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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:54

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Ecologie: que disent les religions du Livre

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A l’heure où le monde tente de trouver une stratégie collective pour répondre aux problèmes climatiques, que nous disent les principales confessions de notre époque ? Comment les trois religions du Livre décrivent-elles, dans les grandes lignes, le rapport de l’homme à la nature ? L’homme doit-il la dominer ? En est-il le gardien ? Ou est-il simplement une expression de la nature ?

La crise écologique dont nous prenons conscience actuellement nous amène à nous interroger sur nos modèles de développement et sur les valeurs de ceux qui en ont été les promoteurs. Les études scientifiques sur l’histoire du changement climatique, par exemple, ont révélé que le décrochage des températures qui nous entraîne dans un réchauffement planétaire croissant est le résultat d’un phénomène qui a pris naissance au début de l’ère industrielle, pointant ainsi la responsabilité historique des puissances occidentales de l’époque. Or, ces civilisations, comme toutes les autres, sont le produit d’histoires particulières, dont les racines et les visions se sont nourries de diverses croyances. Depuis la nuit des temps, l’Homme a interrogé l’univers en formulant des réponses multiples. Certaines ont disparu, d’autres se sont imposées au fil du temps pour constituer les grandes spiritualités de notre époque.
Sans prétendre être exhaustif, nous avons interrogé trois personnalités appartenant aux religions du Livre, avec à chaque fois cette question : Que répondez-vous face aux préoccupations environnementales des hommes ? 

Réponse des églises chrétiennes 

L’historien du Moyen Âge Lynn White, dans un fameux article publié en 1967 et intitulé « Les racines historique de la crise écologique », affirme que l’interprétation du Livre de la Genèse (versets 1, 27, 28 « Soumettez la terre et dominez-là »]) a conduit à une prédation de l’Homme sur la nature et, in fine, à une crise écologique. Sa démonstration induit que les racines historiques de cette crise sont religieuses et, en l’occurrence, judéo-chrétiennes. Une interprétation qui a soulevé de nombreux débats théologiques chez les catholiques comme chez les protestants, qui ont récusé cette responsabilité.

Face à cette accusation, la principale réponse pour les Eglises viendra, à l’époque, du théologien allemand Jurgen Moltmann, auteur du premier traité chrétien sur l’écologie, Dieu dans la création-Traité écologique de la création. Moltmann, dans sa critique de l’article de Lynn White, affirme que c’est une mauvaise interprétation des versets de la Genèse et que cette lecture passe à côté de la beauté et de la cohérence du récit de la création. Une réponse ainsi expliquée par le jésuite Sébastien Carcelle, que nous avons rencontré. « La création du monde s’est faite en sept jours, s’exclame-t-il. Et on s’arrêterait au sixième, quand Dieu crée l’Homme et lui demande de soumettre la création, les créatures ? Cette lecture se concentre sur un tout petit détail, alors que le terme du projet créateur, ce n’est pas la création de l’Homme le sixième jour, mais le septième jour, quand Dieu partage avec l’Homme un repos heureux et contemplatif de la Création ». En résumé, selonSébastien Carcelle, « Dieu confie les clés du camion à l’Homme, il lui confie son projet créateur en lui disant : 'Vas-y, continue, il y a de l’inachevé et je ne veux pas le faire sans toi. A toi de continuer à créer', faisant ainsi de l’Homme le dépositaire ou plutôt le jardinier de la création divine ».
 
Au-delà de ces débats théologiques, les écologistes restèrent très longtemps méfiants vis-à-vis de l’Eglise catholique, principalement, l’accusant de ne pas prendre clairement position, de n’avoir jamais, par exemple, considéré comme « péché » le fait de porter atteinte à la nature, et d’avoir historiquement toujours cherché à éradiquer la pensée animiste qui célèbre diverses formes d’esprit de la nature. L’Eglise, en guise de réponse, reconnaît que l’interprétation des Ecritures suppose une retraduction permanente des textes en fonction du contexte.« On ne lit pas la Bible comme on la lisait il y a cinquante ou deux cents ans. Et c’est plutôt un très bon signe, affirme Sébastien Carcelle. C’est la preuve que les églises chrétiennes cherchent à être en prise, de facto, avec les questions que se posent les hommes et les femmes à chaque époque. Donc, elle n’est pas toujours en pôle position, mais elle s’adapte et évolue. »
 
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]l’encyclique « Laudato si » du pape François qui marque une inflexion très claire de l’Eglise de RomeReuters/Max Rossi
Depuis les années 1980, les églises se sont emparées de la problématique écologique, comme l’explique le journal La Croixet elles ont commencé à reconnaître leur part de responsabilité, confessant « n’avoir pas témoigné de l’amour de Dieu pour toutes et chacune de ses créatures ». Depuis, elles se sont adaptées et ont multiplié les déclarations pour sensibiliser leurs fidèles aux enjeux de leurs temps. Dernière évolution toute récente, l’encyclique « Laudato si » du pape François qui marque une inflexion très claire de l’Eglise de Rome, avec un souci et une attention forte portée aux questions écologiques.
 
De leur côté, les Eglises protestantes et orthodoxes se sont depuis longtemps engagées concrètement sur le terrain écologique. Le Conseil œcuménique des églises (COE) basé à Genève, qui rassemble 500 millions de fidèles (protestants et orthodoxes) à travers le monde, a été, dès la fin des années 1960, l’un des promoteurs de la réflexion sur le développement durable. Aujourd’hui, on observe que des monastères orthodoxes, en Roumanie et en France, se sont convertis à l’agro-écologie de l’écologiste Pierre Rabhi. Le Patriarche orthodoxe de Constantinople, Bartholomé, surnommé le « Pape vert », organise des rencontres sur le thème de l’environnement. L’Eglise d’Angleterre a décidé, en avril dernier, d’après le quotidienLibération, de retirer 16,7 millions d’euros qu’elle avait investis dans le secteur des centrales à charbon et dans les sables bitumineux, annonçant qu’elle n’investirait plus dans des entreprises qui tirent plus de 10 % de leur chiffre d’affaires de ces activités qui affectent l’environnement. Des Eglises luthériennes se sont même dotées, en Allemagne, en Suède et aux Pays-Bas, d’un label écologique pour leurs paroisses, s’engageant ainsi à respecter des objectifs écologiques.
 
Réponse du Judaïsme
 
Dès qu’on interroge le Judaïsme, on se réfère comme pour les chrétiens à la fois à la tradition écrite et à la tradition orale, en l’occurrence à la Tora et aux interprétations des textes par les rabbins à travers les âges. Pour le Rabbin Philippe Haddad, même s’il y a dans les premiers textes, l’affirmation d’un anthropocentrisme de l’Homme au milieu de la création divine, la tradition juive l’interprète comme une forme de responsabilité où l’Homme serait le gestionnaire de la création : « Il est difficile d’imaginer que Dieu ait créé un monde, l’ait offert à l’Homme pour lui dire : 'Maintenant vas-y, détruits ce que j’ai construit'. On voit bien que la logique est une mise en ordre, un maintien du monde... et une harmonisation des éléments de la création ». Une lecture qui dit aux hommes en substance : il faut agir de la sorte. L’Homme a une capacité de domination pour pouvoir agir sur le monde et il peut le modifier « comme un jardinier », précise le Rabbin Philippe Haddad qui ajoute : « Dans le deuxième chapitre de la Bible, il est écrit : 'Dieu crée l’Homme, il le place dans le jardin [et le texte dit] pour le garder et pour le préserver...' Il y a bien l’idée ici de la conservation de la nature. Il ne s’agit pas d’être un prédateur, mais d’avoir une responsabilité ». Des recommandations que l’on retrouve dans de nombreux textes du Talmud issus de la tradition orale qui donne toute une conception de l’urbanisme et de l’environnement, affirmant que l’Homme est en lien avec la nature et que s’il la détruit, c’est lui-même qu’il détruit et qu’alors, il remet en question toute la volonté de Dieu. Et Philippe Haddad de conclure : « Je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui, le fait que l’on pollue les mers ou l’atmosphère, ce soit pour accomplir le verset de la Bible 'Conquérez le monde et dominez- le'. Je pense que ce sont des intérêts économiques, et qu’on fait ça au nom d’un veau d’or… Car dans la tradition juive, l’Homme doit être responsable. »

Réponse de l’Islam
Autre regard, autre vision, pour le philosophe Mohamed Taleb, le Coran avant d’être un livre est d’abord un souffle, une parole, et c’est pour cela que dans les grandes traditions musulmanes, comme dans le soufisme, mais pas seulement, le texte, avant d’être lu de manière théologique, est d’abord psalmodié. « L’importance de cette psalmodie permet de souligner l’importance du souffle, de la respiration. Il y a un acte de lecture par lequel le Coran, le lecteur et l’univers entier se conjuguent mutuellement. Le fait d’expirer l’univers en lisant le Coran et le fait de lire le Coran en regardant l’univers et les règnes animal, végétal et minéral permet de voir l’inclusion entre le grand livre révélé et le grand livre de la nature. »
 
Pour l’imam Tiégo Tiemtoré, cité dans l’Observateur Paalga, « tout musulman a un devoir de protection de l’environnement ». Il cite : « Le Prophète passa un jour près d’un compagnon, Sa’d, qui faisait du gaspillage d’eau dans ses ablutions. 'Que signifie ce gaspillage, Sa’d ?', lui demanda-t-il. 'Peut-il y avoir du gaspillage dans les ablutions ?' Oui, répondit le Prophète,'même si tu te trouves au bord d’un cours d’eau' » (rapporté par Ibn Mâja).
 
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Grande mosquée de Niamey, 1er mai 2015. Pour l’imam Tiégo Tiemtoré, «tout musulman a un devoir de protection de l’environnement».AFP/ Boureima Hama

Dieu affirme aux hommes qu’il a mis les ressources du monde à leur service pour qu’ils puissent vivre sur terre l’épreuve de la vie : «'Dieu est celui qui a créé les cieux et la terre et qui, du ciel, a fait descendre une eau grâce à laquelle il a produit des fruits pour vous nourrir… Il a mis à votre service les rivières, le soleil, la lune, à votre service la nuit et le jour, et il vous a accordé tout ce que vous lui avez demandé. Et si vous comptiez les bienfaits de Dieu, vous ne sauriez les dénombrer » (Coran 14/32-34 ; 31/20 ; 45/12-13 ; 11/7).

L’Homme a le droit de tirer profit des ressources qui se trouvent sur terre, estime l’Imam Tiégo Tiemtoré. Cependant, il a aussi le devoir de le faire de façon modérée. L’Islam a donc érigé des principes que l’Homme doit respecter dans son utilisation des ressources de la terre. Les rapports avec la création humaine, végétale et animale, sont codifiés et plusieurs hadîth du Prophète mettent en exergue certains devoirs que l’Homme a vis-à-vis de la nature. Donc, l’Homme doit bien gérer les ressources qui sont un don de Dieu.

Face à la crise écologique, comment « ré-enchanter le monde », pour reprendre le mot du célèbre sociologue Max Weber. L’Homme ne se sauvera pas seul et il est urgent de restaurer l’unité entre l’Homme et la nature ou entre l’humain, le divin et le cosmique. En tout cas, les religions ont chacune aujourd’hui des réponses.

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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:55

Au commencement était le végétalisme
Bible :

Genèse 1: 29 Et Dieu dit : Voici, je vous donne toute herbe portant de la semence et qui est à la surface de toute la terre, et tout arbre ayant en lui du fruit d'arbre et portant de la semence : ce sera votre nourriture. 

30 Et à tout animal de la terre, à tout oiseau du ciel, et à tout ce qui se meut sur la terre, ayant en soi un souffle de vie, je donne toute herbe verte pour nourriture. Et cela fut ainsi.





Genèse 1:22 Et Dieu les bénit, en disant : Croissez et multipliez, et remplissez les eaux dans les mers; et que les oiseaux multiplient sur la terre. 23 Et il y eut un soir, et il y eut un matin; ce fut le cinquième jour. 26 Puis Dieu dit : Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu'il domine sur les poissons de la mer, et sur les oiseaux des cieux, et sur le bétail, et sur toute la terre, et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre. 27 Et Dieu créa l'homme à son image; il le créa à l'image de Dieu; il les créa mâle et femelle. 28 Et Dieu les bénit; et Dieu leur dit: Croissez et multipliez, et remplissez la terre, et l'assujettissez, et dominez sur les poissons de la mer et sur les oiseaux des cieux, et sur tout animal qui se meut sur la terre.

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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:56

Religion et écologie : quand le Ciel veut sauver la Terre

Souvent présenté comme une forme de dévotion moderne consacrée à la nature, le respect de l’environnement a toujours occupé une place non négligeable dans les traditions religieuses soucieuses de garantir le partage des ressources avec les générations futures.

