Dans une étude récente basée sur des données linguistiques et ethnographiques importantes, Paul Wexler a réexaminé cette question, pour aboutir à la conclusion que la grande majorité des Juifs sépharades descendraient d’habitants d’Afrique du Nord convertis au judaïsme et installés en Espagne12. Si l’hypothèse de Wexler était exacte, il en découlerait que la plupart des Juifs marocains (toshavim comme megorashim) descendraient de Berbères convertis.
Les rares preuves contemporaines de l’existence de communautés juives en Afrique du Nord à l’époque pré-islamique ne permettent pas d’affirmer avec assurance l’importance démographique et culturelle du judaïsme parmi les Berbères. La première source historique évoquant des tribus juives berbères date du XIVe siècle. C’est le Kitab al-cibar d’Ibn Khaldoun [13]. Certes il y a également de nombreuses légendes locales sur les Juifs berbères au Sud marocain préislamique. Jacques Meunié, par exemple, est convaincu de l’authenticité de ces traditions et légendes, même si nombre d’entre elles n’ont été consignées que récemment [14]. Quelle que soit notre opinion au sujet de la conversion des tribus berbères au judaïsme dans l’Antiquité, on peut affirmer que des mythes sur les Juifs berbères ont existé au Moyen Age et que ces mythes concernaient également l’origine des Berbères dans leur ensemble. Ces mythes ont été élaborés afin de légitimer le pouvoir mérinide au XIVe siècle [15], avant d’être reformulés durant la période coloniale. L’historicité des légendes sur l’expansion du christianisme et du judaïsme parmi les Berbères à l’époque pré-islamique a pu servir les besoins de l’administration coloniale dans sa volonté de séparer les Berbères des Arabes. Comme l’écrit Jacques Meunié : " malgré la précarité des indications que nous possédons sur l’extension ancienne du christianisme et du judaïsme dans le Sud marocain, [ces traditions] méritent cependant d’être retenues parce qu’elles peuvent aider à connaître les divers éléments de populations berbères et leurs usages anté-islamiques, au cours de siècles plus récents, et même jusqu’à l’époque actuelle [16] ".
Exhumer les séquelles du passé berbère judéo-chrétien est un moyen parmi d’autres visant à justifier le régime colonial au Maroc.
Relations judéo-berbères : un cas particulier ?
Les études sur le Maroc des premières années du Protectorat français soulignent les différences existant entre les régions contrôlées par le Makhzen et les régions non soumises au contrôle du gouvernement central : bilad al makhzen / bilad al-siba. Considérée comme une division entre Arabes et Berbères, cette perception prédominante de la société marocaine développée par les ethnographes coloniaux et perpétuée – largement – par l’ethnographie post-coloniale, a été sérieusement remise en question [17]. Peu d’attention a été accordée à la façon dont ce dualisme simpliste entre makhzen et al-siba a influencé les débats sur le judaïsme marocain.
L’affirmation selon laquelle les relations judéo-berbères étaient complètement différentes des relations arabo-juives est liée de très près à cette vision d’une dichotomie entre makhzen et siba. On cite en exemple la protection efficace des commerçants juifs par les chefs tribaux, ou les patrons berbères, au point de les rendre intouchables. " Tout juif de bilad al-siba appartient corps et biens à son seigneur, son sid ", écrit Charles de Foucauld, dont les relations avec les communautés juives du Maroc font partie du corpus historique sur le judaïsme marocain [18]. Bien que le Juif soit protégé, Foucauld le décrit comme un être servile, exploité sans merci par son maître. Comme les régions berbères appartiennent au bilad al-siba, les Juifs se doivent d’obtenir la protection de chefs locaux et indépendants du Sultan. Slouschz considère la situation des Juifs du bilad al-siba à la manière de Foucauld : " à Tililit commence, pour les Juifs, le pays du servage, on pourrait même dire de l’esclavage. Tout ce que les Juifs possèdent appartient au Qaid, qui a droit de vie et de mort sur ses sujets. Il peut les tuer en toute impunité, il peut les vendre si tel est son désir... En échange de la perte de tous ses droits, le juif jouit de la sécurité, que le maître lui assure au risque de sa propre vie... Un Juif qui veut se marier doit acheter sa future femme au sid auquel appartient le père de la fille et qui est l’unique maître de son destin [19] ".
Alors que certains écrivains de la période coloniale considèrent la vie des Juifs dans les territoires berbères comme plus difficile que dans les régions citadines arabophones, d’autres au contraire, influencés par la thèse développée par l’ethnographie coloniale selon laquelle les Berbères étaient plus libres, plus démocrates et plus indépendants que les Arabes, qualifient la condition des Juifs dans les régions berbères de " meilleure " que parmi les Arabes. Cette idée avait des précurseurs depuis la première moitié du XIXe siècle. D’après Davidson, par exemple, les Juifs du Sous et du Rif étaient la " propriété des Maures ", mais " ils bénéficiaient néanmoins d’une plus grande liberté qu’à Tanger [20] ". De plus, d’après Davidson " les Juifs de l’Atlas sont de loin supérieurs, physiquement et moralement à leurs frères résidant au sein des Maures. Leurs familles sont nombreuses, et chacune d’elles est sous la protection immédiate d’un Berbère (les habitants originels d’Afrique du Nord), d’un patron, ou d’un seigneur. Ils ont par ailleurs leur propre sheikh, un juif, à la décision duquel tous les cas sont soumis. À la différence des Juifs résidant parmi les Maures, qui sont soumis à la loi musulmane, ils ne vivent pas dans le même état d’avilissement ou de servitude ; ils développent des relations de type patron/client [avec leurs voisins], tous ont les mêmes privilèges, et le Berbère est tenu de défendre la cause du juif en cas d’urgence. Ils disposent d’armes, et servent leurs patrons à tour de rôle [21] ".
Famille juive devant la porte de sa maison du
mellah d'Illigh, Anti-Atlas, 1953
En un lieu indéfini au sud de l’Atlas que Davidson n’a pas pu atteindre durant son voyage, on rapporte que 3 000 à 4 000 Juifs " vivent en toute liberté, et pratiquent tous les métiers ; ils possèdent des mines et des carrières qu’ils exploitent, ont de grands jardins et d’immenses vignobles, et cultivent plus de maïs qu’ils ne peuvent en consommer ; ils disposent de leur propre forme de gouvernement, et possèdent leurs terres depuis l’époque de Salomon [22] ". Faisant sien le point de vue de Davidson, Richardson y ajoute que les pratiques religieuses de ces Juifs, datent de l’époque pré-exilique, et de ce fait " ils redisposent les parties du Pentateuque et de la Torah dans le même ordre que celui de l’ensemble des Juifs ". Vivant isolés, ils considèrent leurs frères des autres parties du Maroc comme des hérétiques [23]. Les Juifs de l’Atlas jouissent d’une " quasi indépendance vis-à-vis de l’autorité impériale ", comme leurs voisins berbères. De plus, ces Juifs " possèdent toutes les caractéristiques des montagnards... ils portent le même costume qu’eux, et on ne peut pas les distinguer [de leurs voisins musulmans [24]]".
L’une des raisons pour lesquelles certains écrivains de la période coloniale considéraient la situation des Juifs parmi les Berbères comme meilleure que parmi les Arabes venait de l’idée que les Juifs étaient totalement intégrés à la société berbère, partageant nombre de coutumes de leurs voisins musulmans. On considérait que les Juifs du Haut-Atlas, par exemple, vivaient en paix et en symbiose avec les Musulmans [25]. Les chercheurs contemporains se sont appuyés souvent sur la littérature ethnographique coloniale pour décrire les relations entre Musulmans et Juifs dans l’intérieur du pays. Malheureusement peu de Juifs originaires des zones berbères ont été interrogés sur leur expérience. Aussi loin que l’on remonterait, on découvrirait sans doute une variété d’expériences que l’on ne saurait ramener à une simple dichotomie arabo-berbère ou à un clivage entre zones citadines et rurales. Les sources dont nous disposons sur les relations entre Musulmans et Juifs à Iligh pendant la période pré-coloniale offrent à cet égard une image très contrastée de ces relations.
Les sources provenant d’Iligh montrent que la communauté juive de cette localité, aussi bien que la communauté voisine d’Ifran, étaient étroitement liées au chef de la puissante famille du Sharif de la famille Abu Dami’a. Les signatures et parfois les déclarations en judéo-arabe des Juifs d’Iligh et d’Ifran quand ils recevaient des acomptes du Shanf ou quand ce dernier leur payait ses dettes, sont consignées dans deux livres de comptes appartenant à Husayn b. Hashim [26]. Les Juifs d’Iligh, qui voyageaient souvent à Essaouira pour leur commerce, étaient considérés comme des protégés du Sharif. S’ils étaient dévalisés ou tués, le Sharif punissait en représailles la localité à laquelle appartenaient les criminels. Parallèlement, le Sultan étendait sa protection à ses tujjar qui voyageaient à Iligh pour le commerce ou pour recouvrer leurs dettes. Les Juifs entretenaient avec les puissants chefs d’Iligh des relations comparables à celles des Juifs du Sultan. Dans un rapport envoyé d’Essaouira (Mogador) à l’A.l.U, en 1874, par Abraham Corcos il y est relaté que les Juifs d’Iligh considéraient le Sharif comme tout puissant. " Étant donné que ce gouverneur... n’est pas soumis à l’autorité de notre roi du Maroc, tout est objet de prières et de suppliques [27] ". Ce qui y était en cause cependant n’était pas l’oppression du Sharif, mais celle dont la responsabilité en incombait à leur propre Shaykh (Nagid en hébreu) qui était fondé de pouvoir du Sharif. Le Nagid Mas’ud b. Bokha, est décrit comme étant " une personne non civilisée et inculte, qui soutire d’eux (les Juifs d’Iligh) des amendes pour rien ou pour les moindres choses [28] ". Nous y apprenons également que ce personnage même, Mas’ud b. Bokha avait des relations d’affaires étroites avec le Sharif Husayn b. Hashim [29]. Ce qui compte ici, c’est le fait qu’un appel ait été fait à Essaouira, en parfaite connaissance de l’influence exercée par l’Alliance israélite universelle. Sachant l’indépendance virtuelle du Sharif Husayn, les Juifs d’Iligh avaient compris que ce n’était pas au Sultan qu’ils pouvaient demander assistance. Mais vue l’interdépendance économique entre Iligh et Essaouira, c’est par le truchement des Corcos et de l’Alliance qu’ils avaient cru obtenir l’intervention du Sharif contre le Nagid.
Dans les années 1880, les relations entre les Juifs d’Iligh et les autorités d’Iligh changèrent de nature. Désormais, opprimés par le Sharif plutôt que par leur Shaykh, ils firent appel à l’Alliance et à l’opinion juive d’Europe de l’Ouest : sous le joug du puissant Sharif Muhammad b. Husayn b. Hashim, ils pouvaient être dépouillés à tout moment de leurs biens et de leur argent, et quand ils voyageaient pour leur commerce, leurs femmes et leurs enfants étaient tenus en otages sur place. En 1889, un commerçant prospère d’lligh, Isaac Souissa, se plaignit d’avoir été battu à mort par ordre du Sharif, le 9 Av. Il s’enfuit à Essaouira, où il demanda l’aide de l’A.I.U., de l’Anglo-Jewish Association et des consulats étrangers, pour obliger le Sharif d’Iligh à libérer sa femme et ses enfants et les autoriser à le rejoindre à Essaouira. Suivant les témoignages émanant de Juifs de cette localité, la plupart des Juifs du Sous vivaient en paix avec leurs voisins berbères à l’exception d’lligh et de son chef tyrannique [30]. Foucauld, qui visita cette région à la même période, explique que chez les Berbères disposant d’institutions démocratiques, chaque Juif y avait son patron, au contraire de la situation prévalant sous le régime des Shaykhs puissants, comme au Tazerwalt (c’est-à-dire à lligh), où les Juifs appartenaient corps et biens au Shaykh[31].
Plusieurs remarques s’imposent au sujet de ces témoignages. Le fait qu’ils aient été transmis à Essaouira, avec laquelle les Juifs d’Iligh avaient des liens étroits, montre que les Juifs étaient conscients de l’influence des organisations juives étrangères et recherchaient leur intervention. Il faut également souligner le fait que l’indépendance du Sharif d’Iligh fut compromise vers 1880 par les harka du Sultan Moulay al-Hasan [32]. Muhammad b. Husayn fut même nommé Qayid du Makhzen,recevant une maison à Essaouira [33]. Investi de l’autorité du Sultan, son pouvoir dépendait du Makhzen. Ce fut à cette période également que la ville de Tiznit devint le principal centre politique du Sous. Certains Juifs d’Iligh voulurent tirer profit de cette évolution et déménagèrent à Tiznit ou à Essaouira où ils pouvaient bénéficier de nouvelles possibilités commerciales. C’est ainsi que Isaac Souissa vint à la mahalla du Sultan pendant la harka de 1886 pour implorer la protection royale et demander au Sultan la permission de s’installer avec les siens à Tiznit. Il semble toutefois que le Sultan ne souhaitait pas porter atteinte à ses nouvelles relations politiques avec Iligh en provoquant la chute de son économie qui dépendait des commerçants juifs. Ainsi, invoquant le prestige du Murabit d’Iligh, le Sultan évita de faire pression sur le Sharif afin qu’il laisse partir les Juifs. Isaac Souissa et sa famille continuèrent à vivre à Iligh jusqu’au moment où Isaac parvint à s’enfuir à Essaouira en 1889. Le Sharif nia avoir maltraité Isaac ou sa famille et refusa de les laisser partir. Plusieurs mois plus tard, il annonça au Sultan qu’il avait relâché les enfants d’Isaac pour mettre fin aux accusations fallacieuses de la communauté juive à son égard [34]. Le Sharif d’Iligh reconnut à cette occasion que, soumis à des pressions étrangères, le Sultan était désormais le garant de la dhimma (protection) des Juifs du Sous.
De même qu’on a tendance à considérer les relations judéo-musulmanes comme étant le reflet des relations entre le Sultan et ses sujets Juifs, on a aussi tendance à considérer les relations judéo-berbères comme étant l’extension des relations entre les chefs de tribus et leurs protégés juifs. Autant qu’on puisse en projeter le sens dans le passé, les études récentes sur Iligh et sur les Juifs d’Iligh montrent que les liens sociaux entre Juifs et Arabes d’Iligh étaient très étroits, peut-être plus étroits que l’impression qu’en laisse le tableau des relations entre le Sharif et la communauté juive. Il ressort des conversations effectuées en 1980 qu’il les avait souvent fréquentés. Il nous a montré un manuscrit qu’il avait écrit lui-même sur la communauté juive. Il y mentionne en tout début de texte que les Juifs vivant à Iligh ont quitté " notre pays (ou village) pour se diriger vers leur pays " kharaju min baladina ila baladihim, et recense ensuite chaque individu de la communauté, par son nom, sur huit pages, non seulement les chefs de famille, mais aussi leurs femmes et leur enfants. Il poursuit en décrivant les coutumes des Juifs, puis signale " leur knesset, qui s’appelle sla ", et indique par leurs noms les fêtes juives : Pessah, Souccot, Yom Kippour et Hanouka [35], les prières quotidiennes qu’il appelle cArbit (Macariv), Sahrit (shahrit) et Milha (minha), et au moment de la [nouvelle] année, écrit-il, ils font des prières appelées slihot, pour lesquelles ils doivent se lever au milieu de la nuit. Le Faqih nous a également raconté qu’il écrivait des amulettes pour les Juifs. Les Juifs d’Iligh interviewés à Casablanca et en Israël nous ont confirmé l’étroitesse de leurs liens sociaux avec les Musulmans, tout en refusant d’admettre que le Faqih leur fournissait des amulettes. Ainsi donc, à la suite de l’exemple de cette seule communauté juive, nous pouvons affirmer que les relations judéo-musulmanes étaient loin d’être statiques et inchangées.
