Les premières traductions de la Bible
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Les premières traductions de la Bible
Les premières traductions de la Bible
Au fur et à mesure que l'Évangile se répand, la Bible est traduite et recopiée à la main par les missionnaires chrétiens dans la langue courante de chaque peuple.
Au Proche-Orient
Le syriaque est un dialecte de l'araméen oriental parlé à l'origine dans la région d'Edesse, en Mésopotamie, dès le Ier siècle de notre ère. Devenu la langue des chrétiens de Syrie et de Mésopotamie, il se répartit en syriaque oriental, parlé par les nestoriens des Empires sassanide, omeyyade et abbasside, et en syriaque occidental, langue des jacobites - disciples de Jacob Baradée, évêque d'Antioche au VIe siècle - de l'Empire byzantin.
La vieille version syriaque de l'Ancien Testament paraît avoir été traduite directement de l'hébreu au Ier siècle de notre ère. Mais ce texte ancien a été révisé au cours des âges à l'aide de la Septante pour aboutir à ce que l'on appelle la Peshitta ou Peshitto, la version « simple » ou « courante ».
L'Arménie fut la première nation à adopter le christianisme comme religion officielle, en 301, lorsque le roi Tiridate III fut baptisé par Grégoire l'Illuminateur. Au début du Ve siècle, le prêtre et moine Mesrob Machtotz mit au point l'écriture arménienne, permettant ainsi à l'arménien de devenir une langue écrite, le grabar. La Bible fut le premier texte à être traduit en grabar par Mesrob Machtotz lui-même.
La Géorgie fut christianisée après l'Arménie. La traduction de la Bible y fut entreprise à partir du Ve siècle et ne fut achevée que tardivement. Ainsi les livres des Maccabées ne furent traduits qu'au XVIIIe siècle, à partir de la version slave. La version géorgienne est traduite non à partir de la Septante, mais de la version arménienne. Dès le VIIe siècle, elle a fait l'objet de révisions successives effectuées d'après le texte grec de la Septante.
La plus ancienne version arabe de la Bible, traduite à partir de la Septante, était celle de Hunayn ibn Ishaq (808-873). Rien, malheureusement, n'en a été conservé. La plus ancienne version connue est celle de Saadiah Gaon (882-942), un juif égyptien, chef (gaon) de l'école rabbinique de Babylone. Elle a été effectuée à partir de l'hébreu.
En Occident
C'est essentiellement en latin que l'Occident a d'abord traduit la Bible. La traduction « vieille version latine » (vetus latina ou itala) en usage à partir du IIIe siècle finira par être supplantée par la nouvelle traduction latine de Jérôme (347-419 ou 420), la Vulgate (ce nom apparaît seulement au XIIIe siècle), qui nourrira la foi chrétienne de l'Occident pendant plus de mille ans.
Au Moyen Age, la plupart des chrétiens étaient analphabètes. Les sculptures, les peintures et les vitraux des cathédrales - ces « Bibles de pierre » - ont cherché à rendre le message biblique accessible à tous.
En Europe orientale
Vers 350, Ulfila, évêque des Goths de Mésie (région recouvrant la Yougoslavie et la Bulgarie d'aujourd'hui) et disciple d'Arius (qui niait la divinité de Jésus), traduit la Bible à partir du grec. Cette version gothique demeure le plus ancien témoignage littéraire daté dans une langue germanique.
Cyrille (mort en 869), évangélisateur de la Moravie, et son frère Méthode (mort en 885) créent l'écriture cyrillique pour fixer leur traduction de la Bible en vieux slavon effectuée à partir de la Septante. Le slavon, langue littéraire issue d'un dialecte oriental, devient la langue liturgique de la chrétienté slave. Au temps de la Russie kiévienne, elle est encore très proche de la langue parlée. La version en vieux slavon reste la Bible officielle des Eglises orthodoxes de langue slave.
En Afrique
En Égypte, dans les années 150-200, la langue copte, dérivée de l'ancien égyptien, a conservé malgré l'expansion du grec une position suffisamment importante parmi les populations paysannes pour mériter des traductions de la Bible. On peut distinguer au moins six versions dialectales : les versions sahidique (de Haute-Égypte), achmimîque (dans la région de Thèbes), subachmimique (Lycopolîs en Moyenne-Egypte), oxyrhynchique (Moyenne-Égypte), fayoumique et bohairique (dans le Delta). Effectuées à partir de la Septante, pour l'Ancien Testament, elles se réfèrent cependant à des états différents du texte grec.
Le christianisme fut introduit en Éthiopie vers 320-330, à la suite de la conversion du roi d'Axoum. A la fin du Ve siècle, des moines syriens introduisirent le monachisme et la doctrine monophysite (dans la personne du Christ, le divin et l'humain ne formeraient qu'une seule nature). La traduction de la Bible fut entreprise à partir des années 500 et fut réalisée en langue guèze ou éthiopien classique, langue parlée dans le royaume d'Axoum. Au cours des siècles suivants cette version a subi des révisions à partir de l'hébreu ou de l'arabe. Assez vite le guèze est devenu langue morte réservée à l'usage liturgique. Ce n'est qu'à une date récente que la Bible fut traduite en amharique. La version guèze est restée la version officielle de l'Église d'Ethiopie. L'Ancien Testament de cette traduction est également utilisée par les Juifs d'Ethiopie, les Falashas.
En Extrême-Orient
Pour la première fois, l'Évangile est proclamé en Chine par des missionnaires membres de l'Église nestorienne (fondée par Nestorius, patriarche de Constantinople de 428 à 431). La Bible a été partiellement traduite en chinois dès le VIIe siècle. On a ainsi retrouvé un hymne à la Trinité dans une des célèbres grottes de Dunhuang (Monastère bouddhique, N.O. de la province du Gansu).
Au fur et à mesure que l'Évangile se répand, la Bible est traduite et recopiée à la main par les missionnaires chrétiens dans la langue courante de chaque peuple.
Au Proche-Orient
Le syriaque est un dialecte de l'araméen oriental parlé à l'origine dans la région d'Edesse, en Mésopotamie, dès le Ier siècle de notre ère. Devenu la langue des chrétiens de Syrie et de Mésopotamie, il se répartit en syriaque oriental, parlé par les nestoriens des Empires sassanide, omeyyade et abbasside, et en syriaque occidental, langue des jacobites - disciples de Jacob Baradée, évêque d'Antioche au VIe siècle - de l'Empire byzantin.
La vieille version syriaque de l'Ancien Testament paraît avoir été traduite directement de l'hébreu au Ier siècle de notre ère. Mais ce texte ancien a été révisé au cours des âges à l'aide de la Septante pour aboutir à ce que l'on appelle la Peshitta ou Peshitto, la version « simple » ou « courante ».
L'Arménie fut la première nation à adopter le christianisme comme religion officielle, en 301, lorsque le roi Tiridate III fut baptisé par Grégoire l'Illuminateur. Au début du Ve siècle, le prêtre et moine Mesrob Machtotz mit au point l'écriture arménienne, permettant ainsi à l'arménien de devenir une langue écrite, le grabar. La Bible fut le premier texte à être traduit en grabar par Mesrob Machtotz lui-même.
La Géorgie fut christianisée après l'Arménie. La traduction de la Bible y fut entreprise à partir du Ve siècle et ne fut achevée que tardivement. Ainsi les livres des Maccabées ne furent traduits qu'au XVIIIe siècle, à partir de la version slave. La version géorgienne est traduite non à partir de la Septante, mais de la version arménienne. Dès le VIIe siècle, elle a fait l'objet de révisions successives effectuées d'après le texte grec de la Septante.
La plus ancienne version arabe de la Bible, traduite à partir de la Septante, était celle de Hunayn ibn Ishaq (808-873). Rien, malheureusement, n'en a été conservé. La plus ancienne version connue est celle de Saadiah Gaon (882-942), un juif égyptien, chef (gaon) de l'école rabbinique de Babylone. Elle a été effectuée à partir de l'hébreu.
En Occident
C'est essentiellement en latin que l'Occident a d'abord traduit la Bible. La traduction « vieille version latine » (vetus latina ou itala) en usage à partir du IIIe siècle finira par être supplantée par la nouvelle traduction latine de Jérôme (347-419 ou 420), la Vulgate (ce nom apparaît seulement au XIIIe siècle), qui nourrira la foi chrétienne de l'Occident pendant plus de mille ans.
Au Moyen Age, la plupart des chrétiens étaient analphabètes. Les sculptures, les peintures et les vitraux des cathédrales - ces « Bibles de pierre » - ont cherché à rendre le message biblique accessible à tous.
En Europe orientale
Vers 350, Ulfila, évêque des Goths de Mésie (région recouvrant la Yougoslavie et la Bulgarie d'aujourd'hui) et disciple d'Arius (qui niait la divinité de Jésus), traduit la Bible à partir du grec. Cette version gothique demeure le plus ancien témoignage littéraire daté dans une langue germanique.
Cyrille (mort en 869), évangélisateur de la Moravie, et son frère Méthode (mort en 885) créent l'écriture cyrillique pour fixer leur traduction de la Bible en vieux slavon effectuée à partir de la Septante. Le slavon, langue littéraire issue d'un dialecte oriental, devient la langue liturgique de la chrétienté slave. Au temps de la Russie kiévienne, elle est encore très proche de la langue parlée. La version en vieux slavon reste la Bible officielle des Eglises orthodoxes de langue slave.
En Afrique
En Égypte, dans les années 150-200, la langue copte, dérivée de l'ancien égyptien, a conservé malgré l'expansion du grec une position suffisamment importante parmi les populations paysannes pour mériter des traductions de la Bible. On peut distinguer au moins six versions dialectales : les versions sahidique (de Haute-Égypte), achmimîque (dans la région de Thèbes), subachmimique (Lycopolîs en Moyenne-Egypte), oxyrhynchique (Moyenne-Égypte), fayoumique et bohairique (dans le Delta). Effectuées à partir de la Septante, pour l'Ancien Testament, elles se réfèrent cependant à des états différents du texte grec.
Le christianisme fut introduit en Éthiopie vers 320-330, à la suite de la conversion du roi d'Axoum. A la fin du Ve siècle, des moines syriens introduisirent le monachisme et la doctrine monophysite (dans la personne du Christ, le divin et l'humain ne formeraient qu'une seule nature). La traduction de la Bible fut entreprise à partir des années 500 et fut réalisée en langue guèze ou éthiopien classique, langue parlée dans le royaume d'Axoum. Au cours des siècles suivants cette version a subi des révisions à partir de l'hébreu ou de l'arabe. Assez vite le guèze est devenu langue morte réservée à l'usage liturgique. Ce n'est qu'à une date récente que la Bible fut traduite en amharique. La version guèze est restée la version officielle de l'Église d'Ethiopie. L'Ancien Testament de cette traduction est également utilisée par les Juifs d'Ethiopie, les Falashas.
En Extrême-Orient
Pour la première fois, l'Évangile est proclamé en Chine par des missionnaires membres de l'Église nestorienne (fondée par Nestorius, patriarche de Constantinople de 428 à 431). La Bible a été partiellement traduite en chinois dès le VIIe siècle. On a ainsi retrouvé un hymne à la Trinité dans une des célèbres grottes de Dunhuang (Monastère bouddhique, N.O. de la province du Gansu).
Re: Les premières traductions de la Bible
La Bible en français du XVe au milieu du XXe siècle.
Il faut bien le reconnaître, la Bible n’a jamais eu, dans le paysage littéraire français, une place aussi centrale qu’elle en a eu en Allemagne ou en Angleterre. La Bible de Luther ou la King James Version ont imprimé profondément leur marque dans la culture qui les a portées. Une multitude de citations, d’allusions ou d’imitations stylistiques dans de très nombreuses œuvres littéraires classiques ou contemporaines témoignent d’une profonde influence de ces versions prestigieuses de la Bible. Rien de tel pour ce qui concerne la culture française. Blaise Pascal ou Paul Claudel lisent encore la version latine de la Bible pour que se produise en eux cette émotion profonde qui féconde le génie littéraire. La Vulgate affleure dans leur œuvre, plus que toute traduction française.
Frontispice de la Bible d'Olivétan, 4 juin 1535, fonds Société biblique Française.
Les traductions françaises étaient-elles donc de si mauvaise qualité ?
Il faut remonter au XVIe siècle et à l’apparition de la Réforme pour comprendre que l’absence de référence majeure en matière de traduction biblique en français tient plus à la sociologie religieuse qu’à l’absence de talent des traducteurs.
En Allemagne et en Angleterre, le mouvement réformiste conduisit à rejeter l’Église catholique mais à conserver la Bible. En France, souvent avec l’appui du pouvoir politique, l’Église catholique conserva son influence prédominante, mais c’est la Bible qui fut bâillonnée.
À partir de là, la France s’est singularisée dans son rapport à la Bible. Alors que dans la culture allemande, russe ou anglo-américaine on apprend à lire avec la Bible, et même très souvent dans la Bible, l’enfant français apprend à lire une langue rationalisée, épurée de toute référence biblique.
La Bible n’a pas modelé la langue et la culture françaises, autant qu’elle a pu le faire dans d’autres cultures européennes. Pour qu’une telle fécondation puisse avoir lieu, il faut la rencontre d’une traduction de qualité avec une majorité de la population ou en tout cas avec une large part de la classe intellectuelle.
L’histoire de la traduction de la Bible en langue française montre bien que la Bible est restée confinée soit parmi les seuls esprits éclairés du catholicisme français, soit parmi les protestants, trop minoritaires pour influencer profondément la culture de leur pays.
I. La Bible au XIVe et XVe siècle. Premières traductions en langue courante
Le premier livre imprimé selon la technique des caractères mobiles mise au point par Gutenberg en 1443 est une Bible latine qui a été tirée à 150 exemplaires. À cette époque dans le monde occidental, lorsqu’on parle d’Écriture sainte, on comprend ce corpus de textes traduits en langue latine et attribués à saint Jérôme. Le contenu du livre est encore sujet à variations : quelques flottements subsistent sur la liste des livres de la version grecque qui ont été exclus du canon hébreu au Ier siècle de notre ère par le judaïsme rabbinique.
Entre 1453 et 1500, on recense 80 éditions de la Bible latine dans toute l’Europe, mais encore aucune édition dans une langue populaire. C’est que l’Église officielle n’encourage pas l’usage des traductions : elle y voit un risque d’hérésie, si chacun se met à interpréter la Bible à sa manière en se coupant de la tradition développée depuis les Pères de l’Église. Pourtant, certains mouvements qui aspiraient à une prédication plus fidèle aux Écritures ont tenté au cours des siècles précédents de diffuser de façon plus ou moins clandestine des traductions de la Bible. On peut citer pour mémoire les disciples de Pierre Valdo qui traduisent des passages des évangiles en langue romane (XIIe siècle), et Wyclif et les lollards qui le font en langue anglaise (XIVe siècle).
En français, la première traduction date seulement du début du XIVe siècle. Il s’agit d’une Bible historiale, c'est à dire que l’épopée biblique est réécrite sous la forme d’une histoire sainte qui reprend de façon linéaire les principaux événements décrits dans la Bible, depuis la création du monde, jusqu’à la venue du Christ et la naissance de l’Église. L’auteur est un certain Guyard des Moulins. À la même époque, se diffusent des petits livrets manuscrits ou xylographiés contenant un résumé de quelques passages bibliques, assortis de conseils de piété, d’où le nom de « Bibles moralisées » que l’on a donné à ces livrets.
Il faut attendre 1498 pour que soit imprimée la première Bible en français, mais c’est encore une Bible historiale, révisée par Jean de Rély, confesseur du roi Charles VIII, et abondamment illustrée de gravures sur bois.
II. Le XVIe siècle. Une renaissance pour la Bible
Le XVIe siècle marque un tournant décisif dans l’histoire de la Bible. Depuis la chute de Constantinople en 1453, sont arrivés en Europe des manuscrits, jusque-là inconnus, des chefs-d’œuvre de l’Antiquité grecque. Les universitaires se penchent sur ces textes anciens et acquièrent de nouvelles méthodes de traduction et d’édition, mettant à profit la technologie de l’imprimerie.
Hans Holbein, Érasme écrivant, 1523, Huile sur panneau,
42 × 32 cm, Musée du Louvre, Paris.
Certains de ces spécialistes en « humanités » (étude des textes anciens) vont tout naturellement étendre à la Bible leur savoir-faire et renouveler l’approche du texte en s’affranchissant du monopole exercé par les théologiens patentés de l’Église catholique. Jacques Lefèvre d’Étaples (1460-1536) est un prêtre catholique, bibliothécaire de l’abbaye de Saint Germain-des-Près, à Paris. Il publie en 1512 un commentaire des épîtres de Paul dans lequel il place côte à côte la version latine de Saint Jérôme et sa propre traduction latine réalisée à partir des manuscrits grecs
Érasme (1469-1536)
« Je souhaite que toutes les femmes lisent l’Évangile, qu’elles lisent les épîtres de Paul et que ces textes soient traduits dans toutes les langues des hommes »
Érasme réside à Rotterdam, mais voyage fréquemment à travers toute l’Europe. Il publie à Bâle, en 1516, un Nouveau Testament avec le texte grec et une nouvelle traduction latine de son cru. Cette édition servira de base à toutes les traductions en langue vernaculaire en Europe. Un dominicain italien, Sanctes Panignus (1470-1536) se livre à un travail analogue sur l’Ancien Testament en retraduisant en latin le texte hébreu. Son ouvrage paraît en 1528 à Lyon.