Le caractère désastreux des conséquences écologiques liées aux activités de l’homme pousse parfois certaines personnes à se tourner vers la religion pour y trouver des réponses. Mais quels liens précis existent entre religion et écologie ? Selon Jean-Marie Pelt, président de l’Institut européen de l’écologie, « toutes les religions ont transmis un message concernant les rapports de l’homme avec la nature». «Dans les monothéismes, explique-t-il, une idée commune s’impose aussi bien dans la Bible que dans le Coran : l’homme doit "garder et jardiner la terre". Or, le jardinier cultive son jardin avec tendresse et délicatesse. Nous devons retrouver ce rapport harmonieux et n’intervenir dans la nature qu’avec mesure». Pour les religions monothéistes, donc, l’homme se doit de préserver la terre. Elles condamnent toutes ainsi le consumérisme sans frein. Certains croyants de confession musulmane, comme Souleymane, 21 ans, surveillant de lycée, tentent à leur manière de rester fidèles à ces enseignements et de préserver l’environnement. «Je suis conscient des problèmes générés sur la terre et depuis tout petit mes frères, ma sœur et moi avons grandi dans une famille très économe, où les questions de protection de la nature et des ressources naturelles avaient toute leur place» raconte-t-il. «Nous devions faire attention à ne pas gaspiller trop d’eau, ni de nourriture. Cette éducation m’a permis de conserver et d’améliorer mon comportement vis-à-vis de l’environnement», indique le jeune homme. Comme le souligne Jean-Marie Pelt, si l’écologie n’est pas une religion, «elle reprend à son compte le respect de la terre mère, si caractéristique des peuples premiers». Les religions orientales comme le bouddhisme ou l’hindouisme ont souvent poussé très loin, elles aussi, leur souci de protection à l’égard de tous les êtres vivants. En islam, on peut également retrouver cette sensibilité au cœur de certaines traditions soufies.

Lorsque les questions écologiques mènent vers la spiritualité 
En effet, quelle que soit la religion choisie, toutes incitent à une certaine sobriété considérée comme indissociable d’une réelle pratique spirituelle. «Une authentique élévation religieuse et morale conduit à faire un usage parcimonieux des ressources naturelles afin de ne pas épuiser la terre et pour permettre aux générations futures de vivre sur une planète encore riche en ressources et pas complètement polluée» précise le président de l’Institut européen de l’écologie. D’après lui, si la spiritualité commence lorsque l’homme se réfère à plus grand que soi, le respect de la nature peut alors être porteur de spiritualité. Une observation qui rejoint la connexion de l’écologie avec les mouvements modernes de développement personnel où la culture du moi ou du bien être individuel fait peu de cas de la relation avec les autres. «Or, explique Jean-Marie Pelt, la spiritualité se déploie à travers le passage du «Je» au «Nous». Il importe que l’écologie se situe clairement en faveur d’une plus grande solidarité entre les hommes et d’une plus grande convivialité pas seulement dans les discours mais aussi dans les faits. L’écologie se doit de promouvoir l’altruisme», poursuit-il.

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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:56

L'écologie est-elle une science ou une religion ?

L’idée est largement répandue : l’écologie serait, aujourd’hui, la nouvelle religion. Ce culte de la Terre Mère prendrait des formes diverses : le catastrophisme issu de l’allemand Hans Jonas, repris par Jean-Pierre Dupuy ; l’écosophie holiste du norvégien Arne Naess, l’hypothèse Gaïa de l’américain James Lovelock.
 
Et bien des fantaisies spirituelles alternatives, fascinées par le modèle exotique des religions lointaines ou archaïques, comme par l’idée d’une communion avec l’origine - qui se retrouve dans le fantasme rousseauiste de ce que les rationalistes appellent "l’illusion du retour à l’état de nature". Il faudrait manger "préhistorique", réactiver nos sens et s’initier au fengshui.
 
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Spiritualité ou réflexion rationnelle ?
 
La pensée écologique marquerait ainsi la résurgence d’une religion régressive et obscurantiste, appuyée sur la culpabilité et la crainte, et construisant des récits apocalyptiques sur la base de données scientifiques incertaines. Lancée par l’[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] de 1992, l’idée a été reprise par certains scientifiques (comme Claude Allègre) ou essayistes (Pascal Brückner) qui se sont donnés pour tâche de dénoncer l’imposture de l’écologie en pointant la religiosité, l’irrationalité de cette conception du monde : non, objectent écosceptiques et écocritiques, la nature n’est pas sacrée, et c’est aller à l’encontre de l’humanisme occidental que d’attaquer le progrès, la technologie et la science, au nom de la nature et de sa sauvegarde.
 
L’accusation peut paraître excessive, et même absurde : l’écologie n’est-elle pas d’abord une science ? En montrant la nécessité d’un recentrement écosystémique de l’action humaine et d’un rééquilibrage de ses impacts, l’écologie semble faire davantage preuve d’une réflexion rationnelle (basée sur le calcul et la modélisation) que d’un débordement émotionnel lié à une spiritualité…
 
Et pourtant : il y a certainement là un penchant de l’écologie qui mériterait d’être analysé. D’un point de vue éthique, la volonté de dépasser l’idée d’une nature-objet à valeur instrumentale passe par le respect de la valeur intrinsèque des espèces et des écosystèmes, sujets de droit autant que de morale.
 
Et si, comme l’affirme J. Baird Callicott, cette valorisation est anthropogénique (décrétée par l’homme), elle est due à une vision symbolique de nos rapports avec la nature, qu’aucune science ne peut produire. L’écologie invite à ré-habiter la Terre, renouer avec le non-humain : spiritualiser notre être-au-monde, réaffirmer une appartenance avec le milieu de vie, contre le froid dualisme nature/culture qui a fait la preuve de son inadéquation. Une attitude dont les religions monothéistes elles-mêmes se sont toujours tenues proches, malgré leur anthropocentrisme revendiqué : la Création n’est-elle pas marquée de la sacralité de son origine ? Et sa beauté, qui nous est si facilement accessible, ne dévoile-t-elle pas quelque chose du lien profond qui nous unit à elle ?
 
En rouvrant la question philosophique de la nature, c’est toute l’ambivalence de nos relations avec elle que nous risquons de voir ressurgir. Un impensé occulté par des siècles de technique et d’industrie commence à réapparaître : ne laissons pas passer cette chance.
 
 
"Y a-t-il du sacré dans la nature ?", un colloque organisé les 27 et 28 avril par l’Université Paris I – PhiCo Philosophies contemporaines, en partenariat avec le Nouvel Observateur et la Mairie de Paris. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:57

Nous sommes toutes et tous, peu importe notre religion, notre culture, ou notre pays, de plus en plus conscients de la nécessité d’unir nos efforts pour prendre soin de la planète et par conséquent, prendre soin de nous-même. Mais à ce propos, religion et environnement font-ils bon ménage ?




 
On trouve les premiers textes religieux sur l’écologie et le gaspillage dans la Halakha (la loi juive) et plus précisément sous le nom de « Bal tach’hit », la prévention des destructions injustifiées. On trouve d’ailleurs dans le Deutéronome des versets appelant à faire la différence entre l’arbre qu’on peut manger et l’arbre qui n’est pas comestible et qu’on peut couper pour construire une maison. (Deutéronome 20, 19 et 20).
 
— LE JUDAÏSME : LA NATURE COMME INSTRUMENT DE PUNITION
De grandes parties de l’écosystème sont détruites par la montée des eaux. À l’exception de la famille de Noé, toute l’humanité est anéantie.
Si vous avez regardé le prince d’Egypte, vous connaissez donc l’histoire des Dix plaies d’Egypte, s’affiliant à l’histoire de Moïse. Parmi ces plaies, on compte l’invasion de sauterelles, la mort du bétail, ou encore les maladies de peau. Un grand nombre de désastres écologiques vont tuer une partie de la population égyptienne, ses esclaves, ses animaux et ses récoltes. Plusieurs des plaies conduisent à une pollution dramatique de l’eau et de l’air. « Le Nil fut nauséabond, et les Égyptiens ne purent boire des eaux depuis le fleuve… » (Exode 7, 21).
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]2de plaie d’Egypte : « les grenouilles tombèrent et recouvrirent l’Égypte » – Crédit photo 2014 Twentieth Century Fox : « Exodus: Gods And Kings »
 
— LA BIBLE : CULTURE ET PROTECTION DE LA NATURE
Quand on se réfère à la Genèse biblique, nous lisons que Dieu nous confia la terre pour que nous la cultivions et la protégions. Le 6 juin 2013, le pape François s’était d’ailleurs exprimé à ce sujet :
«Cultiver et protéger comprend aussi les rapports humains. Si la crise actuelle est largement liée à l’environnement, elle touche également l’homme. La personne est en danger et ceci justifie la priorité d’une écologie humaine. (…) Il s’agit d’une culture du gaspillage et du rejet qui tend à devenir commune. (…) Cette culture rend insensible jusqu’au gâchis alimentaire. La société de consommation nous a habitués à l’excès et au gaspillage des aliments, auxquels on finit par ne plus accorder de valeur. Et ceci va bien au-delà des simples paramètres économiques, car ces denrées sont en fait comme volées aux pauvres et aux affamés. Je vous invite donc à réfléchir sur cette problématique. (…) Prenons tous l’engagement à respecter et protéger l’environnement et la création. Soyons attentifs à toute personne et luttons contre la culture du gaspillage et du rejet au profit d’une culture de la solidarité et du dialogue ».
D’ailleurs Jésus, qui pouvait à l’infini multiplier les pains, a pris soin de faire ramasser les restes dans des paniers «afin que rien ne soit perdu» (Jean 6:12).
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Le déluge (Francis Danby, Tate Gallery) – Public Domain
 
— L’ISLAM N’EST PAS EN RESTE
On a demandé au très reconnu et suivi Cheikh Fawzan quel était le jugement religieux sur le fait de jeter le reste des aliments dont on n’a plus besoin à la poubelle. Voici ce qu’il a répondu :
« Il est autorisé de jeter les aliments avariés qui ne se mangent plus. Quant à ceux, qui sont (encore) bons et qui peuvent être consommés même par les animaux alors, ils seront consommés par ces derniers ou par les volatiles : dans ce cas là, il n’est pas permis de les jeter car le fait de les jeter à la poubelle, il y a en cela du gaspillage et du gâchis ».
 
Mangez et buvez, mais ne soyez pas excessifs !
Dieu n’aime pas ceux qui commettent des excès.

 
L’Islam considère que les ressources naturelles sont des biens communs de l’humanité, comme le souligne la parole prophétique suivante : « Les gens sont associés en trois choses : l’eau le feu et le pâturage. » Ahmad, 5/364. Les musulmans sont invités à éviter toute forme de gaspillage de ses ressources, comme le stipule ce verset coranique :
L’exploitation abusive des ressources naturelles constitue une ingratitude envers Dieu et une forme de corruption que l’Islam condamne sévèrement : « Dieu propose la parabole d’une cité qui vivait dans la paix et la tranquillité, et vers laquelle coulaient à flots des richesses de toutes parts. Or elle se montra ingrate envers les bienfaits de Dieu, qui, en punition de ses méfaits, lui fit connaître les affres de la faim et de la peur » [Coran, s. 16, v. 112].
 




Ces 50 dernières années, l’Homme a causé d’importants dérèglements l’écosystème. L’activité humaine perturbe l’équilibre planétaire et fait obstacle à la préservation de l’environnement. Tout ceci empêche de conserver la Terre telle qu’elle a été. C’est en ce sens que pour les trois religions monothéistes que sont le Judaïsme, la Chrétienté et l’Islam, respecter l’environnement, c’est aussi respecter la création de Dieu.
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:58

Religion catholique et écologie

"L'homme est-il là pour dominer la nature, comme l'affirment certains textes ? Il est fondamental que les Eglises, et l'Eglise catholique en particulier, clarifient la responsabilité de l'homme vis-à-vis de la «Création», pour reprendre le langage des croyants. Les Eglises peuvent-elles rester inaudibles alors que l'œuvre de la Création est en train de se déliter sous leurs yeux ?" (Nicolas Hulot)

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Avec les monothéismes issus de la bible, Dieu sort de la matière, exilé dans une transcendance plus ou moins accessible. Le judaïsme a lutté contre les divinités païennes et les cultes qui idolâtraient la nature.
Les Eglises ont repris le flambeau. Tout au long de leur histoire, elles ne se sont pas contentées de proclamer l’Evangile dans toutes les cultures en accompagnant la colonisation, elles ont aussi tenté d’éradiquer la pensée animiste, les croyances qui célèbrent les esprits présent dans les sources ou les arbres. Par peur du panthéisme, le christianisme a eu tendance à accentuer l’abîme entre le créé naturel et l’incréé issu de Dieu.
Il a coupé le cordon ombilical de l’être humain avec la terre-mère et favorisé l’anthropocentrisme. Au point que la conscience chrétienne n’a jamais considéré comme des « péchés » les atteintes à l’intégrité de la nature et les comportements anti-écologiques. Lynn White imputait en 1967 les racines historiques de notre crise écologique à la vision du monde judéo-chrétienne.
Selon la Genèse les êtres humains, seuls de toutes les créatures, furent créés à l’image de Dieu. Il leur fut donc donné d’exercer leur supériorité sur la nature et de l’assujettir. Deux mille ans de mise en œuvre toujours plus efficace de cette vision de la relation homme/nature ont abouti à la fois aux merveilles technologiques et à la crise environnementale du XXe siècle.

Dans son [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], John Baird Callicott estime cependant que dans la genèse biblique il y a trois interprétations des relations entre les humains et la nature.

  • La première, c’est l’homme « despote », qui domine toutes les formes de vie ; c’est la conception traditionnelle, quasiment la seule représentée officiellement jusqu’à récemment.

  • Une deuxième interprétation est cependant possible, c’est l’homme « intendant », gestionnaire de la nature. Le pape François travaille à la rédaction d'une encyclique consacrée à la relation entre l'homme et la nature. Il y a de fortes chances que ce soit cette deuxième vision de la bible qui dominera ; ni l’Ancien, ni le Nouveau Testament ne se sont intéressé à cette question écologique aujourd’hui brûlante. Si le thème de l'encyclique reste "l'écologie de l'humanité", la prépondérance des humains sera privilégiée.