Le colonialisme et la question judéo-berbère
La politique coloniale française à l’égard des Berbères, telle qu’elle a été développée sous Lyautey avant d’atteindre son point culminant en 1930, avec la publication du Dahir berbère visant à séparer les Berbères des Arabes, reposait sur plusieurs stéréotypes. En premier lieu, celui de la résistance des Berbères indigènes du Maroc aux Arabes puis à toute forme d’autorité centrale, préservant jalousement leur liberté, leur individualisme et leurs institutions démocratiques. Deuxièmement, les Berbères n’auraient adopté que superficiellement l’Islam, conservant intactes ou presque leurs coutumes, leurs croyances et leurs superstitions pré-islamiques. Par conséquent, ils auraient résisté à l’application de la Sharia, maintenant farouchement leurs lois coutumières. Faute de respecter l’autorité suprême du Amir al-Mu’minin, les Berbères auraient " produit " leurs propres chefs marabouts. Le culte des saints, répandu chez les Berbères, serait le vestige d’une pratique pré-islamique. Fortement influencées par ces idées, les autorités françaises ont cru que les anciennes zones siba pourraient être assimilées à la culture française afin d’empêcher les progrès de l’arabisation [36].
Ces stéréotypes sur les Berbères furent d’une certaine façon reproduits à l’égard des Juifs vivant parmi les Berbères dont l’histoire, selon Slouschz, ne serait " que la quintessence de l’histoire des Berbères ". D’après lui, c’est " dans le blad es-siba, dans les qsour algériens et tripolitains, demeurés jusqu’ici inaccessible à l’infiltration européenne, qu’on peut retrouver le Judéo-Berbère dans un état à peu près semblable à celui des maghrabia tels que nous les représentent les littératures juives et arabe du Moyen Age ". A l’exemple de la population berbère musulmane qui est superficiellement islamisée, ces Juifs berbères primitifs " du judaïsme ne connaissent presque rien ". Là où il y a des saints judéo-berbères pré-islamiques, on trouve ces populations anciennes [37]. Slouschz se fait l’écho du discours colonial sur les Berbères, quand il écrit que les Juifs de l’Atlas font montre " d’une bonne dose de liberté [38] ". La dichotomie excessive entre makhzen et siba, élaborée pendant la période coloniale, est reproduite par Slouschz les Juifs du bilad al-makhzen reçoivent la protection royale de la dhimma, alors que ceux du bilad al-siba reçoivent celle de Sayyid individuels. Ces stéréotypes attachés aux Juifs vivant parmi les Berbères ont perduré pendant toute la période coloniale, pour devenir partie intégrante des idées reçues sur le Maroc traditionnel que l’on rencontre reproduites dans de nombreux ouvrages.
Toutefois il ne s’agissait pas seulement de représentations de l’Autre telles qu’elles avaient cours chez les Européens. Les Juifs marocains eux-mêmes ont fini par intérioriser ces stéréotypes, en particulier ceux d’entre eux ayant reçu une éducation française. Les Juifs du Haut-Atlas, du Sous et du Sahara – régions que les Français ont mis du temps à contrôler – étaient considérés par les Juifs marocains des villes comme des marginaux. Le mythe des Juifs berbères répercuté par les maîtres de l’Alliance et par les chercheurs français était devenu la réalité pour les Juifs marocains eux-mêmes. Dans l’étude la plus détaillée sur les conditions de vie des Juifs du Sud marocain, publiée peu après l’indépendance et basée essentiellement sur les informations fournies par les directeurs des écoles de l’Alliance, Pierre Flamand explique comment la " mentalité " des Juifs autochtones originaires des régions berbères a été façonnée par le milieu berbère. D’après lui, les Juifs appelés Shleuh sont faciles à identifier du fait de leurs noms, de leurs traits physiques et leur mode de comportement qui leur sont très typiques : leurs coreligionnaires d’autres extractions reconnaissent les Juifs dits shleuh à leurs patronymes : Abergel, Abouzaglo, Amoch, Assouline, Chriqui, Harrus, Oiknine, etc., et à quelques traits physiologiques et caractériels sommaires : larges épaules, fortes poitrines, yeux vifs dans des visages à traits fermes et droits, esprit d’entreprise, acceptation de rudes besognes [39].
L’épithète utilisé par les Juifs marocains pour désigner leurs coreligionnaires moins évolués, " fils de shleuh " avait une connotation péjorative. Répercutée chez Flamand cette image stéréotypique des Juifs ruraux s’est transportée en Israël par les immigrants juifs du Maroc et le terme shleuh est devenu synonyme de simplet en argot israélien.
Déjà à l’époque pré-coloniale, la migration des Juifs ruraux vers les villes a produit des clivages entre Judéo-berbères et Judéo-arabes. A Essaouira et à Marrakech, les Juifs " autochtones " se distinguaient de leurs coreligionnaires ruraux. Cependant une fois installés en ville, les Juifs berbères s’arabisaient et s’adaptaient à un environnement urbain plus civilisé [40]. Ce processus s’intensifia à l’époque coloniale, mais un certain nombre de Juifs vécurent dans leur région d’origine jusqu’à leur départ en Israël [41]. Par conséquent, les porte-parole de l’urbanisation et du progrès établirent une division hiérarchique entre les différents types de Juifs marocains que l’on retrouve souvent chez Slouschz et ses émules postérieurs. Ces différents types seraient les suivants Juifs hispanophones, à Tanger et dans les régions du Nord ; Juifs parlant français et arabe, sur la côte et dans les villes de l’intérieur ; groupe arabo-berbère du centre du pays ; groupe arabe et shleuh du sud ; Juifs arabophones du Sahara [42]. Les classifications postérieures adoptées par les chantres de l’occidentalisation, comme l’Alliance, ramenèrent ces divisions à quatre catégories essentielles hispanophones, francophones occidentalisés, arabophones et berbérophones.
Les divisions sociales, suivant le schéma tracé par Slouschz, correspondaient aux divisions entre : makhzen et siba, monde urbain / monde rural. Cette vision simpliste devait influencer un bon nombre de chercheurs ayant travaillé sur les Juifs marocains durant le Protectorat français [43]. Inventée ou réelle, elle influença pareillement la politique de l’organisation qui a marqué le plus la vie des Juifs marocains pendant le protectorat français : l’A.I.U et ses écoles qui distinguèrent entre les Juifs du bled, comme on appelait les Marocains ruraux, et ceux de la ville. Ces stéréotypes ont été intériorisés par les Juifs marocains eux-mêmes, qui considéraient les Juifs des régions parlant tashelhit spécialement ceux des montagnes de l’Atlas, comme des Shleuh primitifs, bien que ceux-ci aient eu généralement des conditions de vie plus saines que celle de leurs frères des mellah urbains. Pendant la période du Protectorat, des tensions très vives entre les différentes couches de la population, accompagnèrent l’arrivée de nombreux Juifs ruraux originaires de l’Atlas dans le mellah de Marrakech. Ce qui fit dire, en 1940, à un observateur vivant à Marrakech que les Juifs " étrangers ", d’origine espagnole qui étaient mieux éduqués, furent submergés par les Juifs berbères. Ces Juifs ruraux, pensait-on, " ne pratiquaient qu’un judaïsme très primitif approprié à leur mentalité. La culture de la Torah, l’observation de quelques rites extérieurs, l’aumône au rabbin de Palestine, le mépris et l’hostilité des populations qui l’entourent tels étaient les seuls liens qui les rattachaient à la famille d’Israël ". Ces Juifs berbères primitifs, une fois urbanisés, devinrent plus juifs. Mais " de ces origines surtout rustiques et montagnardes, le juif marrakchi semble avoir gardé quelque chose de farouche et de têtu. Parmi ces coreligionnaires marocains, c’est lui qui se rattache aujourd’hui avec le plus de force aux coutumes de ses ancêtres [45] ". Flamand, qui reprenait les idées de ses informateurs de l’Alliance, considérait que les traditions religieuses des Juifs du Sud avaient été contaminées par des influences " orientales ", déformées par un isolement millénaire des grands centres du judaïsme mondial, assimilant et intégrant concepts et symboles de l’Islam, ainsi que toutes sortes de rites païens tirant leurs sources d’un animisme agraire chargé de pratiques superstitieuses. Les Juifs restés dans les régions berbères, de plus en plus isolés du reste du pays au fur et à mesure que s’intensifiait l’urbanisation, étaient plus marginalisés encore, et cela d’autant plus que l’émigration les privait de leurs meilleurs éléments [47]. Le fossé entre ceux qui restaient dans les campagnes, parmi les Berbères, et ceux vivant en ville était plus profond que jamais : " entre le Juif espagnol ou oriental lettré érudit, urbain et le Juif berbère, fruste, primitif, attaché à son sol, l’opposition est saisissante [48] ".
Jeune femme
en tenu traditionnelle,
Tineghir, vallée du Todra, 1958
Ainsi, l’image du Juif berbère, " isolé du monde civilisé [49] ", descendant des tribus berbères autochtones et maintenant des coutumes primitives était parfaitement acceptée par la société coloniale. L’idée de trouver des Juifs shleuh a guidé initialement mes recherches dans le Sous. Une des questions à laquelle je voulais répondre était de savoir jusqu’à quel point les Juifs de l’Atlas et de l’Anti-Atlas utilisaient le berbère dans l’enseignement pour expliquer et traduire les textes religieux, ou pour réciter certaines prières seulement [50]. La question fut posée déjà par Galand et Zafrani avec la publication de la Haggada de Pessah de la communauté juive de Tinrhir, basée sur un texte oral en tamazight. Cette Haggada berbère a toutefois soulevé plus de questions qu’elle n’a apporté de réponses. Le paysage linguistique de la communauté juive, comme le souligne Zafrani, n’est pas net. La question de l’usage du berbère par cette communauté et par d’autres communautés judéo-berbères à des fins liturgiques est loin d’être élucidée.
Certaines preuves linguistiques semblent démontrer l’existence, au XXe siècle, de communautés juives éparses berbérophones. Certains chercheurs estiment que ce phénomène était beaucoup plus étendu que je ne le considérais moi-même. Des recherches récentes effectuées en Israël parmi les Juifs originaires de régions berbérophones m’ont confirmé cependant que très peu de communautés parlaient berbère à la maison avant la seconde guerre mondiale [51]. Peu d’observateurs des périodes antérieures se sont penchés sur la géographie linguistique juive du Maroc rural. Exception faite de Foucauld qui affirme : " les Israélites du Maroc parlent l’arabe. Dans les contrées où le tamazight est en usage, ils le savent aussi ; en certains points le tamazight leur est plus familier que l’arabe, mais nulle part ce dernier idiome ne leur est inconnu [52] ". Foucauld se réfère-t-il aux deux dialectes du Moyen-Atlas, le tamazight et le tashelhit ? Ce n’est pas clair. Mais ses observations datant de la fin du XIXe siècle, selon lesquelles la plupart des Juifs des régions berbérophones connaissaient aussi bien le berbère que l’arabe et que dans certains endroits le berbère était mieux connu que l’arabe, semblent plausibles. Il s’avère par ailleurs que nombre de communautés importantes du Sous et du Haut-Atlas étaient arabophones même si la plupart des Juifs y parlaient aussi le berbère [53]. C’était le cas d’Iligh dont les habitants juifs parlaient l’arabe. Bien qu’on connaisse mal leur passé lointain, les documents écrits montrent que le judéo-arabe était leur langue de culture, du moins depuis le début du XIXe siècle. L’hébreu aussi était connu de l’élite culturelle, mais il n’y a nulle part trace du judéo-berbère, ni dans les textes écrits, ni dans la tradition orale. On n’a retrouvé aucune tradition indiquant que le berbère était utilisé dans l’enseignement, dans la lecture de textes religieux ou dans la récitation des prières.
S’agissant encore de la communauté juive d’Iligh, ce qui est frappant dans son histoire relativement courte – moins de 400 ans – c’est son cosmopolitisme et son ouverture relative sur le monde. Ainsi, ses habitants eurent vent, au début du XVIIe siècle, de l’avènement de Shabtai Tzvi [54].
Iligh fut détruite par Moulay Rashid en 1670, mais retrouva sa position politique à la fin du XVIIIe siècle sous Sidi Hashim. En 1815, Sidi Hashim est ainsi décrit : " un homme entre 50 et 60 ans, possédant une grande richesse et un grand pouvoir ; il est très rusé et très brave mais rapace et cruel ; il a sous ses ordres 15 000 cavaliers des mieux armés... Toutes les caravanes qui traversent le désert... jugent nécessaire de s’assurer son amitié et sa protection par des présents. Entre ce chef et l’empereur du Maroc existent la plus implacable des haines et une jalousie continuelle qui, il y a quelques années, a éclaté en guerre ouverte [55] ". Assurément le chiffre de 15 000 soldats est exagéré, car un marin naufragé qui fut détenu pendant un certain temps dans l’Oued Noun parle de 600 Arabes " montés " seulement sillonnant le pays [56]. Mais les observateurs contemporains évoquent la puissance politique d’Hashim et le rôle prépondérant d’Iligh dans le commerce transsaharien. Grâce à ses commerçants juifs, Iligh était reliée à l’Europe par le port d’Essaouira [57]. Il n’y avait pas que les marchandises et les commerçants qui arrivaient du littoral à lligh. Des émissaires de Palestine, comme Haim Joseph Masliah, en 1817, passèrent également par Iligh [58], ainsi que des marins européens naufragés sur la côte et tenus en otage à Iligh. Grâce à leurs relations avec le port d’Essaouira, les Juifs d’Iligh servaient d’intermédiaires pour le rachat et la restitution de ces captifs aux consulats européens installés dans cette ville [59].
Avec le déclin du commerce transsaharien et la ruine d’Essaouira comme port international à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, Iligh cessa d’être un centre de commerce international. Ceci porta atteinte à la communauté juive locale dont les relations avec le monde extérieur s’amenuisèrent. Cette situation s’aggrava davantage encore pendant la période coloniale et jusqu’à la seconde Guerre mondiale. Après la guerre, l’Alliance commença à développer son réseau des " écoles de bled ". Dans l’optique de ses dirigeants, cette expansion à l’intérieur du " vrai bled " devait englober les " villages isolés des vallées de l’Atlas, du grand Sud et des oasis pré-sahariennes [60] ". C’est donc vers la fin du Protectorat français qu’Iligh devait attirer l’attention de l’Alliance qui y créa sa première école en 1954 [61], aussitôt fermée avec le départ de la communauté quelques années plus tard. Pour marquer l’ouverture de l’école, on tourna un film : " Ils seront des hommes ". Lors de la projection du film, Jules Brunschvig, le vice-président de l’Alliance, proclama : " l’École tirera ces populations de leur misère [62] ". Un délégué de l’Alliance, en visite à Iligh, mentionna l’école comme " ’héroïne si l’on peut dire, du récent film de l’Alliance, et qui le mérite si bien [63] ". Toutefois, après l’indépendance du Maroc, l’idée de perpétuer les communautés juives des petits mellah du Sud marocain fut rapidement abandonnée, les dirigeants du judaïsme marocain ne pouvant faire grand-chose pour relever ces communautés rurales du Sud, pensant que celles-ci seraient mieux en Israël. " J’ai vidé les mellah ", me dit un membre important de la communauté en 1981.
Iligh était considérée comme éloignée du monde civilisé tant par les Juifs urbains que par l’Alliance. Sa communauté qui s’installa en Israël, entre la fin des années 1950 et le début des années 1960, n’était pas aussi éloignée du monde juif, comme les hommes de l’Alliance se l’imaginaient. Mais avant leur départ, les Juifs d’lligh ont enterré dans la vieille synagogue de leur localité une Geniza que j’ai fouillée en 1981. Malheureusement, presque tout son contenu était en décomposition à cause de l’humidité du sol. Il en restait quelques fragments datant de la période précédant le départ des Juifs. Des textes religieux, des livres de prières ainsi que des fragments de lettres et de livres de comptes en judéo-arabe. Certains fragments révélaient que quelques livres de prières en usage à lligh avaient été publiés en Pologne. Contrairement à l’idée prévalant en Israël, selon laquelle les Juifs de cette contrée étaient totalement ignorants du sionisme politique, la Geniza d’lligh nous a apporté la preuve de la diffusion de textes hébreux modernes et de pamphlets sionistes.