Tous font preuve d’une réelle préoccupation pour rendre la Bible compréhensible pour des personnes non spécialistes. « Je souhaite que toutes les femmes lisent l’Évangile, qu’elles lisent les épîtres de Paul et que ces textes soient traduits dans toutes les langues des hommes » dit Érasme dans l’introduction de son Nouveau Testament.
Bible de Lefèvre d'Étaples, 1534 Anvers, Fonds Société biblique française.
Lefèvre d’Etaples (1530)
C’est pour aider les prédicateurs dans son diocèse de Meaux que Lefèvre d’Étaples traduit le Nouveau Testament en français, à partir de la Vulgate mais avec quelques modifications effectuées d’après le grec. Il y ajoute des canevas de prédication pour les 52 dimanches de l’année et publie l’ouvrage en 1525. Son audace théologique n’est pas du goût de la Faculté de Paris qui exerce alors le pouvoir intellectuel.
En 1526, le Parlement de Paris interdit toute traduction de l’Écriture en français. Néanmoins Lefèvre d’Étaples se remet à la traduction de l’Ancien Testament et en 1530, il publie à Anvers la première traduction complète de la Bible en français. Ce sont les docteurs de l’Université de Louvain qui donnent leur approbation et cette Bible est publiée avec le privilège de l’empereur Charles Quint.
Olivétan (1535)
Frontispice de la Bible d'Olivétan, 4 juin 1535, fonds SBF
Après le développement de la Réforme en France et en Suisse, les protestants souhaitent disposer eux-aussi d’une traduction de la Bible, mais traduite à partir des langues originales. En 1532, un synode des Églises vaudoises vote l’adhésion à la réforme et prend la décision de traduire la Bible. Ce projet sera mené en commun avec les protestants de Suisse. Il reste à trouver un traducteur compétent et les regards se tournent vers Robert Olivétan, un cousin éloigné du réformateur Jean Calvin. Par humilité, Olivétan commence par refuser plusieurs fois ce travail avant de l’accepter en 1533. S’il parvient à achever le travail, seul, dans un délai de deux années, c’est qu’il avait déjà traduit un certain nombre de passages de l’Ancien Testament et qu’il lui a suffi de compléter les textes manquants. Pour la traduction des livres canoniques de l’Ancien Testament, Olivétan utilise une abondante documentation et produit une œuvre originale. Sa traduction des livres apocryphes et du Nouveau Testament reste assez dépendante de celle de Lefèvre d’Étaples. On notera que, comme dans la traduction réalisée par Martin Luther (1534), la version d’Olivétan comporte les livres tardifs du judaïsme présents dans la version grecque de l’Ancien Testament, mais qui n’appartiennent pas au canon de la Bible hébraïque. Ces livres sont placés à la fin de l’Ancien Testament canonique et précédés d’un avertissement pour prévenir le lecteur de leur statut particulier.
Olivétan a réalisé un travail de précurseur en se confrontant, pour la première fois en français, aux textes originaux mais sa traduction comporte encore certaines maladresses. Elle sera de plus desservie par le choix du caractère gothique dans la première édition de 1535 qui, sans accentuation et avec une ponctuation sommaire, rend la lecture malaisée.
Bible de Genève (1546) – Bible de Louvain (1550)
Bible de Genève, 1540, l'épéede la page de titre, fonds SBF
La version d’Olivétan a rapidement été révisée à Genève, et notamment par Jean Calvin qui ajoute à la Bible publiée en 1546 une préface maintes fois reprise dans la suite de l’édition biblique. La version de Lefèvre d’Étaples, quant à elle, a été révisée par les docteurs de l’Université de Louvain qui en publient une nouvelle version dès 1550, puis à nouveau en 1578 dans une révision qui connaît un succès durable.
Castellion (1555)
Sébastien Castellion (1515-1563), un érudit qui évolue dans l’entourage de Rabelais, Ronsard et du Bellay souhaite mettre la Bible à la portée des gens sans culture classique. Ce fin connaisseur des langues bibliques, réalise une traduction de la Bible très compréhensible en faisant preuve d’une certaine audace. Il invente des néologismes pour rendre certaines expressions idiomatiques des langues originales dans le français de son temps. Cette traduction que l’on peut qualifier de populaire, et qui se démarque donc des précédentes, est publiée pour la première fois en 1555.
Benoist (1566)
Il faut attendre le règne de Charles IX, en 1566 pour que paraisse la première Bible en français imprimée à Paris. Elle est l’œuvre de René Benoist (1521-1608), le régent de la Faculté de Paris qui répond à une sollicitation des imprimeurs désireux de ne pas rester à l’écart du marché de la Bible qui prend une certaine ampleur. Benoist ne réalise pas une traduction entièrement nouvelle, mais se contente de corriger ici et là quelques expressions dans la Bible de Genève qui sonnent un peu trop calvinistes. Conscient de la témérité de sa démarche, Benoist estime que l’hérésie protestante ne peut être combattue que par le contrepoison d’une véritable « Bible catholique ».
Il faut bien le reconnaître, la Bible n’a jamais eu, dans le paysage littéraire français, une place aussi centrale qu’elle en a eu en Allemagne ou en Angleterre. La Bible de Luther ou la King James Version ont imprimé profondément leur marque dans la culture qui les a portées. Une multitude de citations, d’allusions ou d’imitations stylistiques dans de très nombreuses œuvres littéraires classiques ou contemporaines témoignent d’une profonde influence de ces versions prestigieuses de la Bible. Rien de tel pour ce qui concerne la culture française. Blaise Pascal ou Paul Claudel lisent encore la version latine de la Bible pour que se produise en eux cette émotion profonde qui féconde le génie littéraire. La Vulgate affleure dans leur œuvre, plus que toute traduction française.
Frontispice de la Bible d'Olivétan, 4 juin 1535, fonds Société biblique Française.
Les traductions françaises étaient-elles donc de si mauvaise qualité ?
Il faut remonter au XVIe siècle et à l’apparition de la Réforme pour comprendre que l’absence de référence majeure en matière de traduction biblique en français tient plus à la sociologie religieuse qu’à l’absence de talent des traducteurs.
En Allemagne et en Angleterre, le mouvement réformiste conduisit à rejeter l’Église catholique mais à conserver la Bible. En France, souvent avec l’appui du pouvoir politique, l’Église catholique conserva son influence prédominante, mais c’est la Bible qui fut bâillonnée.
À partir de là, la France s’est singularisée dans son rapport à la Bible. Alors que dans la culture allemande, russe ou anglo-américaine on apprend à lire avec la Bible, et même très souvent dans la Bible, l’enfant français apprend à lire une langue rationalisée, épurée de toute référence biblique.
La Bible n’a pas modelé la langue et la culture françaises, autant qu’elle a pu le faire dans d’autres cultures européennes. Pour qu’une telle fécondation puisse avoir lieu, il faut la rencontre d’une traduction de qualité avec une majorité de la population ou en tout cas avec une large part de la classe intellectuelle.
L’histoire de la traduction de la Bible en langue française montre bien que la Bible est restée confinée soit parmi les seuls esprits éclairés du catholicisme français, soit parmi les protestants, trop minoritaires pour influencer profondément la culture de leur pays.
I. La Bible au XIVe et XVe siècle. Premières traductions en langue courante
Le premier livre imprimé selon la technique des caractères mobiles mise au point par Gutenberg en 1443 est une Bible latine qui a été tirée à 150 exemplaires. À cette époque dans le monde occidental, lorsqu’on parle d’Écriture sainte, on comprend ce corpus de textes traduits en langue latine et attribués à saint Jérôme. Le contenu du livre est encore sujet à variations : quelques flottements subsistent sur la liste des livres de la version grecque qui ont été exclus du canon hébreu au Ier siècle de notre ère par le judaïsme rabbinique.
Entre 1453 et 1500, on recense 80 éditions de la Bible latine dans toute l’Europe, mais encore aucune édition dans une langue populaire. C’est que l’Église officielle n’encourage pas l’usage des traductions : elle y voit un risque d’hérésie, si chacun se met à interpréter la Bible à sa manière en se coupant de la tradition développée depuis les Pères de l’Église. Pourtant, certains mouvements qui aspiraient à une prédication plus fidèle aux Écritures ont tenté au cours des siècles précédents de diffuser de façon plus ou moins clandestine des traductions de la Bible. On peut citer pour mémoire les disciples de Pierre Valdo qui traduisent des passages des évangiles en langue romane (XIIe siècle), et Wyclif et les lollards qui le font en langue anglaise (XIVe siècle).
En français, la première traduction date seulement du début du XIVe siècle. Il s’agit d’une Bible historiale, c'est à dire que l’épopée biblique est réécrite sous la forme d’une histoire sainte qui reprend de façon linéaire les principaux événements décrits dans la Bible, depuis la création du monde, jusqu’à la venue du Christ et la naissance de l’Église. L’auteur est un certain Guyard des Moulins. À la même époque, se diffusent des petits livrets manuscrits ou xylographiés contenant un résumé de quelques passages bibliques, assortis de conseils de piété, d’où le nom de « Bibles moralisées » que l’on a donné à ces livrets.
Il faut attendre 1498 pour que soit imprimée la première Bible en français, mais c’est encore une Bible historiale, révisée par Jean de Rély, confesseur du roi Charles VIII, et abondamment illustrée de gravures sur bois.
II. Le XVIe siècle. Une renaissance pour la Bible
Le XVIe siècle marque un tournant décisif dans l’histoire de la Bible. Depuis la chute de Constantinople en 1453, sont arrivés en Europe des manuscrits, jusque-là inconnus, des chefs-d’œuvre de l’Antiquité grecque. Les universitaires se penchent sur ces textes anciens et acquièrent de nouvelles méthodes de traduction et d’édition, mettant à profit la technologie de l’imprimerie.
Hans Holbein, Érasme écrivant, 1523, Huile sur panneau,
42 × 32 cm, Musée du Louvre, Paris.
Certains de ces spécialistes en « humanités » (étude des textes anciens) vont tout naturellement étendre à la Bible leur savoir-faire et renouveler l’approche du texte en s’affranchissant du monopole exercé par les théologiens patentés de l’Église catholique. Jacques Lefèvre d’Étaples (1460-1536) est un prêtre catholique, bibliothécaire de l’abbaye de Saint Germain-des-Près, à Paris. Il publie en 1512 un commentaire des épîtres de Paul dans lequel il place côte à côte la version latine de Saint Jérôme et sa propre traduction latine réalisée à partir des manuscrits grecs
Érasme (1469-1536)
« Je souhaite que toutes les femmes lisent l’Évangile, qu’elles lisent les épîtres de Paul et que ces textes soient traduits dans toutes les langues des hommes »
Érasme réside à Rotterdam, mais voyage fréquemment à travers toute l’Europe. Il publie à Bâle, en 1516, un Nouveau Testament avec le texte grec et une nouvelle traduction latine de son cru. Cette édition servira de base à toutes les traductions en langue vernaculaire en Europe. Un dominicain italien, Sanctes Panignus (1470-1536) se livre à un travail analogue sur l’Ancien Testament en retraduisant en latin le texte hébreu. Son ouvrage paraît en 1528 à Lyon.
Tous font preuve d’une réelle préoccupation pour rendre la Bible compréhensible pour des personnes non spécialistes. « Je souhaite que toutes les femmes lisent l’Évangile, qu’elles lisent les épîtres de Paul et que ces textes soient traduits dans toutes les langues des hommes » dit Érasme dans l’introduction de son Nouveau Testament.
Bible de Lefèvre d'Étaples, 1534 Anvers, Fonds Société biblique française.
Lefèvre d’Etaples (1530)
C’est pour aider les prédicateurs dans son diocèse de Meaux que Lefèvre d’Étaples traduit le Nouveau Testament en français, à partir de la Vulgate mais avec quelques modifications effectuées d’après le grec. Il y ajoute des canevas de prédication pour les 52 dimanches de l’année et publie l’ouvrage en 1525. Son audace théologique n’est pas du goût de la Faculté de Paris qui exerce alors le pouvoir intellectuel.
En 1526, le Parlement de Paris interdit toute traduction de l’Écriture en français. Néanmoins Lefèvre d’Étaples se remet à la traduction de l’Ancien Testament et en 1530, il publie à Anvers la première traduction complète de la Bible en français. Ce sont les docteurs de l’Université de Louvain qui donnent leur approbation et cette Bible est publiée avec le privilège de l’empereur Charles Quint.
Olivétan (1535)
Frontispice de la Bible d'Olivétan, 4 juin 1535, fonds SBF
Après le développement de la Réforme en France et en Suisse, les protestants souhaitent disposer eux-aussi d’une traduction de la Bible, mais traduite à partir des langues originales. En 1532, un synode des Églises vaudoises vote l’adhésion à la réforme et prend la décision de traduire la Bible. Ce projet sera mené en commun avec les protestants de Suisse. Il reste à trouver un traducteur compétent et les regards se tournent vers Robert Olivétan, un cousin éloigné du réformateur Jean Calvin. Par humilité, Olivétan commence par refuser plusieurs fois ce travail avant de l’accepter en 1533. S’il parvient à achever le travail, seul, dans un délai de deux années, c’est qu’il avait déjà traduit un certain nombre de passages de l’Ancien Testament et qu’il lui a suffi de compléter les textes manquants. Pour la traduction des livres canoniques de l’Ancien Testament, Olivétan utilise une abondante documentation et produit une œuvre originale. Sa traduction des livres apocryphes et du Nouveau Testament reste assez dépendante de celle de Lefèvre d’Étaples. On notera que, comme dans la traduction réalisée par Martin Luther (1534), la version d’Olivétan comporte les livres tardifs du judaïsme présents dans la version grecque de l’Ancien Testament, mais qui n’appartiennent pas au canon de la Bible hébraïque. Ces livres sont placés à la fin de l’Ancien Testament canonique et précédés d’un avertissement pour prévenir le lecteur de leur statut particulier.
Olivétan a réalisé un travail de précurseur en se confrontant, pour la première fois en français, aux textes originaux mais sa traduction comporte encore certaines maladresses. Elle sera de plus desservie par le choix du caractère gothique dans la première édition de 1535 qui, sans accentuation et avec une ponctuation sommaire, rend la lecture malaisée.
Bible de Genève (1546) – Bible de Louvain (1550)
Bible de Genève, 1540, l'épéede la page de titre, fonds SBF
La version d’Olivétan a rapidement été révisée à Genève, et notamment par Jean Calvin qui ajoute à la Bible publiée en 1546 une préface maintes fois reprise dans la suite de l’édition biblique. La version de Lefèvre d’Étaples, quant à elle, a été révisée par les docteurs de l’Université de Louvain qui en publient une nouvelle version dès 1550, puis à nouveau en 1578 dans une révision qui connaît un succès durable.
Castellion (1555)
Sébastien Castellion (1515-1563), un érudit qui évolue dans l’entourage de Rabelais, Ronsard et du Bellay souhaite mettre la Bible à la portée des gens sans culture classique. Ce fin connaisseur des langues bibliques, réalise une traduction de la Bible très compréhensible en faisant preuve d’une certaine audace. Il invente des néologismes pour rendre certaines expressions idiomatiques des langues originales dans le français de son temps. Cette traduction que l’on peut qualifier de populaire, et qui se démarque donc des précédentes, est publiée pour la première fois en 1555.
Benoist (1566)
Il faut attendre le règne de Charles IX, en 1566 pour que paraisse la première Bible en français imprimée à Paris. Elle est l’œuvre de René Benoist (1521-1608), le régent de la Faculté de Paris qui répond à une sollicitation des imprimeurs désireux de ne pas rester à l’écart du marché de la Bible qui prend une certaine ampleur. Benoist ne réalise pas une traduction entièrement nouvelle, mais se contente de corriger ici et là quelques expressions dans la Bible de Genève qui sonnent un peu trop calvinistes. Conscient de la témérité de sa démarche, Benoist estime que l’hérésie protestante ne peut être combattue que par le contrepoison d’une véritable « Bible catholique ».
Re: Les premières traductions de la Bible
III. La Bible au XVIIe siècle. Place à la belle langue
Jusqu’au début du règne de Louis XIV (1661), la traduction de la Bible en français n’a pas connu de grande nouveauté. Des catholiques comme François Véron ou Michel de Marolles proposent des traductions du Nouveau Testament réalisée à partir du texte grec d’Érasme, car tous deux insistent sur la nécessité de lire la Bible en langue « vulgaire » et non pas dans les langues savantes. Leur démarche novatrice suscite de fortes réactions de la part de l’autorité ecclésiastique, ce qui limite la portée de leurs travaux.
Les protestants, quant à eux, continuent à utiliser la Bible de Genève dans sa version de 1588.