  • La dernière interprétation de la Genèse, l’homme comme « petite partie du grand Tout de la création », n’est pas dans le logiciel des monothéismes alors que des éthiques de la Terre, laïques, commencent  à se diffuser.


 Voici quelques éléments de réflexion centrés sur les porte-paroles de l’Eglise catholique.

Le pape François
Par le choix de son nom lié au poverello d'Assise, le Pape François a manifesté dès les premiers jours de son pontificat son attention aux plus pauvres et aux plus fragiles. Lors de la messe inaugurale du 19 mars 2013, le pape François a confirmé sa volonté de mettre la défense de la création dans ses priorités. Partant de l’image de Joseph qui a élevé Jésus, il précise la notion de « gardien » qui « concerne tout le monde. C’est le fait de garder la création tout entière, la beauté de la création, comme il nous est dit dans le Livre de la Genèse et comme nous l’a montré saint François d’Assise : c’est le fait d’avoir du respect pour toute créature de Dieu et pour l’environnement dans lequel nous vivons… ».

Deux semaines après son élection, le cardinal Bergoglio avait expliqué pourquoi le nouveau pape avait choisi son nom en hommage à Saint-François d'Assise : « Il (Saint-François) nous enseigne le respect profond de toute la création et de la protection de notre environnement que trop souvent, même si cela est parfois pour le bien, nous exploitons avec avidité, au détriment d'autrui ».
A l’occasion de la journée mondiale pour l’environnement en juin 2013, le pape François déclarait : « Chers frères et sœurs, Dieu a confié la création à l’homme et à la femme pour qu’ils la gardent et la cultivent. Cultiver veut dire prendre soin, avec attention, avec passion et dévouement. Parfois nous perdons notre capacité de contempler, de nous émerveiller devant la Création, car nous vivons dans un monde horizontal, qui s’éloigne de Dieu. Or la Création est un don qui nous est fait, que nous devons respecter, et non pas manipuler pour en tirer profit. Mais, « garder et cultiver » concernent aussi les relations entre les hommes. La personne humaine est aujourd’hui sacrifiée aux idoles du profit et de la consommation. Elle est trop souvent rejetée comme si elle était un déchet dont personne ne se préoccupe… Ecologie de l’environnement et écologie humaine vont ensemble. C’est en combattant la culture du rejet et du gaspillage qu’il est possible de devenir attentif à chacun, et de venir en aide aux besoins des plus pauvres. » Dans son adresse sur "l'état du monde" en janvier 2014 devant les diplomates accrédités au Vatican, le Saint-Père avait déclaré : « Dieu pardonne parfois, nous pardonnons parfois, mais lorsque la création est maltraitée, elle ne pardonne jamais ». 

Pour le 1er de l’an 2014, la nature prend une place importante dans le discours urbi et orbi du pape François : «  La famille humaine a reçu en commun un don du Créateur : la nature. La vision chrétienne de la création comporte un jugement positif sur la licéité des interventions sur la nature pour en tirer bénéfice, à condition d’agir de manière responsable, c'est-à-dire en en reconnaissant la “grammaire”qui est inscrite en elle, et en utilisant sagement les ressources au bénéfice de tous, respectant la beauté, la finalité et l’utilité de chaque être vivant et de sa fonction dans l’écosystème. Bref, la nature est à notre disposition, et nous sommes appelés à l’administrer de manière responsable. Par contre, nous sommes souvent guidés par l’avidité, par l’orgueil de dominer, de posséder, de manipuler, de tirer profit ; nous ne gardons pas la nature, nous ne la respectons pas, nous ne la considérons pas comme un don gratuit dont nous devons prendre soin et mettre au service des frères, y compris les générations futures (…) En ce sens, je voudrais rappeler à tous cette nécessaire destination universelle des biens qui est un des principes cardinaux de la doctrine sociale de l’Église. Respecter ce principe est la condition essentielle pour permettre un efficace et équitable accès à ces biens essentiels et premiers dont tout homme a besoin et a droit. »

Dans ce passage, il y a reconnaissance de certaines lois de la nature (la “grammaire”qui est inscrite en elle) et un léger tournant vers le biocentrisme (respect de la fonction de chaque être vivant dans l’écosystème). Donc quelques petites références au message de François d’Assise. Mais il y a surtout une conclusion/soutien à ceux qui ouvrent la voie de la simplicité volontaire : « Il y a une dernière manière de promouvoir la fraternité – et ainsi de vaincre la pauvreté – qui doit être à la base de toutes les autres. C’est le détachement de celui qui choisit d’adopter des styles de vie sobres et basés sur l’essentiel, de celui qui, partageant ses propres richesses, réussit ainsi à faire l’expérience de la communion fraternelle avec les autres. Cela est fondamental pour suivre Jésus Christ et être vraiment des chrétiens. »

Ainsi le pape François paraît bien plus écologiste que ses prédécesseurs. Cependant l’Eglise reste fondamentalement nataliste, ce qui est en contradiction avec l’écologie puisque la croissance exponentielle de la population humaine entraîne la dégradation profonde de la biosphère. Après celui de 1980, un synode sur la famille aura lieu en octobre 2014. Il est intitulé « Les défis pastoraux de la famille dans le cadre de l'évangélisation » et veut aborder la « vraie vie » familiale des fidèles de l'Église dans le monde actuel. Sous l’égide du pape François, on a proposé un questionnaire à tous les croyants. Parmi les 39 questions posées dans le document préparatoire, la question posée est de type clairement nataliste : « Comment promouvoir une mentalité plus ouverte envers la natalité ? Comment favoriser la croissance des naissances ? » Cette « interrogation » révèle la permanence des positions de l'Eglise… à l’antipode des considérations de capacité de charge de la planète. Dans le texte préliminaire, l'Eglise rappelait les fondements théologiques du mariage catholique, notamment l'indissolubilité ou le devoir de procréer !

Le pape Benoît XVI
Benoît XVI n’est pas un pape « vert ». Benoît XVI est resté quasiment inaudible sur le réchauffement climatique, la sixième extinction des espèces, la stérilisation des sols, etc. Il dénonçait en décembre 2007 dans son message de Noël l’exploitation de la planète : « paix et écologie dans le message de Noël du pape ». En fait, juste une petite phrase du pape peut appuyer cette assertion : « Dans le monde, le nombre des migrants, des réfugiés, des déplacés, va toujours croissant, à cause aussi des catastrophes naturelles, qui sont souvent la conséquence de préoccupants désastres écologiques. » Pas de quoi changer la face du monde et dénoncer les innombrables dommages environnementaux causés par l’homme. 

Dans son message Urbi et Orbi du 25 décembre 2009, le Pape n’était toujours pas écolo : « Autour de la crèche de Bethléem, tout se passe dans la simplicité et dans la discrétion, selon le style par lequel Dieu opère. » Mais le pape n’en dit pas plus. Avec Benoît 16 la papauté était sur le déclin, encore imprégné d’une théologie d’un autre âge.Ppour lui, nul besoin d’électricité et de fuel, la parole est toujours éthérée : « Laissons la lumière de ce jour (de Noël) se répandre partout : qu’elle entre dans nos cœurs, qu’elle éclaire et réchauffe nos maisons. » Les marchands du Temple peuvent continuer à sévir le jour de Noël et tout le reste du temps, ce n’est pas le problème de ce pape. 

Pourtant dix mouvements catholiques avaient lancé fin 2005 un appel pour « vivre Noël autrement ». Ils avaient diffusé une affichette avec le slogan : « Noël, bonne nouvelle pour la Terre » puisque « Jésus nous offre un monde nouveau, sans caddies pleins de cadeaux qui comblent les armoires et les décharges. » Ils mentionnaient un texte de Jean Paul II publié en 1990 et consacré à la protection de l’environnement : « La société actuelle ne trouvera pas de solution au problème écologique si elle ne révise pas sérieusement son style de vie. »

Le pape Jean Paul II
En janvier 1990, le pape Jean-Paul II semblait sensible au respect de la planète dans son Message pour la journée de la paix : « La théologie, la philosophie et la science s’accordent dans une conception de l’univers en harmonie, c’est-à-dire d’un vrai cosmos, pourvu d’une intégrité propre et d’un équilibre interne dynamique. Cet ordre doit être respecté, l’humanité est appelée à l’explorer avec une grande prudence et à en faire ensuite usage en sauvegardant son intégrité. On ne peut négliger la valeur esthétique de la création. Le contact avec la nature est par lui-même profondément régénérateur, de même que la contemplation de sa splendeur donne paix et sérénité. Les chrétiens savent que leurs devoirs à l’intérieur de la création et leurs devoirs à l’égard de la nature font partie intégrante de leur foi. » 

 Il n’empêche que son point de vue relevait fondamentalement d’une conception anthropocentrique car il indiquait par ailleurs : « Au nom d’une conception inspirée par l’écocentrisme et le biocentrisme, on propose d’éliminer la différence ontologique et axiologique entre l’homme et les autres êtres vivants, considérant la biosphère comme une unité biotique de valeur indifférenciée. On en arrive ainsi à éliminer la responsabilité supérieure de l’homme au profit d’une considération égalitariste de la dignité de tous les êtres vivants. Mais l’équilibre de l’écosystème et la défense d’un environnement salubre ont justement besoin de la responsabilité de l’homme. La technologie qui infecte peut aussi désinfecter, la production qui accumule peut distribuer équitablement. » (Discours de Jean-Paul II au Congrès Environnement et Santé, 24 mars 1997)

Le pape Jean Paul II est plus connu pour son populationnisme que par son écologisme : « La pression de la population est très souvent citée comme une des causes majeures de la destruction des forêts tropicales. Quoi qu’il en soit, il est essentiel d’établir que l’expansion démographique n’est pas seulement un problème de statistiques ; c’est une question profondément morale. En condamner les pressions, y compris économiques, auxquelles les gens sont soumis, spécialement dans les pays les plus pauvres, pour qu’ils acceptent des programmes de contrôle des naissances, l’Eglise soutient inlassablement la liberté des couples de décider du nombre de leurs enfants selon la loi morale et leur foi religieuse. » (Discours du 18 mai 1990 à l’Académie pontificale des sciences)

Jean-Paul II a fait semblant d’écouter [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]. Il est vrai que rien ne prépare les papes à s’intéresser à l’écologie puisqu’il ont une vision qui peut se résumer par cette phrase : « Faits à l’image et à la ressemblance de Dieu, Adam et Eve doivent soumettre la terre (Genèse 1,28) ».
Conclusion

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Laissons la parole à Nicolas Hulot, envoyé spécial du président François Hollande pour la protection de la planète : 

« Tous les ingrédients sont aujourd'hui réunis pour que la conférence de Paris de 2015, où doit être signé le premier accord mondial engageant tous les pays contre le réchauffement, soit un échec.
Nous sommes passés en l'espace de vingt-cinq ans d'une forme d'indifférence à une forme d'impuissance... Peut-être les autorités religieuses pourront rappeler les politiques à la raison.
L'homme est-il là pour dominer la nature, comme l'affirment certains textes ? Il est fondamental que les Eglises, et l'Eglise catholique en particulier, clarifient la responsabilité de l'homme vis-à-vis de la «Création», pour reprendre le langage des croyants. Les Eglises peuvent-elles rester inaudibles alors que l'œuvre de la Création est en train de se déliter sous leurs yeux ?
Après avoir étudié les textes religieux pour préparer ma visite au Vatican, j'ai réalisé que l'Eglise catholique n'évoquait pas le changement climatique. Or, comme vous le savez, les choses mal nommées n'existent pas. Le sentiment est plutôt donné que les événements extrêmes actuels sont à mettre au registre des catastrophes naturelles. Il est donc important que l'Eglise précise clairement les choses... » (LE MONDE du 5 février 2014, « Les Eglises peuvent provoquer un sursaut de conscience face à la crise climatique »)

Source : Bi-mensuel BIOSPHERE-INFO n° 334 (16 au 30 septembre 2014)

Lire aussi

Nicole HUYBENS : Dans le premier récit de la création de la Genèse, l’être humain apparaît au sixième jour, avec les autres mammifères. En tant qu’image de Dieu, il reçoit un mandat : « … soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la; dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre » (Gn 1 : 28).
Dans le second, Dieu attribue une mission d’intendance à l’espèce humaine : « Yahvé Dieu prit l'homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le garder » (Gn 2 : 15).
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:59

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Bible et écologie – Protection de l’environnement et responsabilité chrétienne
Bible et écologie
Protection de l’environnement et responsabilité chrétienne
Frédéric Baudin*
Introduction

Les questions écologiques ont une importance croissante dans le débat public depuis environ une cinquantaine d’années, lorsqu’on a pris conscience de la puissance dévastatrice de l’arme nucléaire et des conséquences de la pollution engendrée par l’exploitation industrielle des ressources naturelles de la planète.

Malgré une nouvelle attention portée à la « nature » grâce au romantisme et à l’essor des sciences naturelles au XIXe siècle, les hommes et les femmes dans leur ensemble n’ont pas vraiment su anticiper la crise écologique; les chrétiens n’ont pas toujours réagi avec la rapidité que l’on était en droit d’attendre de leur part, sauf peut-être dans quelque cénacle théologique ou œcuménique, où l’on s’efforçait pour le moins de réfléchir. Mais le mouvement semble s’inverser depuis une trentaine d’années.