La recherche sur les Juifs vivant parmi les Berbères reste encore à faire et nous sommes conscients des lacunes qui restent à combler. Ce que j’ai essayé de montrer dans cette étude est que notre savoir sur les Juifs ruraux du Maroc reste largement tributaire des stéréotypes sur le Juif berbère, stéréotypes acceptés aussi bien par le colonisateur et que par les colonisés – reflétant les divisions internes existant au sein des communautés juives du Maroc sous le protectorat. Ces divisions ont été entretenues en Israël du fait de la pérennité des mythes concernant les Juifs berbères.
NOTES
Pour une carte préliminaire des communautés juives du sud marocain, voir l’étude ethnographique de Harvey E. Goldberg, " The Mellahs of Southern Morocco ", The Maghreb Review 8, 3-4,1983, pp. 61-69.
On peut en citer des dizaines d’exemples. Voir notamment la distinction entre Juifs parlant le berbère et juifs parlant l’arabe faite par Léon Godard, Description et histoire du Maroc, Paris. C. Tanera, 1860, p.15. L’auteur se réfère aux tribus berbères pratiquant le judaïsme dans l’Oued Noun et parmi les Amazigh. Il semble croire qu’i1s vinrent de Palestine dans de temps ancien. Il note que l’Oued Noun était une région arabophone.
Travels in Morocco, Londres. Charles J. Skeet. 1860. II. pp 7-10.
Nous avons publié avec le regretté Paul Pascon un premier article sur la communauté juive d’Iligh. " Le cimetière juif d’Iligh, 1751-1955 : étude des épitaphes comme documents d’histoire sociale ", Revue de l’occident musulman et de la Méditerranée. 34, 2, 1982, pp. 39-62. Une autre version de cet article a aussi été publiée dans Paul Pascon. La Maison d’Iligh et l’histoire sociale du Tazerwalt, Rabat, SMER, 1984. pp. 113-140.
Voir notre article " Orientalism and the Jews of the Mediterranean ", Journal of Mediterranean Studies, 4.2.1994, pp. 183-196.
Nahum Slouschz, Travels in North Africa, Philadelphia, The Jewish Publication Society of America, 1927, p. 274 ; idem, Un voyage d’études juives en Afrique, Paris, Librairie C. Klincksieck, 1909, pp. 3-15. L’hypothèse de l’origine berbère des Juifs à l’intérieur du Maroc a été émise par Moise Nahon, " Les Israélites du Maroc ", Revue des études ethnographiques et sociologiques, 2. 1909, p. 259. Slouschz avait déjà commencé à publier certaines de ses recherches dans Archives Marocaines, en 1905, mais Nahon ne les cite pas.
Voir, Abraham I Laredo, Berberes y hebreos en Marruecos, Madrid, Instituto de Estudios Africanos, 1954. Dans la période post-coloniale aussi, plusieurs chercheurs affirment que la plupart des Juifs indigènes de l’Afrique du Nord descendent des tribus berbères. Voir, par exemple, Gabriel Camps, Les Berbères : Mémoire et identité, Paris, Éditions Errance, 1995, p. 98.
Sur Le Chatelier et la Mission scientifique du Maroc, voir Edmund Burke, III, " La Mission scientifique au Maroc ", in Actes de Durham : Recherches récentes sur le Maroc moderne, Rabat, Publication du Bulletin économique et social du Maroc, 1978, pp. 37-56 ; idem, " The First Crisis of orientalism, 1890-1914 ", in Contemporary North Africa, éditeur Halim Barakat, Sydney, Croom Helm, 1985, pp. 217-219.
Sur la mission de Slouschz, voir Daniel Schroeter et Joseph Chetrit " The Reform of Jewish Institutions in Morocco at the Beginning of the Colonial Government (1912-1919) ", (en hébreu), Miqqedem Umiyyam, 6, 1995, pp. 77-81; voir aussi Mohammed Kenbib, Juifs et Musulmans au Maroc : 1859-1948, Rabat, Université Mohammed V, Publications de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, 1994, p. 411.
Slouschz Travels, p. ix.
H. Z. Hirschberg, " The problems of the Judaized Berbers ", Journal 0f African History, 4, 1963. pp. 312-339. D’après Norman Roth, la judéité des tribus berbères pré-islamiques est douteuse à cause de la répression du judaïsme durant l’occupation byzantine en Afrique du Nord. " The Kahina : Legendary Material in the Accounts of the Jewish Berber Queen ", The Maghreb Review, vol. 7, 5-6, 1982, p. 124. Tout en acceptant l’essentiel de sa thèse, Hirschberg a été critiqué pour avoir minimisé l’importance de la conversion des Berbères au judaïsme, en raison de ses travers européens. Hirschberg mêle, à son objectivité d’historien et d’orientaliste érudit, une certaine subjectivité de Juif occidental resté fidèle à ses traditions religieuses qui découragent le prosélytisme, (André Chouraqui. Histoire des Juifs en Afrique du Nord, Paris, Hachette, 1986, p. 65.) Par ailleurs, dans une étude sur les groupes sanguins marocains, il a été constaté que les juifs étaient différents de leurs voisins musulmans : certains auteurs en virent la preuve que si les Berbères ont été largement judaïsés à l’époque pré-islamique, la plupart ont été islamisés par la suite, et seuls les " juifs d’origine " ont conservé leur judaïsme. D. Mechali, J. Levêque, et P. Faure, " Les groupes sanguins ABO et Rh des Juifs du Maroc ", Bulletin de la Société d’anthropologie de Paris, série 10, 9, 1957, pp. 354-370.
The Non-Jewish Origins of the Sephardic Jews, Albany: State University of New York Press, 1996.
Histoire des Berbères, 4 vols, Paris, 1925-1956, vol. I, pp. 208-209.
D. Jacques-Meunié, Le Maroc saharien des origines au XVIe siècle, Paris, Librairie Klincksieck, 1982, pp. 173-188. Voir aussi Gabriel Camps, " Réflexions sur l’origine des Juifs des régions nord-sahariennes ", dans M. Abitbol, Communautés juives des marges sahariennes du Maghreb, Jérusalem, Institut Ben-Zvi, 1982, pp. 57-67.
Voir Maya Shatzmiller, L’Historiographie mérinide : Ibn Khaldun et ses contemporains, Leiden. E. J. Brill, 1982, p. 115ff.
Ibid, p. 188.
Voir en particulier Germain Ayache, " La fonction d’arbitrage du Makhzen ", dans Études d’histoire marocaine, Rabat, SMFR, 1979, pp. 159-176. Sur l’évolution de la perception des rapports entre makhzan et siba, dans l’ethnologie française du Maroc. voir Edmund Burke III, " The Image of the Moroccan State in French Ethnological Literature : a New Look at the Origin of Lyautey’s Berber policy ", dans Ernest Gellner et Charles Micaud, Arabs and Berbers (eds), Londres, Duckworth, 1973, pp. 175-199.
Reconnaissance au Maroc, 1883-1884, Paris, Challamel, p. 398.
Travels, p. 483.
John Davidson, Notes Taken during Travels in Africa, Londres, 1839, p. 165.
Ibid., p. 188.
Ibid., p. 192.
Richardson, Travels, 11, pp. 8-9.
Ibid, pp. 7-8.
Voir à ce sujet, " Jewish Existence in a Berber Environment ", dans Jewish Societies in the Middle East, ed. par Shlomo Deshen et P. Zenner, Wasbington DC, University Press of America, 1982, p. 107.
Archives d’Iligh. K3 et K10. Paul Pascon a examiné un choix d’extraits de ces livres de comptes d’Iligh, voir à ce sujet La Maison, pp. 80-81.
AIU/Maroc III. B. 14. Mogador 24 avril 1874, Abraham Corcos à AIU.
Ibid.
Extrait du registre K3, Archives d’Iligh.
Archives de l’Alliance israélite universelle (ci-après AIU)/Maroc III. C. 10 Mogador, le 19 juillet 1889, J de A Elmaleh à AIU ; Hamagid, 23 septembre 1889 ; " Yishaq b. Yais Halewi " dans Hasfirah 18, 1891: 573, 577. Le rapport du consul français ne mentionne pas les coups, mais suggère que les prêts constants qu’il était obligé de faire à Muhammad ont poussé Souissa à s’enfuir, Archives du Ministère des Affaires étrangères (Nantes), Tanger 95, Mogador, 23 août 1889, Lacoste.
Reconnaissance au Maroc, p. 400. Voir à ce sujet Allan R. Meyers, " Patrongage and Protection : The Status of Jews in Precolonial Morocco ", dans Jewish Societies in the Middle East, ed. par Shlomo Deshen et P. Zenner, Washington DC, University Press of America, 1982, pp. 99-100.
L. Justinard, Un petit royaume berbère : le Tazeroualt. Un saint berbère Sidi Ahmed ou Moussa, Paris, Maisonneuve, 1954, pp. 75-77 ; E. Gérenton, " Les expéditions de Moulay El Hassan dans le Sous, 1882-1886 ", Renseignements Coloniaux, (1924) : 265-286.
Moharned Ennaji et Paul Pascon, Le Makhzen et le Sous al-Aqsa, Paris, CNRS, 1988, pp. 125-126.
Ibid pp. 142, 169-170.
Il fait également référence à al-ashura al-kabira et al-sghira.
Voir Burke, " The Image of the Moroccan State ", pp. 193-194 et Kenneth Brown " The Impact of the Dahir Berbère in Salé ", dans Arabs and Berbers, op. cit., pp. 201-206.
Nahum Slouschz, " Hébraeo-phéniciens et judéo-berbères. Introduction à l’histoire des Juifs et du judaïsme en Afrique ", Archives Marocaines, 14, 1908, pp. 450-452.
Slouschz, Travels, p. 467.
Pierre Flamand, Diaspora juive en terre d’Islam. Les communautés israélites du sud marocain ; essai de description et d’analyse de la vie juive en milieu berbère, Casablanca, 1959, pp. 215-216.
Nahon, Les Israélites, p. 260.
Pour un exposé sur les mellah de l’Atlas dans les années 1930, voir Y. D. Semach, " Les saints de l’Atlas ", Paix et Droit, n° 10, décembre 1937, pp. 10-11, n° 1 janvier 1938, pp. 7-8, n° 2, février 1938, pp. 10-11.
Slouschz, Travels, pp. 377-379. Voir, par exemple, Manuel L. Ortega, Les Hebreos en Marruecos, Madrid. 1934, pp. 116-117 ; ces catégories, mutatis mutandis, sont reproduites intégralement par Michael M. Laskier, The Alliance Israélite universelle and the Jewish Communities of Morocco :1862-1962, Albany, State University of New York Press, 1983, pp. 20-21. Laskier s’appuie à ce sujet sur Nahon (Les Israélites, p. 260).
Voir, par exemple Doris Bensimon-Dorath, Évolution du Judaïsme marocain sous le Protectorat français, 1912-1956, Paris, Mouton & Compagnie, 1968, p. 13. Laskier The Alliance, pp. 14-16 ; idem, " Aspects of Change and Modernisation the Jewish Communities of Morocco’s Bled ", dans Communautés juives des marges sahariennes du Maghreb, édité par M. Abitbol, Jérusalem, Institut Ben-Zvi, 1982, pp. 331-332.
Cf. Flamand, Diaspora, pp 97-98.
José Bénech, Essai d’explication d’un mellah, s.d., pp. 29-30.
Diaspora, p. 306
Ibid., p 269.
Bénech, Essai, p. 11.
Goldenberg, Expédition, p. 27.
P. Galand-Pernet & Haïm Zafrani, Une version berbère de la Haggada de Pessah, Paris, Geuthner, 1970, p. 2.
Goldenberg, Mellahs of Southern Morocco, pp. 62-63.
Foucauld, Reconnaissance, p. 398.
A. Goldenberg, " Expédition dans le Haut-Atlas marocain ", Les Cahiers de L’Alliance Israélite Universelle, septembre 1952, p. 27. Pour Akka, voir Vincent Monteil, " Choses et gens du Bani ", Hespéris, 33, 1946, p. 39.
Adversaire notoire des Sabbatéens, Jacob Sasportas rapporte dans son ouvrage Zizat Nobbel Zvi, les rumeurs relatives aux dix tribus perdues circulant à Iligh : voir Hirschberg, The Problem, pp. 332-333.
Voir à ce sujet James Riley, An Authentic Narrative 0f the Loss 0f the American Brig Commerce, 1846, pp. 134-135.
Archibard Robbins, A Journal comprising an Account of the Loss of the American brig Commerce, 1851, pp. 213-214.
The narrative of Robert Adams, Londres, 1816, pp. 76-77, 150-152.
Archives Nationales d’Outre Mer, Aix-en-Provence : F80 1589A, dossier de Delaporte, Notes sur l’Afrique.
Public Record Office, F0 631/,4 avril 1816, Wiltshire ; Justinard, Un petit royaume, op. cit., pp. 64-67.
André Goldenberg, " Les Juifs du Maroc et l’Alliance : les écoles de bled ". Les Cahiers de l’Alliance israélite universelle, nouvelle série, n° 5 juin 1993, p. 24.
Elle comptait 42 élèves en 1954 : Flamand, Diaspora, p. 312. A la veille de l’Indépendance, l’Alliance était toujours intéressée par la perspective d’ouverture de nouvelles écoles dans les régions isolées du Sud. Voir Cochba Levy, " Notes de voyage dans l’extrême sud marocain ", Les Cahiers de l’Alliance Israélite Universelle, n° 83, mal 1954, pp. 26-32.
Ibid., p. 314.
Levy, Notes, pp. 31-32.
http://www.mondeberbere.com/decouverte-juifs-berberes.html
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime son semblable a accompli [la] loi. Romains 13:8
Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Mais qui sont donc les Berbères
Saviez-vous que les Berbères sont descendants de juifs ?
Juifs et Berbères
Première partie. Juifs et Berbères : vers une communauté de destin
Deux peuples au passé commun, séparés par le temps mais culturellement très proches par leur histoire millénaire commune, se côtoient sur les bords de la Méditerranée. Une histoire à rétablir d’urgence dans nos mémoires. Quelques accords enflammés de musique judéo-berbère suffiront-ils à jumeler un jour leur berbérité à notre judaïté ?
Avant l’ère chrétienne et après la mort d’Alexandre le Grand, soit 266 ans après la destruction du premier temple à Jérusalem par Nabuchodonosor, les lointains ancêtres des Berbères étaient probablement des Juifs déportés de la Terre promise en Cyrénaïque (l’actuelle Libye) en 320 av J.C. par Ptolémée Soter, fondateur de la dynastie des Lagides d’Égypte. Ces Juifs « libyens » furent ensuite enrôlés de force par Ramsès II pour combattre les Hittites.
Ce n’est qu’après la destruction du second temple de Jérusalem, en 70 de l’ère chrétienne, que les enfants d’Israël se réfugièrent chez leurs frères en Cyrénaïque. Ils développèrent une économie prospère sur les rives de la Méditerranée. Certains des riches marchands et des courageux marins phéniciens du bassin méditerranéen étaient probablement nos ancêtres…
Bien plus tard, ils se révoltèrent contre la tyrannie et l’assouvissement des Grecs, chassèrent les Romains après en avoir tué plus de deux cent mille avant de s’enfuir. Une errance de plusieurs siècles à travers les steppes désertiques du sud tunisien qui vient en écho à nos quarante ans d’errance dans le désert du Néguev, après la sortie d’Égypte en 1320 av. J.C. Une destinée vécue, aux confins du Sahara, en tribu armée appelée Djéroua, leur permettra d’échapper au contrôle des légions romaines, présentes dans les villes côtières.