Nouveau Testament de Denis Amelotte (1666-1670)
En 1655, une assemblée générale du clergé exprime le désir d’une nouvelle traduction de l’Écriture sainte capable de répondre aux besoins de l’Église catholique. C’est à Denis Amelotte (1609-1678), un oratorien féru de grec et de latin, qu’est confiée cette tâche. Amelotte travaille avec la version latine comme texte de base, mais il la corrige ici ou là lorsque les différences avec le grec sont flagrantes. Le t. I (évangiles et Actes) est publié en 1666, le t. II (épîtres de Paul) en 1667 et le t. III en 1670. Il semble qu’Amelotte ait eu connaissance du manuscrit du Nouveau Testament de Port Royal publié en 1667 car, bien qu’il ait combattu la doctrine des jansénistes dans plusieurs de ses écrits, son travail est largement inspiré de cette traduction. Le Nouveau Testament d’Amelotte a connu une très grande diffusion, car les catholiques le considèrent comme leur traduction officielle et Louis XIV en fait distribuer 150000 exemplaires aux protestants qui rejoignent l’Église catholique après la révocation de l’édit de Nantes (1685).
Nouveau Testament de Mons (1667)
Isaac Lemaître de Sacy, 1667, page de titre, Imprimé à Amsterdam par Daniel Elzevier, fonds Société biblique française.
Autour de l’abbaye de Port-Royal se cristallise un profond intérêt pour la Bible de la part de catholiques réformistes, fortement marqués par la pensée d’Augustin. Le rôle primordial de la Bible se manifeste autant dans la spiritualité de ces hommes et de ces femmes que dans leur volonté d’apporter à tous les humains cette Écriture « qui n’a que Jésus-Christ pour objet » (Blaise Pascal). Dans le cercle de Port Royal, on pratique non seulement le latin, mais aussi le grec et les langues orientales. La lecture des Pères de l’Église n’exclut pas celle des commentaires contemporains, y compris les travaux entrepris dans les milieux calvinistes.
En 1653, Antoine le Maître, un des Solitaires de Port Royal, achève de traduire à partir de la Vulgate les quatre évangiles et l’Apocalypse. Un petit cercle d’érudits parmi lesquels Blaise Pascal et le frère d’Antoine le Maître, Isaac Lemaître de Sacy, se met au travail en 1657 pour reprendre cette traduction et la confronter au texte grec et pour la compléter. Après la mort de son frère Antoine en 1658, Sacy coordonne le travail de l’équipe, il rédige et corrige la traduction. Mais en raison des menaces qui pèsent sur Port-Royal, le manuscrit reste au placard. Prenant conscience que des copies commencent à circuler sans contrôle, Sacy décide de publier l’ouvrage. La chancellerie royale refuse d’accorder le privilège permettant l’édition, il faut donc se tourner une fois de plus vers l’étranger pour que le texte soit publié. L’ouvrage paraît en 1667, sous le titre Nouveau Testament de nostre Seigneur Jesus Christ, Traduit en François Selon l’édition Vulgate, sans nom d’auteur, et avec un éditeur fictif : Gaspard Migeot à Mons.
Ce Nouveau Testament dit « de Mons » connaît un succès exceptionnel pour l’époque : près de cinq mille exemplaires sont vendus en six mois. En 1668, il est encore réimprimé quatre fois. Dans sa préface de la première édition, Sacy argumente ainsi la nécessité pour les chrétiens d’être nourris par les Écritures saintes : « Nous sommes les enfants et les disciples de Jésus-Christ. Si nous aimons donc véritablement ces deux admirables qualités et que nous les regardons comme faisant toute notre dignité et notre gloire, combien ce Livre sacré nous doit-il être précieux, puisqu’il est tout ensemble le recueil des divins enseignements de notre Maître et le Testament qui nous assure l’héritage de Notre Père. »
La Bible de Sacy-Port Royal (1672-1693)
Pour contrer l’autorité du Nouveau Testament de Mons, plusieurs évêques en interdisent la lecture dans leur diocèse, et même le pape Clément IX menace d’excommunication celui qui en ferait usage. Malgré tout, Sacy s’attaque à la traduction de l’Ancien Testament avec le même désir de produire un texte facilitant l’accès aux Écritures sans rien céder à la rigueur de la traduction. Incarcéré en 1666, en raison de ses liens avec le mouvement janséniste et l’abbaye de Port-Royal, il poursuit son travail même pendant les deux ans qu’il passe à la Bastille. Sa Bible est publiée en livres séparés entre 1672 et 1693. Beaucoup apprécient cette exceptionnelle traduction des Écritures qui ne se fige pas dans le littéralisme, mais ne tombe pas pour autant dans le travers d’une littérature précieuse. À cause de cet équilibre intelligent, la Bible de Sacy s’inscrit parmi les chefs-d’œuvre littéraires classiques. Réimprimée à maintes reprises, et pour la première fois à Paris en 1701, elle est encore disponible aujourd’hui dans les éditions d’œuvres classiques du patrimoine littéraire français.
IV. Le XVIIIe siècle. Un travail biblique hors de France
Le siècle des Lumières voit se creuser le fossé entre d’une part ceux qui s’ouvrent à la dimension de la raison et de l’importance de l’individu et d’autre part ceux qui combattent cette nouvelle vision du monde au nom de la persistance des valeurs chrétiennes. L’Église catholique reste très liée au pouvoir royal qui utilise toutes les ressources juridiques et militaires pour faire disparaître l’hérésie protestante. Plusieurs initiatives catholiques cherchent cependant à élargir au peuple la connaissance du Nouveau Testament reconnu comme l’enseignement même du Christ. La Bible de Sacy publiée sous le nom de son auteur ou assortie de commentaires additionnels reste la référence durant tout le siècle.
Les protestants, privés de toute liberté, et notamment celle de publier la Bible, doivent se contenter des Bibles de famille pieusement conservées depuis le XVIe et XVIIe siècle ou d’attendre de l’étranger des bibles qui entrent clandestinement et au compte-gouttes. Pendant cette période, c’est encore la Bible de Genève qui reste la plus utilisée dans le protestantisme français. Les nouvelles traductions réalisées dans les pays où les huguenots ont trouvé refuge n’ont eu qu’une assez faible diffusion en France.
Nouveau Testament en quatre volumes, traduit et annoté par Richard Simon et publié à Trévoux en 1702. Bossuet a déployé
beaucoup d’énergie pour que ce Nouveau Testament ne soit pas diffusé à Paris. Page de titre, fonds SBF.
Le Nouveau Testament de Richard Simon (1702)
L’oratorien Richard Simon (1638-1712) a consacré sa vie à de nombreux travaux d’exégèse et de recherche critique sur le texte de la Bible. Ses études s’appuyaient sur une solide connaissance de manuscrits et de versions du texte biblique. Il pratiquait le grec, l’hébreu, l’araméen, connaissait les méthodes d’exégèse traditionnelle du judaïsme. Un siècle après la renaissance humaniste, Simon n’est plus aussi convaincu que l’étude des langues anciennes suffise à retourner aux sources des Écritures. Pour lui, les massorètes qui affirmaient n’avoir suivi que la tradition de leurs pères ont pu se tromper: « On n’est pas obligé d’ajouter foi au texte hébreu d’aujourd’hui, comme à un premier et véritable original. On le considèrera donc comme un excellent exemplaire. » Simon s’attache à analyser et à comparer toutes les traditions à travers lesquelles le texte biblique nous est parvenu, afin d’en dégager la richesse. Pour cette raison, il n’est pas satisfait par les récentes traductions catholiques, y compris celle de Port-Royal, car il estime qu’elles manquent de base critique. Il entreprend donc une nouvelle traduction du Nouveau Testament, mais sachant que ses travaux font déjà l’objet d’une grande suspicion de la part des autorités catholiques, il fait le choix de conserver la Vulgate latine comme texte de base. Néanmoins, il donne en marge de sa traduction les variantes du texte grec et il s’attache à traduire de l’hébreu toutes les citations de l’Ancien Testament. Simon a ainsi le sentiment de mettre entre les mains de chrétiens une copie des Écritures fidèle aux originaux. Son Nouveau Testament est publié à Trévoux, dans les Dombes, c'est à dire loin de Paris. Bossuet reproche à cette traduction de Richard Simon de ne pas reproduire le vocabulaire consacré par la liturgie de l’Église et il obtient du cardinal de Paris l’interdiction de lire cette traduction sous peine d’excommunication.
La Bible de David Martin (1707)
Obligé de quitter la France après la révocation de l’édit de Nantes, le pasteur David Martin (1639-1721) trouve refuge dans les Provinces-Unies (actuels Pays-Bas). Le synode des Églises wallonnes lui demande de mettre au point une bible francophone. Avec beaucoup de sérieux, Martin serre le texte hébreu et grec au plus près, mais il reste malgré tout assez dépendant de la version de Genève. En note, Martin explique certaines difficultés du texte et donne quelques commentaires dans la ligne doctrinale des Églises calvinistes. Le Nouveau Testament paraît d’abord en 1696, puis la Bible complète en 1707 à Amsterdam. Plus que la nouveauté intrinsèque de ce travail, c’est surtout l’approbation officielle par le synode des Églises wallonnes qui a conféré à la Bible de David Martin un succès durable. En plein XIXe siècle, Victor Hugo avouera préférer la version de David Martin à toute autre.
La Bible de Charles de cène (1741)
Charles de cène (1647-1703) est lui aussi un pasteur réfugié dans les Provinces-Unies. Ce passionné de théologie, estime que les traductions en vigueur « tordent l’Écriture » et « la détournent de son véritable sens ». Comment, dans ces conditions, amener les athées et les libertins à reconnaître et à adorer la majesté de Dieu si on laisse subsister dans la Bible des contradictions qui ébranlent les principes de la logique et de la raison ? Il entreprend donc une nouvelle traduction de la Bible avec l’objectif avoué de mieux communiquer avec son époque. Il s’éloigne radicalement des anciennes traductions tout en essayant de rester fidèle à l’hébreu ou au grec. Dans le célèbre prologue de l’évangile de Jean, un des piliers de la doctrine de la divinité du Christ, de cène traduit : « L’Oracle était dès le commencement, et cet Oracle se rapportait à Dieu. L’Oracle même était Dieu. » Dans sa traduction actualisante, les docteurs de la loi deviennent des « docteurs en droit », les scribes deviennent des « notaires ». Son projet suscite de vives réactions : Charles de cène est démis de ses fonctions pastorales au motif qu’il met en doute par sa traduction certains dogmes chrétiens jugés essentiels. Ce qui met le feu au poudre, c’est le fait que sa Bible signale au lecteur les difficultés textuelles par des passages en italique. De cène signale en note que des textes comme le récit de la femme adultère (Jn 7.53-8.11) ou encore la finale de l’évangile de Marc (16.9-20) ne sont pas attestés dans les manuscrits les plus anciens. Ces indications qui font partie aujourd’hui de toutes les éditions sérieuses de la Bible, créent un véritable scandale à l’époque. On soupçonne de cène de vouloir porter atteinte à l’autorité des Saintes Écritures. Son projet, sans doute trop novateur, est condamné par le synode des Églises wallonnes. Sa Bible est interdite de publication par le pouvoir civil dans deux des Provinces-Unies, et en France, Louis XV refuse aussi de donner son autorisation.
En 1741, soit trente-huit ans après la mort de Charles de cène, son fils parvient a faire publier l’œuvre de son père à Amsterdam, mais cette Bible ne connaît qu’une très faible audience, tant en raison de son contenu jugé trop libéral que de son prix assez élevé. Elle marque en tout cas le premier essai d’une lecture plus rationaliste de la Bible clairement animée par un souci de mieux communiquer dans les catégories intellectuelles d’une époque.
La Bible d’Ostervald (1744)
Version David Martin, assortie des arguments d’Ostervald, 1742, page de titre, fonds SBF
Pasteur de l’Église protestante de Neuchâtel en Suisse, Jean-Frédéric Ostervald s’efforce de rendre le culte plus profitable pour l’ensemble des fidèles. Il commence par rédiger un argument pour introduire chacun des livres bibliques, puis pour chaque chapitre un sommaire qui en présente les thèmes principaux et enfin une conclusion qui rappelle au lecteur l’essentiel des vérités exprimées dans le chapitre.
L’archevêque de Cantorbéry obtient d’Ostervald l’autorisation de traduire en anglais le texte de ses Argumens et Reflexions sur l’Ecriture Sainte. L’Ancien Testament paraît en 1716 et le Nouveau Testament en 1718 alors que le texte français n’a pas encore été publié. Devant la menace de voir utiliser une improbable traduction d’anglais vers français, Ostervald accepte que son texte soit publié en 1720 à Neuchâtel. En 1724, paraît une édition de la version David Martin à peine révisée, assortie des Argumens d’Ostervald.
Même s’il a passé toute sa vie à méditer les Écritures, c’est seulement en 1742 qu’il entreprend une révision complète de la Bible de David Martin. Il travaille rapidement, en deux ans, et sans abandonner pour autant ses activités pastorales. Alors qu’il a quatre-vingt-un ans, il fait paraître à Neuchâtel en 1744 une nouvelle édition revue, corrigée et augmentée. Ostervald précise dans son introduction que sa logique de révision a été « de faire les corrections qui paraissaient nécessaires, de changer des expressions et des manières de parler qui ne sont plus en usage et pourraient causer de l’obscurité ».
Cette édition propose en outre de nombreuses notes pour faciliter la lecture des Écritures à ceux qui sont peu familiers du monde antique ou pour expliquer telle ou telle traduction littérale qui pourrait décontenancer le lecteur.
La Bible Ostervald a connu une audience exceptionnelle dans le monde protestant jusqu’à la fin du XIXe siècle, ce que son auteur était loin d’imaginer. On l’a rééditée plus de quarante fois entre 1744 et 1899. Elle présente l’avantage de s’inscrire totalement dans la tradition réformée en corrigeant de façon assez minime la version David Martin qui elle-même reprenait la Bible de Genève. Mais la prédominance de cette version jusqu’au XIXe siècle révèle plutôt la faiblesse endémique du protestantisme francophone, très affaibli par l’opposition à laquelle il a dû faire face de la révocation de l’édit de Nantes en 1685 jusqu’à l’édit de Tolérance en 1797.
Jusqu’au début du règne de Louis XIV (1661), la traduction de la Bible en français n’a pas connu de grande nouveauté. Des catholiques comme François Véron ou Michel de Marolles proposent des traductions du Nouveau Testament réalisée à partir du texte grec d’Érasme, car tous deux insistent sur la nécessité de lire la Bible en langue « vulgaire » et non pas dans les langues savantes. Leur démarche novatrice suscite de fortes réactions de la part de l’autorité ecclésiastique, ce qui limite la portée de leurs travaux.
Les protestants, quant à eux, continuent à utiliser la Bible de Genève dans sa version de 1588.
Nouveau Testament de Denis Amelotte (1666-1670)
En 1655, une assemblée générale du clergé exprime le désir d’une nouvelle traduction de l’Écriture sainte capable de répondre aux besoins de l’Église catholique. C’est à Denis Amelotte (1609-1678), un oratorien féru de grec et de latin, qu’est confiée cette tâche. Amelotte travaille avec la version latine comme texte de base, mais il la corrige ici ou là lorsque les différences avec le grec sont flagrantes. Le t. I (évangiles et Actes) est publié en 1666, le t. II (épîtres de Paul) en 1667 et le t. III en 1670. Il semble qu’Amelotte ait eu connaissance du manuscrit du Nouveau Testament de Port Royal publié en 1667 car, bien qu’il ait combattu la doctrine des jansénistes dans plusieurs de ses écrits, son travail est largement inspiré de cette traduction. Le Nouveau Testament d’Amelotte a connu une très grande diffusion, car les catholiques le considèrent comme leur traduction officielle et Louis XIV en fait distribuer 150000 exemplaires aux protestants qui rejoignent l’Église catholique après la révocation de l’édit de Nantes (1685).
Nouveau Testament de Mons (1667)
Isaac Lemaître de Sacy, 1667, page de titre, Imprimé à Amsterdam par Daniel Elzevier, fonds Société biblique française.
Autour de l’abbaye de Port-Royal se cristallise un profond intérêt pour la Bible de la part de catholiques réformistes, fortement marqués par la pensée d’Augustin. Le rôle primordial de la Bible se manifeste autant dans la spiritualité de ces hommes et de ces femmes que dans leur volonté d’apporter à tous les humains cette Écriture « qui n’a que Jésus-Christ pour objet » (Blaise Pascal). Dans le cercle de Port Royal, on pratique non seulement le latin, mais aussi le grec et les langues orientales. La lecture des Pères de l’Église n’exclut pas celle des commentaires contemporains, y compris les travaux entrepris dans les milieux calvinistes.
En 1653, Antoine le Maître, un des Solitaires de Port Royal, achève de traduire à partir de la Vulgate les quatre évangiles et l’Apocalypse. Un petit cercle d’érudits parmi lesquels Blaise Pascal et le frère d’Antoine le Maître, Isaac Lemaître de Sacy, se met au travail en 1657 pour reprendre cette traduction et la confronter au texte grec et pour la compléter. Après la mort de son frère Antoine en 1658, Sacy coordonne le travail de l’équipe, il rédige et corrige la traduction. Mais en raison des menaces qui pèsent sur Port-Royal, le manuscrit reste au placard. Prenant conscience que des copies commencent à circuler sans contrôle, Sacy décide de publier l’ouvrage. La chancellerie royale refuse d’accorder le privilège permettant l’édition, il faut donc se tourner une fois de plus vers l’étranger pour que le texte soit publié. L’ouvrage paraît en 1667, sous le titre Nouveau Testament de nostre Seigneur Jesus Christ, Traduit en François Selon l’édition Vulgate, sans nom d’auteur, et avec un éditeur fictif : Gaspard Migeot à Mons.