Les conférences internationales ont débuté avec le sommet « Une seule Terre », organisé par les Nations Unies à Stockholm en 1972; le Programme des Nations Unies pour l’environnement a été créé cette même année. Vingt ans plus tard, en 1992, après plusieurs catastrophes écologiques qui ont manifestement contribué à éveiller les consciences, la conférence de Rio de Janeiro a rassemblé 117 chefs d’Etat ou délégués des gouvernements de 178 pays. Ce sommet a débouché sur la rédaction de conventions sur les changements climatiques ou sur la préservation de la diversité biologique. Les délégués ont rédigé l’Agenda 21, un programme de mise en œuvre du « développement durable ». Un accord sur le problème de la désertification et un autre sur l’aide au développement ont été signés sur la base de plusieurs accords ou textes antérieurs, comme le rapport Brundtland en 1987, qui définissait le développement durable et jetait les bases d’un programme d’actions urgentes à entreprendre pour préserver l’environnement à l’échelle mondiale. Le bilan du Sommet mondial pour le développement durable, qui s’est tenu à Johannesburg en 2002, est dans l’ensemble positif. Le protocole de Kyoto, élaboré en 1997, sur les changements climatiques (en particulier sur les émissions de gaz à effet de serre) a été ratifié par de nombreux pays, même si des exceptions notables (les Etats-Unis) en ont affaibli la portée symbolique et pratique.

Les Eglises historiques ont emboîté le pas de ces conférences internationales en 1983, à Vancouver, lors d’un rassemblement œcuménique sur le thème « Justice, paix et sauvegarde de la création », sous l’impulsion du physicien allemand von Weizsäcker. En 1989, la Conférence des Eglises européennes convoquait près de 650 délégués à Bâle, en Suisse, sur le même thème, qui sera de nouveau repris à Graz, en Autriche, en juin 1997. Le réseau écologique chrétien européen (ECEN, European Christian Environmental Network) mis en place en 1998, dans le même élan, adresse régulièrement des appels aux Eglises chrétiennes et leur propose de célébrer un « Temps de la création », avec des liturgies appropriées, du premier dimanche de septembre au deuxième dimanche d’octobre. Toujours en Suisse, à Villars en 1987, les chrétiens évangéliques ont signé une Déclaration sur l’entraide et le développement, mais ce texte est souvent passé inaperçu. Les travaux du Comité de Lausanne ont également rendu les évangéliques sensibles à la nécessité de préserver la création.

La prise de conscience des problèmes écologiques s’est donc approfondie parmi les chrétiens dans leur ensemble. Elle s’est accompagnée, dans certains cas, d’une repentance pour les fautes commises dans le passé, les négligences dans ce domaine. Les Eglises ont lancé un appel à changer de comportement pour préserver la création. La réflexion théologique s’est enrichie, avec des nuances cependant assez sensibles au sein des diverses dénominations chrétiennes. La Fédération protestante de France s’est dotée, par exemple, d’une cellule de réflexion, le Forum du développement durable, qui s’apprête à relayer des informations pratiques et des recommandations dans les différentes Eglises de la fédération.

Nul ne pourrait donc affirmer aujourd’hui que les Eglises chrétiennes ne se préoccupent pas de la préservation de l’environnement ou du développement durable. Mais il faut bien reconnaître que les membres de nos communautés n’ont pas toujours été informés ou enseignés sur ce sujet. La mise en pratique des mesures préconisées en haut lieu semble difficile sur le terrain, voire utopique et même inutile pour certains, qui considèrent que les petites actions individuelles ou communautaires pour protéger l’environnement se perdent dans l’océan des problèmes écologiques. Les chrétiens professionnels de l’environnement discernent souvent mal le rapport spécifique entre leur activité et leur foi. Quelles sont donc les données bibliques et théologiques qui peuvent influencer notre regard sur la création et notre action pour la préserver des effets les plus néfastes de notre civilisation contemporaine?

La foi en un Dieu créateur et le mandat culturel

Nous croyons, quelles que soient nos convictions sur la manière dont Dieu a créé le monde, que Dieu est notre Créateur. Le Symbole des apôtres, qui est probablement l’une des plus anciennes confessions de foi chrétienne, commence par ces mots: « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre. » Le Symbole de Nicée-Constantinople (381) précise que nous croyons en un Dieu créateur « de toutes choses visibles et invisibles… » La Confession de foi de La Rochelle ajoute que « nous croyons non seulement que Dieu a créé toutes choses, mais qu’il les gouverne et les conduit, disposant et réglant selon sa volonté tout ce qui arrive dans le monde ». Dieu n’est pas seulement notre Rédempteur, en Jésus-Christ, il est aussi notre Créateur, le Seigneur qui règne sur ce monde et le soutient; il faut maintenir ces vérités ensemble, afin de ne pas privilégier l’une au détriment de l’autre. Notre foi en un Dieu créateur influence notre regard sur le monde, sur les hommes et les femmes, comme sur toute créature; elle influence également notre façon de vivre dans ce monde.

Plusieurs couples de verbes sont employés dans le livre de la Genèse, pour définir précisément le mandat adressé par Dieu à l’homme et à la femme: « multiplier et remplir la terre », « dominer et soumettre » cette terre, les animaux et la végétation qu’elle renferme (et les ressources naturelles, au sens large); et, enfin, « cultiver et garder » la terre, ou le « jardin », dans lequel, d’après la Genèse, Dieu a placé l’homme et la femme au commencement. Ce mandat demeure après la chute, la révolte de l’homme et de la femme contre Dieu, la rupture de l’alliance et de la communion avec Dieu; il est simplement plus difficile à mettre en œuvre, après que la malédiction prononcée par Dieu a affecté la nature et les êtres humains. Dieu ne laisse cependant pas les hommes et les femmes totalement désemparés, sans défense et sans espérance; il leur donne la grâce d’avoir des enfants, de cultiver la terre et d’élever des troupeaux, de forger des outils et d’exercer leurs talents artistiques.

Que signifient ces verbes de la Genèse pour tous les hommes et femmes de ce monde? En quoi consiste ce mandat que Dieu nous confie? Quelles en sont les conséquences pour le milieu naturel, pour notre environnement? Enfin, les chrétiens ont-ils une responsabilité plus particulière dans ce domaine de la protection de l’environnement? Nous tenterons d’apporter à ces questions quelques réponses qui nous permettront d’esquisser ainsi une éthique de la création.

A) Multiplier et remplir la terre

On dénombrait, au début du XIXe siècle, environ 1 milliard d’individus, 4 milliards en 1930, 6 milliards en l’an 2000. Cette « explosion démographique » est en partie la cause de la dégradation de notre environnement actuel. Il a fallu, en effet, nourrir cette population sans cesse croissante, et pour cela développer l’agriculture et l’industrie, puis assurer la distribution à grande échelle des produits; ces mesures indispensables ont malheureusement entraîné une pollution indubitable et perturbé les équilibres naturels.

Sur le plan de l’alimentation, la situation est très inégale dans le monde. Dans certaines régions, la malnutrition est toujours une réalité, en particulier en Afrique subsaharienne. La famine demeure une menace, lorsque les conditions climatiques sont défavorables ou, plus souvent, lorsque des conflits éclatent ou que l’aide est mal répartie. En revanche, dans nos pays dits « développés », nous avons largement dépassé le seuil du bien-être élémentaire, même si certains d’entre nos concitoyens ne bénéficient toujours pas, hélas, de cette abondance.

On estime que la population mondiale pourrait culminer à 10 ou 12 milliards, voire 14 milliards d’individus d’ici à un siècle (selon les estimations les plus réalistes). Il semble qu’il soit possible de nourrir cette population, à condition qu’aucune perturbation majeure, climatique ou politique, ne survienne. Il est vrai qu’après la tyrannie de la procréation incontrôlée, la tendance est actuellement à la maîtrise de l’évolution démographique, parfois de façon excessive, si l’on considère que la plupart des pays développés ont un taux de fécondité inférieur à celui qui serait nécessaire pour assurer le renouvellement des générations. Et cela pose déjà des problèmes sociaux, qu’il va falloir désormais résoudre à plus ou moins court terme.

Le défi aujourd’hui est de trouver des solutions agricoles, industrielles et urbaines qui nuisent le moins possible à l’environnement, tout en permettant de nourrir et d’abriter au mieux le plus grand nombre d’individus, et cela sans freiner le progrès économique, technologique, scientifique: c’est une définition du développement durable. Le rapport Brundtland (1987) précisait que le développement actuel devrait aussi permettre aux générations futures de vivre dans des conditions de confort optimales.

B) Dominer et soumettre

La grâce que les théologiens qualifient de « générale » ou « commune » ­- la grâce que Dieu accorde à toutes ses créatures – n’est pas étrangère à l’exploit réalisé par l’humanité pour se nourrir. Mais cet exploit, ce gigantesque effort consenti par les hommes et les femmes dans le monde, n’a pas été accompli dans le seul but de nourrir les plus pauvres et de subvenir aux besoins de ceux qui travaillent.

Nous voyons se développer, depuis les débuts de l’âge industriel, parfois même en prenant appui sur ces verbes de la Genèse, une domination immodérée, une exploitation presque sans borne de toutes les ressources naturelles de la création. Les conséquences de cette surexploitation sont parfois tragiques. Il n’est pas normal que le souci du rendement, qui a sa part légitime, ait conduit les éleveurs à utiliser, souvent sans discernement ni précautions suffisantes, des farines animales, des antibiotiques ou des hormones de croissance. Il n’est pas juste d’utiliser la formidable puissance de nos machines pour détruire sans frein les espaces naturels: près de 9 millions de kilomètres carrés ont été défrichés et transformés depuis 1850 pour répondre, il est vrai, aux besoins d’une population et d’une urbanisation croissantes. La gestion de l’espace urbain n’a pas toujours été la meilleure, l’organisation de nos villes ou de nos régions laisse parfois songeur. Et que dire de nos loisirs, de nos invasions saisonnières dans les montagnes ou sur les plages, qui laissent souvent des traces indésirables dans « la nature »? Il n’est pas normal, enfin, que l’on développe l’industrialisation sans se préoccuper aussi de la pollution qu’elle peut engendrer. Certains sites ont été totalement défigurés, souillés, anéantis par une pollution parfois dramatique et mortelle.

On a recensé, dans le monde, environ 1,4 million d’espèces animales et végétales. Il y aurait probablement en réalité quatre à cinq fois plus d’espèces à la surface de la terre. Nous avons encore du travail pour identifier et nommer les plantes et les animaux de ce monde! Les milieux les plus riches disparaissent cependant à grande vitesse, en particulier la forêt équatoriale des pays en voie de développement, par centaines et même par milliers d’hectares chaque jour (100 000 kilomètres carrés par an, soit environ un cinquième de la France). On avance que deux ou trois espèces animales ou végétales disparaîtraient chaque jour et, parmi elles, certaines plantes qui auraient pu contenir des éléments nécessaires à la fabrication de médicaments. Des milliers d’espèces sont directement menacées d’extinction. Parmi les causes de ces disparitions prématurées, on cite généralement la pression démographique, l’extension des zones industrielles et résidentielles, le drainage quasi systématique des marais et la destruction des forêts, l’usage abusif des pesticides ou des engrais (surtout pendant les années 1970), les pratiques agricoles discutables, mais aussi nos mauvaises habitudes et notre négligence.

Domination excessive, donc, mais l’excès contraire ne vaut pas mieux: certains systèmes religieux ou courants écologiques préconisent en effet la méthode douce, et parfois même le laissez-faire absolu. Parmi les adeptes du mouvement nébuleux et syncrétiste du Nouvel Age, beaucoup prônent un respect de la nature qui semble a priori très estimable; mais il s’inspire, en réalité, d’une vision panthéiste et orientale de la nature. On ne touche pas à tel animal, car il est une parcelle de la divinité, il est sacré, il est la réincarnation d’un individu, homme ou femme, qui a plus ou moins bien agi dans sa vie antérieure. Les systèmes religieux et philosophiques qui recommandent de ne pas intervenir sur la nature sont inspirés par un idéalisme mystique ou par le fatalisme, dont nous pouvons constater les effets funestes sur les populations, si longtemps livrées à la maladie, la malnutrition et la prolifération anarchique. Cette bonne résolution de respecter tous les êtres vivants est souvent mise à mal, lorsqu’on dort dans une chambre peuplée de moustiques virulents, ou que l’on cultive quelques légumes, eux aussi abondamment visités par les parasites! Il nous faut donc faire un choix entre le tout « dominer et soumettre », en vogue depuis l’âge industriel, et l’utopique laissez-faire prôné par de doux rêveurs ou par les plus résignés, qui ne sont pas toujours les plus inoffensifs.

C) Cultiver et garder la terre (le jardin)

D’après la Genèse, les hommes et les femmes étaient invités à remplir, dominer et cultiver la terre en communion avec Dieu, c’est-à-dire avec la sagesse et le discernement que Dieu leur inspirait. Il ne s’agissait pas pour eux d’exercer leur tyrannie sur la création, mais plutôt d’en prendre soin pour le bien de toutes les créatures et pour la gloire du Créateur. L’un des verbes traduits par dominer, l’hébreu radâ, est employé à plusieurs reprises dans le Pentateuque. Dans le Lévitique, en particulier, il est rappelé aux descendants d’Abraham, dans le cadre des lois sur le travail domestique, qu’ils ne doivent pas dominer sur leurs frères de façon tyrannique (Lv 25 et 26). Ces lois étaient données pour éviter les problèmes de l’esclavage. Les serviteurs juifs pouvaient être rachetés par un membre de leur famille; ils avaient la possibilité de recouvrer la liberté lors de l’année sabbatique, tous les sept ans, ou lors du jubilé, tous les cinquante ans. Le même verbe dominer est employé par les prophètes, comme Ezéchiel ou Jérémie, qui rappellent que le roi doit exercer sa domination pour le bien de son peuple, comme un berger envers son troupeau et non comme un tyran assoiffé de pouvoir.