Dans un article récent, Belkacem Lounes(1), le Président du Congrès Mondial Amazigh (CMA), estime qu’il subsiste une trentaine de millions de berbérophones occupant des territoires plus ou moins vastes, répartis sur une dizaine de pays : Maroc (Rif, Atlas, Sous), Algérie (Kabylie, Aurès, Chenoua, M’zab), Tunisie, Libye, Égypte (Oasis de Siwa), Canaries et le pays touareg, découpé par les frontières de six états (Niger, Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Libye, Algérie). La géopolitique du royaume des Berbères ou TAMAZGHA (prononcer Tamazrha), s’inscrit dans des montagnes sécuritaires, et signifie : Pays des hommes libres. Un peuple sans territoire est un peuple sans ombre, disait l’historien Georges Bensoussan.
Plus de deux millions de Berbères sont recensés actuellement en France, contribuant en toute discrétion à l’épanouissement économique, scientifique, artistique et sportif de
la France. Parmi les plus célèbres : Edith Piaf, Mouloudji, Daniel Prévost, Isabelle Adjani, Zinédine Zidane et bien d’autres personnalités de tous horizons. Leur immigration remonte à la fin du XIXe siècle. Elle répondait alors à la fois au besoin de soldats pour la première et la seconde guerre mondiale et au déficit de main d’œuvre dans les secteurs de l’industrie et du BTP. Ils ont retrouvé dans les fondements de la société française – républicaine et laïque – les valeurs essentielles sur lesquelles repose leur propre modèle de société.
Berbères ou Amazighs : peuple noble et libre
AMAZIGH, AMAZIGHREN (prononcer Amaziren) signifient homme(s) ou femme(s) libres, nobles. Le terme ethnolinguistique « berbère » – pourtant couramment employé – est souvent considéré comme péjoratif car avec ce terme, les anglophones et les francophones inventeront le mot « barbare ». Le terme berbère vient du grec « barbaro » terme qui représentait quelqu’un qui parlait le grec d’une façon inintelligible, et de ce fait était considéré comme barbare.
Le tamazigh devient la langue officielle des Amazighs, elle constitue leur identité berbère d’appartenance. L’alphabet amazigh inclut des signes d’origine et d’inspiration gréco-latine appelés « tifinagh ». Depuis sa fondation, le sionisme représente un mouvement national de libération et d’indépendance de l’état d’Israël. Par comparaison, le réveil du nationalisme berbère fait référence à leur appartenance à une terre ou à d’immenses territoires, à l’usage d’une langue commune, à leur culture traditionnelle. A quand un état berbère libre et reconnu ?…
Le combat légitime de reconnaissance des Amazighs est en tous points de vue semblable à celui du peuple juif pour légitimer la terre d’Israël. Sur le plan religieux, précisera B. Lounes, les Berbères ont toujours été pluriels. Après avoir connu l’animisme et le paganisme, ils ont subi l’influence du judaïsme, du christianisme et de l’islam. Des religions adaptées dans leur sphère privée, pour perpétuer à leur manière les us et coutumes familiales, rarement pratiquées de manière orthodoxe ou prosélyte. Comme aime à nous le rappeler le Président B. Lounes, les Berbères ont la solide réputation de résistants, défendant farouchement leur liberté et refusant de vivre sous domination. Le Berbère est par essence laïc et égalitaire, c’est un démocrate !
Le refus de la Tunisie à reconnaître l’identité amazighe
La 62ème session du Congrès Mondial Amazigh de Genève, en mars 2003, a établi un rapport cinglant(2) qui dénonce les discriminations, à l’encontre des Amazighs de Tunisie depuis un demi siècle. Et pourtant, comme les Indiens d’Amérique du Nord, les Amazighs étaient les premiers autochtones de ce pays. Les amazighophones sont estimés aujourd’hui à un million de personnes soit environ 10% de la population de Tunisie, concentrés autour de Djerba, Tataouine, Médine, Kebili, Tozeur. On retrouve aussi d’autres groupes ethniques sur la côte méditerranéenne et le long de la frontière avec l’Algérie. Ce rapport fait état d’une violation inique des droits (azref) identitaires des populations amazighes (art. 2a, 3 et 5 de la convention internationale contre toutes les formes de discriminations raciales, pourtant ratifiée par la Tunisie le 13 janv. 67).
C’est ainsi que se proclamer amazigh est complètement prohibé en Tunisie. La seule identité officiellement autorisée est l’identité tunisienne fondée sur l’islamité et l’arabité. Toute autre revendication identitaire est passible de trahison. Le terme « amazigh » n’a pas le droit de cité en Tunisie, seul le mot berbère est autorisé pour sa connotation « barbare ». Une manière totalitaire d’étouffer l’histoire d’un peuple minoritaire à des fins géopolitiques d’annexion et d’exclusion. Un peuple minoritaire, que l’on a rendu illégitime afin de l’effacer.
A l’évidence, la Tunisie et l’Algérie et le Maroc nient et nieront longtemps l’existence de cette population autochtone, non arabe, dotée de ses propres références culturelles berbères (langue, tradition et culture). Dans ce schéma réducteur l’enfant amazigh, symbole d’avenir, est ignoré, tant il subit un système éducatif qui falsifie son histoire, heurte ses convictions personnelles, réprime sa liberté et minore sa culture berbère. Ses déterminants identitaires une fois rejetés le placent dans une situation d’infériorité par rapport à l’enfant arabe. Un combat légitime, une question de survie taraude depuis toujours le bureau exécutif du CMA. Les Berbères, peuple minoritaire – dont le combat démontre de singulières similitudes avec celui d’Israël et des Juifs – vivent aujourd’hui une situation inédite d’exclusion qui n’a rien à envier à la situation d’hier. Par la négation de leur existence, par la falsification de leur histoire, par les interdits qui frappent leur expression culturelle, par la persécution implacable allant jusqu’au crime ethnocidaire en Kabylie, les dirigeants des États nord-africains visent à effacer « dans l’œuf » toute trace de berbérité encore vivante. Le FIS et le GIA font plus de ravages que l’OAS d’autrefois. En deux ans, on a tué cent fois plus de musulmans en Algérie qu’en « Palestine » !… Mais, dira Guy Konopnicki, les assassins étant des musulmans, le silence est de règle. A l’indépendance, il fallait que l’Algérie soit arabe et non algérienne, observera encore G. Konopnicki(3).
A l’évidence, poursuit B. Louness, cette politique découle du rattachement artificiel des pays du monde arabe moyen-oriental et à leur corollaire fédérateur : une seule langue, l’arabe, une seule religion : l’islam ! Un processus d’arabisation, ajoutera-t-il, entamé il y a plus de quatorze siècles au nom de l’islam. Quant à l’amalgame entre la langue arabe érigée en langue « sacrée » du Coran et la religion musulmane, il est sciemment entretenu afin de culpabiliser les Berbères musulmans et de les empêcher de s’opposer à la vague d’arabisation portée par l’islam. Pour réussir cette grande opération de décervelage mondialisée, la presse panarabique, les médias publics complices, l’école des banlieues, et les mollahs des mosquées, s’emploient à cultiver le mépris et la haine des Berbères réfractaires à l’idéologie dominante en les diabolisant en antimusulmans. Comme des mécréants qu’il est utile de combattre, comme des sauvages bons à « civiliser ».
Mais l’histoire de leur berbérité n’est pas soluble dans l’islamisme tout comme l’histoire des Hébreux n’est pas soluble dans celle des pharaons d’Égypte.
Par un impact d’images, émotionnellement fortes, dans l’inconscient collectif, on a voulu créer un grand leurre affectif, qui tend à amalgamer les Berbères à la cause palestinienne. Les images satellites tronquées des TV étrangères, diffusées durant plus de deux ans ont, selon toute vraisemblance, une part de responsabilité dans ce détournement des esprits.
En détournant habilement l’attention du peuple berbère vers
la Palestine, on occulte du regard les massacres de familles entières en Kabylie, ou des jeunes filles assassinées pour avoir refusé de porter le voile. La banalisation du régime de la terreur fait le lit de la dictature répressive algérienne. Un bilan tragique qui atteint aujourd’hui en Kabylie deux cent mille morts civils innocents ! CHALOM – AZUL. Saluts de paix entre les peuples.
1 le Figaro du 27 juin 2003 2 http://www.kabyle.com (v. aussi : http://www.mondeberbere.com) 3 Guy Konopnicki,
La Faute des Juifs, Balland, 2002
Deuxième partie. Juifs et Berbères Entre mythe et réalité
Au Ve siècle (en 439), lorsque les Vandales écrasèrent les Romains, sonna l’heure de la délivrance pour la grande tribu judéo-berbère appelée Djéroua. La vie devenait trop dure aux confins du Sahara et, comme plus rien ne s’opposait à leur migration vers le Nord, ils prirent possession du massif des Aurès vers 483 et s’installèrent en bonne intelligence avec les clans voisins. On sait aujourd’hui que certains nomades transhumants qui pratiquaient l’élevage étaient païens, d’autres étaient chrétiens.
L’historien berbère du XIVe siècle, Ibn Khaldoun(4) écrivait qu’une partie des Berbères transmettait à leurs enfants le judaïsme, religion qu’ils avaient reçue de leurs voisins israélites venus de Syrie.
Campées sur le dos de leurs chameaux, orgueilleuses et belliqueuses, les tribus judéo-berbères se nommaient les Nefouça en Ifrikia (l’actuelle Tunisie) et les Fendéoula, les Médiouna, les Béloula, les Riata, les Fazas au Maghreb el-Aqsa (l’actuel Maroc).
Dans les Aurès, la tribu des Djéroua, se distinguera particulièrement avec, à sa tête, la Dina Kahéna, reine du mont Aurès. Djéroua dérivant de l’hébreu guer, semble désigner « l’étranger qui adhère au judaïsme ». Après avoir battu les Vandales, les Byzantins occupèrent Carthage et s’allièrent avec les Berbères. Ils se retrouvèrent face à des tribus redoutables, prêtes à tout pour défendre leur liberté. En particulier ces étranges Djéroua, mélange d’Hébreux et de païens, devenus maîtres de l’Aurès oriental. Le monde qui allait accueillir les grandes invasions arabes, était déjà modelé par un siècle de vandalisme. Tout laisse à penser que l’intérieur de l’Afrique du Nord avait été judaïsé avant l’arrivée des troupes musulmanes. Ces dernières mettront plus d’un demi siècle à s’imposer au Maghreb (Maroc).
La kahéna, reine des Berbères(5)
Une femme dans la société berbère qui commande aux hommes a un caractère sacré. De son vrai nom Dahia, fille de Tabet, fils de Nicin (ou Tifan selon les auteurs) la reine Dina Kahéna – dont le nom signifie en punique « la prophétesse », et en hébreu : « fille de Cohen » – était juive. Une reine des Monts Aurès, réputée très combative. Pourquoi ? Au VIe siècle, l’islam imposera par le Coran, la soumission de l’homme à Allah et la domination de toutes les religions qui précédèrent l’islam, impliquant ainsi une conversion par la force de tous les individus. Pour cette reine de la tribu des Djéroua dont la descendance libyenne se libéra de la tyrannie des Pharaons, la soumission au dogme de l’islam devenait insupportable. Elle montrera une détermination farouche à combattre l’envahisseur barbare. Sa résistance obstinée de (696 à 700) à abjurer sa foi pour un islam prosélyte et hégémonique, fera entrer son nom dans la légende de la société berbère et du monde arabo-islamique. Elle se serait battue vaillamment contre Hassan ibn Noomane jusqu’à la mort causant d’énormes pertes dans les rangs de cet ennemi juré. Trahie par son fils adoptif Khaled, amant et ex-prisonnier, elle saura mourir dignement en reine, près du puits de Bir-el-Kahéna là où elle finira tristement décapitée en l’an 701. Sa tête sera expédiée avec les premières invasions barbares, en guise de trophée, au khalife Abd-el-Malek. De nombreux membres de la tribu des Djéroua se convertiront à l’islam. Le fils aîné de Kahéna deviendra gouverneur du mont Aurès. Plus tard, au XIe siècle, Ibn Khaldoun raconte que 100.000 Hillaliens et Soleimiens arrivés d’Égypte ravagèrent tout le pays. Il se produisit alors un phénomène incroyable, celui de voir plusieurs millions d’habitants, tous berbères, anciens païens, phéniciens ou juifs, se convertir à la religion de leurs envahisseurs, au point d’en oublier leurs origines et de se déclarer arabes. Ils oublièrent l’hébreu ancien, le punique ou le berbère pour ne plus parler que la langue de l’islam. Quelques communautés juives éparses, perdurèrent sur le plan économique et religieux avant de prendre un nouvel essor avec l’arrivée des Juifs d’Espagne à partir du XIVe siècle.
Messages kabyles(6)
Shamy Chemini(7), âme sans fortune dans « Messages Kabyles », 40 ans après, revient en Kabylie. Il découvre avec rage que les pouvoirs successifs se sont accaparés des richesses de l’actuelle Kabylie. Lorsque la terre a tremblé le 10 novembre 2000 à Wartirane, les dons (12 millions de dinars) en provenance d’une association Solidarité Kabylie sont restés bloqués à la préfecture laissant les Arouchs (peuple Berbère de Kabylie), déjà sans eau potable, dans le plus grand dénuement.
Les jeunes (retraités à 30 ans) sans travail et sans avenir sont poussés à l’exil ou seront emprisonnés ou assassinés. Les plus jeunes sont maintenus dans l’ignorance.
Les chanteurs berbères comme Oul Lahlou et Matloub Louness (lâchement assassiné) pleurent leur souffrance. Alyat Rahame, cet universitaire de 35 ans, qui ne supportait plus de voir son pays sous la domination d’un pouvoir qui tue les enfants et leur mémoire, a été assassiné le 17 juin 2001 par les gendarmes qui ont lancé une bombe lacrymogène sur lui, en pleine tête. A Mascara, fin juin 2001, les légats du pouvoir tirent à balles réelles sur la foule en marche pacifique. Au nom de la religion, les intégristes sont instrumentalisés contre les démocrates berbères.
Dans cette normalisation, tout ce qui n’est pas arabe ou musulman, devient illégitime. Orchestration à court terme, de l’effacement de l’autre, dans l’indifférence du monde entier.
Le 8 août 2001, la marche sur Alger dévoile une jeunesse en colère qui se soulève contre la machine impitoyable du pouvoir. Une folie meurtrière s’étend alors dans tout le pays. Les Arouchs se révoltent mais le Maghreb se suicide. La jeunesse kabyle a vaincu la peur. Ils ne peuvent plus la tuer vu qu’elle est déjà morte…
La Kabylie se mobilise encore le 14 juin 2001 pour défendre ses droits identitaires : dire non à la dictature, réclamer une Algérie démocratique une et indivisible, imposer le tamazight comme lien social et langue officiellement admise. On recensera des dizaines de morts et des centaines de blessés. La chasse aux Kabyles à l’arme blanche par les sbires du pouvoir en civil mérite, à elle seule, une page d’histoire. Une autre marche le 8 août 2001 sera interdite par le pouvoir du président Bouteflika qui bloquera toutes les routes conduisant à Alger, opposant à nouveau la jeunesse aux forces de l’ordre.
Tahar Djaout, journaliste et poète né en 1953 à Oulkoun, sera victime d’un attentat le 26 mai 1993. En effigie sur sa tombe, on peut lire l’épitaphe suivante :
« Si tu parles tu meurs, si tu te tais tu meurs, alors parles et meurs »…
De déchirures en déchirures, le père de Shamy est jeté en prison par les autorités françaises. En pleine guerre d’Algérie, à l’âge de treize ans, Shamy sera torturé.
La Kabylie, dit-il, devient aussi un pays écartelé par des luttes fratricides, une terre arrosée de sang d’innocents, un espace de convoitise, des hommes d’Orient et d’Occident.
5 Didier Nebo,
La Kahéna, éd. A.Carrière ;
La Kahéna reine des Berbères, Moh Cherbi et Thierry Deslot, éd.Paris-Méditerranée 6 Dossier de presse de Shamy Chemini. Orgueilleuse Kabylie. Film vidéo, l’Harmattan 7 Enfant prodige, artiste musicien et poète. Auteur de 4 tomes sur l’Orgueilleuse Kabylie, l’Harmattan.