Ce Nouveau Testament dit « de Mons » connaît un succès exceptionnel pour l’époque : près de cinq mille exemplaires sont vendus en six mois. En 1668, il est encore réimprimé quatre fois. Dans sa préface de la première édition, Sacy argumente ainsi la nécessité pour les chrétiens d’être nourris par les Écritures saintes : « Nous sommes les enfants et les disciples de Jésus-Christ. Si nous aimons donc véritablement ces deux admirables qualités et que nous les regardons comme faisant toute notre dignité et notre gloire, combien ce Livre sacré nous doit-il être précieux, puisqu’il est tout ensemble le recueil des divins enseignements de notre Maître et le Testament qui nous assure l’héritage de Notre Père. »
La Bible de Sacy-Port Royal (1672-1693)
Pour contrer l’autorité du Nouveau Testament de Mons, plusieurs évêques en interdisent la lecture dans leur diocèse, et même le pape Clément IX menace d’excommunication celui qui en ferait usage. Malgré tout, Sacy s’attaque à la traduction de l’Ancien Testament avec le même désir de produire un texte facilitant l’accès aux Écritures sans rien céder à la rigueur de la traduction. Incarcéré en 1666, en raison de ses liens avec le mouvement janséniste et l’abbaye de Port-Royal, il poursuit son travail même pendant les deux ans qu’il passe à la Bastille. Sa Bible est publiée en livres séparés entre 1672 et 1693. Beaucoup apprécient cette exceptionnelle traduction des Écritures qui ne se fige pas dans le littéralisme, mais ne tombe pas pour autant dans le travers d’une littérature précieuse. À cause de cet équilibre intelligent, la Bible de Sacy s’inscrit parmi les chefs-d’œuvre littéraires classiques. Réimprimée à maintes reprises, et pour la première fois à Paris en 1701, elle est encore disponible aujourd’hui dans les éditions d’œuvres classiques du patrimoine littéraire français.
IV. Le XVIIIe siècle. Un travail biblique hors de France
Le siècle des Lumières voit se creuser le fossé entre d’une part ceux qui s’ouvrent à la dimension de la raison et de l’importance de l’individu et d’autre part ceux qui combattent cette nouvelle vision du monde au nom de la persistance des valeurs chrétiennes. L’Église catholique reste très liée au pouvoir royal qui utilise toutes les ressources juridiques et militaires pour faire disparaître l’hérésie protestante. Plusieurs initiatives catholiques cherchent cependant à élargir au peuple la connaissance du Nouveau Testament reconnu comme l’enseignement même du Christ. La Bible de Sacy publiée sous le nom de son auteur ou assortie de commentaires additionnels reste la référence durant tout le siècle.
Les protestants, privés de toute liberté, et notamment celle de publier la Bible, doivent se contenter des Bibles de famille pieusement conservées depuis le XVIe et XVIIe siècle ou d’attendre de l’étranger des bibles qui entrent clandestinement et au compte-gouttes. Pendant cette période, c’est encore la Bible de Genève qui reste la plus utilisée dans le protestantisme français. Les nouvelles traductions réalisées dans les pays où les huguenots ont trouvé refuge n’ont eu qu’une assez faible diffusion en France.
Nouveau Testament en quatre volumes, traduit et annoté par Richard Simon et publié à Trévoux en 1702. Bossuet a déployé
beaucoup d’énergie pour que ce Nouveau Testament ne soit pas diffusé à Paris. Page de titre, fonds SBF.
Le Nouveau Testament de Richard Simon (1702)
L’oratorien Richard Simon (1638-1712) a consacré sa vie à de nombreux travaux d’exégèse et de recherche critique sur le texte de la Bible. Ses études s’appuyaient sur une solide connaissance de manuscrits et de versions du texte biblique. Il pratiquait le grec, l’hébreu, l’araméen, connaissait les méthodes d’exégèse traditionnelle du judaïsme. Un siècle après la renaissance humaniste, Simon n’est plus aussi convaincu que l’étude des langues anciennes suffise à retourner aux sources des Écritures. Pour lui, les massorètes qui affirmaient n’avoir suivi que la tradition de leurs pères ont pu se tromper: « On n’est pas obligé d’ajouter foi au texte hébreu d’aujourd’hui, comme à un premier et véritable original. On le considèrera donc comme un excellent exemplaire. » Simon s’attache à analyser et à comparer toutes les traditions à travers lesquelles le texte biblique nous est parvenu, afin d’en dégager la richesse. Pour cette raison, il n’est pas satisfait par les récentes traductions catholiques, y compris celle de Port-Royal, car il estime qu’elles manquent de base critique. Il entreprend donc une nouvelle traduction du Nouveau Testament, mais sachant que ses travaux font déjà l’objet d’une grande suspicion de la part des autorités catholiques, il fait le choix de conserver la Vulgate latine comme texte de base. Néanmoins, il donne en marge de sa traduction les variantes du texte grec et il s’attache à traduire de l’hébreu toutes les citations de l’Ancien Testament. Simon a ainsi le sentiment de mettre entre les mains de chrétiens une copie des Écritures fidèle aux originaux. Son Nouveau Testament est publié à Trévoux, dans les Dombes, c'est à dire loin de Paris. Bossuet reproche à cette traduction de Richard Simon de ne pas reproduire le vocabulaire consacré par la liturgie de l’Église et il obtient du cardinal de Paris l’interdiction de lire cette traduction sous peine d’excommunication.
La Bible de David Martin (1707)
Obligé de quitter la France après la révocation de l’édit de Nantes, le pasteur David Martin (1639-1721) trouve refuge dans les Provinces-Unies (actuels Pays-Bas). Le synode des Églises wallonnes lui demande de mettre au point une bible francophone. Avec beaucoup de sérieux, Martin serre le texte hébreu et grec au plus près, mais il reste malgré tout assez dépendant de la version de Genève. En note, Martin explique certaines difficultés du texte et donne quelques commentaires dans la ligne doctrinale des Églises calvinistes. Le Nouveau Testament paraît d’abord en 1696, puis la Bible complète en 1707 à Amsterdam. Plus que la nouveauté intrinsèque de ce travail, c’est surtout l’approbation officielle par le synode des Églises wallonnes qui a conféré à la Bible de David Martin un succès durable. En plein XIXe siècle, Victor Hugo avouera préférer la version de David Martin à toute autre.
La Bible de Charles de cène (1741)
Charles de cène (1647-1703) est lui aussi un pasteur réfugié dans les Provinces-Unies. Ce passionné de théologie, estime que les traductions en vigueur « tordent l’Écriture » et « la détournent de son véritable sens ». Comment, dans ces conditions, amener les athées et les libertins à reconnaître et à adorer la majesté de Dieu si on laisse subsister dans la Bible des contradictions qui ébranlent les principes de la logique et de la raison ? Il entreprend donc une nouvelle traduction de la Bible avec l’objectif avoué de mieux communiquer avec son époque. Il s’éloigne radicalement des anciennes traductions tout en essayant de rester fidèle à l’hébreu ou au grec. Dans le célèbre prologue de l’évangile de Jean, un des piliers de la doctrine de la divinité du Christ, de cène traduit : « L’Oracle était dès le commencement, et cet Oracle se rapportait à Dieu. L’Oracle même était Dieu. » Dans sa traduction actualisante, les docteurs de la loi deviennent des « docteurs en droit », les scribes deviennent des « notaires ». Son projet suscite de vives réactions : Charles de cène est démis de ses fonctions pastorales au motif qu’il met en doute par sa traduction certains dogmes chrétiens jugés essentiels. Ce qui met le feu au poudre, c’est le fait que sa Bible signale au lecteur les difficultés textuelles par des passages en italique. De cène signale en note que des textes comme le récit de la femme adultère (Jn 7.53-8.11) ou encore la finale de l’évangile de Marc (16.9-20) ne sont pas attestés dans les manuscrits les plus anciens. Ces indications qui font partie aujourd’hui de toutes les éditions sérieuses de la Bible, créent un véritable scandale à l’époque. On soupçonne de cène de vouloir porter atteinte à l’autorité des Saintes Écritures. Son projet, sans doute trop novateur, est condamné par le synode des Églises wallonnes. Sa Bible est interdite de publication par le pouvoir civil dans deux des Provinces-Unies, et en France, Louis XV refuse aussi de donner son autorisation.
En 1741, soit trente-huit ans après la mort de Charles de cène, son fils parvient a faire publier l’œuvre de son père à Amsterdam, mais cette Bible ne connaît qu’une très faible audience, tant en raison de son contenu jugé trop libéral que de son prix assez élevé. Elle marque en tout cas le premier essai d’une lecture plus rationaliste de la Bible clairement animée par un souci de mieux communiquer dans les catégories intellectuelles d’une époque.
La Bible d’Ostervald (1744)
Version David Martin, assortie des arguments d’Ostervald, 1742, page de titre, fonds SBF
Pasteur de l’Église protestante de Neuchâtel en Suisse, Jean-Frédéric Ostervald s’efforce de rendre le culte plus profitable pour l’ensemble des fidèles. Il commence par rédiger un argument pour introduire chacun des livres bibliques, puis pour chaque chapitre un sommaire qui en présente les thèmes principaux et enfin une conclusion qui rappelle au lecteur l’essentiel des vérités exprimées dans le chapitre.
L’archevêque de Cantorbéry obtient d’Ostervald l’autorisation de traduire en anglais le texte de ses Argumens et Reflexions sur l’Ecriture Sainte. L’Ancien Testament paraît en 1716 et le Nouveau Testament en 1718 alors que le texte français n’a pas encore été publié. Devant la menace de voir utiliser une improbable traduction d’anglais vers français, Ostervald accepte que son texte soit publié en 1720 à Neuchâtel. En 1724, paraît une édition de la version David Martin à peine révisée, assortie des Argumens d’Ostervald.
Même s’il a passé toute sa vie à méditer les Écritures, c’est seulement en 1742 qu’il entreprend une révision complète de la Bible de David Martin. Il travaille rapidement, en deux ans, et sans abandonner pour autant ses activités pastorales. Alors qu’il a quatre-vingt-un ans, il fait paraître à Neuchâtel en 1744 une nouvelle édition revue, corrigée et augmentée. Ostervald précise dans son introduction que sa logique de révision a été « de faire les corrections qui paraissaient nécessaires, de changer des expressions et des manières de parler qui ne sont plus en usage et pourraient causer de l’obscurité ».
Cette édition propose en outre de nombreuses notes pour faciliter la lecture des Écritures à ceux qui sont peu familiers du monde antique ou pour expliquer telle ou telle traduction littérale qui pourrait décontenancer le lecteur.
La Bible Ostervald a connu une audience exceptionnelle dans le monde protestant jusqu’à la fin du XIXe siècle, ce que son auteur était loin d’imaginer. On l’a rééditée plus de quarante fois entre 1744 et 1899. Elle présente l’avantage de s’inscrire totalement dans la tradition réformée en corrigeant de façon assez minime la version David Martin qui elle-même reprenait la Bible de Genève. Mais la prédominance de cette version jusqu’au XIXe siècle révèle plutôt la faiblesse endémique du protestantisme francophone, très affaibli par l’opposition à laquelle il a dû faire face de la révocation de l’édit de Nantes en 1685 jusqu’à l’édit de Tolérance en 1797.
Re: Les premières traductions de la Bible
V. La Bible au XIXe siècle. Renouveau et compétition
Le XIXe siècle marque un renouveau dans le travail de traduction de la Bible en direction du public français. Les catholiques produisent quatre traductions nouvelles des évangiles et huit traductions nouvelles pour la Bible complète. Durant une cinquantaine d’années, les protestants qui ont créé en 1818 la Société biblique protestante de Paris pour faciliter la diffusion des Écritures se contentent de réviser la version Ostervald, mais dans la seconde moitié du siècle, ils produisent huit traductions partielles et quatre nouvelles traductions complètes. Mais seules les traductions réalisées par Louis Segond chez les protestants et par Auguste Crampon chez les catholiques connaîtront une notoriété durable.
Au cours du XIXe siècle, les sciences bibliques progressent considérablement avec les premières fouilles archéologiques dans les pays bibliques, la découverte de nouveaux manuscrits anciens et l’avènement d’une lecture critique des textes dans les milieux universitaires protestants. Dans une encyclique de 1893, le pape Léon XIII autorise les exégètes catholiques à utiliser les méthodes de la science biblique moderne, à condition qu’ils le fassent dans le respect de la tradition de leur Église. C’est ce document qui ouvre à Auguste Crampon la possibilité de publier les travaux qu’il mène déjà depuis déjà plusieurs années.
La découverte de nouveaux manuscrits de la Bible fait naître un débat au sein du protestantisme. A partir de quel texte faut-il traduire? Les tenants d’une lecture critique de la Bible donnent leur faveur aux manuscrits les plus anciens découverts tout récemment, le courant « piétiste » préfère conserver le Textus receptus, c'est à dire la version du Nouveau Testament grec publiée à Amsterdam en 1633 et utilisée par les grands traducteurs de la Bible jusqu’au XVIIIe siècle.
1. Les traductions catholiques au XIXe siècle.
La Bible de Genoud (1821-1824)
Antoine-Eugène Genoud (1792-1849) formé au grand séminaire a longtemps exercé le métier de journaliste aux côtés de Chateaubriand ou de Joseph de Mestre. Il participe à la réaction catholique qui cherche au lendemain de la Révolution française à lutter contre l’incrédulité héritée du Siècle des lumières. Sa traduction de la Bible traduit un effort certain pour rejoindre les Français et leur proposer un renouveau spirituel, dans ligne du romantisme naissant. Mais cette traduction n’est pas toujours très précise. Chateaubriand lui-même regrette que la langue manque bien souvent de naïveté et d’énergie. L’abbé Glaire, auteur d’une traduction d’après la Vulgate accuse la version de Genoud de ne pas suivre scrupuleusement le texte latin et « de reproduire avec une fidélité scrupuleuse la paraphrase de Sacy ». La Bible de Genoud est publiée pour le première fois en vingt-trois volumes de 1821 à 1824.
La Sainte Bible de Bourassé et Janvier (1843)
Jean-Jacques Bourassé et Pierre-Désiré Janvier sont deux chanoines de l’Église de Tours. Passionnés d’archéologie et d’études bibliques, ils réalisent ensemble une traduction de la Bible à partir de la Vulgate. La lecture de leur texte est facile et agréable. Cette version aurait pu devenir beaucoup plus populaire qu’elle ne l’a été si les éditeurs en avaient proposé une déclinaison en petit format. Ils ont fait le choix d’une édition luxueuse en deux volumes, illustrés par H. Giacomelli et G. Doré qui reste une référence dans l’édition de la Bible.
La Sainte Bible de Glaire (1871-1873)
Professeur d’hébreu à la Sorbonne, Jean-Baptiste Glaire (1798-1879) est un fin connaisseur des langues anciennes. De nombreux évêques, et le pape Pie IX lui-même, réclament une traduction actualisée du Nouveau Testament. Glaire s’attaque donc à la traduction du Nouveau Testament dans le strict respect des directives pontificales. Prenant comme texte source la version de la Vulgate approuvée en 1856, il s’inspire largement de la version de Sacy, et la modifie quand cela est nécessaire. Glaire refuse toute élégance de style, il s’en tient à une stricte littéralité qui confère à sa traduction une rigueur louable, mais la prive aussi de cette vivacité qui fait l’originalité d’une œuvre. Le Nouveau Testament publié pour la première fois en 1861 reçoit en 1865 l’approbation du pape lui-même. La Bible complète est publiée en trois volumes entre 1871 et 1873. Elle demeure pendant une trentaine d’année la version de référence dans le catholicisme français. Elle a été rééditée en 2002 pour les lecteurs encore attachés à la version latine.
La Sainte Bible d’Antoine Arnaud (1881)
Prêtre du diocèse du Var, Antoine Arnaud (1827-1920) poursuit en parallèle avec son activité paroissiale divers travaux de recherche sur la Bible. Auteur d’un commentaire des épîtres de Paul et d’une concordance des Évangiles, il publie en 1881 la Sainte Bible, une traduction réalisée à partir de la Vulgate avec commentaires de bas de page. Arnaud ne fait pas un travail critique ou scientifique, il vise seulement un public éclairé qui cherche à mieux comprendre la Bible. Souvent utilisée par les séminaristes jusqu’à la fin du siècle, sa version a néanmoins souffert de l’insertion provinciale de son auteur pour connaître une large diffusion.
La Sainte Bible de Fillion (1888-1904)
Prêtre de la paroisse de Saint-Sulpice à Paris, Louis-Claude Fillon est un disciple du grand théologien catholique F. Vigouroux. Cet érudit est nommé professeur d’exégèse à l’Institut catholique de Paris et devient l’un des premiers consulteurs de la commission biblique pontificale. Sur les conseils de son maître F. Vigouroux, L.-Cl. Fillion commence par commenter et traduire les évangiles, puis se lance dans le reste de la Bible. Sa Sainte Bible est publiée en huit volumes entre 1888 et 1904. Fillion vise nommément, dans le sous-titre qu’il donne à son édition, un public de séminaristes et de prêtres, ce qui n’empêche pas d’autres utilisateurs de tirer profit de ce travail. Sa traduction suit de très près la Vulgate et reste influencée par la version de Sacy et par les diverses éditions du XIXe siècle. Tournant le dos à la critique historique qui s’est développée dans les milieux protestants, notamment en Allemagne, Fillion s’en tient à une lecture traditionnelle des textes bibliques. Il utilise un langage précis et sans ostentation, ce qui constitue un avantage certain.