En hébreu, les verbes « cultiver » (avad) et « garder » (shamar) ont aussi une connotation religieuse: on garde les commandements de Dieu, et le verbe cultiver – travailler – peut avoir le sens de « rendre un culte », « servir Dieu ». Ce verbe est employé pour désigner l’activité des lévites dans le tabernacle dressé dans le désert ou dans le temple de Jérusalem. Les prêtres étaient tenus de « garder » le sanctuaire, et notamment de préserver la pureté du lieu saint de toute souillure profane. L’autorité des êtres humains, déléguée par Dieu, leur vocation (remplir et cultiver la terre, identifier, nommer et protéger les êtres vivants), leur domination impliquent également leur responsabilité devant Dieu.

La nature porte l’empreinte du Créateur, comme le suggère l’apôtre Paul au début de l’épître aux Romains, où il fait écho à de nombreux psaumes et à d’autres textes de l’Ancien Testament. Cette révélation de Dieu dans la nature est partielle, mais les hommes et les femmes créés à l’image de Dieu peuvent au moins reconnaître, dans cette nature, la marque de la divinité. Cela les rend même, souligne l’apôtre Paul, « inexcusables de ne pas avoir rendu leur culte au seul vrai Dieu ». Cette révélation fonde donc leur responsabilité. Elle dévoile, d’une certaine manière, leur faute devant Dieu: ils se sont tellement fourvoyés qu’au lieu de servir le Créateur, ils ont servi les créatures. Autrement dit, ils ont rendu un culte à la création; ils ont travaillé pour la seule création. Le renversement est alors complet: au lieu de dominer sur les poissons, les oiseaux et les reptiles, les animaux de tous les milieux, les hommes et les femmes en sont réduits à adorer ces créatures, à les diviniser. Les vices, les péchés, dénoncés par l’apôtre dans la suite de sa lettre aux Romains, sont éloquents: ils trahissent la prétention de l’être humain à la démesure, à franchir les limites de sa condition, tant sur le plan spirituel que moral et pratique, dans tous les domaines, familial, sexuel, social et économique. Or, c’est bien dans le respect des limites fixées par Dieu que se trouve sans aucun doute l’alternative à l’exploitation démesurée de la création, à cette divinisation, ce culte des idoles dénoncé par les prophètes et les apôtres. En voulant s’affranchir de Dieu, en idolâtrant la création au lieu d’adorer le Créateur, l’homme qui se croit sage se conduit en réalité comme un insensé.

Les êtres humains prétendent mettre en œuvre leur raison et leur vision mécaniste d’un monde sans Dieu, où ils ne voient qu’un enchaînement de causes et d’effets qu’il leur appartient de comprendre pour mieux le maîtriser. Mais leur volonté de dominer la création, afin d’en tirer le plus grand bénéfice – et le plus immédiat -, leur cupidité idolâtre les conduisent à appauvrir cette création de façon aujourd’hui alarmante, à la polluer d’une manière parfois irréversible à court ou moyen terme, à la modifier (notamment sur le plan génétique) sans toujours maîtriser ces changements, un peu comme l’apprenti sorcier.

D) Mandat culturel et responsabilité chrétienne

Les chrétiens, comme le prétendait Lynn White dans un article de la revue Science (1967) demeuré célèbre, portent-ils une responsabilité toute particulière dans la crise écologique?

Les lois de l’Ancien Testament, énoncées par Moïse et rappelées par les prophètes, mettent en évidence le lien entre la terre – sa fécondité – et l’obéissance morale et religieuse du peuple de Dieu. Le peuple d’Israël devait observer le sabbat, un jour par semaine, et ne pas travailler ce jour-là; le repos était pour ces hommes et ces femmes un signe de leur dépendance envers le Seigneur, de leur foi en Dieu qui pouvait pourvoir à leurs besoins même lorsqu’ils se reposaient. C’était pour eux le rappel qu’ils étaient des créatures limitées dans le temps et dans l’espace et qu’ils devaient respecter leurs limites aussi bien que celles des autres créatures, dont les animaux avec lesquels ils travaillaient. La terre même devait « jouir de ses sabbats », selon l’expression biblique, elle devait se reposer pour être plus féconde. Mais lorsque ces commandements étaient transgressés, la terre, littéralement, « vomissait » les habitants (Lv 18.27). L’image est éloquente! La terre ne supporte pas la surexploitation par les hommes, et cela la rend malade. Elle subit les effets de la désobéissance des hommes à la Loi de Dieu.

Dans les livres du Lévitique et du Deutéronome, en particulier dans l’énoncé des bénédictions et des malédictions, un lien étroit est souligné entre l’obéissance à Dieu, le climat favorable, la fertilité de la terre et l’abondance des récoltes; la solidarité entre les créatures assure la sauvegarde de l’ensemble de la création. Cela demeure toutefois un idéal à atteindre; il serait pour le moins excessif de considérer tout désordre actuel dans le monde comme la conséquence des fautes précises d’un peuple ou d’individus envers Dieu. Nous savons à quels excès cette interprétation simpliste peut, hélas, mener… L’apôtre Paul utilise l’expression « empire du péché » pour désigner un monde marqué par la réalité du mal, « assujetti à la vanité », un monde que Dieu veut sauver en le réconciliant avec lui par Jésus-Christ.

Les hommes peuvent donc soumettre la création, à condition de rester eux-mêmes soumis à Dieu, à ses commandements, à condition qu’ils demeurent en communion avec Dieu. Et cela est aujourd’hui possible, au moins jusqu’à un certain point, puisque Dieu lui-même a rétabli cette communion avec tous les hommes et toutes les femmes; c’est en tout cas ce que croient les chrétiens, qui reconnaissent en Jésus le Fils de Dieu, le médiateur d’une nouvelle alliance entre Dieu et son peuple. Mais ce peuple de Dieu n’est pas encore dans la « nouvelle création », même si les chrétiens, juifs et non-juifs, insiste l’apôtre Paul, sont d’ores et déjà de nouvelles créatures – littéralement (en grec) une nouvelle création – en Jésus-Christ (2Co 5.17).

Les chrétiens vivent plus ou moins bien cette tension entre le présent et l’avenir, spécifique à leur foi. Ils ont parfois tendance à mettre l’accent sur les dernières phrases du Credo, le retour de Jésus-Christ, le jugement dernier, la « dissolution de toutes choses » évoquée par l’apôtre Pierre dans sa deuxième lettre, la « fin du monde », pour employer une expression plus familière aux accents apocalyptiques. Tout doit disparaître, comme au temps des soldes! Après moi, le déluge! Mais la fin a commencé depuis deux mille ans, Jésus et ses disciples l’affirment. La discontinuité entre l’ancienne et la nouvelle création n’est peut-être pas aussi radicale. Certes, la Bible l’évoque, Jésus lui-même le souligne: le jugement purificateur aura lieu; mais la Bible évoque aussi la continuité entre cette création devenue corruptible et la nouvelle création incorruptible à venir, qui est déjà révélée en Jésus-Christ ressuscité. Au jour de la résurrection finale, la nature elle-même, le ciel et la terre seront régénérés, renouvelés, recréés, transformés…

Dieu demeure le Seigneur de toute la création, de toute créature, et c’est donc l’ensemble de cette création qui est appelé, avec les élus de Dieu, au salut, au rétablissement de toutes choses évoqué par l’apôtre Paul (Rm 8.18-23), c’est-à-dire au rétablissement de relations justes, dans la foi en Jésus-Christ, entre les créatures et leur Créateur, mais aussi entre les créatures elles-mêmes. La matière, dans la Bible, n’est pas assimilée au mal. Dieu lui-même choisit de s’incarner en homme et Jésus ressuscite avec un corps que ses disciples peuvent reconnaître et que Thomas peut toucher. Il nous faut lutter contre l’idée, issue du platonisme et du gnosticisme grecs, d’un « ciel » ou d’un « royaume de Dieu » désincarné, qui serait libéré de toute matière assimilée au mal, le lieu des âmes pures sans corps. On retrouve cette même pensée dans les religions ou philosophies orientales, qui considèrent le monde matériel comme une illusion, pour mettre l’accent sur le monde spirituel. La pensée biblique ne méprise pas cette création, qui est déclarée bonne. Elle inclut la nouvelle création, une régénération spirituelle, certes, déjà commencée en ceux qui ont foi en Jésus-Christ, mais aussi une rédemption corporelle, la résurrection des êtres humains dans de nouveaux corps incorruptibles, appelés à vivre sous le règne de Dieu.

Les chrétiens, comme d’ailleurs les non-chrétiens, vivent parfois avec la pensée, plus ou moins consciente, que les ressources naturelles sont sans limite, que la diversité biologique ne semble pas souffrir d’un appauvrissement, qu’il y aura de toute façon « une solution » et que l’homme vaut bien plus qu’une fleur, un oiseau, un poisson, un coléoptère ou un serpent. L’homme et la femme sont des créatures précieuses; nous avons raison de nous préoccuper du salut et du bien-être de nos contemporains. Mais nous cherchons, précisément, en tant que chrétiens, à protéger cette nature où Dieu se révèle en partie et que nous sommes appelés à gérer comme de bons intendants mandatés par leur créateur. Nos réserves naturelles et énergétiques sont limitées: l’eau potable manque dans de nombreuses régions du monde (et pose aussi des problèmes de régénération dans nos pays développés), bien des ressources ne sont pas inépuisables… Le pétrole, par exemple, est une énergie fossile qui met extrêmement longtemps à se constituer, mais nous sommes en train de l’épuiser en deux ou trois siècles à peine. Cela vaut aussi pour l’uranium dans nos centrales nucléaires actuelles, grandes consommatrices de ce minerai dont on utilise une part infime (1 à 2%) dans le processus de fission pour en dégager l’énergie tant convoitée…

Nous devons donc changer nos modes de comportement si l’on veut que les générations suivantes vivent dans des conditions acceptables. Nous avons besoin de sagesse pour gérer l’avenir – notre avenir, mais aussi celui de nos enfants ou de nos petits-enfants… Nous pouvons économiser nos ressources, protéger le patrimoine naturel qui nous est confié, penser aux générations futures et dénoncer l’égoïsme de notre génération. Nous relevons le défi, en tant que chrétiens, de respecter les limites qui nous sont imposées par Dieu. Nous devons essayer de gérer cette création, de « cultiver le jardin », de remplir cette terre et en prendre soin d’une façon intègre, en communion avec notre Créateur, autant qu’il est possible dans le cadre de la « nouvelle alliance ».

Nous partageons toutefois cette responsabilité avec l’ensemble de nos contemporains engagés dans tous les domaines: les autorités politiques, les industriels, les chercheurs et les biologistes, les agriculteurs, les grands distributeurs… et les consommateurs, que nous sommes tous! Il est trop facile de rejeter la responsabilité sur un seul des maillons de la chaîne. Les recommandations publiées lors des grands rassemblements internationaux ou œcuméniques vont dans le même sens, comme les conseils émis (en particulier sur internet!) par le gouvernement français pour contribuer à la préservation de l’environnement dans notre pays…

Comment pouvons-nous donc, dans notre univers quotidien, contribuer à protéger la création, à lutter contre la surexploitation des ressources? Les pistes de réflexion que nous suggérons ci-dessous sembleront peut-être un peu utopiques, voire simplistes… L’idéal à atteindre est élevé; il s’apparente même à la quadrature du cercle si l’on cherche à satisfaire toutes les conditions du « développement durable », parfois contradictoires…