Troisième partie. Ces juifs oubliés, vivant parmi les Berbères(8)
Dans le livre de Daniel J. Schroeter, « Juif parmi les Berbères »(9), une distinction dichotomique semble séparer les Amazighs judaïsés ou Juifs berbérophones des Juifs arabophones.
Dans la vallée de l’Atlas, dans le Sous et aux confins sahariens, vivaient depuis des siècles, sinon un ou deux millénaires, de nombreuses communautés juives, regroupées dans des quartiers réservés : les mellahs. Les juifs berbérophones des pays chleuh et tamazight possédaient, par tradition, une culture littéraire orale et religieuse. Ces communautés, au sein de tribus amazighes, empruntaient aux groupes voisins des formes d’organisation sociale ou même, quelquefois, leurs rites. Aujourd’hui, on n’en trouve guère de trace car depuis l’indépendance du Maroc, le 2 mars 1956, ils ont émigré en bloc en Israël.
Haïm Zafrani(10) établira que la plupart des communautés juives, vivant dans la montagne marocaine et le sud du pays, étaient bilingues (berbero-arabophones), d’autres essentiellement berbérophones comme à Tifnut. De cette dernière catégorie, quelques individus isolés ont immigrés en Israël, principalement à Ashkelon. Le tamazight était un parler juif de communication dans le milieu familial, social et économique mais constituait, à côté de l’hébreu, la langue traditionnelle de culture et d’enseignement, pour expliquer et traduire les textes sacrés, comme le judéo arabe ou le vieux castillan dans les communautés de langue arabe ou d’origine hispanique. Les bénédictions de la Thora étaient dites uniquement en berbère jusque dans la liturgie pascale. La langue de la très précieuse Haggada de Pessah s’apparente à la tamazight. La version berbère de cette Haggada constitue aujourd’hui une véritable preuve historique de l’existence d’une diaspora longtemps ignorée et irrévocablement disparue. C’est le premier texte berbère, issu de la communauté juive de Tinghir, de la vallée du Todgha (Maroc-1959), à être publié.(11)
A la recherche des juifs berbères
Plusieurs sources historiques de la période précoloniale nous sont parvenues, sur les juifs parlant arabe et vivant en zone urbaine au Maroc. Les Juifs berbères, quant à eux, vivaient en milieu rural, ce qui explique la nature fragmentaire et très éparse des sources historiques de ce groupe ethnique. En 1840, au Maroc, James Richardson, militant anti-esclavagiste britannique, fut le premier à désigner les juifs de l’Atlas comme des juifs shelouh, parlant Berbère et dont les coutumes étaient semblables à celles de leurs voisins non juifs et musulmans.
La référence aux Juifs berbères semble encore très inhabituelle car au XIXe siècle, les communautés juives du Maroc se revendiquent essentiellement comme descendantes de l’ancien Israël. Les seules distinctions relevées, émanent du clivage entre juifs originaires d’Espagne puis expulsés (megorashim) et juifs autochtones résidents au Maroc depuis toujours (toshavim).
A l’ère du Colonialisme triomphant, les recherches des voyageurs ethnographes sur les communautés lointaines d’orient sont devenues un moyen de gouvernement et une interrogation curieuse. Pourquoi, cet intérêt soudain des européens, pour ces juifs des régions « éloignées » du monde ?
La découverte de coreligionnaires primitifs évoquerait-elle le souvenir de tribus perdues ou plus simplement d’anciennes coutumes disparues, recherchées, afin de restaurer la souveraineté juive ?
Nahum Slouschz, orientaliste hébraïsant du début du XX e siècle, en mission au Maroc, apporte une contribution engagée qui aurait influencé la vision française du judaïsme marocain. Slouschz était sioniste et voulut réveiller la conscience nationale juive de son judaïsme marocain. Ses recherches, au Maroc sous protectorat français, pour découvrir le passé Juif berbère, pré arabe, étaient pertinentes. Pour lui, les Juifs de descendance berbère, avec leurs manières primitives d’influences locales, sont les vrais « Juifs nord-africains ». Ce sera en partie, à cause de ses idées sionistes, que les autorités françaises, décideront de le relever de ses fonctions.
Des mythes sur les Juifs berbères ont, selon toute vraisemblance, existé depuis le moyen âge. Vu l’importance historique du phénomène, la thèse de N. Slouschz laissera sceptique H.Z. Hirschberg. Ce dernier ajoutera qu’il y a peu de preuves pour affirmer que les juifs d’Afrique du Nord descendent des tribus berbères converties au judaïsme.
La judaïsation des berbères semble ici assez controversée. Pourtant, une étude plus récente de Paul Wexler, basée sur des données linguistiques et ethnographiques, démontre que la plupart des juifs marocains, pris dans leur ensemble (megorashim et toshavim), descendraient de Berbères convertis au judaïsme. Pour légitimer le pouvoir mérinide, plus précisément rapportée par les écrits d’Ibn Khaldoun, la première source historique fiable, évoquant l’existence de tribus Juives berbères, daterait du XIV e siècle.
Jacques Meunié témoignera à son tour de l’authenticité de traditions et légendes locales sur les juifs berbères au sud marocain préislamique ; puis précisera que pour justifier le régime colonial au Maroc, il fallait exhumer les séquelles du passé : berbère judéo-chrétien. C’était un moyen parmi d’autres. L’historicité des légendes sur l’expansion du christianisme et du judaïsme, parmi les Berbères à l’époque préislamique, a pu servir les besoins de l’administration coloniale dans sa volonté de séparer les Berbères et les Arabes.
Les relations Judéo berbères
Le Maroc de l’époque coloniale, sous protectorat français d’occupation, dans un dualisme simpliste dévoilera les divisions entre Berbères et Arabes : bilad al-makhzen / bilad al-siba, lesquelles influenceront les débats sur le judaïsme marocain. En principe, bien que le Juif soit protégé, Charles de Foucauld, a établi que tout Juif de bilad al-siba appartenait corps et bien à son seigneur, son sid et décrit dans ses notes de voyage le Juif comme un être servile, exploité sans merci par son maître. Comme les régions berbères appartenaient au bilad al-siba, les Juifs se devaient d’obtenir la protection de chefs tribaux et indépendants du Sultan. Slouschz rejoint encore Charles de Foucauld, pour attester de l’esclavage des Juifs à Tililit, pays du servage. [En échange de la perte de tous ses droits, le Juif jouit de la sécurité de son maître. Le Juif devra acheter sa future femme au sid, qui devient l’unique maître de son destin. Tout ce que les Juifs possèdent appartient au Qaïd. Le Qaïd a droit de vie et de mort sur ses sujets].
A la première partie du XIX e siècle, pour Davidson, les Juifs, du Sous, du Rif, de Tanger- avilis et soumis à la loi musulmane (charia)- étaient la propriété des Maures. Par contre, les 3.000 à 4.000 Juifs de l’Atlas placés sous la protection vigilante des Berbères auront une plus grande liberté et jouiront d’une quasi indépendance, vis-à-vis de l’autorité impériale. Les Juifs totalement intégrés à la société berbère, vivaient en paix et en symbiose avec les musulmans peu islamisés. Les sources de l’époque précoloniale sur les relations entre Musulmans et Juifs à Tililit, nous renvoient une image très contrastée de ces relations, que l’on se garderait bien de schématiser dans un clivage entre zones citadines et rurales, à une dichotomie arabo-berbère réductrice.
La question judéo berbère face au colonialisme.
La politique coloniale française, à l’égard des Berbères, a été développée sous Lyautey jusqu’en 1930 avec la publication du Dahir berbère visant à séparer les Berbères des Arabes. Au Maroc, dans l’Atlas, la résistance berbère – envers toute forme d’autorité centrale des Arabes – a préservé leurs institutions démocratiques, leur individualisme et leur liberté. Les ethnographes coloniaux relèvent que les Berbères musulmans n’auraient adopté que très superficiellement l’islam, conservant intacts leurs coutumes, leurs croyances, leurs superstitions préislamiques comme le culte des saints. Pour Slouschz, ces stéréotypes sur les Berbères se sont reproduits, d’une certaine façon, par quintessence à l’égard des juifs vivants parmi les Berbères. A l’exemple de la population berbère musulmane, très superficiellement islamisée, ces juifs berbères « primitifs » ne connaissaient rien ou presque de leur judaïsme. Pierre Flamand explique comment la « mentalité » des juifs autochtones originaires des régions berbères a été façonnée par le milieu berbère. Les Juifs appelés sleuh, dont les patronymes sont : Abergel, Assouline, Oiknine, Harrus, etc. sont très typiques dans leurs traits physiques et caractériels, dans leur mode de comportement. Le qualificatif « fils de sleuh », était par exemple utilisé par les juifs marocains pour désigner leurs coreligionnaires moins évolués. Plus tard, les immigrants juifs du Maroc ont exporté, vers Israël, cette image péjorative des Juifs ruraux, et le terme sleuh est devenu « simplet » en argot israélien.
Pendant la période du Protectorat d’occupation française, des tensions très vives entre les différentes couches de la population accompagnèrent de nombreux Juifs ruraux, originaires de l’Atlas dans le mellah de Marrakech. Les Juifs espagnols qui étaient mieux éduqués furent vite submergés par les Juifs berbères. Un observateur vivant à Marrakech en 1940 pensait, à tort, que ces Juifs ruraux ne pratiquaient qu’un judaïsme très primitif, approprié à leur mentalité. Puis par la culture de la Thora, par l’aumône au rabbin de Palestine, par les liens qui les rattachaient à la famille d’Israël, ces juifs berbères primitifs, une fois urbanisés, devinrent plus juifs que les citadins natifs. L’origine rustique et montagnarde du Juif marrakchi – a préservé son air farouche et têtu – mais l’a rattaché avec encore plus de force aux coutumes de ses ancêtres. On peut dire que le fossé se creusait plus que jamais, entre ceux qui restaient dans les campagnes parmi les Berbères et ceux vivants en ville. Entre le juif espagnol ou oriental, lettré, érudit, urbain et le Juif berbère, fruste et primitif, attaché à son sol, l’opposition est notable.
La coordination des Berbères de France(12)
Seule une volonté d’amitié entre les peuples peut barrer la route à la haine, à la terreur qui envahit ce monde pour apporter sa pierre à la construction de la paix entre les hommes de bonne volonté.
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Saviez-vous que les Berbères sont descendants de juifs ?
Juifs et Berbères
Première partie. Juifs et Berbères : vers une communauté de destin
Deux peuples au passé commun, séparés par le temps mais culturellement très proches par leur histoire millénaire commune, se côtoient sur les bords de la Méditerranée. Une histoire à rétablir d’urgence dans nos mémoires. Quelques accords enflammés de musique judéo-berbère suffiront-ils à jumeler un jour leur berbérité à notre judaïté ?
Avant l’ère chrétienne et après la mort d’Alexandre le Grand, soit 266 ans après la destruction du premier temple à Jérusalem par Nabuchodonosor, les lointains ancêtres des Berbères étaient probablement des Juifs déportés de la Terre promise en Cyrénaïque (l’actuelle Libye) en 320 av J.C. par Ptolémée Soter, fondateur de la dynastie des Lagides d’Égypte. Ces Juifs « libyens » furent ensuite enrôlés de force par Ramsès II pour combattre les Hittites.
Ce n’est qu’après la destruction du second temple de Jérusalem, en 70 de l’ère chrétienne, que les enfants d’Israël se réfugièrent chez leurs frères en Cyrénaïque. Ils développèrent une économie prospère sur les rives de la Méditerranée. Certains des riches marchands et des courageux marins phéniciens du bassin méditerranéen étaient probablement nos ancêtres…
Bien plus tard, ils se révoltèrent contre la tyrannie et l’assouvissement des Grecs, chassèrent les Romains après en avoir tué plus de deux cent mille avant de s’enfuir. Une errance de plusieurs siècles à travers les steppes désertiques du sud tunisien qui vient en écho à nos quarante ans d’errance dans le désert du Néguev, après la sortie d’Égypte en 1320 av. J.C. Une destinée vécue, aux confins du Sahara, en tribu armée appelée Djéroua, leur permettra d’échapper au contrôle des légions romaines, présentes dans les villes côtières.
Dans un article récent, Belkacem Lounes(1), le Président du Congrès Mondial Amazigh (CMA), estime qu’il subsiste une trentaine de millions de berbérophones occupant des territoires plus ou moins vastes, répartis sur une dizaine de pays : Maroc (Rif, Atlas, Sous), Algérie (Kabylie, Aurès, Chenoua, M’zab), Tunisie, Libye, Égypte (Oasis de Siwa), Canaries et le pays touareg, découpé par les frontières de six états (Niger, Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Libye, Algérie). La géopolitique du royaume des Berbères ou TAMAZGHA (prononcer Tamazrha), s’inscrit dans des montagnes sécuritaires, et signifie : Pays des hommes libres. Un peuple sans territoire est un peuple sans ombre, disait l’historien Georges Bensoussan.
Plus de deux millions de Berbères sont recensés actuellement en France, contribuant en toute discrétion à l’épanouissement économique, scientifique, artistique et sportif de
la France. Parmi les plus célèbres : Edith Piaf, Mouloudji, Daniel Prévost, Isabelle Adjani, Zinédine Zidane et bien d’autres personnalités de tous horizons. Leur immigration remonte à la fin du XIXe siècle. Elle répondait alors à la fois au besoin de soldats pour la première et la seconde guerre mondiale et au déficit de main d’œuvre dans les secteurs de l’industrie et du BTP. Ils ont retrouvé dans les fondements de la société française – républicaine et laïque – les valeurs essentielles sur lesquelles repose leur propre modèle de société.
Berbères ou Amazighs : peuple noble et libre
AMAZIGH, AMAZIGHREN (prononcer Amaziren) signifient homme(s) ou femme(s) libres, nobles. Le terme ethnolinguistique « berbère » – pourtant couramment employé – est souvent considéré comme péjoratif car avec ce terme, les anglophones et les francophones inventeront le mot « barbare ». Le terme berbère vient du grec « barbaro » terme qui représentait quelqu’un qui parlait le grec d’une façon inintelligible, et de ce fait était considéré comme barbare.
Le tamazigh devient la langue officielle des Amazighs, elle constitue leur identité berbère d’appartenance. L’alphabet amazigh inclut des signes d’origine et d’inspiration gréco-latine appelés « tifinagh ». Depuis sa fondation, le sionisme représente un mouvement national de libération et d’indépendance de l’état d’Israël. Par comparaison, le réveil du nationalisme berbère fait référence à leur appartenance à une terre ou à d’immenses territoires, à l’usage d’une langue commune, à leur culture traditionnelle. A quand un état berbère libre et reconnu ?…
Le combat légitime de reconnaissance des Amazighs est en tous points de vue semblable à celui du peuple juif pour légitimer la terre d’Israël. Sur le plan religieux, précisera B. Lounes, les Berbères ont toujours été pluriels. Après avoir connu l’animisme et le paganisme, ils ont subi l’influence du judaïsme, du christianisme et de l’islam. Des religions adaptées dans leur sphère privée, pour perpétuer à leur manière les us et coutumes familiales, rarement pratiquées de manière orthodoxe ou prosélyte. Comme aime à nous le rappeler le Président B. Lounes, les Berbères ont la solide réputation de résistants, défendant farouchement leur liberté et refusant de vivre sous domination. Le Berbère est par essence laïc et égalitaire, c’est un démocrate !