La Sainte Bible de Crampon (1894-1904)
La Bible du chanoine Auguste Crampon, publiée entre 1894 et1904, est la première traduction
catholique de la Bible réalisée à partir des textes originaux en hébreu et grec. Page de titre, fonds SBF
Avec la traduction du chanoine Augustin Crampon (1826-1894), le catholicisme français dispose enfin d’une traduction réalisée à partir des textes hébreux, araméen et grec qui devient une traduction classique jusqu’au milieu du XXe siècle. Crampon a été l’élève du célèbre exégète catholique Arthur Le Hir avant d’enseigner au séminaire de Saint-Riquier et de devenir ensuite chanoine d’Amiens. Sur les conseils de son maître, il entreprend un important travail sur la Bible, car Crampon est navré de voir que les fidèles de l’Église délaissent l’Évangile. Crampon, qui fait preuve d’une bonne connaissance des langues anciennes, prépare une traduction annotée des évangiles qui est publiée en 1864. Dans un vrai souci linguistique, il traduit à partir du seul texte grec, mais s’attache en plus à préserver le style propre de chaque auteur biblique et non pas de lisser l’ensemble comme jusque-là les traducteurs se sont ingéniés à le faire. Il essaye de préserver « une exactitude savante et minutieuse qui reproduise jusqu’aux nuances », mais en ayant le souci d’une certaine beauté littéraire en français. Le résultat est une traduction concise, souvent assez alerte. On peut regretter un certain manque d’audace de sa part lorsqu’il conserve l’appellation « Jéhovah » pour traduire le nom divin (ce mot provient de la prononciation des consonnes hébraïques du nom divin, YHWH, avec les voyelles du mot ’Adônai, le Seigneur, que les Juifs prononcent lorsqu’ils rencontrent ce mot dans la Bible hébraïque) ou lorsqu’il ne renonce pas au vouvoiement en ce qui concerne Dieu. Les notes bien documentées rédigées par Crampon, donnent au lecteur des renseignements historiques, géographiques ou des conseils spirituels. Elles ne traduisent pas la moindre polémique à l’égard des protestants, ce qui tranche par rapport à d’autres éditions du XIXe siècle. Crampon meurt en 1894 alors que paraît le premier volume de sa Bible qui en comptera sept, publiés entre 1894 et 1904.
2. Les traductions protestantes de la Bible au XIXe siècle
L’Ancien Testament de H.-A. Perret-Gentil (1866)
Depuis sa création en 1818, la Société biblique protestante de Paris n’a publié que des révisions de la Bible d’Ostervald. En 1866, elle publie une traduction de l’Ancien Testament réalisée par H.-A. Perret-Gentil, professeur à la Faculté de Neuchâtel. Perret-Gentil qui suit de très près le texte hébreu, innove dans sa traduction en conservant la forme poétique de certains textes, notamment les Psaumes. En fait, Perret-Gentil s’inspire beaucoup d’un travail réalisé par Guillaume de Wette, un théologien allemand qui a publié une Bible en six volumes entre 1809 et 1812. Si la traduction de Perret-Gentil a une indéniable valeur scientifique, elle porte la trace de certaines lourdeurs ou de formules maladroites qui proviennent d’une traduction trop littérale de l’allemand.
La Bible de Lausanne (1839, 1854-1872)
C’est animé par la conviction que l’Écriture sainte communique la pensée même de Dieu qu’un groupe de protestants piétistes se met au travail sous la direction de Louis Gaussen puis Louis Burnier. Le principe de la traduction est celle d’une cohérence poussée à l’extrême : chaque fois qu’on le peut, le même mot grec est rendu par le même mot français. Certains passages peu compréhensibles ne sont pas artificiellement éclairés par une traduction qui viserait à gommer les aspérités du texte original. Certains mots usés par leur passage à travers le latin sont évités : on ne parle plus d’« Évangile » mais de « bonne nouvelle », d’« Église » mais d’« assemblée », d’« apôtre » mais d’« envoyé ». Le vocabulaire s’enrichit ainsi de plusieurs centaines de mots nouveaux. L’équipe corrige d’elle-même certains passages où le littéralisme avait été poussé trop loin. Le Nouveau Testament paraît d’abord en 1839, puis les Psaumes en 1854 et le reste de l’Ancien Testament entre 1861 et 1872. Cette Bible de Lausanne a connu une très large audience parmi les spécialistes. Elle a profondément influencé les travaux de Louis Segond.
Le Nouveau Testament d’Oltramare (1872)
C’est la Compagnie des pasteurs de Genève qui prend l’initiative de lancer une nouvelle traduction de la Bible, d’après les textes originaux. Elle confie à Hugues Oltramare (né en 1813) le soin de traduire le Nouveau Testament et elle confiera plus tard à Louis Segond la traduction de l’Ancien Testament. Oltramare n’utilise plus le texte reçu comme texte source mais celui résultant des travaux de son contemporain Tischendorf, découvreur du manuscrit Sinaïticus (daté de la fin du IVe siècle). Sa traduction manifeste une grande liberté de style, ce qui la rend agréable à lire, mais elle pèche quelquefois par un esthétisme qui lui fait perdre la rugosité de l’original.
La Bible de Louis Segond (1880)
Après avoir traduit l’Ancien Testament, publié pour la première fois en 1874, Louis Segond traduit le Nouveau Testament qui paraît en
1880.. Page de titre, fonds SBF.
Alors qu’il est professeur de théologie à la Faculté de Genève, Louis Segond (1810-1885), signe un contrat en 1865 avec la Compagnie des pasteurs de Genève pour achever en six ans une traduction de l’Ancien Testament. Segond tient ses engagements puisque près d’un mois et demi avant le terme prévu, il remet le manuscrit de sa traduction.
Segond reconnaît qu’il doit beaucoup à la version de Perret-Gentil ainsi qu’à la Bible de Lausanne, mais il produit une traduction assez originale, notamment pour ce qui concerne les livres prophétiques. Segond ne tombe pas dans le littéralisme, il s’attache plutôt à produire une traduction précise, dans un français toujours très correct. C’est cette grande clarté dans l’expression qui explique le succès du travail de Louis Segond. L’Ancien Testament est publié en entier en 1874, après quoi Segond, selon les mêmes principes, s’atèle à la traduction du Nouveau Testament qu’il publie en 1880. La Bible complète contenant l’Ancien et le Nouveau Testament traduits par Louis Segond paraît pour la première fois à Oxford en 1880. Peu de traductions de la Bible ont connu un succès aussi fulgurant que celui de la version Segond : éditée simultanément à Oxford, Paris, Lausanne, Neuchâtel et Genève, trois cent mille exemplaires sont produits entre 1880 et 1910. Depuis cette époque et jusqu’à aujourd’hui, la version Segond reste, et de loin, la version française de la Bible la plus répandue et la plus demandée.
La Bible de Reuss (1874-1881)
La deuxième moitié du XIXe siècle connaît un renouveau des sciences bibliques en Allemagne. Un professeur à la Faculté de théologie de Strasbourg, Edouard-Guillaume Reuss, entreprend une nouvelle traduction assortie d’introductions abondantes et de notes à caractère scientifique qui reprennent largement les travaux des écoles allemandes. La traduction, très précise, manque cependant d’élégance, elle porte la trace de germanismes qui en alourdissent le style. Publié de 1874 à 1881, ce travail de Reuss est salué par la communauté scientifique, mais ne connaît pas une diffusion très populaire.
La Sainte Bible de Darby (1885)
John Nelson Darby est le fondateur d’une nouvelle forme d’Églises chrétiennes, les Églises de Frères, appelées aussi quelquefois « darbystes ». Très attaché à l’Écriture qu’il connaît remarquablement, Darby commence par traduire le Nouveau Testament avec un grand souci de littéralité par rapport au texte original. Dans la première édition de 1859, il se réfère quelquefois au texte reçu, mais au fil des rééditions, il se libère, dit-il lui-même, « de ce texte appelé sans aucune raison valable : Texte reçu ». Darby traduit l’Ancien Testament depuis l’hébreu avec la même méthode que le Nouveau, c'est à dire avec le souci de rendre la langue originale aussi littéralement que le commande « la clarté nécessaire à l’intelligence du texte ».
C’est en 1885 que la Bible complète traduite par John Darby est publiée pour la première fois. Elle est encore éditée aujourd’hui après avoir bénéficié de menues révisions de vocabulaire. Une révision complète du Nouveau Testament d’après l’original est parue en 2005.
3. Traductions non chrétiennes de la Bible au XIXe siècle.
La Bible de Ledrain (1886-1889)
Eugène Ledrain entreprend une traduction de la Bible « en dehors de toute théorie, qui ne vise qu’à reproduire dans leur vive précision, les phrases et les mots bibliques ». Bien averti des problèmes historiques et exégétiques, il rassemble sa contribution au débat sur l’histoire de la composition de l’Ancien Testament dans un volume séparé, conscient de la grande versatilité des théories dans ce domaine. Pour rendre le nom divin, Ledrain utilise le mot « Yahvéh », c'est à dire la contraction des consonnes hébraïques du tétragramme et des voyelles du mot hašŸm (le Nom). Son choix sera repris au XXe siècle par la Bible de Jérusalem.
La Bible du rabbinat français (1831-1839 et 1899-1906)
Une première traduction de la Bible dans le cadre du judaïsme français paraît entre 1831 et 1839. Elle est l’œuvre de Samuel Cahen (1796-1862), directeur de l’école du Consistoire juif à Paris. Si cette traduction ne manque ni de saveur, ni de vigueur, son style n’est pas toujours très élégant, elle porte la trace d’une influence de l’allemand. Assez critique sur le travail de Cahen, Lazare Wogue (1817-1897), grand spécialiste de la Bible hébraïque, publie une traduction du Pentateuque entre 1860 et 1869. Il faut attendre la fin du siècle pour que le Grand Rabbin Zadok Kahn se soucie de produire « une Bible française vraiment populaire, d’un format commode, d’un prix modique et agréable à lire ». Avec plusieurs membres du rabbinat français, il entreprend donc une nouvelle traduction, sans prétention scientifique, mais avec le souci de reproduire aussi fidèlement que possible le texte original reçu de la tradition juive. Cette traduction reste la seule officiellement en usage dans les milieux juifs. Elle ne sera révisée qu’une fois, en 1966.
Le XIXe siècle marque un renouveau dans le travail de traduction de la Bible en direction du public français. Les catholiques produisent quatre traductions nouvelles des évangiles et huit traductions nouvelles pour la Bible complète. Durant une cinquantaine d’années, les protestants qui ont créé en 1818 la Société biblique protestante de Paris pour faciliter la diffusion des Écritures se contentent de réviser la version Ostervald, mais dans la seconde moitié du siècle, ils produisent huit traductions partielles et quatre nouvelles traductions complètes. Mais seules les traductions réalisées par Louis Segond chez les protestants et par Auguste Crampon chez les catholiques connaîtront une notoriété durable.
Au cours du XIXe siècle, les sciences bibliques progressent considérablement avec les premières fouilles archéologiques dans les pays bibliques, la découverte de nouveaux manuscrits anciens et l’avènement d’une lecture critique des textes dans les milieux universitaires protestants. Dans une encyclique de 1893, le pape Léon XIII autorise les exégètes catholiques à utiliser les méthodes de la science biblique moderne, à condition qu’ils le fassent dans le respect de la tradition de leur Église. C’est ce document qui ouvre à Auguste Crampon la possibilité de publier les travaux qu’il mène déjà depuis déjà plusieurs années.
La découverte de nouveaux manuscrits de la Bible fait naître un débat au sein du protestantisme. A partir de quel texte faut-il traduire? Les tenants d’une lecture critique de la Bible donnent leur faveur aux manuscrits les plus anciens découverts tout récemment, le courant « piétiste » préfère conserver le Textus receptus, c'est à dire la version du Nouveau Testament grec publiée à Amsterdam en 1633 et utilisée par les grands traducteurs de la Bible jusqu’au XVIIIe siècle.
1. Les traductions catholiques au XIXe siècle.
La Bible de Genoud (1821-1824)
Antoine-Eugène Genoud (1792-1849) formé au grand séminaire a longtemps exercé le métier de journaliste aux côtés de Chateaubriand ou de Joseph de Mestre. Il participe à la réaction catholique qui cherche au lendemain de la Révolution française à lutter contre l’incrédulité héritée du Siècle des lumières. Sa traduction de la Bible traduit un effort certain pour rejoindre les Français et leur proposer un renouveau spirituel, dans ligne du romantisme naissant. Mais cette traduction n’est pas toujours très précise. Chateaubriand lui-même regrette que la langue manque bien souvent de naïveté et d’énergie. L’abbé Glaire, auteur d’une traduction d’après la Vulgate accuse la version de Genoud de ne pas suivre scrupuleusement le texte latin et « de reproduire avec une fidélité scrupuleuse la paraphrase de Sacy ». La Bible de Genoud est publiée pour le première fois en vingt-trois volumes de 1821 à 1824.
La Sainte Bible de Bourassé et Janvier (1843)
Jean-Jacques Bourassé et Pierre-Désiré Janvier sont deux chanoines de l’Église de Tours. Passionnés d’archéologie et d’études bibliques, ils réalisent ensemble une traduction de la Bible à partir de la Vulgate. La lecture de leur texte est facile et agréable. Cette version aurait pu devenir beaucoup plus populaire qu’elle ne l’a été si les éditeurs en avaient proposé une déclinaison en petit format. Ils ont fait le choix d’une édition luxueuse en deux volumes, illustrés par H. Giacomelli et G. Doré qui reste une référence dans l’édition de la Bible.
La Sainte Bible de Glaire (1871-1873)
Professeur d’hébreu à la Sorbonne, Jean-Baptiste Glaire (1798-1879) est un fin connaisseur des langues anciennes. De nombreux évêques, et le pape Pie IX lui-même, réclament une traduction actualisée du Nouveau Testament. Glaire s’attaque donc à la traduction du Nouveau Testament dans le strict respect des directives pontificales. Prenant comme texte source la version de la Vulgate approuvée en 1856, il s’inspire largement de la version de Sacy, et la modifie quand cela est nécessaire. Glaire refuse toute élégance de style, il s’en tient à une stricte littéralité qui confère à sa traduction une rigueur louable, mais la prive aussi de cette vivacité qui fait l’originalité d’une œuvre. Le Nouveau Testament publié pour la première fois en 1861 reçoit en 1865 l’approbation du pape lui-même. La Bible complète est publiée en trois volumes entre 1871 et 1873. Elle demeure pendant une trentaine d’année la version de référence dans le catholicisme français. Elle a été rééditée en 2002 pour les lecteurs encore attachés à la version latine.
La Sainte Bible d’Antoine Arnaud (1881)
Prêtre du diocèse du Var, Antoine Arnaud (1827-1920) poursuit en parallèle avec son activité paroissiale divers travaux de recherche sur la Bible. Auteur d’un commentaire des épîtres de Paul et d’une concordance des Évangiles, il publie en 1881 la Sainte Bible, une traduction réalisée à partir de la Vulgate avec commentaires de bas de page. Arnaud ne fait pas un travail critique ou scientifique, il vise seulement un public éclairé qui cherche à mieux comprendre la Bible. Souvent utilisée par les séminaristes jusqu’à la fin du siècle, sa version a néanmoins souffert de l’insertion provinciale de son auteur pour connaître une large diffusion.
La Sainte Bible de Fillion (1888-1904)
Prêtre de la paroisse de Saint-Sulpice à Paris, Louis-Claude Fillon est un disciple du grand théologien catholique F. Vigouroux. Cet érudit est nommé professeur d’exégèse à l’Institut catholique de Paris et devient l’un des premiers consulteurs de la commission biblique pontificale. Sur les conseils de son maître F. Vigouroux, L.-Cl. Fillion commence par commenter et traduire les évangiles, puis se lance dans le reste de la Bible. Sa Sainte Bible est publiée en huit volumes entre 1888 et 1904. Fillion vise nommément, dans le sous-titre qu’il donne à son édition, un public de séminaristes et de prêtres, ce qui n’empêche pas d’autres utilisateurs de tirer profit de ce travail. Sa traduction suit de très près la Vulgate et reste influencée par la version de Sacy et par les diverses éditions du XIXe siècle. Tournant le dos à la critique historique qui s’est développée dans les milieux protestants, notamment en Allemagne, Fillion s’en tient à une lecture traditionnelle des textes bibliques. Il utilise un langage précis et sans ostentation, ce qui constitue un avantage certain.