E) Solutions pratiques

Nous pouvons:
– Résister tout simplement aux tentations de la publicité, de la mode, du matérialisme et, en revanche, nous contenter davantage de ce qui est nécessaire et non superflu pour vivre: n’hésitons pas à marcher à contre-courant! Revenons à un style de vie plus modéré…
– Eviter de tomber dans les pièges de la civilisation des loisirs, du divertissement (la diversion est contraire à la conversion!). Exerçons notre esprit critique, notre discernement humain et spirituel, à la lumière de la Bible, et n’ayons pas peur de remettre ainsi en cause les modèles dominants… Tout est permis, sans doute, mais tout n’est pas utile, loin de là!
– Réduire notre consommation d’essence et marcher davantage, ou utiliser nos vélos! Nous pouvons aussi réduire, dans certains cas, notre consommation d’eau potable, d’électricité, etc.
– Lutter contre la pollution domestique et pratiquer le tri sélectif des déchets en vue du recyclage (à condition que des filières de recyclage existent, qu’elles soient bien organisées et rentables) et inciter nos autorités locales dans ce sens.
– Favoriser le développement des énergies renouvelables (solaire, éolienne, eau [hydroélectricité], etc.), mais est-il réaliste de tout en attendre? L’énergie nucléaire restera très probablement indispensable, il importe donc de favoriser la recherche pour mieux la maîtriser et rentabiliser l’utilisation de l’uranium…
– Développer l’éducation, la sensibilisation à l’environnement, en particulier auprès des jeunes, dans le cadre du catéchisme, par exemple, et des associations comme A Rocha (Le Rocher), créée en 1983 par le pasteur anglican Peter Harris et soutenue depuis le premier jour par son collègue et ami John Stott. La branche française de cette association a été créée en France en 2000 et s’est implantée près d’Arles, où elle contribue sur les plans scientifique et pratique à la protection de la vallée des Baux-de-Provence.
– Dénoncer la désinformation dont nous sommes souvent l’objet, ce qui suppose que nous fassions l’effort de nous informer, même si cela n’est pas toujours facile…
– Participer au débat politique (gestion de la cité): rien ne nous empêche de faire entendre notre voix auprès des autorités locales, régionales ou nationales, pour les encourager à prendre des mesures saines visant à protéger l’environnement.
– Etre sensible à la situation des pays du tiers monde, où les risques de pollution et de surexploitation sont encore accrus à cause du manque de réglementation sur place et de moyens pour lutter efficacement, ou encore à cause de l’appétit parfois démesuré des grands groupes industriels, qui peuvent cependant avoir dans certains cas une influence positive.
– Rechercher des solutions adéquates par le biais de nos œuvres ou des missions chrétiennes et favoriser le « commerce équitable », comme s’y efforce, par exemple, le SEL, le Service d’entraide et de liaison, basé à Cachan, près de Paris.
– Aborder ce sujet lors d’un débat dans nos Eglises et trouver ensemble des solutions pratiques à notre portée. Il faut poursuivre le débat dans ce sens et ne pas négliger les petits commencements: la mise en pratique des recommandations formulées par les autorités civiles ou religieuses commence par des gestes très simples qui visent à préserver la création dans notre univers quotidien.
– Etre davantage présent dans le débat public, où deux tendances s’affrontent:
• Une vision mécaniste, matérialiste, déterministe: on ne voit dans le monde qu’un enchaînement d’effets et de causes qu’il importe de comprendre et de maîtriser, sans référence à Dieu.
• Une vision plus spirituelle, souvent idéaliste et mystique, qui met l’accent sur le sens de l’existence et de la vie, mais qui tend à diviniser la nature; cette pensée est largement récupérée par le mouvement du Nouvel Age, de tendance panthéiste et syncrétiste, très présent dans les milieux écologistes.

Cette dernière influence est parfois sensible jusque dans les rassemblements organisés par le Fonds mondial de la nature (WWF) et l’Alliance des religions et de la conservation (ARC). Une première manifestation de ce courant a eu lieu en marge du rassemblement interreligieux d’Assise, en 1986. Il a pris une certaine ampleur, jusqu’au rassemblement de Katmandou en l’an 2000. En France, ce courant se développe depuis les rassemblements interreligieux, en 2001, au monastère (orthodoxe) de Solan, dans le Gard, et à celui du Mont-Saint-Michel, en avril 2003. L’apport des différentes traditions religieuses sur la réflexion et la protection active de l’environnement est souvent positif, mais le flou syncrétiste qui semble caractériser ces rassemblements des grandes et petites religions pose problème. L’écologie risque de devenir une nouvelle idéologie de portée mondiale, c’est peut-être même la prochaine grande utopie universelle…

Notre point de vue chrétien mérite le respect. Il est porteur d’un projet de vie pour ce monde présent, même si les chrétiens n’en ont pas toujours été les meilleurs témoins, loin s’en faut! Nous avons une vision du monde, de notre prochain, de notre environnement spécifique à la foi en un Dieu créateur. Notre regard se tourne également vers le monde à venir, car nous croyons que Dieu renouvellera un jour cette création. Et nous croyons que notre responsabilité actuelle n’est pas sans conséquences sur le monde à venir.

Nous savons, en tant que chrétiens, qu’il n’y a pas (et qu’il n’y aura pas) d’écologie parfaite. Nous ne croyons pas que l’homme sera capable d’établir le règne de Dieu sur terre, grâce à son intelligence, son habileté technique, ni même grâce à ses mesures nécessaires de protection de l’environnement ou pour assurer un développement durable. Nous devons rester vigilants et dénoncer la réalité du mal, comme nous devons aussi dénoncer l’utopie du progrès, de la productivité ou de l’écologie qui nous délivreraient de ce mal ancré dans le cœur de l’homme; c’est sur ce point précis que la théologie sous-jacente du mouvement inauguré par le physicien von Weiszäcker nous semble révéler quelque faiblesse.

Nous ne sommes pas pour autant contre le progrès ou l’évolution des techniques qui nous procurent un certain confort! Mais ce confort, sans Dieu, peut être un piège, dès lors qu’il nous conduit à ne plus reconnaître en Dieu notre Créateur, dont nous demeurons dépendants (cf. Dt 8). Ce confort peut aussi nous donner l’illusion que notre pouvoir sur la création et les créatures est sans limite.
L’annonce de l’Evangile, la conversion des hommes et des femmes à Dieu, un véritable changement de comportement dans tous les domaines de notre vie peuvent atténuer les effets du mal, tant parmi les êtres humains que dans la nature. La création tout entière sera ainsi mieux respectée. Notre éthique de la création n’apportera sans doute qu’une amélioration partielle. Dieu seul reste souverain pour régénérer cette terre, pour « créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre ». Cela ne doit pas nous empêcher de combattre le mal sous toutes ses formes, d’être sensibles à notre environnement, dans une authentique perspective chrétienne, en communion avec Dieu. Car prendre soin de la création, dans le temps présent, c’est aussi une façon d’aimer Dieu et notre prochain…

* F. Baudin est écrivain et conférencier.

LIVRES

BASTAIRE, Jean Le salut de la création (Paris: DDB, 1996).
BERRY, R.J. (collectif) The Care of Creation (Leicester: IVP, 2000).
CHALLIER, Catherine L’alliance avec la nature (Paris: Cerf, 1989).
Collectif Nature menacée et responsabilité chrétienne (Strasbourg: Oberlin, 1979).
Collectif L’agitation et le rire (sur « Le temps presse ») (Genève: Labor & Fides, 1989).
DE WITT, Calvin B. (collectif) L’environnement et le chrétien (Québec: La Clairière, 1995).
DOUMA, Jochum Bible et écologie (Aix-en-Provence: Kerygma, 1991).
HARI, Albert L’écologie et la Bible (Paris: Ed. Atelier, 1995).
HARRIS, Peter Under the Bright Wings (Londres: Hodder & Stoughton, 1993).
HERVIEU-LÉGER, Danièle (collectif) Religion et écologie (Paris: Cerf, 1993).
IGNACE IV, patriarche d’Antioche Sauver la création (Paris: DDB, 1989).
JACQUEMIN, Dominique Ecologie, éthique de la création (Louvain: Artel-Fides, 1994).
JONAS, Hans Le principe de responsabilité (Champs: Flammarion, 3e éd. 1995, Cerf, 1990). Une éthique pour la nature (Paris: DDB, 2000).
MOLTMANN, Jürgen Dieu dans la création (Paris: Cerf, 1985).
PELT, Jean-Marie La terre en héritage (Paris: Fayard, 2000).
Au fond de mon jardin (Paris: Fayard, 1992).
SCHAEFFER, Francis La pollution et la mort de l’homme (Guebwiller: LLB, 1974).
SCHÄFER-GUIGNIER, Otto Et demain la terre, christianisme et écologie (Genève: Labor & Fides, 1990).
SHARLAND, Roger W. The Stewardship of God’s World (Nairobi: REAP, 1999).
WEIZSÄCKER von, Carl Friedrich Le temps presse (Paris: Cerf, 1987).
WRIGHT, N.T. Nouveaux cieux, nouvelle terre (Aix-en-Provence: Kerygma, 2004).

REVUES

Communio « L’écologie », revue catholique internationale, n° 107 (mai-juin 1993).
Concilium « Pas de ciel sans la terre », revue internationale de théologie, n° 236 (1991).
Fac réflexion H. Blocher, « Dieu est-il vert? », n° 15 (janvier 1990).
Foi et Vie Rodes, Ellul, Charbonneau, « Ecologie et théologie », n° 5-6 (décembre 1974).
Foi et Vie Rodes, Ellul, Charbonneau, « Sciences, techniques, éthique », n° 3-4 (juillet 1988).
Hokhma Cuvillier, Baecher, etc., « La fin du monde, une question d’actualité », n° 62 (1996).
Ichthus Ph. Gold-Aubert, « La pollution, ses dangers, ses limites », n° 40 (février 1974).
Ichthus L. de Benoit, J. Humbert, « La responsabilité écologique du chrétien », n° 50 (février-mars 1975).
L’écologiste « Religions et écologie », n° 9 (février 2003).
Lumière et Vie Simon, Müller, Blancy, « Ecologie et création », n° 214 (septembre 1993).
La Revue réformée P. Wells, « Justice, paix et préservation de la création », n° 157 (novembre 1988).
La Revue réformée H. Blocher, J. Brun, P. Jones, etc., « Ecologie et création », n° 169 (juin 1991).
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 20:59

Christianisme, islam, bouddhisme : comment les religions s’emparent des questions écologiques

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Face aux dérèglements climatiques et aux périls écologiques, que peuvent apporter les croyants ? Interdépendance, responsabilité, sobriété, respect du vivant, qu’en disent les religions chrétienne, musulmane, bouddhiste ? A quoi invitent-elles leurs fidèles ? C’est à cette question que tentent de répondre trois spécialistes, rassemblées par la revue Projet qui publie un numéro sur « les spiritualités face aux défis climatiques ». Interview croisée.

Cet article a initialement été publié dans la [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien].
Revue Projet : Comment l’écologie s’enracine-t-elle dans les visions du monde propres à chacune des cultures religieuses ou spirituelles que vous représentez ?
Salima Naït Ahmed, professeure de philosophie et co-fondatrice de l’association des « Musulmans inclusifs de France » [[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] : D’une certaine façon, la question écologique aurait pu ne pas se poser pour l’islam. Dans le Coran, la nature est omniprésente, une nature cosmique et harmonieuse, proche d’une vision grecque. Dans la tradition musulmane, l’idée est présente d’un monde bien proportionné par Dieu – celui qui met le désordre dans cet équilibre aura des comptes à lui rendre. On trouve énormément de sourates (ensemble de versets du Coran, ndlr) avec un nom d’animal : les vaches, les fourmis, les abeilles… et à l’intérieur de ces sourates, une omniprésence d’un Dieu créateur de la nature et donc des astres.

Dans la sunna, la tradition qui s’ajoute au Coran, composée par les hadiths [[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]], on trouve encore davantage d’injonctions, critiquables certes, mais significatives, dans la mesure où elles informent l’imaginaire musulman. Il y a ainsi certains animaux que l’on ne peut absolument pas tuer : les fourmis, les abeilles, la pie et la huppe.

Mais dans son traitement politique, la question écologique reste nouvelle pour les musulmans. Une fatwa (décision juridique inspirée de l’islam) a par exemple été décidée en 2014, en Indonésie, pour protéger les espèces animales en voie de disparition. Une autre, dans les années 1990, au Yémen, interdisait l’usage des cornes de rhinocéros pour fabriquer des poignards traditionnels.

Elena Lasida, économiste et enseignante à l’Institut catholique de Paris [[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] : Il existe aussi, bien sûr, une sensibilité chrétienne à l’égard de la nature, mais elle n’est pas homogène et n’émerge pas au même rythme. Les protestants et les orthodoxes ont davantage été précurseurs. Chez les orthodoxes, la pratique de la contemplation rend la nature très présente dans l’expérience spirituelle. Les protestants ont une posture plus militante et leur sensibilité à ce sujet, liée au respect de la création, est plus ancienne que chez les catholiques, même si ces derniers rattrapent aujourd’hui leur retard.
La tradition chrétienne a souvent été accusée, notamment à travers une certaine relecture de la Genèse, d’appeler à l’instrumentalisation de la nature et de donner une priorité à l’humain. Des théologiens ont aujourd’hui bien montré que cette lecture s’inscrivait dans une démarche de désacralisation de la nature, celle-ci ayant été associée à des manifestations divines dans beaucoup de religions. Mais, à partir de là, d’autres textes, notamment dans la théologie de la création, ont au contraire mis en avant l’importance de la nature et de l’interdépendance entre les êtres vivants.
Le souci écologique est aujourd’hui davantage présent. C’est sans doute lui qui a poussé à relire ou réinterpréter la Bible, à y trouver des choses que l’on ne cherchait pas. La crise écologique interpelle en ce moment les chrétiens dans leur ensemble. Ainsi, la COP21 (conférence internationale sur le climat) pousse les trois traditions chrétiennes à travailler de concert. Tout ce qui s’organise est interreligieux, ou du moins œcuménique, notamment les célébrations. Si, dans l’histoire, nous avons beaucoup insisté sur les différences, aujourd’hui, notre intérêt commun nous pousse à travailler sur ce qui rassemble.