Le refus de la Tunisie à reconnaître l’identité amazighe
La 62ème session du Congrès Mondial Amazigh de Genève, en mars 2003, a établi un rapport cinglant(2) qui dénonce les discriminations, à l’encontre des Amazighs de Tunisie depuis un demi siècle. Et pourtant, comme les Indiens d’Amérique du Nord, les Amazighs étaient les premiers autochtones de ce pays. Les amazighophones sont estimés aujourd’hui à un million de personnes soit environ 10% de la population de Tunisie, concentrés autour de Djerba, Tataouine, Médine, Kebili, Tozeur. On retrouve aussi d’autres groupes ethniques sur la côte méditerranéenne et le long de la frontière avec l’Algérie. Ce rapport fait état d’une violation inique des droits (azref) identitaires des populations amazighes (art. 2a, 3 et 5 de la convention internationale contre toutes les formes de discriminations raciales, pourtant ratifiée par la Tunisie le 13 janv. 67).
C’est ainsi que se proclamer amazigh est complètement prohibé en Tunisie. La seule identité officiellement autorisée est l’identité tunisienne fondée sur l’islamité et l’arabité. Toute autre revendication identitaire est passible de trahison. Le terme « amazigh » n’a pas le droit de cité en Tunisie, seul le mot berbère est autorisé pour sa connotation « barbare ». Une manière totalitaire d’étouffer l’histoire d’un peuple minoritaire à des fins géopolitiques d’annexion et d’exclusion. Un peuple minoritaire, que l’on a rendu illégitime afin de l’effacer.
A l’évidence, la Tunisie et l’Algérie et le Maroc nient et nieront longtemps l’existence de cette population autochtone, non arabe, dotée de ses propres références culturelles berbères (langue, tradition et culture). Dans ce schéma réducteur l’enfant amazigh, symbole d’avenir, est ignoré, tant il subit un système éducatif qui falsifie son histoire, heurte ses convictions personnelles, réprime sa liberté et minore sa culture berbère. Ses déterminants identitaires une fois rejetés le placent dans une situation d’infériorité par rapport à l’enfant arabe. Un combat légitime, une question de survie taraude depuis toujours le bureau exécutif du CMA. Les Berbères, peuple minoritaire – dont le combat démontre de singulières similitudes avec celui d’Israël et des Juifs – vivent aujourd’hui une situation inédite d’exclusion qui n’a rien à envier à la situation d’hier. Par la négation de leur existence, par la falsification de leur histoire, par les interdits qui frappent leur expression culturelle, par la persécution implacable allant jusqu’au crime ethnocidaire en Kabylie, les dirigeants des États nord-africains visent à effacer « dans l’œuf » toute trace de berbérité encore vivante. Le FIS et le GIA font plus de ravages que l’OAS d’autrefois. En deux ans, on a tué cent fois plus de musulmans en Algérie qu’en « Palestine » !… Mais, dira Guy Konopnicki, les assassins étant des musulmans, le silence est de règle. A l’indépendance, il fallait que l’Algérie soit arabe et non algérienne, observera encore G. Konopnicki(3).
A l’évidence, poursuit B. Louness, cette politique découle du rattachement artificiel des pays du monde arabe moyen-oriental et à leur corollaire fédérateur : une seule langue, l’arabe, une seule religion : l’islam ! Un processus d’arabisation, ajoutera-t-il, entamé il y a plus de quatorze siècles au nom de l’islam. Quant à l’amalgame entre la langue arabe érigée en langue « sacrée » du Coran et la religion musulmane, il est sciemment entretenu afin de culpabiliser les Berbères musulmans et de les empêcher de s’opposer à la vague d’arabisation portée par l’islam. Pour réussir cette grande opération de décervelage mondialisée, la presse panarabique, les médias publics complices, l’école des banlieues, et les mollahs des mosquées, s’emploient à cultiver le mépris et la haine des Berbères réfractaires à l’idéologie dominante en les diabolisant en antimusulmans. Comme des mécréants qu’il est utile de combattre, comme des sauvages bons à « civiliser ».
Mais l’histoire de leur berbérité n’est pas soluble dans l’islamisme tout comme l’histoire des Hébreux n’est pas soluble dans celle des pharaons d’Égypte.
Par un impact d’images, émotionnellement fortes, dans l’inconscient collectif, on a voulu créer un grand leurre affectif, qui tend à amalgamer les Berbères à la cause palestinienne. Les images satellites tronquées des TV étrangères, diffusées durant plus de deux ans ont, selon toute vraisemblance, une part de responsabilité dans ce détournement des esprits.
En détournant habilement l’attention du peuple berbère vers
la Palestine, on occulte du regard les massacres de familles entières en Kabylie, ou des jeunes filles assassinées pour avoir refusé de porter le voile. La banalisation du régime de la terreur fait le lit de la dictature répressive algérienne. Un bilan tragique qui atteint aujourd’hui en Kabylie deux cent mille morts civils innocents ! CHALOM – AZUL. Saluts de paix entre les peuples.
1 le Figaro du 27 juin 2003 2 http://www.kabyle.com (v. aussi : http://www.mondeberbere.com) 3 Guy Konopnicki,
La Faute des Juifs, Balland, 2002
Deuxième partie. Juifs et Berbères Entre mythe et réalité
Au Ve siècle (en 439), lorsque les Vandales écrasèrent les Romains, sonna l’heure de la délivrance pour la grande tribu judéo-berbère appelée Djéroua. La vie devenait trop dure aux confins du Sahara et, comme plus rien ne s’opposait à leur migration vers le Nord, ils prirent possession du massif des Aurès vers 483 et s’installèrent en bonne intelligence avec les clans voisins. On sait aujourd’hui que certains nomades transhumants qui pratiquaient l’élevage étaient païens, d’autres étaient chrétiens.
L’historien berbère du XIVe siècle, Ibn Khaldoun(4) écrivait qu’une partie des Berbères transmettait à leurs enfants le judaïsme, religion qu’ils avaient reçue de leurs voisins israélites venus de Syrie.
Campées sur le dos de leurs chameaux, orgueilleuses et belliqueuses, les tribus judéo-berbères se nommaient les Nefouça en Ifrikia (l’actuelle Tunisie) et les Fendéoula, les Médiouna, les Béloula, les Riata, les Fazas au Maghreb el-Aqsa (l’actuel Maroc).
Dans les Aurès, la tribu des Djéroua, se distinguera particulièrement avec, à sa tête, la Dina Kahéna, reine du mont Aurès. Djéroua dérivant de l’hébreu guer, semble désigner « l’étranger qui adhère au judaïsme ». Après avoir battu les Vandales, les Byzantins occupèrent Carthage et s’allièrent avec les Berbères. Ils se retrouvèrent face à des tribus redoutables, prêtes à tout pour défendre leur liberté. En particulier ces étranges Djéroua, mélange d’Hébreux et de païens, devenus maîtres de l’Aurès oriental. Le monde qui allait accueillir les grandes invasions arabes, était déjà modelé par un siècle de vandalisme. Tout laisse à penser que l’intérieur de l’Afrique du Nord avait été judaïsé avant l’arrivée des troupes musulmanes. Ces dernières mettront plus d’un demi siècle à s’imposer au Maghreb (Maroc).
La kahéna, reine des Berbères(5)
Une femme dans la société berbère qui commande aux hommes a un caractère sacré. De son vrai nom Dahia, fille de Tabet, fils de Nicin (ou Tifan selon les auteurs) la reine Dina Kahéna – dont le nom signifie en punique « la prophétesse », et en hébreu : « fille de Cohen » – était juive. Une reine des Monts Aurès, réputée très combative. Pourquoi ? Au VIe siècle, l’islam imposera par le Coran, la soumission de l’homme à Allah et la domination de toutes les religions qui précédèrent l’islam, impliquant ainsi une conversion par la force de tous les individus. Pour cette reine de la tribu des Djéroua dont la descendance libyenne se libéra de la tyrannie des Pharaons, la soumission au dogme de l’islam devenait insupportable. Elle montrera une détermination farouche à combattre l’envahisseur barbare. Sa résistance obstinée de (696 à 700) à abjurer sa foi pour un islam prosélyte et hégémonique, fera entrer son nom dans la légende de la société berbère et du monde arabo-islamique. Elle se serait battue vaillamment contre Hassan ibn Noomane jusqu’à la mort causant d’énormes pertes dans les rangs de cet ennemi juré. Trahie par son fils adoptif Khaled, amant et ex-prisonnier, elle saura mourir dignement en reine, près du puits de Bir-el-Kahéna là où elle finira tristement décapitée en l’an 701. Sa tête sera expédiée avec les premières invasions barbares, en guise de trophée, au khalife Abd-el-Malek. De nombreux membres de la tribu des Djéroua se convertiront à l’islam. Le fils aîné de Kahéna deviendra gouverneur du mont Aurès. Plus tard, au XIe siècle, Ibn Khaldoun raconte que 100.000 Hillaliens et Soleimiens arrivés d’Égypte ravagèrent tout le pays. Il se produisit alors un phénomène incroyable, celui de voir plusieurs millions d’habitants, tous berbères, anciens païens, phéniciens ou juifs, se convertir à la religion de leurs envahisseurs, au point d’en oublier leurs origines et de se déclarer arabes. Ils oublièrent l’hébreu ancien, le punique ou le berbère pour ne plus parler que la langue de l’islam. Quelques communautés juives éparses, perdurèrent sur le plan économique et religieux avant de prendre un nouvel essor avec l’arrivée des Juifs d’Espagne à partir du XIVe siècle.
Messages kabyles(6)
Shamy Chemini(7), âme sans fortune dans « Messages Kabyles », 40 ans après, revient en Kabylie. Il découvre avec rage que les pouvoirs successifs se sont accaparés des richesses de l’actuelle Kabylie. Lorsque la terre a tremblé le 10 novembre 2000 à Wartirane, les dons (12 millions de dinars) en provenance d’une association Solidarité Kabylie sont restés bloqués à la préfecture laissant les Arouchs (peuple Berbère de Kabylie), déjà sans eau potable, dans le plus grand dénuement.
Les jeunes (retraités à 30 ans) sans travail et sans avenir sont poussés à l’exil ou seront emprisonnés ou assassinés. Les plus jeunes sont maintenus dans l’ignorance.
Les chanteurs berbères comme Oul Lahlou et Matloub Louness (lâchement assassiné) pleurent leur souffrance. Alyat Rahame, cet universitaire de 35 ans, qui ne supportait plus de voir son pays sous la domination d’un pouvoir qui tue les enfants et leur mémoire, a été assassiné le 17 juin 2001 par les gendarmes qui ont lancé une bombe lacrymogène sur lui, en pleine tête. A Mascara, fin juin 2001, les légats du pouvoir tirent à balles réelles sur la foule en marche pacifique. Au nom de la religion, les intégristes sont instrumentalisés contre les démocrates berbères.
Dans cette normalisation, tout ce qui n’est pas arabe ou musulman, devient illégitime. Orchestration à court terme, de l’effacement de l’autre, dans l’indifférence du monde entier.
Le 8 août 2001, la marche sur Alger dévoile une jeunesse en colère qui se soulève contre la machine impitoyable du pouvoir. Une folie meurtrière s’étend alors dans tout le pays. Les Arouchs se révoltent mais le Maghreb se suicide. La jeunesse kabyle a vaincu la peur. Ils ne peuvent plus la tuer vu qu’elle est déjà morte…
La Kabylie se mobilise encore le 14 juin 2001 pour défendre ses droits identitaires : dire non à la dictature, réclamer une Algérie démocratique une et indivisible, imposer le tamazight comme lien social et langue officiellement admise. On recensera des dizaines de morts et des centaines de blessés. La chasse aux Kabyles à l’arme blanche par les sbires du pouvoir en civil mérite, à elle seule, une page d’histoire. Une autre marche le 8 août 2001 sera interdite par le pouvoir du président Bouteflika qui bloquera toutes les routes conduisant à Alger, opposant à nouveau la jeunesse aux forces de l’ordre.
Tahar Djaout, journaliste et poète né en 1953 à Oulkoun, sera victime d’un attentat le 26 mai 1993. En effigie sur sa tombe, on peut lire l’épitaphe suivante :
« Si tu parles tu meurs, si tu te tais tu meurs, alors parles et meurs »…
De déchirures en déchirures, le père de Shamy est jeté en prison par les autorités françaises. En pleine guerre d’Algérie, à l’âge de treize ans, Shamy sera torturé.
La Kabylie, dit-il, devient aussi un pays écartelé par des luttes fratricides, une terre arrosée de sang d’innocents, un espace de convoitise, des hommes d’Orient et d’Occident.
5 Didier Nebo,
La Kahéna, éd. A.Carrière ;
La Kahéna reine des Berbères, Moh Cherbi et Thierry Deslot, éd.Paris-Méditerranée 6 Dossier de presse de Shamy Chemini. Orgueilleuse Kabylie. Film vidéo, l’Harmattan 7 Enfant prodige, artiste musicien et poète. Auteur de 4 tomes sur l’Orgueilleuse Kabylie, l’Harmattan.
Troisième partie. Ces juifs oubliés, vivant parmi les Berbères(8)
Dans le livre de Daniel J. Schroeter, « Juif parmi les Berbères »(9), une distinction dichotomique semble séparer les Amazighs judaïsés ou Juifs berbérophones des Juifs arabophones.
Dans la vallée de l’Atlas, dans le Sous et aux confins sahariens, vivaient depuis des siècles, sinon un ou deux millénaires, de nombreuses communautés juives, regroupées dans des quartiers réservés : les mellahs. Les juifs berbérophones des pays chleuh et tamazight possédaient, par tradition, une culture littéraire orale et religieuse. Ces communautés, au sein de tribus amazighes, empruntaient aux groupes voisins des formes d’organisation sociale ou même, quelquefois, leurs rites. Aujourd’hui, on n’en trouve guère de trace car depuis l’indépendance du Maroc, le 2 mars 1956, ils ont émigré en bloc en Israël.
Haïm Zafrani(10) établira que la plupart des communautés juives, vivant dans la montagne marocaine et le sud du pays, étaient bilingues (berbero-arabophones), d’autres essentiellement berbérophones comme à Tifnut. De cette dernière catégorie, quelques individus isolés ont immigrés en Israël, principalement à Ashkelon. Le tamazight était un parler juif de communication dans le milieu familial, social et économique mais constituait, à côté de l’hébreu, la langue traditionnelle de culture et d’enseignement, pour expliquer et traduire les textes sacrés, comme le judéo arabe ou le vieux castillan dans les communautés de langue arabe ou d’origine hispanique. Les bénédictions de la Thora étaient dites uniquement en berbère jusque dans la liturgie pascale. La langue de la très précieuse Haggada de Pessah s’apparente à la tamazight. La version berbère de cette Haggada constitue aujourd’hui une véritable preuve historique de l’existence d’une diaspora longtemps ignorée et irrévocablement disparue. C’est le premier texte berbère, issu de la communauté juive de Tinghir, de la vallée du Todgha (Maroc-1959), à être publié.(11)
A la recherche des juifs berbères
Plusieurs sources historiques de la période précoloniale nous sont parvenues, sur les juifs parlant arabe et vivant en zone urbaine au Maroc. Les Juifs berbères, quant à eux, vivaient en milieu rural, ce qui explique la nature fragmentaire et très éparse des sources historiques de ce groupe ethnique. En 1840, au Maroc, James Richardson, militant anti-esclavagiste britannique, fut le premier à désigner les juifs de l’Atlas comme des juifs shelouh, parlant Berbère et dont les coutumes étaient semblables à celles de leurs voisins non juifs et musulmans.
La référence aux Juifs berbères semble encore très inhabituelle car au XIXe siècle, les communautés juives du Maroc se revendiquent essentiellement comme descendantes de l’ancien Israël. Les seules distinctions relevées, émanent du clivage entre juifs originaires d’Espagne puis expulsés (megorashim) et juifs autochtones résidents au Maroc depuis toujours (toshavim).
A l’ère du Colonialisme triomphant, les recherches des voyageurs ethnographes sur les communautés lointaines d’orient sont devenues un moyen de gouvernement et une interrogation curieuse. Pourquoi, cet intérêt soudain des européens, pour ces juifs des régions « éloignées » du monde ?
La découverte de coreligionnaires primitifs évoquerait-elle le souvenir de tribus perdues ou plus simplement d’anciennes coutumes disparues, recherchées, afin de restaurer la souveraineté juive ?