La Sainte Bible de Crampon (1894-1904)
La Bible du chanoine Auguste Crampon, publiée entre 1894 et1904, est la première traduction
catholique de la Bible réalisée à partir des textes originaux en hébreu et grec. Page de titre, fonds SBF
Avec la traduction du chanoine Augustin Crampon (1826-1894), le catholicisme français dispose enfin d’une traduction réalisée à partir des textes hébreux, araméen et grec qui devient une traduction classique jusqu’au milieu du XXe siècle. Crampon a été l’élève du célèbre exégète catholique Arthur Le Hir avant d’enseigner au séminaire de Saint-Riquier et de devenir ensuite chanoine d’Amiens. Sur les conseils de son maître, il entreprend un important travail sur la Bible, car Crampon est navré de voir que les fidèles de l’Église délaissent l’Évangile. Crampon, qui fait preuve d’une bonne connaissance des langues anciennes, prépare une traduction annotée des évangiles qui est publiée en 1864. Dans un vrai souci linguistique, il traduit à partir du seul texte grec, mais s’attache en plus à préserver le style propre de chaque auteur biblique et non pas de lisser l’ensemble comme jusque-là les traducteurs se sont ingéniés à le faire. Il essaye de préserver « une exactitude savante et minutieuse qui reproduise jusqu’aux nuances », mais en ayant le souci d’une certaine beauté littéraire en français. Le résultat est une traduction concise, souvent assez alerte. On peut regretter un certain manque d’audace de sa part lorsqu’il conserve l’appellation « Jéhovah » pour traduire le nom divin (ce mot provient de la prononciation des consonnes hébraïques du nom divin, YHWH, avec les voyelles du mot ’Adônai, le Seigneur, que les Juifs prononcent lorsqu’ils rencontrent ce mot dans la Bible hébraïque) ou lorsqu’il ne renonce pas au vouvoiement en ce qui concerne Dieu. Les notes bien documentées rédigées par Crampon, donnent au lecteur des renseignements historiques, géographiques ou des conseils spirituels. Elles ne traduisent pas la moindre polémique à l’égard des protestants, ce qui tranche par rapport à d’autres éditions du XIXe siècle. Crampon meurt en 1894 alors que paraît le premier volume de sa Bible qui en comptera sept, publiés entre 1894 et 1904.
2. Les traductions protestantes de la Bible au XIXe siècle
L’Ancien Testament de H.-A. Perret-Gentil (1866)
Depuis sa création en 1818, la Société biblique protestante de Paris n’a publié que des révisions de la Bible d’Ostervald. En 1866, elle publie une traduction de l’Ancien Testament réalisée par H.-A. Perret-Gentil, professeur à la Faculté de Neuchâtel. Perret-Gentil qui suit de très près le texte hébreu, innove dans sa traduction en conservant la forme poétique de certains textes, notamment les Psaumes. En fait, Perret-Gentil s’inspire beaucoup d’un travail réalisé par Guillaume de Wette, un théologien allemand qui a publié une Bible en six volumes entre 1809 et 1812. Si la traduction de Perret-Gentil a une indéniable valeur scientifique, elle porte la trace de certaines lourdeurs ou de formules maladroites qui proviennent d’une traduction trop littérale de l’allemand.
La Bible de Lausanne (1839, 1854-1872)
C’est animé par la conviction que l’Écriture sainte communique la pensée même de Dieu qu’un groupe de protestants piétistes se met au travail sous la direction de Louis Gaussen puis Louis Burnier. Le principe de la traduction est celle d’une cohérence poussée à l’extrême : chaque fois qu’on le peut, le même mot grec est rendu par le même mot français. Certains passages peu compréhensibles ne sont pas artificiellement éclairés par une traduction qui viserait à gommer les aspérités du texte original. Certains mots usés par leur passage à travers le latin sont évités : on ne parle plus d’« Évangile » mais de « bonne nouvelle », d’« Église » mais d’« assemblée », d’« apôtre » mais d’« envoyé ». Le vocabulaire s’enrichit ainsi de plusieurs centaines de mots nouveaux. L’équipe corrige d’elle-même certains passages où le littéralisme avait été poussé trop loin. Le Nouveau Testament paraît d’abord en 1839, puis les Psaumes en 1854 et le reste de l’Ancien Testament entre 1861 et 1872. Cette Bible de Lausanne a connu une très large audience parmi les spécialistes. Elle a profondément influencé les travaux de Louis Segond.
Le Nouveau Testament d’Oltramare (1872)
C’est la Compagnie des pasteurs de Genève qui prend l’initiative de lancer une nouvelle traduction de la Bible, d’après les textes originaux. Elle confie à Hugues Oltramare (né en 1813) le soin de traduire le Nouveau Testament et elle confiera plus tard à Louis Segond la traduction de l’Ancien Testament. Oltramare n’utilise plus le texte reçu comme texte source mais celui résultant des travaux de son contemporain Tischendorf, découvreur du manuscrit Sinaïticus (daté de la fin du IVe siècle). Sa traduction manifeste une grande liberté de style, ce qui la rend agréable à lire, mais elle pèche quelquefois par un esthétisme qui lui fait perdre la rugosité de l’original.
La Bible de Louis Segond (1880)
Après avoir traduit l’Ancien Testament, publié pour la première fois en 1874, Louis Segond traduit le Nouveau Testament qui paraît en
1880.. Page de titre, fonds SBF.
Alors qu’il est professeur de théologie à la Faculté de Genève, Louis Segond (1810-1885), signe un contrat en 1865 avec la Compagnie des pasteurs de Genève pour achever en six ans une traduction de l’Ancien Testament. Segond tient ses engagements puisque près d’un mois et demi avant le terme prévu, il remet le manuscrit de sa traduction.
Segond reconnaît qu’il doit beaucoup à la version de Perret-Gentil ainsi qu’à la Bible de Lausanne, mais il produit une traduction assez originale, notamment pour ce qui concerne les livres prophétiques. Segond ne tombe pas dans le littéralisme, il s’attache plutôt à produire une traduction précise, dans un français toujours très correct. C’est cette grande clarté dans l’expression qui explique le succès du travail de Louis Segond. L’Ancien Testament est publié en entier en 1874, après quoi Segond, selon les mêmes principes, s’atèle à la traduction du Nouveau Testament qu’il publie en 1880. La Bible complète contenant l’Ancien et le Nouveau Testament traduits par Louis Segond paraît pour la première fois à Oxford en 1880. Peu de traductions de la Bible ont connu un succès aussi fulgurant que celui de la version Segond : éditée simultanément à Oxford, Paris, Lausanne, Neuchâtel et Genève, trois cent mille exemplaires sont produits entre 1880 et 1910. Depuis cette époque et jusqu’à aujourd’hui, la version Segond reste, et de loin, la version française de la Bible la plus répandue et la plus demandée.
La Bible de Reuss (1874-1881)
La deuxième moitié du XIXe siècle connaît un renouveau des sciences bibliques en Allemagne. Un professeur à la Faculté de théologie de Strasbourg, Edouard-Guillaume Reuss, entreprend une nouvelle traduction assortie d’introductions abondantes et de notes à caractère scientifique qui reprennent largement les travaux des écoles allemandes. La traduction, très précise, manque cependant d’élégance, elle porte la trace de germanismes qui en alourdissent le style. Publié de 1874 à 1881, ce travail de Reuss est salué par la communauté scientifique, mais ne connaît pas une diffusion très populaire.
La Sainte Bible de Darby (1885)
John Nelson Darby est le fondateur d’une nouvelle forme d’Églises chrétiennes, les Églises de Frères, appelées aussi quelquefois « darbystes ». Très attaché à l’Écriture qu’il connaît remarquablement, Darby commence par traduire le Nouveau Testament avec un grand souci de littéralité par rapport au texte original. Dans la première édition de 1859, il se réfère quelquefois au texte reçu, mais au fil des rééditions, il se libère, dit-il lui-même, « de ce texte appelé sans aucune raison valable : Texte reçu ». Darby traduit l’Ancien Testament depuis l’hébreu avec la même méthode que le Nouveau, c'est à dire avec le souci de rendre la langue originale aussi littéralement que le commande « la clarté nécessaire à l’intelligence du texte ».
C’est en 1885 que la Bible complète traduite par John Darby est publiée pour la première fois. Elle est encore éditée aujourd’hui après avoir bénéficié de menues révisions de vocabulaire. Une révision complète du Nouveau Testament d’après l’original est parue en 2005.
3. Traductions non chrétiennes de la Bible au XIXe siècle.
La Bible de Ledrain (1886-1889)
Eugène Ledrain entreprend une traduction de la Bible « en dehors de toute théorie, qui ne vise qu’à reproduire dans leur vive précision, les phrases et les mots bibliques ». Bien averti des problèmes historiques et exégétiques, il rassemble sa contribution au débat sur l’histoire de la composition de l’Ancien Testament dans un volume séparé, conscient de la grande versatilité des théories dans ce domaine. Pour rendre le nom divin, Ledrain utilise le mot « Yahvéh », c'est à dire la contraction des consonnes hébraïques du tétragramme et des voyelles du mot hašŸm (le Nom). Son choix sera repris au XXe siècle par la Bible de Jérusalem.
La Bible du rabbinat français (1831-1839 et 1899-1906)
Une première traduction de la Bible dans le cadre du judaïsme français paraît entre 1831 et 1839. Elle est l’œuvre de Samuel Cahen (1796-1862), directeur de l’école du Consistoire juif à Paris. Si cette traduction ne manque ni de saveur, ni de vigueur, son style n’est pas toujours très élégant, elle porte la trace d’une influence de l’allemand. Assez critique sur le travail de Cahen, Lazare Wogue (1817-1897), grand spécialiste de la Bible hébraïque, publie une traduction du Pentateuque entre 1860 et 1869. Il faut attendre la fin du siècle pour que le Grand Rabbin Zadok Kahn se soucie de produire « une Bible française vraiment populaire, d’un format commode, d’un prix modique et agréable à lire ». Avec plusieurs membres du rabbinat français, il entreprend donc une nouvelle traduction, sans prétention scientifique, mais avec le souci de reproduire aussi fidèlement que possible le texte original reçu de la tradition juive. Cette traduction reste la seule officiellement en usage dans les milieux juifs. Elle ne sera révisée qu’une fois, en 1966.
Re: Les premières traductions de la Bible
VI. Les traductions de la Bible dans la première moitié du XXe siècle. La Bible à la base de l’œcuménisme.
Le fait marquant du XXe siècle est la remarquable évolution de l’Église catholique en ce qui concerne son rapport aux Écritures. Le concile Vatican I (1870) tenait la Bible pour un livre surnaturel dans lequel Dieu « se révèle lui-même au genre humain, ainsi que les décrets éternels de sa volonté » et il rappelait avec force que seul le magistère de l’Église catholique a reçu de Dieu la charge d’interpréter correctement l’Écriture : « Il donne cette interprétation dans des dogmes dont le sens est présenté une fois pour toutes ». Vatican II voit plutôt l’Écriture comme un événement, le lieu d’une rencontre avec Dieu. La Constitution Dei Verbum (1965) s’ouvre sur un passage de la première épître de Jean « ce que nous avons vu et entendu nous vous l’annonçons afin que vous soyez en communion avec nous et que notre communion soit avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ » (1 Jn 1.2-3). D’un point de vue œcuménique, ce nouveau point de départ est capital : non seulement l’Église catholique abandonne toute attitude polémique par rapport aux Églises de la Réforme, mais elle intègre l’expérience de la Parole, si chère à Luther.
Cette humilité nouvelle face à l’Écriture, que catholiques et protestants redécouvrent en même temps, a été l’élément moteur d’un rapprochement œcuménique autour de la Bible durant le XXe siècle. Pour la première fois, des traductions de la Bible sont réalisées en commun, avec l’objectif avoué de favoriser la rencontre de tous les chrétiens avec le Dieu de Jésus-Christ. Ce regain d’intérêt pour la Bible se vérifie dans l’explosion du nombre de traductions nouvelles et dans l’amélioration qualitative indéniable.
1. Les traductions catholiques dans la première moitié du XXe siècle
La Bible de Maredsous (1950)
En 1943, le pape Pie XII encourage les chrétiens « à la connaissance et à la méditation des Écritures ». Une équipe de moines de l’abbaye de Maredsous en Belgique met en chantier une nouvelle traduction pour rendre le texte plus accessible à l’ensemble des catholiques francophones. Le Nouveau Testament est publié en 1948, la Bible en 1950. L’équipe des traducteurs, dirigée par dom Paul-Georges Passelecq, utilise une langue très claire et veille à ce que les textes puissent être lus à haute voix et restent toujours intelligibles pour les auditeurs. L’ensemble du texte est révisé en 1968, avec notamment l’utilisation de la deuxième personne du singulier pour les adresses à Dieu, puis en 1997. Editeur : Brepols. En savoir plus
2. Les traductions protestantes au XXe siècle
La version synodale (1910)
Plusieurs synodes officieux des Églises réformées en France ont réclamé une révision de la Bible Ostervald. À partir de 1844, une centaine de pasteurs et de professeurs appartenant aux diverses Églises francophones issues de la Réforme participent à cet effort qui aboutit en 1910 à une traduction nouvelle pour le sens des textes comme pour le style. Pourtant beaucoup de passages ne modifient que très légèrement des versets consacrés par l’usage. Chaque réédition verra le texte s’améliorer, mais l’instabilité du texte a pénalisé la diffusion de cette version. La huitième et dernière édition révisée date de 1956.
La Bible du Centenaire (1916-1947)
La Bible du Centenaire, n’a jamais fait l’objet d’une publication en un seul volume. D’où le peu de succès de cette traduction pourtant intéressante. Page de titre, fonds SBF.
La Société biblique protestante de Paris décide en 1911 de publier une nouvelle traduction de la Bible pour le centenaire de la Société, fondée en 1818. De 1911 à 1947, les biblistes les plus qualifiés des Églises de la Réforme apportent leur contribution à la Bible du Centenaire qui paraît en fascicules à partir de 1916. Adolphe Lods dirige les travaux sur l’Ancien Testament et Henri Monnier ceux sur le Nouveau Testament. Avec une attention toute spéciale aux manuscrits utilisés, la Bible du Centenaire tente de traduire en français le style propre de chaque auteur biblique. Des introductions et des notes très développées fournissent tous les éclaircissements sur le texte que la science biblique de l’époque permettait. Cette Bible encyclopédique n’a jamais été éditée intégralement. Sa diffusion est restée confidentielle, mais toutes les Bibles annotées publiées après la Bible du Centenaire ont bénéficié de cette entreprise exceptionnelle.
C.B.
Bibliographie :
J.-R. Armogathe (sous dir.), Le grand siècle de la Bible, 1989
J.-M. Auwers et al., La Bible en français (guide des traductions courantes), Connaître la Bible n° 11/ 12, 1999, rééd. 2002
J.-M. Babut, Lire la Bible en traduction, 1997
Y. Belaval et D. Bourel, Le Siècle des Lumières et la Bible, 1985
M. de Certeau, L’idée de traduction de la Bible au XVIIe siècle, RSR, t. LXVI, 1978
F. Delforge, La Bible en France et dans la francophonie, SBF, 1991
A. Kuen, Une Bible et tant de versions, 1996
D. Lortsch, mise à jour par J.-M. Nicole, Histoire de la Bible française, 1997
C. Savat et J.-N. Aletti (sous dir.), Le monde contemporain et la Bible, 1985
Le fait marquant du XXe siècle est la remarquable évolution de l’Église catholique en ce qui concerne son rapport aux Écritures. Le concile Vatican I (1870) tenait la Bible pour un livre surnaturel dans lequel Dieu « se révèle lui-même au genre humain, ainsi que les décrets éternels de sa volonté » et il rappelait avec force que seul le magistère de l’Église catholique a reçu de Dieu la charge d’interpréter correctement l’Écriture : « Il donne cette interprétation dans des dogmes dont le sens est présenté une fois pour toutes ». Vatican II voit plutôt l’Écriture comme un événement, le lieu d’une rencontre avec Dieu. La Constitution Dei Verbum (1965) s’ouvre sur un passage de la première épître de Jean « ce que nous avons vu et entendu nous vous l’annonçons afin que vous soyez en communion avec nous et que notre communion soit avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ » (1 Jn 1.2-3). D’un point de vue œcuménique, ce nouveau point de départ est capital : non seulement l’Église catholique abandonne toute attitude polémique par rapport aux Églises de la Réforme, mais elle intègre l’expérience de la Parole, si chère à Luther.
Cette humilité nouvelle face à l’Écriture, que catholiques et protestants redécouvrent en même temps, a été l’élément moteur d’un rapprochement œcuménique autour de la Bible durant le XXe siècle. Pour la première fois, des traductions de la Bible sont réalisées en commun, avec l’objectif avoué de favoriser la rencontre de tous les chrétiens avec le Dieu de Jésus-Christ. Ce regain d’intérêt pour la Bible se vérifie dans l’explosion du nombre de traductions nouvelles et dans l’amélioration qualitative indéniable.