Catherine Eveillard, architecte, bouddhiste [[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] : Dans le bouddhisme, il n’y a pas de dieu créateur : le monde est un processus d’auto-création perpétuel. La vision qui en découle est tout à fait autre : nous sommes tous acteurs de cette création collective où le principe d’interdépendance est central et nécessaire. Quand on prie, on le fait toujours pour tous les êtres vivants, depuis la fourmi jusqu’à ceux que l’on ne voit pas. Nous sommes liés, non seulement dans cette vie, mais aussi dans toute la continuité des vies, puisque les êtres traversent les différents mondes en fonction de leur karma. La logique est que si rien ne meurt, l’énergie propagée continue après la mort de chacun à agir dans l’univers.
[...]
Pour les Tibétains, l’âge que nous vivons était prédit : c’est l’âge sombre, une sorte d’aspiration vers le bas. Mais ce n’est pas nécessairement une mauvaise nouvelle si nous en sommes pleinement conscients ; toute notre capacité d’éveil est nécessaire, il faut être là, présents. Dans le bouddhisme shambhala, la place de l’humanité est entre terre et ciel. La terre représente la base organique, pragmatique, de toute notre existence, et le ciel la vision ; entre les deux, les humains font le trait d’union. Ils rendent ce lien visible et lui donnent du sens.
Dans le bouddhisme traditionnel, le concept d’interdépendance vient de l’hindouisme ancien. Par exemple, Ashoka, un roi bouddhiste de l’Inde, avait fait construire des hôpitaux pour les animaux et recommandait le végétarisme. Le bouddhisme a plus tard été éradiqué de l’Inde. Les Tibétains en sont devenus les gardiens, mais, en même temps, ils l’ont transformé en introduisant des aspects chamaniques, donc très liés à la connaissance de l’interdépendance de tous les êtres. Pour nous aujourd’hui, dans notre façon de vivre, il s’agit d’être conscient que tous les détails du quotidien peuvent manifester cette interdépendance. Il n’y a donc pas de différence entre des choses triviales et domestiques et ce qui pourrait être sacré.

L’éveil dont-vous parlez est-il collectif ou individuel ?
Catherine Eveillard : Le Bouddha à venir, c’est la société humaine. On passe de l’image du sage inscrit dans une société traditionnelle harmonieuse à la nécessité que toute la société s’éveille, pour transformer ce que l’on est en train de vivre. Pour vous donner une image, la légende de Shambhala, encore très vivante en Asie centrale, représente l’idéal d’une société éveillée : les hommes et femmes de cette société ayant reçu du Bouddha des enseignements sur l’éveil, cette attention totale à l’autre, et l’ayant tous pratiquée dans leur vie personnelle et sociale, ont disparu dans une dimension supérieure, mais ils sont toujours là pour protéger le monde.

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Chögyam Trungpa, le maître tibétain qui a fondé le bouddhisme shambhala, était très inspiré par cette légende. Il avait déjà été averti par ses propres maîtres que nous étions entrés dans l’âge sombre et qu’il allait devoir reconstruire, être capable de transmettre la sagesse autrement que par une reproduction ou du mimétisme. Quand il a enseigné le bouddhisme en Europe, il s’est aperçu que les occidentaux n’avaient ni la structure de pensée ni la culture permettant de comprendre le bouddhisme. Au Tibet, de grands sages naissaient spontanément d’une société fondée sur l’harmonie et la bonté. Il fallait donc amener l’Occident à récréer une société fondée sur la bonté pour protéger la terre. La base de tout cela est appelée « bonté fondamentale » : tous les êtres humains et non-humains ont cette étincelle.

Quelles ressources spirituelles peut-on convoquer dans chacune de vos traditions pour voir cet âge « sombre » et l’affronter ?
S. Naït Ahmed : Dans l’islam, les ressources sont là, mais vont-elles permettre de faire face ? Car il y a aussi une vision apocalyptique des choses… Depuis les années 2000, des initiatives émergent. Je pense notamment à la mise en commun, en ligne, des ressources de différentes traditions spirituelles sur l’écologie, ou à ce plan pour l’écologie entamé en 2008, avec différents objectifs : créer des mosquées écologiques (surtout au Royaume-Uni), une chaîne de télévision sur islam et écologie, une ville verte dans les pays musulmans… On peut évoquer un travail encore plus ancien du côté des soufis. Depuis le XVIIIe siècle, ils prônent le végétarisme et proposent une spiritualité comme le sentiment d’un rapport harmonieux à la nature, d’un devoir des croyants envers les animaux.
E. Lasida : Dans la tradition chrétienne, je pense particulièrement à trois ressources. Il y a d’abord une dimension universelle dans le christianisme qui invite à concevoir la terre comme une « maison commune » et l’humanité comme une seule famille, or la crise écologique est un appel à se penser ensemble avec la terre tout entière, plutôt que de se positionner en concurrents et en rivaux. Il y a ensuite l’expérience fondatrice de l’« alliance » qui traverse toute l’histoire biblique. L’alliance nous relie à Dieu et aux autres êtres vivants en termes de co-créateurs : chacun a quelque chose de propre et d’unique à apporter, mais chacun est incomplet, appelé à se réaliser par et avec les autres. Dès lors, il y a aussi une interdépendance existentielle entre toutes les créatures.
Enfin, il y a l’expérience de la résurrection. C’est une ressource fondamentale : croire que de la mort peut naître de la vie nouvelle. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une situation de mort, de menace par rapport aux générations futures, aux êtres vivants. Dans ce contexte, la question n’est pas, pour moi, comment réduire au maximum les dégâts, mais plutôt : comment cela peut-il être source de nouveauté et de meilleur ?
Le problème est que nous jugeons ce qui est bon ou mauvais par rapport à un imaginaire qui met en avant la sécurité de l’avenir, le bien-être matériel, l’autonomie individuelle. Cette crise est une occasion de construire un nouvel imaginaire autour de ce qui signifie « vivre bien », qui ne soit pas exclusivement lié au bien-être matériel. Et c’est en ce sens que la menace de mort peut devenir promesse de vie, et la crise écologique une expérience de résurrection. La résurrection peut être ainsi une ressource pour nous aider à transformer la perte en ouverture à un nouveau possible.

Existe-il du commun dans ces ressources ? Où peut-on le trouver ?
E. Lasida : On a parlé de bonté. On trouve aussi cette dimension dans la tradition chrétienne, liée à la solidarité, même si cette idée doit être revisitée : la solidarité, ce n’est pas simplement aider celui qui souffre, c’est aussi être dans une relation où l’on a quelque chose à donner et à recevoir de l’autre.
C. Eveillard : Souvent, on ne croit pas à sa propre bonté. L’âge sombre ne correspond pas seulement à ce qui se passe en dehors de nous : il y a une perte de confiance dans notre capacité d’être humain à vivre une vie saine. Si les gens n’ont plus la confiance de croire qu’ils peuvent vivre leur vie, qu’ils ont cette capacité, cette santé en eux, ils se sentent toujours pauvres. On aboutit à la « charité ONG », à une simple redistribution.
Méditer, ce n’est pas se mettre à l’abri de la réalité, c’est être attentif au moment de bonté dans sa propre expérience et dans celle des autres. L’important est de comprendre que pour se reconnecter avec la nature, nous devons nous reconnecter avec notre propre nature de bonté. Quand on touche son cœur, on touche ses tripes, et c’est de là que vient la vérité. Ce n’est pas une construction mentale, et ce n’est pas du tout l’idée de transcendance.
E. Lasida : Au fond, l’expérience du don est commune. Il y a quelque chose qui nous dépasse, qui nous est donné, une expérience de gratuité : on arrive sur terre avec quelque chose que l’on a reçu et qui ne nous appartient pas, que l’on n’a pas acheté. Il ne s’agit pas de nier notre héritage mais, au-delà de nos parents, ce quelque chose nous dépasse. Je pense que l’expérience de transcendance n’est pas uniquement religieuse, mais qu’elle est avant tout une expérience profondément humaine.
Et en même temps, la transcendance s’exprime grâce à l’immanence : on passe par des rites, des choses que l’on peut signifier, toucher et c’est par ce biais qu’elle se manifeste. Mais parfois on fait une séparation très tranchée entre les deux dimensions. C’est notamment ce qui arrive dans les cultures occidentales, marquées par la philosophie grecque qui sépare, parfois même oppose, la matière et l’esprit. Il n’est pas anodin que le bouddhisme ou l’hindouisme soient liés à des cultures orientales où l’approche du vivant est beaucoup plus globale. C’est culturel, au-delà du religieux.
S. Naït Ahmed : Le terme er-rahman, que l’on traduit par « le miséricordieux » et que l’on utilise pour signifier un Dieu clément, est très important pour les musulmans. L’expressionrahma me paraît traduire cette idée de bonté, qui n’a pas le sens exact de la charité, mais permet d’accepter et de protéger les plus vulnérables. Elle désigne une chaleur qui doit entourer les autres êtres. Dans l’islam, tous les mouvements des êtres vivants – a fortiori la prière – sont des prosternations devant le Seigneur. Il y a aussi un lien entre les cinq prières et les mouvements des astres, et un contact avec la terre quand on se prosterne.
La rahma, je la vois dans cette attitude de clémence par rapport au vivant. Le jeûne constitue une autre ressource. Pour les musulmans, il est associé à un mois dans l’année, mais il exprime pour moi une forme de résistance à la frénésie de notre monde moderne : on est davantage dans l’être que dans la consommation, on ralentit. Le jeûne dit que le monde, la vie, peuvent avoir un autre sens que la production.

L’idée du jeûne a été évoquée comme une entrée en résistance, est-il aussi une ouverture sur une sobriété ?
S. Naït Ahmed  : En théorie, le temps du ramadan ne doit pas servir de prétexte pour se goinfrer le soir et il est possible de jeûner en dehors de ce temps. La crise peut nous aider à renouer avec son sens spirituel. On peut aussi rappeler l’importance, pour les musulmans, de ne pas gaspiller, l’eau notamment, même quand on fait ses ablutions. Cela favorise un rapport sacré à la nature, sans la sacraliser : dans cette absence de gaspillage, les gestes de l’homme s’inscrivent dans l’univers cosmique. On trouve dans l’islam des choses très précises sur l’absence d’excès, la modération.
C. Eveillard : Dans ma communauté bouddhiste, certains demandaient régulièrement à notre maître pourquoi la viande n’était pas interdite au déjeuner. Ils auraient voulu pouvoir dire : « Le maître a dit qu’on ne mangeait pas de viande ». Or il a toujours refusé de le faire, car c’est à chacun de prendre ses responsabilités.
E. Lasida : Dans la tradition chrétienne, le jeûne a été lié au carême, comme pour le ramadan. Mais bien des textes bibliques en parlent dans d’autres contextes. Or le jeûne a parfois été réduit à une lecture sacrificielle : on se prive de quelque chose pour en obtenir une autre. Le jeûne devient ainsi une forme de « marchandage » avec Dieu. Je crois au contraire que le jeûne renvoie à l’expérience de la résurrection, à l’expérience du manque, du vide, qui appelle l’émergence du nouveau. Il ne s’agit pas de se sacrifier par punition mais de faire le vide pour laisser place au radicalement nouveau.
L’Occident a parfois poussé à une relation instrumentale entre matière et esprit : la production et la consommation sont devenues les principales sources de bonheur. Par une injonction rationnelle similaire, on propose maintenant de réduire la production et la consommation. Mais le jeûne biblique ne s’inscrit pas dans cette approche instrumentale qui remplace simplement la logique du « plus » par celle du « moins ». Le jeûne est au contraire ce qui permet de changer de logique, de sortir d’une approche pensée uniquement en termes « d’avoir » pour faire place à d’autres dimensions de « l’être ».

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C. Eveillard : Je suis d’accord. En recherchant une certaine pauvreté, on risque de passer à côté de tout ce que le monde peut offrir. Or dans le bouddhisme shambhala, il y a une notion de célébration : le monde est extraordinairement riche, pourquoi le réduire à sa portion congrue ? Les offrandes, dans les sociétés traditionnelles hindoues et bouddhistes, même pauvres, ne constituent pas une nourriture perdue, mais une célébration de la richesse de toute la société. Si on supprime cette dimension de célébration, on s’appauvrit, on se coupe de l’invocation de ce monde généreux.
S. Naït Ahmed : Pour ma part, j’envisage le jeûne comme une démarche individuelle plutôt que comme une quelconque contrainte. C’est l’occasion d’une rupture avec un excès d’avoir. Il y a une dialectique entre le jeûne et la valorisation esthétique des biens : pour les musulmans, le plaisir esthétique est très important. Je n’ai pas de réponse sur l’imposition d’une limite. Cependant le concept de halal indique un principe de responsabilité. Il met en lumière le problème éthique que pose le fait de consommer de la viande d’animaux issus d’un élevage industriel.

Si les ressources spirituelles étaient disponibles, comment expliquer une mobilisation tardive des religions sur la question écologique et comment susciter maintenant le passage à l’acte ?
E. Lasida : La tradition chrétienne n’est jamais indépendante de l’histoire concrète des hommes et des femmes. Cela nous invite à relire et actualiser en permanence notre tradition et nos repères de base à la lumière de l’évolution de l’histoire humaine. D’autres questions sociales ont ainsi été mises au centre de la réflexion chrétienne, qui a eu parfois du mal à s’ouvrir à la dimension écologique. Mais on rattrape aujourd’hui le retard, comme le montre la publication récente de l’encyclique [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] !
S. Naït Ahmed : Le contexte est en effet très important pour une réactivation, une réappropriation des textes. On peut éventuellement parler de « retard » pour le monde musulman compte tenu de l’urgence de l’action ou relativement à une échelle de valeur occidentale, car même si certains éléments de textes ont toujours été mis en valeur, les décisions politiques ou juridiques arrivent très tard par rapport à l’Occident. Cela peut peut-être s’expliquer aussi par une sorte de schizophrénie des pays du Moyen-Orient qui veulent rattraper d’abord un retard technico-scientifique et non pas un retard écologique, donnant une primauté à la techno-science, alors même que les situations écologiques sont urgentes (lire aussi : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]).
Propos recueillis par Marie Drique et Bertrand Hériard Dubreuil (Revue Projet)
La Revue Projet est partenaire de Basta !. Vous pouvez retrouver sa présentation sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien].