Nahum Slouschz, orientaliste hébraïsant du début du XX e siècle, en mission au Maroc, apporte une contribution engagée qui aurait influencé la vision française du judaïsme marocain. Slouschz était sioniste et voulut réveiller la conscience nationale juive de son judaïsme marocain. Ses recherches, au Maroc sous protectorat français, pour découvrir le passé Juif berbère, pré arabe, étaient pertinentes. Pour lui, les Juifs de descendance berbère, avec leurs manières primitives d’influences locales, sont les vrais « Juifs nord-africains ». Ce sera en partie, à cause de ses idées sionistes, que les autorités françaises, décideront de le relever de ses fonctions.
Des mythes sur les Juifs berbères ont, selon toute vraisemblance, existé depuis le moyen âge. Vu l’importance historique du phénomène, la thèse de N. Slouschz laissera sceptique H.Z. Hirschberg. Ce dernier ajoutera qu’il y a peu de preuves pour affirmer que les juifs d’Afrique du Nord descendent des tribus berbères converties au judaïsme.
La judaïsation des berbères semble ici assez controversée. Pourtant, une étude plus récente de Paul Wexler, basée sur des données linguistiques et ethnographiques, démontre que la plupart des juifs marocains, pris dans leur ensemble (megorashim et toshavim), descendraient de Berbères convertis au judaïsme. Pour légitimer le pouvoir mérinide, plus précisément rapportée par les écrits d’Ibn Khaldoun, la première source historique fiable, évoquant l’existence de tribus Juives berbères, daterait du XIV e siècle.
Jacques Meunié témoignera à son tour de l’authenticité de traditions et légendes locales sur les juifs berbères au sud marocain préislamique ; puis précisera que pour justifier le régime colonial au Maroc, il fallait exhumer les séquelles du passé : berbère judéo-chrétien. C’était un moyen parmi d’autres. L’historicité des légendes sur l’expansion du christianisme et du judaïsme, parmi les Berbères à l’époque préislamique, a pu servir les besoins de l’administration coloniale dans sa volonté de séparer les Berbères et les Arabes.
Les relations Judéo berbères
Le Maroc de l’époque coloniale, sous protectorat français d’occupation, dans un dualisme simpliste dévoilera les divisions entre Berbères et Arabes : bilad al-makhzen / bilad al-siba, lesquelles influenceront les débats sur le judaïsme marocain. En principe, bien que le Juif soit protégé, Charles de Foucauld, a établi que tout Juif de bilad al-siba appartenait corps et bien à son seigneur, son sid et décrit dans ses notes de voyage le Juif comme un être servile, exploité sans merci par son maître. Comme les régions berbères appartenaient au bilad al-siba, les Juifs se devaient d’obtenir la protection de chefs tribaux et indépendants du Sultan. Slouschz rejoint encore Charles de Foucauld, pour attester de l’esclavage des Juifs à Tililit, pays du servage. [En échange de la perte de tous ses droits, le Juif jouit de la sécurité de son maître. Le Juif devra acheter sa future femme au sid, qui devient l’unique maître de son destin. Tout ce que les Juifs possèdent appartient au Qaïd. Le Qaïd a droit de vie et de mort sur ses sujets].
A la première partie du XIX e siècle, pour Davidson, les Juifs, du Sous, du Rif, de Tanger- avilis et soumis à la loi musulmane (charia)- étaient la propriété des Maures. Par contre, les 3.000 à 4.000 Juifs de l’Atlas placés sous la protection vigilante des Berbères auront une plus grande liberté et jouiront d’une quasi indépendance, vis-à-vis de l’autorité impériale. Les Juifs totalement intégrés à la société berbère, vivaient en paix et en symbiose avec les musulmans peu islamisés. Les sources de l’époque précoloniale sur les relations entre Musulmans et Juifs à Tililit, nous renvoient une image très contrastée de ces relations, que l’on se garderait bien de schématiser dans un clivage entre zones citadines et rurales, à une dichotomie arabo-berbère réductrice.
La question judéo berbère face au colonialisme.
La politique coloniale française, à l’égard des Berbères, a été développée sous Lyautey jusqu’en 1930 avec la publication du Dahir berbère visant à séparer les Berbères des Arabes. Au Maroc, dans l’Atlas, la résistance berbère – envers toute forme d’autorité centrale des Arabes – a préservé leurs institutions démocratiques, leur individualisme et leur liberté. Les ethnographes coloniaux relèvent que les Berbères musulmans n’auraient adopté que très superficiellement l’islam, conservant intacts leurs coutumes, leurs croyances, leurs superstitions préislamiques comme le culte des saints. Pour Slouschz, ces stéréotypes sur les Berbères se sont reproduits, d’une certaine façon, par quintessence à l’égard des juifs vivants parmi les Berbères. A l’exemple de la population berbère musulmane, très superficiellement islamisée, ces juifs berbères « primitifs » ne connaissaient rien ou presque de leur judaïsme. Pierre Flamand explique comment la « mentalité » des juifs autochtones originaires des régions berbères a été façonnée par le milieu berbère. Les Juifs appelés sleuh, dont les patronymes sont : Abergel, Assouline, Oiknine, Harrus, etc. sont très typiques dans leurs traits physiques et caractériels, dans leur mode de comportement. Le qualificatif « fils de sleuh », était par exemple utilisé par les juifs marocains pour désigner leurs coreligionnaires moins évolués. Plus tard, les immigrants juifs du Maroc ont exporté, vers Israël, cette image péjorative des Juifs ruraux, et le terme sleuh est devenu « simplet » en argot israélien.
Pendant la période du Protectorat d’occupation française, des tensions très vives entre les différentes couches de la population accompagnèrent de nombreux Juifs ruraux, originaires de l’Atlas dans le mellah de Marrakech. Les Juifs espagnols qui étaient mieux éduqués furent vite submergés par les Juifs berbères. Un observateur vivant à Marrakech en 1940 pensait, à tort, que ces Juifs ruraux ne pratiquaient qu’un judaïsme très primitif, approprié à leur mentalité. Puis par la culture de la Thora, par l’aumône au rabbin de Palestine, par les liens qui les rattachaient à la famille d’Israël, ces juifs berbères primitifs, une fois urbanisés, devinrent plus juifs que les citadins natifs. L’origine rustique et montagnarde du Juif marrakchi – a préservé son air farouche et têtu – mais l’a rattaché avec encore plus de force aux coutumes de ses ancêtres. On peut dire que le fossé se creusait plus que jamais, entre ceux qui restaient dans les campagnes parmi les Berbères et ceux vivants en ville. Entre le juif espagnol ou oriental, lettré, érudit, urbain et le Juif berbère, fruste et primitif, attaché à son sol, l’opposition est notable.
La coordination des Berbères de France(12)
Seule une volonté d’amitié entre les peuples peut barrer la route à la haine, à la terreur qui envahit ce monde pour apporter sa pierre à la construction de la paix entre les hommes de bonne volonté.
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime son semblable a accompli [la] loi. Romains 13:8
Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
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HISTOIRE DE LA KAHINA ( DIHYA )
Histoire du Maghreb : Dihya, la Kahina
Histoire du Maghreb TV
Kahena (signifiant « prêtresse » en hébreu et en arabe1), de son vrai nom Dihya ou Damya , est une reine guerrière berbère zénète des Aurès qui combattit les Omeyyades lors de l'expansion islamique en Afrique du Nord au viie siècle.
Plusieurs femmes ont écrit des romans sur la Kahena au xxe siècle et plusieurs penseurs disent que c'est une des premières féministes bien avant le Moyen Âge et une des premières reines guerrières de l'Histoire. De nombreux auteurs la considèrent comme juive3,4, d'autres comme chrétienne.
Pour les Berbères des Aurès, elle s'appelait Dyhia Tadmut qui veut dire la belle gazelle en tamazight. D'autres Chaouis disent Damya, qui vient du verbe edmy en tamazight, qui signifie devineresse6. Les écrivains en langue arabe au Moyen Âge rapportent le nom de Dihya et le surnom de Kahina à l'exemple d'Ibn Khaldoun. La majorité des écrits sur cette femme reprennent son surnom Kahena dans les récits historiques ou littéraires.
Le surnom Kahena a plusieurs significations en arabe, en hébreu ou en grec. En arabe, Kahena désigne une prêtresse, mais également une devineresse7. En grec, Kahena est tiré de Karina qui signifie être pur. En hébreu le mot est proche de Cohen qui a un sens de prêtre. (En français, les noms Catherine et Corinne ont le sens d'"être pur"). La présence de deux des six anciennes nécropoles réservées aux Cohanim en Afrique du Nord qui se trouvaient à Biskra et à Bône pourraient être reliées à la famille de la Kahena.
Dans la région des Aurès, les chaouis l'appellent Yemma El Kahina (maman Kahina) et plusieurs chansons lui sont dédiées dans le terroir chaouis, soit en arabe soit en chaouis. Le groupe le plus connu de la ville de Batna et en Algérie portait le nom de El Kahina dans les années 1980
La conquête de l'Afrique du Nord est décidée par le chef de la dynastie omeyade, Muawiya Ier. À l'aube de l'invasion, l'unité politique et administrative de la Berbérie orientale et centrale (les Aurès, actuellement à l'est de l'Algérie et à l'ouest de la Tunisie) était en grande partie réalisée par Kusayla8, chef de la résistance à la Conquête musulmane du Maghreb (règne de 660 à 686). Kusayla, converti à l'islam, entre en conflit avec Oqba Ibn Nafi Al Fihri, général de l'armée des Omeyades.
À son décès en 686, Dihya prend la tête de la résistance. Elle était issue de la tribu des Djerawa, une tribu berbère zénète de Numidie, selon les chroniqueurs en langue arabe au Moyen Âge. Fille unique, elle aurait été élue ou nommée par sa tribu après la mort de son père9. Dihya procéda à l'appel de nombreuses tribus de l'Afrique du Nord orientale et du Sud pour déclencher la guerre contre les Omeyades.
Elle défait par deux fois la grande armée des Omeyyades grâce à l'apport des cavaliers des Banou Ifren.
Elle règne sur tout l'Ifriqiya pendant cinq ans. Vaincue en 693 par Hassan Ibn en N'uman dans la dernière bataille contre les Omeyyades, elle se réfugie dans l'Amphithéâtre d'El Jem. Elle est enfin faite prisonnière, puis décapitée au lieudit Bir El Kahina. Les chefs de l'armée Omeyades envoient sa tête en trophée au calife Abd al-Malik en Syrie10.
Dihya sera la seule femme de l'histoire à combattre l'empire omeyyade11. Les Omeyyades demandent aux Zénètes de leur fournir douze mille combattants pour la conquête de l'Andalousie comme condition à la cessation de la guerre12.
L'intervention de Musa ben Nusayr règle le problème avec les Berbères en nommant Tariq ibn Ziyad à la tête de l'armée zénète et des autres Berbères13. Son fils devient gouverneur de la région des Aurès et par la suite sa tribu aura un pouvoir lors[Quoi ?] des Zirides dans les Aurès14.
Une statue à l'effigie de la Kahena a été élevée à Khenchela en Algérie en 2003.
HISTOIRE DE LA KAHINA ( DIHYA )
Histoire du Maghreb : Dihya, la Kahina
Histoire du Maghreb TV
Kahena (signifiant « prêtresse » en hébreu et en arabe1), de son vrai nom Dihya ou Damya , est une reine guerrière berbère zénète des Aurès qui combattit les Omeyyades lors de l'expansion islamique en Afrique du Nord au viie siècle.
Plusieurs femmes ont écrit des romans sur la Kahena au xxe siècle et plusieurs penseurs disent que c'est une des premières féministes bien avant le Moyen Âge et une des premières reines guerrières de l'Histoire. De nombreux auteurs la considèrent comme juive3,4, d'autres comme chrétienne.
Pour les Berbères des Aurès, elle s'appelait Dyhia Tadmut qui veut dire la belle gazelle en tamazight. D'autres Chaouis disent Damya, qui vient du verbe edmy en tamazight, qui signifie devineresse6. Les écrivains en langue arabe au Moyen Âge rapportent le nom de Dihya et le surnom de Kahina à l'exemple d'Ibn Khaldoun. La majorité des écrits sur cette femme reprennent son surnom Kahena dans les récits historiques ou littéraires.
Le surnom Kahena a plusieurs significations en arabe, en hébreu ou en grec. En arabe, Kahena désigne une prêtresse, mais également une devineresse7. En grec, Kahena est tiré de Karina qui signifie être pur. En hébreu le mot est proche de Cohen qui a un sens de prêtre. (En français, les noms Catherine et Corinne ont le sens d'"être pur"). La présence de deux des six anciennes nécropoles réservées aux Cohanim en Afrique du Nord qui se trouvaient à Biskra et à Bône pourraient être reliées à la famille de la Kahena.
Dans la région des Aurès, les chaouis l'appellent Yemma El Kahina (maman Kahina) et plusieurs chansons lui sont dédiées dans le terroir chaouis, soit en arabe soit en chaouis. Le groupe le plus connu de la ville de Batna et en Algérie portait le nom de El Kahina dans les années 1980
La conquête de l'Afrique du Nord est décidée par le chef de la dynastie omeyade, Muawiya Ier. À l'aube de l'invasion, l'unité politique et administrative de la Berbérie orientale et centrale (les Aurès, actuellement à l'est de l'Algérie et à l'ouest de la Tunisie) était en grande partie réalisée par Kusayla8, chef de la résistance à la Conquête musulmane du Maghreb (règne de 660 à 686). Kusayla, converti à l'islam, entre en conflit avec Oqba Ibn Nafi Al Fihri, général de l'armée des Omeyades.
À son décès en 686, Dihya prend la tête de la résistance. Elle était issue de la tribu des Djerawa, une tribu berbère zénète de Numidie, selon les chroniqueurs en langue arabe au Moyen Âge. Fille unique, elle aurait été élue ou nommée par sa tribu après la mort de son père9. Dihya procéda à l'appel de nombreuses tribus de l'Afrique du Nord orientale et du Sud pour déclencher la guerre contre les Omeyades.
Elle défait par deux fois la grande armée des Omeyyades grâce à l'apport des cavaliers des Banou Ifren.
Elle règne sur tout l'Ifriqiya pendant cinq ans. Vaincue en 693 par Hassan Ibn en N'uman dans la dernière bataille contre les Omeyyades, elle se réfugie dans l'Amphithéâtre d'El Jem. Elle est enfin faite prisonnière, puis décapitée au lieudit Bir El Kahina. Les chefs de l'armée Omeyades envoient sa tête en trophée au calife Abd al-Malik en Syrie10.
Dihya sera la seule femme de l'histoire à combattre l'empire omeyyade11. Les Omeyyades demandent aux Zénètes de leur fournir douze mille combattants pour la conquête de l'Andalousie comme condition à la cessation de la guerre12.
L'intervention de Musa ben Nusayr règle le problème avec les Berbères en nommant Tariq ibn Ziyad à la tête de l'armée zénète et des autres Berbères13. Son fils devient gouverneur de la région des Aurès et par la suite sa tribu aura un pouvoir lors[Quoi ?] des Zirides dans les Aurès14.
Une statue à l'effigie de la Kahena a été élevée à Khenchela en Algérie en 2003.
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime son semblable a accompli [la] loi. Romains 13:8
Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Découverte des Berbères dans la Bible
La Bible a parlé des Berbères.
La Bible a parlé des Berbères.
Les Rois Berbères Numides
Le plus connu des royaumes berbères fut la Numidie avec ses rois tels que Gaïa, Syphax et Massinissa.
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Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Les tatouages Berbères
Les Symboles Berbères
les symboles Berbères et leur signification symbolique
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les symboles Berbères et leur signification symbolique
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Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Origine des noms de famille kabyles
Émission Karambolage rediffusé sur ARTE en avril 2014
Kamal Mezoued est kabyle. Il est né en Algérie, mais il vit en France depuis quinze ans. Il est éducateur spécialisé. Il nous raconte l'histoire mouvementée de son nom de famille.