1. Les traductions catholiques dans la première moitié du XXe siècle
La Bible de Maredsous (1950)
En 1943, le pape Pie XII encourage les chrétiens « à la connaissance et à la méditation des Écritures ». Une équipe de moines de l’abbaye de Maredsous en Belgique met en chantier une nouvelle traduction pour rendre le texte plus accessible à l’ensemble des catholiques francophones. Le Nouveau Testament est publié en 1948, la Bible en 1950. L’équipe des traducteurs, dirigée par dom Paul-Georges Passelecq, utilise une langue très claire et veille à ce que les textes puissent être lus à haute voix et restent toujours intelligibles pour les auditeurs. L’ensemble du texte est révisé en 1968, avec notamment l’utilisation de la deuxième personne du singulier pour les adresses à Dieu, puis en 1997. Editeur : Brepols. En savoir plus
2. Les traductions protestantes au XXe siècle
La version synodale (1910)
Plusieurs synodes officieux des Églises réformées en France ont réclamé une révision de la Bible Ostervald. À partir de 1844, une centaine de pasteurs et de professeurs appartenant aux diverses Églises francophones issues de la Réforme participent à cet effort qui aboutit en 1910 à une traduction nouvelle pour le sens des textes comme pour le style. Pourtant beaucoup de passages ne modifient que très légèrement des versets consacrés par l’usage. Chaque réédition verra le texte s’améliorer, mais l’instabilité du texte a pénalisé la diffusion de cette version. La huitième et dernière édition révisée date de 1956.
La Bible du Centenaire (1916-1947)
La Bible du Centenaire, n’a jamais fait l’objet d’une publication en un seul volume. D’où le peu de succès de cette traduction pourtant intéressante. Page de titre, fonds SBF.
La Société biblique protestante de Paris décide en 1911 de publier une nouvelle traduction de la Bible pour le centenaire de la Société, fondée en 1818. De 1911 à 1947, les biblistes les plus qualifiés des Églises de la Réforme apportent leur contribution à la Bible du Centenaire qui paraît en fascicules à partir de 1916. Adolphe Lods dirige les travaux sur l’Ancien Testament et Henri Monnier ceux sur le Nouveau Testament. Avec une attention toute spéciale aux manuscrits utilisés, la Bible du Centenaire tente de traduire en français le style propre de chaque auteur biblique. Des introductions et des notes très développées fournissent tous les éclaircissements sur le texte que la science biblique de l’époque permettait. Cette Bible encyclopédique n’a jamais été éditée intégralement. Sa diffusion est restée confidentielle, mais toutes les Bibles annotées publiées après la Bible du Centenaire ont bénéficié de cette entreprise exceptionnelle.
C.B.
Bibliographie :
J.-R. Armogathe (sous dir.), Le grand siècle de la Bible, 1989
J.-M. Auwers et al., La Bible en français (guide des traductions courantes), Connaître la Bible n° 11/ 12, 1999, rééd. 2002
J.-M. Babut, Lire la Bible en traduction, 1997
Y. Belaval et D. Bourel, Le Siècle des Lumières et la Bible, 1985
M. de Certeau, L’idée de traduction de la Bible au XVIIe siècle, RSR, t. LXVI, 1978
F. Delforge, La Bible en France et dans la francophonie, SBF, 1991
A. Kuen, Une Bible et tant de versions, 1996
D. Lortsch, mise à jour par J.-M. Nicole, Histoire de la Bible française, 1997
C. Savat et J.-N. Aletti (sous dir.), Le monde contemporain et la Bible, 1985
Re: Les premières traductions de la Bible
La traduction de la Bible en français
L'Alliance biblique française propose des traductions adaptées à différents publics : traductions littérales pour ceux qui
recherchent la précision, traductions dynamiques pour ceux qui veulent avant tout comprendre le sens du texte.
Les versions récentes de la Bible en français
Depuis 1950, date de la parution de la Bible de Maredsous, le public francophone a connu une profusion de traductions nouvelles. Aucune ne pourra devenir l’équivalent d’une Vulgate acceptée et utilisée par tous. Notre époque ne s’y prête plus. Aujourd’hui par contre, chacun, quelle que soit son origine confessionnelle, son âge ou son bagage culturel, peut trouver une traduction de la Bible qui conviendra à l’usage qu’il souhaite en faire : lecture et méditation personnelle, étude textuelle, lecture publique.
2010 : La Traduction de la Bible en langue des signes française Luc, Jonas
La première traduction en langue des signes française (LSF) d’une partie de la Bible – l’évangile de Luc – a constitué en 2010 un grand événement pour la communauté sourde francophone. Enfin le livre le plus lu au monde devenait accessible aux utilisateurs de la LSF, dans leur propre langue, concernant en France métropolitaine 80 000 personnes sourdes et malentendantes, mais aussi 75 000 personnes entendantes qui utilisent la LSF pour communiquer avec leurs proches. La LSF est une langue à part entière, visuelle et gestuelle, linéaire et non vocale. Et comme les autres langues, elle possède sa propre syntaxe, son lexique et sa stylistique. Pour un chrétien sourd, voir l’évangile de Luc, c’est « entendre parler » Dieu dans sa langue.
2010 : La Traduction œcuménique de la Bible
Révision, texte et notes, de l'édition de 1975. La TOB 2010 constitue un événement éditorial et oecuménique sans précédent puisqu’elle contient six livres deutérocanoniques supplémentaires, en usage dans la liturgie des Eglises orthodoxes : 3 et 4 Esdras, 3 et 4 Maccabées, la Prière de Manassé et le Psaume 151.
2002 : La Nouvelle Bible Segond
La traduction de la Bible par Louis Segond, réalisée à la fin du 19ème siècle, s'est rapidement imposée comme la traduction de référence dans le protestantisme francophone. Déjà révisée en 1978, dans la version "à la colombe", elle avait besoin d'une révision nouvelle. L'évolution de la langue, la facilité d'harmonisation globale apportée par l'outil informatique, l'association d'Eglises et de tendance théologiques différentes ont permis de gagner en cohérence, en solidité et en impartialité. La NBS a fait l'objet d'un travail de révision très minutieux visant à rendre la traduction encore plus fidèle aux textes originaux, en étant encore plus rigoureuse dans son expression. Soucieuse de favoriser l'étude des textes bibliques en profondeur, l'équipe de révision a recherché d'abord la cohérence : les correspondances entre les mots du texte français reflètent autant que possible les correspondances dans les langues originales. Cette traduction littérale s'effoce de rendre non seulement ce qui est dit, mais aussi la façon dont cela est dit. L'ajout de nombreux outils de lecture en font une véritable "Bible d'étude".
2001 : La Bible, nouvelle traduction
En 2001, les éditions Bayard publient La Bible, Nouvelle Traduction, dans laquelle chaque livre de la Bible a été confié à un binôme composé d’un exégète et d’un auteur de la littérature contemporaine. Cette traduction en dialogue avec la culture contemporaine s’efforce d’éviter le vocabulaire typiquement ecclésial pour rejoindre un grand public qui évolue en dehors de toute culture chrétienne. Ainsi, on ne parle plus d’« Évangile » mais d’« Annonce », ni d’« Église » mais d’« Assemblée ». Le choix de rendre la poésie hébraïque par une forme de poésie contemporaine peut surprendre le lecteur habitué à des traductions classiques, mais il produit un texte très neuf, très décapant. Le refus de toute harmonisation dans le vocabulaire ou le style rend néanmoins cette traduction difficile à utiliser pour l’étude intertextuelle. Cette édition a repris l’ordre interconfessionnel inauguré par la TOB. Editeur : Bayard édition.
2001 : La Bible d'Alexandrie (Pentateuque)
Sous la direction de Marguerite Harl, une équipe d'hellénistes traduit la Bible à partir de la Septante. Cette traduction grecque réalisée entre 150 et 250 avant notre ère est le témoin d'un état beaucoup plus ancien du texte biblique que le manuscrit hébraïque du 11e siècle qui sert de base aux autres traductions. Editeur : Le Cerf
2000 : La Bible Parole de Vie
Soucieuse de mettre la Bible à la portée même de ceux qui n’ont pas une parfaite maîtrise du français, l’Alliance biblique universelle entreprend encore dans les années 1980 la traduction de la Bible en français très simple. Ce projet répond à la demande des évêques d’Afrique francophone qui souhaitent une traduction de la Bible parfaitement compréhensible pour un public dont la première langue n’est pas le français. Les traducteurs utilisent pour cela le travail du linguiste Georges Guggenheim qui dans les années 1950 a défini, à la demande de l’Unesco, les limites du « français fondamental ». Cette base linguistique se caractérise par un vocabulaire de 3500 mots environ, des phrases courtes, une conjugaison simple. Loin d’affaiblir le texte biblique, le fait d’être soumis à de telles contraintes linguistiques, lui donne au contraire une vigueur et une actualité que les traductions classiques ne laissent plus soupçonner. Le Nouveau Testament Parole de Vie est achevé en 1993. La Bible complète est éditée en 2000, en trois versions : avec les livres deutérocanoniques (ordre grec ou ordre hébreu) et sans les livres deutérocanoniques. Cette version a reçu l’Imprimatur de la Conférence des évêques d’Afrique de l’Ouest en 2000. Editeur : Alliance biblique universelle.
1998 : La Bible des peuples
Traduction de Bernard et Louis Hureau, deux prêtres catholiques ayant une longue expérience de l’animation biblique. Cette traduction assez littérale, avec des trouvailles visant à rendre le texte plus percutant et actuel est une réédition légèrement amendée de la « Bible des Communautés chrétiennes », retirée du commerce en 1995 à la demande de la communauté juive qui trouvait certaines notes explicatives blessantes pour la sensibilité juive. Editeur : Fayard.
1992 : La Bible du Semeur
Dès 1970, dans un travail à l’époque totalement novateur (Lettres pour notre temps) et salué par le futur maître d’œuvre de la Bible en français courant, Jean-Claude Margot (Traduire sans trahir, 1979, p. 139-140), Alfred Kuen avait cherché à transcrire le texte de l’Écriture en un français compréhensible par un large public. Mettant à profit ces travaux préliminaires tout en renonçant à les reprendre tels quels à cause de leur caractère paraphrastique, le comité de traduction de la Bible du Semeur, travaillant sous l’égide de la Société biblique internationale et composé de Jacques Buchhold, André Lovérini, Alfred Kuen et Sylvain Romerowski, a élaboré une traduction nouvelle de l’Écriture selon le principe de l’équivalence dynamique ou fonctionnelle, qui vise à traduire le sens des phrases plutôt qu’à offrir une correspondance entre les mots du texte original et les mots de la traduction (cf. infra). Le comité élargi, chargé de la révision de la Bible du Semeur, qui a paru en 2000, se composait d’une quinzaine de théologiens évangéliques francophones enseignant dans les principales institutions évangéliques francophones d’Europe et d’Afrique (facultés de Vaux-sur-Seine, d’Aix-en-Provence, de Bangui et d’Abidjan, instituts bibliques de Nogent-sur-Marne, d’Emmaüs, et de Bruxelles). En 2001 paraissait La Bible d’étude. Version Semeur 2000, avec introductions générales aux livres bibliques, notes d’information et de compréhension du texte et, innovation à signaler, notes de section cherchant à aider le lecteur à discerner l’intention rédactionnelle des auteurs bibliques. Editeur : Excelsis.
1985 : La Bible, traductiond'André Chouraqui
L’écrivain juif André Chouraqui souhaite donner au lecteur de la Bible un aperçu du génie de la langue hébraïque et de l’arrière-plan sémitique du Nouveau Testament. Il retranscrit dans sa traduction les subtilités et les jeux de mots présents dans la langue originale et pousse le littéralisme aux limites de la compréhension. Chouraqui traduit un même mot dans l’original par un même mot en français. Ainsi les mots ruah en hébreu ou pneuma en grec sont systématiquement traduits par « souffle », là où les traductions plus traditionnelles parlent d’« esprit ». Pour les lecteurs qui n’ont pas accès aux langues bibliques, la traduction de Chouraqui peut paraître déconcertante à certains moments. Éditeur : Desclée de Brouwer.
1982 : La Bible en français courant
La Bible en français courant que l’Alliance biblique publie en 1982 inaugure une nouvelle approche scientifique de la traduction. Lorsque l’éloignement culturel avec la Bible risque de provoquer des incompréhensions, la traduction préfère rester fidèle au sens du texte, mais non à sa forme. On appelle « traduction par équivalence dynamique » cette approche qui prend en compte la capacité de compréhension du lecteur moderne de la Bible et qui exprime le sens des textes dans les catégories mentales du lecteur contemporain. Là où les versions traditionnelles traduisaient « Vanité des vanités, tout est vanité » au début du livre de l’Ecclésiaste, la Bible en français courant traduit « De la fumée, tout n’est que fumée » car le mot « vanité » a perdu en français contemporain son sens de « vide, vacuité, futilité ». Ce principe de traduction dynamique permet aussi de rendre le genre littéraire dans l’original par un genre littéraire correspondant en français. La traduction du livre de Job est ainsi réalisée entièrement en alexandrins, pour faire ressentir au lecteur moderne l’impression que le texte hébraïque provoquait chez ses premiers lecteurs. Une équipe interconfessionnelle a travaillé sur cette traduction qui est aujourd’hui abondamment diffusée dans tous les milieux ecclésiaux. Elle a reçu l’Imprimatur de la Conférence des évêques de France en 1995. Révisée en 1997 dans le sens d'une élévation du niveau de langue. Editeur : Alliance biblique universelle.
1981 : La BiblePierre de Beaumont
Pierre de Beaumont est un diplomate qui a souvent pu vérifier la distance culturelle qui existe entre les populations contemporaines et les textes bibliques. C’est pourquoi, il réalise une traduction dans un français très simple, permettant une lecture aisée par le plus grand nombre. Le vocabulaire de base est volontairement réduit, les phrases sont courtes, tous les verbes sont au présent de l’indicatif. L’ensemble du texte a malgré tout été revu par un professeur de l’Institut pontifical à Rome. Le texte paraît d’abord en 164 fascicules dans la collection « Aujourd’hui la Bible », avant d’être publié en un seul volume en 1981. Traduction assez libre, facile à lire, mais pas toujours très rigoureuse. Editeurs : Fayard/Mame.
1978 : La Bible à la Colombe
Révision approfondie de la Bible de Louis Segond, très prisée chez les protestants de langue française depuis 1910.
La révision porte essentiellement sur une modernisation du vocabulaire. Editeur : Alliance biblique universelle.
1975 : Traduction Œcuménique de la Bible (TOB)
Dès la publication de la Constitution Dei Verbum (1965) autorisant les traductions de la Bible interconfessionnelles, il est décidé de mettre en chantier une traduction œcuménique en français. Plus d’une centaine de spécialistes se mettent au travail avec l’enthousiasme des pionniers. Même si l’idée d’une traduction commune aux deux confessions remonte au XVIIe siècle, exprimée notamment par l’oratorien Richard Simon, c’est la première fois dans l’histoire tumultueuse des relations entre catholiques et protestants qu’une telle entreprise se réalise. Le contexte est favorable, car dans le domaine de l’exégèse et de la recherche biblique, il y a déjà longtemps que les aspects confessionnels sont passés au second plan. Non seulement cette équipe traduit le texte biblique, mais elle prépare aussi des introductions et des notes à caractère scientifique qui s’efforcent de faire un état de la recherche biblique dans les années 60-70. Le premier travail porte sur l’épître aux Romains, pomme de discorde entre catholiques et protestants depuis Luther. L’essai se révélant concluant, le Nouveau Testament paraît en 1972 et l’Ancien Testament en 1975. La TOB innove non seulement par le fait d’avoir vu collaborer des catholiques, des protestants et des orthodoxes, mais aussi par l’ordre des livres tout à fait original qu’elle propose : puisque l’Ancien Testament est traduit à partir de la Bible juive, on en reprend l’ordre en trois parties (Torah, prophètes, autres écrits), puisque les catholiques et les orthodoxes reconnaissent l’inspiration des livres deutérocanoniques, ils sont présents, mais pour ne pas gêner les protestants on reprend leur habitude de ne pas les mélanger aux autres livres de la Bible hébraïque et de les placer à la charnière entre l’Ancien et le Nouveau Testament. La traduction, bien qu’ayant été harmonisée, révèle la pluralité de ses auteurs. Elle n’en demeure pas moins d’une grande fiabilité et précision. On lui a fait le reproche quelquefois de ne pas toujours se prêter à la lecture en public. Editeurs : Société biblique française / Le Cerf.
1973 : La Bible Osty
La remarquable traduction réalisée par le chanoine Émile Osty, représente plus de 25 ans d’un minutieux labeur. En cours de route, Osty a fait appel à Joseph Trinquet, professeur au grand séminaire de Paris. Cette traduction respecte « jusqu’au scrupule » les textes originaux hébreu, araméen et grec étant l’œuvre d’une seule personne, elle se caractérise par sa grande cohérence : une même expression dans la langue originale est rendue par une même expression en français. Très précise, cette traduction s’efforce aussi de respecter les genres littéraires présents dans les livres bibliques. Utilisant toutes les ressources de la langue française, elle cherche à rendre le côté pittoresque de l’original. D’abondantes introductions et notes techniques font de le Bible Osty-Trinquet un remarquable outil pour l’exégèse. Editeur : Seuil.
1971 : La Biblede la Pléiade
Fruit d’un travail collectif, la traduction très littérale de l’Ancien Testament sous la direction d’Édouard Dhorme, offre des solutions intéressantes pour rendre non seulement le sens du texte, mais aussi sa forme. Sans tomber dans un mot-à-mot intolérable, elle navigue dans un juste milieu entre un littéralisme étroit et une interprétation qui s’éloignerait du texte. La traduction du Nouveau Testament sous la direction de Jean Grojean tente de rendre en français la parenté des mots grecs, et cherche à faire disparaître les traductions inadéquates consacrées par l’usage religieux : « le christ » perd sa majuscule, pour faire sentir au lecteur qu’il s’inscrit dans la longue chaîne de tous ceux qui avant lui ont reçu ce signe de consécration. Editeur : Gallimard.