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Émission Karambolage rediffusé sur ARTE en avril 2014
Kamal Mezoued est kabyle. Il est né en Algérie, mais il vit en France depuis quinze ans. Il est éducateur spécialisé. Il nous raconte l'histoire mouvementée de son nom de famille.
Amazigh - Nos ancêtres
Le réveil amazigh. Nos ancêtres
Le réveil amazigh. Nos ancêtres
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Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Arius, le Berbère
Arius
Arius est un prêtre, théologien et ascète chrétien libyen d'origine berbère inspirateur de la doctrine qui porte son nom : l'arianisme. La querelle qu'il a ouverte a profondément divisé la Chrétienté durant tout le IVᵉ siècle. Wikipédia
Naissance : 256 ap. J.-C., Libye
Décès : 336 ap. J.-C., Constantinople, Turquie
L’arianisme est un courant de pensée des débuts du christianisme, dû à Arius (256-336), théologien alexandrin d'origine berbère de langue grecque de l'École théologique d'Antioche, dont le point central concerne la nature de la trinité chrétienne et des positions respectives des concepts de « Dieu le père » et « son fils Jésus ». La pensée de l'arianisme affirme que si Dieu est divin, son Fils, lui, est d'abord humain, mais un humain disposant d'une part de divinité.
Arius. - Fameux hérésiarque, né vers l'an 270 dans la Cyrénaïque, ou, selon d'autres, à Alexandrie, fut ordonné prêtre dans un âge avancé, s'établit à Alexandrie et commença en 312 à y enseigner une doctrine nouvelle, qui se répandit rapidement: il combattait la Trinité, niait la consubstantialité du Verbe avec le Père et par suite sa divinité même, et soutenait que Jésus est une simple créature tirée du néant, très inférieure au Père. Il fut successivement combattu par S. Alexandre et par S. Athanase, évêques d'Alexandrie, condamné par plusieurs conciles notamment par le concile de Nicée en 325, anathématisé et exilé pendant plusieurs années. Mais soutenu par Eusèbe, évêque de Nicomédie, homme de son parti, il se fit absoudre par quelques conciliabules et parvint même à égarer Constantin qui le rappela d'exil. Son retour à Alexandrie ayant excité des troubles, il se retira à Constantinople; il allait, malgré l'opposition de S. Alexandre, devenu patriarche de cette ville, entrer en triomphe dans l'église, lorsqu'il mourut subitement d'une violente colique, l'an 336. Ses partisans prétendirent qu'il avait été empoisonné; ses adversaires virent dans cette mort extraordinaire une punition de Dieu.
Après la mort d'Arius, son "hérésie" (Arianisme) fit de grands progrès elle fut ouvertement protégée par l'empereur Constance et par plusieurs de ses successeurs ; elle fut même approuvée par plusieurs conciliabules, et pendant longtemps elle compta de très nombreux partisans. L'empereur Théodose parvint à l'étouffer presque entièrement dans ses États, mais elle fut embrassée par la plupart des peuples germaniques qui avaient envahi l'empire romain, à l'exception des Francs, et elle subsista pendant plusieurs siècles chez les Goths, les Vandales, les Bourguignons et les Lombards. Elle s'éteignit vers l'an 660, par l'abjuration d'Aribert l, dernier roi arien des Lombards; cependant on en retrouve des traces chez les Vaudois et les Albigeois. Depuis la Réforme, l'Arianisme s'est reproduit, mais sous de nouvelles formes, principalement sous elle du Socinianisme, et a eu pour principaux défeseurs : Servet, Socin, Capxton, Cellarius, etc. L'Histoire de l'Arianisme a été écrite par le P. Maimbouro.
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime son semblable a accompli [la] loi. Romains 13:8
Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Touareg, Kabyles, Rifains... Qui sont les Berbères ?
Par Djamel Alilat
Par Djamel Alilat
Au Niger, les Touareg, grande composante de la mosaïque berbère, célèbrent la fête de la République avec force chameaux.
Ils se nomment eux-mêmes Amazighs, "hommes libres". Du Maroc à l'Egypte, les Berbères, les plus anciens habitants de l'Afrique du Nord, cherchent à défendre leur particularité au sein du monde arabe. Un peuple pluriel divisé entre neuf pays, auquel nous consacrons un grand reportage à découvrir dans le magazine GEO de janvier.
Où sont-ils ?
https://e.issuu.com/embed.html?identifier=q4ipwqf0mque&embedType=script&u=geofrance&d=berberes2&p=1
Les Berbères, un peuple pluriel divisé entre neuf pays Hugues Piolet
Combien sont-ils ?
Maroc
Population : 12 à 15 millions (40 à 45 %).
Statut : le tamazight (la langue berbère) est reconnu comme langue officielle au même titre que l'arabe en 2011.
Algérie
Population : 10 à 12 millions (au moins 25 %).
Statut : le tamazight est reconnu comme langue officielle au même titre que l'arabe en 2016.
Tunisie
Population : environ 100 000 (autour de 1 %).
Statut : très assimilés à la suite d'un long processus d'arabisation.
Libye
Population : 600 000 (10 %).
Statut : demande de reconnaissance de la langue déposée auprès du nouveau régime.
Egypte
Population : moins de 30 000 (0,03 %).
Statut : population très isolée et non prise en compte.
Mauritanie
Population : aucune estimation.
Statut : langue en voix d'extinction.
Mali
Population : de 800 000 à 1,8 million (de 5 à 10 %).
Statut : proclamation unilatérale de l'indépendance de l'Azawad dans le nord du pays, en 2012.
Niger
Population : environ 800 000 (4 %).
Statut : création en 2015 d'un parti politique amazigh qui revendique la reconnaissance de la langue et son enseignement.
Burkina Faso
Population : 50 000 (0,2 %).
Statut : néant.
>>> PHOTOS - La voix berbère
Quelle langue parlent-ils ?
alphabet-berbere
Azu, izem, itri… "Vent", "lion", "étoile". Les archéologues ont daté les inscriptions les plus anciennes du tifinagh, l’alphabet berbère, du VIe siècle avant J.-C. Seuls les Touareg utilisent encore ce système d’écriture vieux de 2 500 ans. Les autres populations berbères transcrivent leur langue en caractères latins ou arabes. Communément appelé tamazight, le berbère appartient à la famille linguistique dite chamito-sémitique, avec l’ancien égyptien et l’hébreu. Après les conquêtes arabes qui ont débuté au VIIe siècle de notre ère, l’Afrique du Nord s’est lentement arabisée mais le berbère s’est maintenu dans des zones refuges, dans les campagnes, les montagnes et les oasis. Une quarantaine de dialectes dérivent du berbère ancien (le chleuh et le rifain au Maroc, le kabyle et le chaoui en Algérie…). Seuls le Maroc et l’Algérie ont reconnu au berbère le statut de langue officielle au même titre que l’arabe.
Que signifie leur drapeau ?
drapeau-berbere
Il fut conçu par l’Académie berbère dans les années 1970 puis avalisé par le Congrès mondial amazigh en 1998. La lettre Z de l’alphabet tifinagh symbolise le sang commun des Amazigh. Bleu pour la mer, vert pour les montagnes, jaune pour le Sahara : les couleurs du drapeau renvoient à géographie de Tamazgha, nom donné par les Berbères à l’Afrique du Nord, le grand territoire où ils vivent.
diaporama-berberes
Quelques dates
10 000 av. J.-C. Epanouissement de la civilisation ibéromaurusienne au Maghreb.
7 000 à 5 000 av. J.-C. Apparition de la civilisation capsienne entre l'Algérie et la Tunisie.
6 500 à 2 000 av. J.-C. Développement de la civilisation néolithique au Sahara et au Maghreb.
1 000 av. J.-C. Arrivée des Phéniciens sur les côtes de l'Afrique du Nord.
200 av. J.-C. Massinissa unifie les royaumes numides et fait de Cirta (Constantine) sa capitale.
112-105 av. J.-C. Guerre du roi numide Jugurtha, petit-fils de Massinissa, contre Rome.
354 Naissance de saint Augustin à Thagaste (actuelle Souk Ahras en Algérie).
429-533 Occupation du Maghreb par les Vandales, peuple germanique.
533-647 L'Afrique du Nord est sous la domination de l'Empire byzantin.
695-702 La reine berbère Kahéna repousse les Arabes en Tripolitaine.
711 Conquêtes arabes du Maghreb et conversion des Berbères à l'islam. Des rébellions berbères éclatent.
711 Des contingents berbères musulmans traversent le détroit de Gibraltar sous la conduite de Tariq ibn Ziyad.
742 Grande révolte berbère, dite révolte kharidjite, contre l'autorité du calife arabe.
776-909 Les dynasties rostémides, originaires de Perse, règnent sur une vaste partie du Maghreb central.
1050 Début des invasions arabes hilaliennes, confédération de tribus venues d'Arabie.
1055-1146 L'empire des Almoravides, une dynastie berbère musulmane, domine le Maghreb central et l'Andalousie.
1152-1269 La dynastie berbère des Almohades règne sur le Maghreb central et l'Andalousie.
Sources : Inalco ; Encyclopédie berbère ; "Langue et littérature berbères", par Salem Chaker, article de 2004 ; Les Berbères, Mémoire et Identité, par Gabriel Camps, Actes Sud 2007
https://www.geo.fr/voyage/touareg-kabyles-rifains-qui-sont-les-berberes-183310
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
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Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Rachid Ali-Yahia - En Algérie il y'a pas d'Arabe
Une leçon d'histoire de la part de Maître Rachid Ali-Yahia.
En Algérie il y'a pas d'Arabe, il y'a que des algériens, il y'a que des berbères, les un sont des berbères qui parlent l'arabe algérien, les autres sont des berbère qui parlent le berbère'
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
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Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
Généalogie des Amazigh
Tablette en langue punique ( lettre zed )
Les Amazigh nous dit Ibn khaldoun sont les fils de #canaan, donc cousins des #Phéniciens, fils de #Cham et de Noé....En entendant que les habitants de canaan étaient des géants très puuissants....La race Imazighen ( pl. Amazigh ) signifiant homme libre , baiidân ( blanc) en opposition à Ahbachan , Aberkane, Ahradan ou assoqi, autant de vocables dont le sens est Assoued ( Noir ) , le vulgaire le citoyen de second ordre , l'individu acheté sur le marché.Tablette en langue punique ( lettre zed )
Nous retrouvons ce mot partout en Afrique du Nord , aussi bien chez les personne que dans la toponymie comme #Mazigh, #Mazagan ,#Mazghenna, #Mazagran,... ect.
Nous en retrouvons la trace chez les historiens Grec et Romains déformé, souvent malmené : " Les latins et les grecques ont laissé un fatras de noms informes et souvent fantaisistes ou déformés par des règles gramaticales compliquées grecques ou latins . D'ailleurs, ces deux langues se prêtaient très mal à exprimer les noms sémitiques, emphatiques et gutturaux des Amazigh, ces " nomina ineffabilia " qui écorchaient les oreilles et la bouche du #Pline l'ancien, quant il s'occupait de la géographie africaine...." ... Je ne citerai que #Makès nom de la grande tribu-mère de la Libye antique , #Mazikes, #Massessyliens,#Massyles... Chez les généalogistes et historiens arabes, on ne rencontre plus ces vocables étranges tels que les Gramantes , Blemyes, Absystes, Astermakhides, Psylles, Arzugues, Troglodytes, et que sais-je encore ? je fais grâces de ces noms " Barbares " le moins qu'on puisse dire.
Il faut dire qu'avant les arabes, aucun ouvrage en latin ou en grec n'a pu déterminer, avec détail et d'une manière intelligible, les origines et les ramifications des populations antiques du Maghreb.
On parle bien d'un ouvrage , aujourd'hui perdu, sur les origines des Amazigh écrit par Juba II , intitulé " #Lybica ". Cependant , l'évolution des tribus à travers tout le territoire Maghrebin et au cours des siècle, ainsi que les généalogies et les dénominations des populations d'Afrique du Nord, ont permis aux historiens et géographes arabes, en particulier El Bakri, El Idrissi, Ibn El Athir, Ibn Qotaïba et surtout Ibn khaldoun, de tirer des conclusions qu'il serait pas permis de mettre en doute.
Avec les savant arabes , les confédérations, les tribus et les fractions se précisent et prennent forme. Les deux groupes se dégagent, issu de même ancêtre Mazigh ou Amazigh ce personnage à donné naissance à deux enfants : #Madghis que les arabes surnommé El Abtar ( le cour ) et#Bornos ....Les auteurs divisent les Amazigh d'un groupe en confédérations celles-ci en tribus " Qabaïl " mot arabe contenant une idée d'antériorité et désignant des groupements d'autochtones.
Les Amazigh en ont fait " Taqbilet " pl : "Tiqbilin " et le substantif à servi à faire l'adjectif " Kabaïli " dont les français ont fait " Kabyle " ( ï = ii = y ).
La tribus appelée aussi par les arabes " Orch " ( branche ) était divisée en fraction , ighs ( os) ou âdhem , ou ferqa ou frâ ( section ) ou fekhda ( jambe ) par analogie à la division du corps humain ou l'arbre.
*La tribu avait un chef " Amghar " amoqran, le grand, le vieux, comme cheikh en arabe , c'est-à-dire l'homme mûr, âgé.
** La confédération était commandée par un roi appelé " Aguellid "... Lorsque la tribu était administrée collégialement , comme il arrivait assez fréquemment, et, en cas d'hostilité contre l'ennemi du dehors, elle désignait, par voie d'élection, un chef de guerre, #amghar, investi d'un pouvoir quasi total. A la faveur des événements, cet homme pouvait prendre le titre de roi, #aguellid, surtout lorsqu'il triomphait de l'ennemi et s'imposait par la force de ses armes. On a des exemples nombreux de chefs Amazigh qui s'arrogèrent le titre d'aguellid pour combattre les romains.
*** La fraction se subdivisait en douars ou hameaux appelés en Amazigh : taddart, ighrem, agadir, ou tiguemi, selon les régions.
C'était, en général, une enceinte fortifiée, construite sur le flanc d'une colline toujours difficile à escalader.
L'eghrem dont nous donnerons l'organisation sociale, était la cellule de base qui fut l'origine de la tribu et qui portait le nom du premier chef de toute agglomération-mère. Ses descendants porteront son nom précédé de " Aît , Id , It, ou Ida qui sont les synonymes des mots arabes " Beni, Oulad, et Doui ( fils ).
Si nous prenons, à titre exemple, le nom de la célèbre tribu de Jeraoua de l'Aurès, nous y décelons le radical aquerrou ou aguerrou (tête) et le pluriel est iquerouan dont les arabes ont fait jeraoua, selon une forme de pluriel usuelle comme Maghraba, Touansa, Msaraoua ect ... s'explique la forme arabe de tous les noms des tribus Amazigh telles que * senhadja, * Goudala, *Zouagha , * zouaoua, *Berghouata , *Masmouda, * Zenaga ect... /....à suivre.....
Tablette en langue punique ( lettre zed )
Ethnopolis
Les Berbères sont les enfants de Chanaan, fils de Cham, fils de Noé; leur aïeul se nommait Mazir ; ils étaient parents des #Philistins .
Le roi portait chez eux le nom de #Goliath . Il y eut en Syrie , entre les Philistins et les juifs , des guerres.... Vers ce temps- là, les Berbères passèrent en Afrique ....."
Tablette en langue punique( lettre zed )
http://ethnopolis-net.over-blog.com/2016/02/genealogie-des-amazigh.html
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime son semblable a accompli [la] loi. Romains 13:8
Re: L'histoire Des Kabyles - (Les Berbères)
HISTOIRE DES BERBÈRES - Le documentaire
’origine des berbères (Doc Les rois berbères)
Les rois berbères -The Berber kings
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’origine des berbères (Doc Les rois berbères)
Les rois berbères -The Berber kings
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Psaumes 33:13 Du haut des cieux YHWH regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions.
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