1956 : La Bible de Jérusalem
La Bible de Jérusalem résulte d’une volonté des dominicains, grands spécialistes en Bible et archéologie, de préparer une nouvelle traduction tenant compte des progrès des sciences bibliques. Une équipe de près d’une centaine de personnes, pilotée depuis l’École biblique de Jérusalem se met au travail. Cette diversité des collaborateurs garantit que chacun traduit des livres qu’il connaît particulièrement bien. La contrepartie est que le texte final risque de manquer d’unité et d’homogénéité. Un gros travail d’harmonisation visant à une réduction drastique du champ lexical est donc entrepris avant la première publication en un seul volume en 1956.
Le titre « Bible de Jérusalem » n’apparaît qu’en 1973 à l’occasion d’une révision de l’Ancien Testament visant à serrer de plus près le texte de la Bible hébraïque. La révision de 1998 n’a que très peu retouché le texte, ce sont surtout les introductions et les notes de bas de pages qui ont été revues pour rendre compte des récentes avancées des sciences bibliques. La version de Jérusalem reste la plus utilisée par les chrétiens catholiques en France. Editeur : Le Cerf.
L'Alliance biblique française propose des traductions adaptées à différents publics : traductions littérales pour ceux qui
recherchent la précision, traductions dynamiques pour ceux qui veulent avant tout comprendre le sens du texte.
Les versions récentes de la Bible en français
Depuis 1950, date de la parution de la Bible de Maredsous, le public francophone a connu une profusion de traductions nouvelles. Aucune ne pourra devenir l’équivalent d’une Vulgate acceptée et utilisée par tous. Notre époque ne s’y prête plus. Aujourd’hui par contre, chacun, quelle que soit son origine confessionnelle, son âge ou son bagage culturel, peut trouver une traduction de la Bible qui conviendra à l’usage qu’il souhaite en faire : lecture et méditation personnelle, étude textuelle, lecture publique.
2010 : La Traduction de la Bible en langue des signes française Luc, Jonas
La première traduction en langue des signes française (LSF) d’une partie de la Bible – l’évangile de Luc – a constitué en 2010 un grand événement pour la communauté sourde francophone. Enfin le livre le plus lu au monde devenait accessible aux utilisateurs de la LSF, dans leur propre langue, concernant en France métropolitaine 80 000 personnes sourdes et malentendantes, mais aussi 75 000 personnes entendantes qui utilisent la LSF pour communiquer avec leurs proches. La LSF est une langue à part entière, visuelle et gestuelle, linéaire et non vocale. Et comme les autres langues, elle possède sa propre syntaxe, son lexique et sa stylistique. Pour un chrétien sourd, voir l’évangile de Luc, c’est « entendre parler » Dieu dans sa langue.
2010 : La Traduction œcuménique de la Bible
Révision, texte et notes, de l'édition de 1975. La TOB 2010 constitue un événement éditorial et oecuménique sans précédent puisqu’elle contient six livres deutérocanoniques supplémentaires, en usage dans la liturgie des Eglises orthodoxes : 3 et 4 Esdras, 3 et 4 Maccabées, la Prière de Manassé et le Psaume 151.
2002 : La Nouvelle Bible Segond
La traduction de la Bible par Louis Segond, réalisée à la fin du 19ème siècle, s'est rapidement imposée comme la traduction de référence dans le protestantisme francophone. Déjà révisée en 1978, dans la version "à la colombe", elle avait besoin d'une révision nouvelle. L'évolution de la langue, la facilité d'harmonisation globale apportée par l'outil informatique, l'association d'Eglises et de tendance théologiques différentes ont permis de gagner en cohérence, en solidité et en impartialité. La NBS a fait l'objet d'un travail de révision très minutieux visant à rendre la traduction encore plus fidèle aux textes originaux, en étant encore plus rigoureuse dans son expression. Soucieuse de favoriser l'étude des textes bibliques en profondeur, l'équipe de révision a recherché d'abord la cohérence : les correspondances entre les mots du texte français reflètent autant que possible les correspondances dans les langues originales. Cette traduction littérale s'effoce de rendre non seulement ce qui est dit, mais aussi la façon dont cela est dit. L'ajout de nombreux outils de lecture en font une véritable "Bible d'étude".
2001 : La Bible, nouvelle traduction
En 2001, les éditions Bayard publient La Bible, Nouvelle Traduction, dans laquelle chaque livre de la Bible a été confié à un binôme composé d’un exégète et d’un auteur de la littérature contemporaine. Cette traduction en dialogue avec la culture contemporaine s’efforce d’éviter le vocabulaire typiquement ecclésial pour rejoindre un grand public qui évolue en dehors de toute culture chrétienne. Ainsi, on ne parle plus d’« Évangile » mais d’« Annonce », ni d’« Église » mais d’« Assemblée ». Le choix de rendre la poésie hébraïque par une forme de poésie contemporaine peut surprendre le lecteur habitué à des traductions classiques, mais il produit un texte très neuf, très décapant. Le refus de toute harmonisation dans le vocabulaire ou le style rend néanmoins cette traduction difficile à utiliser pour l’étude intertextuelle. Cette édition a repris l’ordre interconfessionnel inauguré par la TOB. Editeur : Bayard édition.
2001 : La Bible d'Alexandrie (Pentateuque)
Sous la direction de Marguerite Harl, une équipe d'hellénistes traduit la Bible à partir de la Septante. Cette traduction grecque réalisée entre 150 et 250 avant notre ère est le témoin d'un état beaucoup plus ancien du texte biblique que le manuscrit hébraïque du 11e siècle qui sert de base aux autres traductions. Editeur : Le Cerf
2000 : La Bible Parole de Vie
Soucieuse de mettre la Bible à la portée même de ceux qui n’ont pas une parfaite maîtrise du français, l’Alliance biblique universelle entreprend encore dans les années 1980 la traduction de la Bible en français très simple. Ce projet répond à la demande des évêques d’Afrique francophone qui souhaitent une traduction de la Bible parfaitement compréhensible pour un public dont la première langue n’est pas le français. Les traducteurs utilisent pour cela le travail du linguiste Georges Guggenheim qui dans les années 1950 a défini, à la demande de l’Unesco, les limites du « français fondamental ». Cette base linguistique se caractérise par un vocabulaire de 3500 mots environ, des phrases courtes, une conjugaison simple. Loin d’affaiblir le texte biblique, le fait d’être soumis à de telles contraintes linguistiques, lui donne au contraire une vigueur et une actualité que les traductions classiques ne laissent plus soupçonner. Le Nouveau Testament Parole de Vie est achevé en 1993. La Bible complète est éditée en 2000, en trois versions : avec les livres deutérocanoniques (ordre grec ou ordre hébreu) et sans les livres deutérocanoniques. Cette version a reçu l’Imprimatur de la Conférence des évêques d’Afrique de l’Ouest en 2000. Editeur : Alliance biblique universelle.
1998 : La Bible des peuples
Traduction de Bernard et Louis Hureau, deux prêtres catholiques ayant une longue expérience de l’animation biblique. Cette traduction assez littérale, avec des trouvailles visant à rendre le texte plus percutant et actuel est une réédition légèrement amendée de la « Bible des Communautés chrétiennes », retirée du commerce en 1995 à la demande de la communauté juive qui trouvait certaines notes explicatives blessantes pour la sensibilité juive. Editeur : Fayard.
1992 : La Bible du Semeur
Dès 1970, dans un travail à l’époque totalement novateur (Lettres pour notre temps) et salué par le futur maître d’œuvre de la Bible en français courant, Jean-Claude Margot (Traduire sans trahir, 1979, p. 139-140), Alfred Kuen avait cherché à transcrire le texte de l’Écriture en un français compréhensible par un large public. Mettant à profit ces travaux préliminaires tout en renonçant à les reprendre tels quels à cause de leur caractère paraphrastique, le comité de traduction de la Bible du Semeur, travaillant sous l’égide de la Société biblique internationale et composé de Jacques Buchhold, André Lovérini, Alfred Kuen et Sylvain Romerowski, a élaboré une traduction nouvelle de l’Écriture selon le principe de l’équivalence dynamique ou fonctionnelle, qui vise à traduire le sens des phrases plutôt qu’à offrir une correspondance entre les mots du texte original et les mots de la traduction (cf. infra). Le comité élargi, chargé de la révision de la Bible du Semeur, qui a paru en 2000, se composait d’une quinzaine de théologiens évangéliques francophones enseignant dans les principales institutions évangéliques francophones d’Europe et d’Afrique (facultés de Vaux-sur-Seine, d’Aix-en-Provence, de Bangui et d’Abidjan, instituts bibliques de Nogent-sur-Marne, d’Emmaüs, et de Bruxelles). En 2001 paraissait La Bible d’étude. Version Semeur 2000, avec introductions générales aux livres bibliques, notes d’information et de compréhension du texte et, innovation à signaler, notes de section cherchant à aider le lecteur à discerner l’intention rédactionnelle des auteurs bibliques. Editeur : Excelsis.
1985 : La Bible, traductiond'André Chouraqui
L’écrivain juif André Chouraqui souhaite donner au lecteur de la Bible un aperçu du génie de la langue hébraïque et de l’arrière-plan sémitique du Nouveau Testament. Il retranscrit dans sa traduction les subtilités et les jeux de mots présents dans la langue originale et pousse le littéralisme aux limites de la compréhension. Chouraqui traduit un même mot dans l’original par un même mot en français. Ainsi les mots ruah en hébreu ou pneuma en grec sont systématiquement traduits par « souffle », là où les traductions plus traditionnelles parlent d’« esprit ». Pour les lecteurs qui n’ont pas accès aux langues bibliques, la traduction de Chouraqui peut paraître déconcertante à certains moments. Éditeur : Desclée de Brouwer.
1982 : La Bible en français courant
La Bible en français courant que l’Alliance biblique publie en 1982 inaugure une nouvelle approche scientifique de la traduction. Lorsque l’éloignement culturel avec la Bible risque de provoquer des incompréhensions, la traduction préfère rester fidèle au sens du texte, mais non à sa forme. On appelle « traduction par équivalence dynamique » cette approche qui prend en compte la capacité de compréhension du lecteur moderne de la Bible et qui exprime le sens des textes dans les catégories mentales du lecteur contemporain. Là où les versions traditionnelles traduisaient « Vanité des vanités, tout est vanité » au début du livre de l’Ecclésiaste, la Bible en français courant traduit « De la fumée, tout n’est que fumée » car le mot « vanité » a perdu en français contemporain son sens de « vide, vacuité, futilité ». Ce principe de traduction dynamique permet aussi de rendre le genre littéraire dans l’original par un genre littéraire correspondant en français. La traduction du livre de Job est ainsi réalisée entièrement en alexandrins, pour faire ressentir au lecteur moderne l’impression que le texte hébraïque provoquait chez ses premiers lecteurs. Une équipe interconfessionnelle a travaillé sur cette traduction qui est aujourd’hui abondamment diffusée dans tous les milieux ecclésiaux. Elle a reçu l’Imprimatur de la Conférence des évêques de France en 1995. Révisée en 1997 dans le sens d'une élévation du niveau de langue. Editeur : Alliance biblique universelle.
1981 : La BiblePierre de Beaumont
Pierre de Beaumont est un diplomate qui a souvent pu vérifier la distance culturelle qui existe entre les populations contemporaines et les textes bibliques. C’est pourquoi, il réalise une traduction dans un français très simple, permettant une lecture aisée par le plus grand nombre. Le vocabulaire de base est volontairement réduit, les phrases sont courtes, tous les verbes sont au présent de l’indicatif. L’ensemble du texte a malgré tout été revu par un professeur de l’Institut pontifical à Rome. Le texte paraît d’abord en 164 fascicules dans la collection « Aujourd’hui la Bible », avant d’être publié en un seul volume en 1981. Traduction assez libre, facile à lire, mais pas toujours très rigoureuse. Editeurs : Fayard/Mame.
1978 : La Bible à la Colombe
Révision approfondie de la Bible de Louis Segond, très prisée chez les protestants de langue française depuis 1910.
La révision porte essentiellement sur une modernisation du vocabulaire. Editeur : Alliance biblique universelle.
1975 : Traduction Œcuménique de la Bible (TOB)
Dès la publication de la Constitution Dei Verbum (1965) autorisant les traductions de la Bible interconfessionnelles, il est décidé de mettre en chantier une traduction œcuménique en français. Plus d’une centaine de spécialistes se mettent au travail avec l’enthousiasme des pionniers. Même si l’idée d’une traduction commune aux deux confessions remonte au XVIIe siècle, exprimée notamment par l’oratorien Richard Simon, c’est la première fois dans l’histoire tumultueuse des relations entre catholiques et protestants qu’une telle entreprise se réalise. Le contexte est favorable, car dans le domaine de l’exégèse et de la recherche biblique, il y a déjà longtemps que les aspects confessionnels sont passés au second plan. Non seulement cette équipe traduit le texte biblique, mais elle prépare aussi des introductions et des notes à caractère scientifique qui s’efforcent de faire un état de la recherche biblique dans les années 60-70. Le premier travail porte sur l’épître aux Romains, pomme de discorde entre catholiques et protestants depuis Luther. L’essai se révélant concluant, le Nouveau Testament paraît en 1972 et l’Ancien Testament en 1975. La TOB innove non seulement par le fait d’avoir vu collaborer des catholiques, des protestants et des orthodoxes, mais aussi par l’ordre des livres tout à fait original qu’elle propose : puisque l’Ancien Testament est traduit à partir de la Bible juive, on en reprend l’ordre en trois parties (Torah, prophètes, autres écrits), puisque les catholiques et les orthodoxes reconnaissent l’inspiration des livres deutérocanoniques, ils sont présents, mais pour ne pas gêner les protestants on reprend leur habitude de ne pas les mélanger aux autres livres de la Bible hébraïque et de les placer à la charnière entre l’Ancien et le Nouveau Testament. La traduction, bien qu’ayant été harmonisée, révèle la pluralité de ses auteurs. Elle n’en demeure pas moins d’une grande fiabilité et précision. On lui a fait le reproche quelquefois de ne pas toujours se prêter à la lecture en public. Editeurs : Société biblique française / Le Cerf.
1973 : La Bible Osty
La remarquable traduction réalisée par le chanoine Émile Osty, représente plus de 25 ans d’un minutieux labeur. En cours de route, Osty a fait appel à Joseph Trinquet, professeur au grand séminaire de Paris. Cette traduction respecte « jusqu’au scrupule » les textes originaux hébreu, araméen et grec étant l’œuvre d’une seule personne, elle se caractérise par sa grande cohérence : une même expression dans la langue originale est rendue par une même expression en français. Très précise, cette traduction s’efforce aussi de respecter les genres littéraires présents dans les livres bibliques. Utilisant toutes les ressources de la langue française, elle cherche à rendre le côté pittoresque de l’original. D’abondantes introductions et notes techniques font de le Bible Osty-Trinquet un remarquable outil pour l’exégèse. Editeur : Seuil.
1971 : La Biblede la Pléiade
Fruit d’un travail collectif, la traduction très littérale de l’Ancien Testament sous la direction d’Édouard Dhorme, offre des solutions intéressantes pour rendre non seulement le sens du texte, mais aussi sa forme. Sans tomber dans un mot-à-mot intolérable, elle navigue dans un juste milieu entre un littéralisme étroit et une interprétation qui s’éloignerait du texte. La traduction du Nouveau Testament sous la direction de Jean Grojean tente de rendre en français la parenté des mots grecs, et cherche à faire disparaître les traductions inadéquates consacrées par l’usage religieux : « le christ » perd sa majuscule, pour faire sentir au lecteur qu’il s’inscrit dans la longue chaîne de tous ceux qui avant lui ont reçu ce signe de consécration. Editeur : Gallimard.
1956 : La Bible de Jérusalem
La Bible de Jérusalem résulte d’une volonté des dominicains, grands spécialistes en Bible et archéologie, de préparer une nouvelle traduction tenant compte des progrès des sciences bibliques. Une équipe de près d’une centaine de personnes, pilotée depuis l’École biblique de Jérusalem se met au travail. Cette diversité des collaborateurs garantit que chacun traduit des livres qu’il connaît particulièrement bien. La contrepartie est que le texte final risque de manquer d’unité et d’homogénéité. Un gros travail d’harmonisation visant à une réduction drastique du champ lexical est donc entrepris avant la première publication en un seul volume en 1956.
Le titre « Bible de Jérusalem » n’apparaît qu’en 1973 à l’occasion d’une révision de l’Ancien Testament visant à serrer de plus près le texte de la Bible hébraïque. La révision de 1998 n’a que très peu retouché le texte, ce sont surtout les introductions et les notes de bas de pages qui ont été revues pour rendre compte des récentes avancées des sciences bibliques. La version de Jérusalem reste la plus utilisée par les chrétiens catholiques en France. Editeur : Le Cerf.
Re: Les premières traductions de la Bible
La toute première traduction de la Bible est sans doute la Septante.
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