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] La situation est-elle si désespérée qu’il faille appeler les traditions spirituelles au chevet de la planète ? Et si les défis écologiques appelaient plutôt à redonner du sens à notre passage sur terre ? A entamer une forme de conversion personnelle et collective ? C’est la question débattue dans le n°347 de la Revue Projet.
Image de Une  : CC PhotoGraham
Photos : Simon Gouin

Notes
[[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] Salima Naït Ahmed, professeure de philosophie et doctorante en sociologie, est une des fondatrices de l’association des « Musulmans inclusifs de France », qui promeut un islam progressiste, tolérant et inclusif.
[[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] Les hadiths correspondent aux récits de tout ce que le prophète Mahomet aurait fait ou aurait dit et qui est rapporté par des témoins. L’authenticité de la sunna n’est pas reconnue par tous les musulmans.
[[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] Elena Lasida, économiste, enseigne à l’Institut catholique de Paris. Elle est chargée de mission à « Justice et Paix », le service de l’Église catholique pour les questions de justice internationale.
[[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]] Catherine Eveillard est bouddhiste. Elle enseigne à Dechen Chöling, centre de méditation du bouddhisme shambhala en Limousin, tout en menant une activité d’architecte indépendante.
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 21:00

[size=130]Bible : les versets écologiques[/size]

par Norman Lévesque, théologien et environnementaliste
Compilation pour [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] (2014)
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La Bible, fondement des enseignement de la foi de tous les chrétiens, contient de nombreux passages à teneur écologique. Il est souvent question de relation respectueuse aux créatures et à la Création de Dieu. Cette page contient trois palmarès: les meilleurs versets, les meilleurs récits et les meilleures hymnes sur le thème de la Création dans la Bible. Les extraits proviennent tous de la Traduction oecuménique de la Bible (TOB 2010).
 
Palmarès des 25 meilleurs versets
sur la Création dans la Bible
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Dieu vit tout ce qu’il avait fait. Voilà, c’était très bon.  (Genèse 1, 31)
Le SEIGNEUR Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour cultiver le sol et le garder.  (Genèse 2, 15)
Dieu dit à Noé : « Un couple de chaque espèce viendra à toi pour survivre. »  (Genèse 6, 20)
Dieu dit à Noé: « Je vais établir mon alliance avec vous, avec votre descendance après vous et avec tous les êtres vivants qui sont avec vous. » (Genèse 9, 8-10)
Pendant six ans, tu tailleras ta vigne et tu en ramasseras la récolte ; la septième année sera un sabbat, une année de repos pour la terre.  (Lévitique 25  3-4)
Si vous écoutez vraiment mes commandements... tu récolteras ton blé, ton vin nouveau et ton huile ; je donnerai de l’herbe à tes bêtes dans tes prés, et tu mangeras à satiété.  (Deutéronome 11, 13-15)
 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
La terre a été profanée sous les pieds de ses habitants, car ils ont transgressé les lois, ils ont tourné les préceptes, ils ont rompu l’alliance perpétuelle.  (Ésaïe 24,5)
Jusques à quand la terre sera-t-elle en deuil, et desséchée l’herbe de toute la campagne ? Toute la faune périt à cause de la méchanceté de ses habitants.  (Jérémie 12, 4)
Aussi le pays est-il désolé, et tous ses habitants s’étiolent, en même temps que les bêtes des champs et les oiseaux du ciel ; et même les poissons de la mer disparaîtront.  (Osée 4, 3)
Au SEIGNEUR, la terre et ses richesses, le monde et ses habitants !  (Psaume 24(23), 1
Que tes œuvres sont nombreuses, SEIGNEUR ! Tu les as toutes faites avec sagesse, la terre est remplie de tes créatures. (Psaume 104(103), 24)
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Tu ouvres ta main et tu rassasies tous les vivants que tu aimes.  (Psaume 145, 17)
Mais interroge donc les bestiaux, ils t’instruiront, les oiseaux du ciel, ils t’enseigneront. Cause avec la terre, elle t’instruira, et les poissons de la mer te le raconteront.  (Job 12, 7-8)
Si ma terre a protesté contre moi, si ses sillons ont fondu en larmes... alors qu’au lieu du froment l’épine y croisse et au lieu d’orge l’herbe puante.  (Job 31, 38-40)
Le SEIGNEUR a fondé la terre par la sagesse, affermissant les cieux par la raison.  (Proverbes 3, 19)
Comme un lis parmi des ronces, telle est ma compagne parmi les filles. Comme un pommier au milieu des arbres de la forêt, tel est mon chéri parmi les garçons.  (Cantique des cantiques 2, 2-3)
 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Car le sort des fils d’Adam, c’est le sort de la bête... ils ont tous un souffle identique : la supériorité de l’homme sur la bête est nulle, car tout est vanité.  (Qohélet (Ecclésiaste) 3, 19)
C’est toi qui as fait les cieux, les cieux des cieux et toute leur armée, la terre et tout ce qui s’y trouve, les mers et tout ce qu’elles contiennent. C’est toi qui leur donnes la vie à tous.  (Néhémie 9, 6)
Heureux les doux : ils auront la terre en partage.  (Matthieu 5, 4-5)
Regardez les oiseaux : ils ne sèment ni ne moissonnent, ils n’amassent pas de récoltes dans des greniers, mais votre Père qui est au ciel les nourrit !  (Matthieu 6, 26)
Durant quarante jours, au désert, il fut tenté par Satan. Il était avec les bêtes sauvages et les anges le servaient.  (Marc 1, 13)
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Jésus leur dit : « Allez par le monde entier, proclamez l’Évangile à toutes les créatures. »  (Marc 16, 15)
En effet, depuis que Dieu a créé le monde, ses qualités invisibles… se voient fort bien quand on considère ses œuvres. (Romains 1, 20)
Nous le savons en effet : la création tout entière gémit maintenant encore dans les douleurs de l’enfantement. (Romains 8, 22)
Alors je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre ont disparu et la mer n’est plus.  (Apocalypse 21, 1)
 
Palmarès des 15 meilleurs récits
sur la Création dans la Bible
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Création du monde (Genèse 1,1 - 2,4)
Dieu crée le ciel et la terre en établissant l'ordre sur le chaos. Par sa Parole, la terre et la mer produisent les animaux et les végétaux. L'humain est créé à l'image de Dieu qui donne vie à toute chose. Devant toute le Création, Dieu voit que c'est très bon et il se repose le septième jour.
 
Création d'Adam et Ève (Genèse 2, 4-24)
Le premier humain, nommé Adam, est façonné à partir de la terre, adamah, et l'eau. Dieu souffle de l'air dans ses narines et l'humain devient un être vivant. Il est placé dans un jardin pour le cultiver et le garder. Il découvre son territoire et nomme les animaux. Sa compagne Ève, dont le nom signifie vie, est l'os de ses os, la chair de sa chair.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'Arche de Noé (Genèse 6-9)
Devant une catastrophe imminante, Dieu donne la mission à Noé de construire une arche pour accueillir un couple de chaque espèce animale. Ainsi, Noé et sa famille prennent soin des vivants sur le bateau pendant le déluge. Lorsque les eaux se retirent, l'arc-en-ciel rappelle le signe de l'Alliance entre Dieu, l'humanité et toutes les créatures. 
 
Loi de Moïse: protéger les faibles, les animaux et la terre (Exode 23, 1-12)
Selon le livre de l'Exode, Dieu dictait les préceptes de vie à Moïse qui les transmettait au peuple. Ce chapitre n'est qu'un extrait, mais il  regroupe le souci des faibles, des animaux et de la terre. Ainsi, le peuple de Dieu demeure fidèle dans son Alliance avec Dieu lorsqu'il respecte sa loi qui donne la vie.
 
Le Seigneur te fait entrer dans la Terre Promise (Deutéronome 8, 6-20)
Cette description de la Terre Promise est si belle qu'elle donne le goût de s'y rendre. Il y a de l'eau claire, des fruits en abondance, et des minéraux dans le sol. Une terre idéale. C'est à se demander si Dieu promet une terre à toutes les nations, comme la terre grande et riche promise aux nations vivant au Canada.
 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Roi Salomon connait les animaux et les plantes (1 Rois 5, 1-14)
Qui était l'homme le plus sage de tous les temps? La Bible dit que c'était le roi Salomon, qui a prononcé des milliers de proverbes et de chants. Une grande marque de sagesse était sa capacité de parler des végétaux et des animaux. Ainsi, il cultivait sa sagesse par l'observation de la Création de Dieu. Un modèle à suivre!
 
La vigne de Naboth  (1 Rois 21)
Naboth avait une vigne en Samarie non loin du palais du roi Akhab. Le roi voulait aggrandir son domaine et cherche à déposséder Naboth de sa terre. D'abord, il lui offre de l'argent. Naboth affirme qu'il ne peut pas céder l'héritage de ses ancêtres. Le roi fait tuer Naboth et prend possession du terrain.
 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Jonas, un prophète de son temps (Jonas 1 à 4)
Dieu demande à Jonas de se rendre à Ninive afin de dénoncer leurs comportements mauvais. Sa première réaction est de se sauver dans le sens inverse en prenant le bateau par la Méditerranée, mais Dieu envoie une tempête et Jonas est récupéré par un poisson géant qui le recrache sur le rivage après 3 jours. Lorsqu'il prononce l'oracle du Seigneur à Ninive, les habitants se convertissent et cessent leur mauvaises actions, ce qui sauve la ville.
 
Dieu parle à Job (Job 38 à 42)
Job a beaucoup de succès dans sa vie, mais il perd tout subitement. Du milieu d'un ouragan, Dieu le questionne sur sa perception de la vie. Dieu fait la liste des animaux sur lesquels Job n'a aucun pouvoir, insistant que ces animaux n'ont pas été créé pour le bénéfice de l'humain, mais pour cohabiter avec l'humain sous un même Dieu créateur.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]La Sagesse, maitre d'oeuvre de la Création (Proverbes 8, 12-31)
Pourquoi le ciel et la terre nous apportent autant d'émerveillement? Pourquoi le système atmosphérique et les écosystèmes sont-ils si féconds pour la vie sur terre? Parce que la Création a été faite avec Sagesse. Oui, la Sagesse était au côté de Dieu comme maitre d'oeuvre et a contribué à façonner les montagnes, la végétation et les êtres vivants. La tradition chrétienne a rapidement associé la figure de la Sagesse à celle du Christ, le Verbe de Dieu (Jean 1).
 
Regardez les oiseaux du ciel (Matthieu 6, 25-34)
Dans une société où l'argent personnel et l'économie prend tellement de place, on finit par croire que nos accomplissements sont les fruits de nos efforts. Et lorsque nous manquons du nécessaire, nous avons une inquiétude terrible pour demain. Jésus confronte cette logique en rappelant que Dieu pourvoit aux besoins de toutes ses créatures, incluant les oiseaux et les fleurs. Cherchons à vivre simplement, avec justice, et Dieu nous donne ce dont on a besoin.
 
La parabole du semeur (Marc 4, 1-20)
Avant même de raconter une réalité spirituelle, cette parabole nous explique une réalité de la vie végétale: les graines ont besoin d'une bonne terre afin de pouvoir croitre et ensuite la plante portera du fruit. Elle nous rapelle que Dieu a mis en place des mécanismes écologiques qui permettent de nourir toutes les créatures, les animaux et les humains. Est-ce que notre coeur est une bonne terre dans laquelle Dieu plante une parole de protection de la Création?
 
Jésus ressuscité donne sa mission (Marc 16, 9-20)
Avant de monter au ciel, Jésus apparait à ses disciples et leur confie sa mission: "Allez par le monde entier, proclamez la Bonne Nouvelle à toutes les créatures." Ainsi, Jésus confirme qu'il n'est pas venu seulement pour ceux qui croient, mais pour renouveler toute la création en lui. Les autres miracles qui suivront, comme boire le poison des serpents n'est pas à prendre litéralement, mais plutôt d'être plus conscients des créatures et ne pas en avoir peur. 
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Les souffrances de la Création (Romains 8, 18-30)
Nous avons vu des images de déversements de pétrole, de coupes forestières à blanc, de surpêche, d'élevage industriel, etc. À notre époque, la Création souffre. Mais que penser de cette réalité? Y a-t-il de l'espérance dans cette histoire sombre d'exploitation sans limite? Saint paul affirme que la Création ne souffre pas en vain, car elle gémit dans les douleurs dans l'enfantement, en attendant que l'humanité arrive à sa pleine maturité spirituelle. 
 
Nouvelle Terre, Nouveaux Cieux (Apocalypse 21-22)
Le révélation du Christ à saint Jean, appelée l'Apocalypse, est un récit hautement symbolique. Les exégètes les plus sérieux considèrent qu'elle est une allégorie de la lutte des chrétiens ayant vécu la persécution pendant l'Empire romain. Après toutes ces batailles entre le bien et mal, arrive notre grande espérance: une terre ordonnée, harmonieuse, avec la présence de Dieu, sans pollution, une rivière pure qui sort de la ville, de la végétation médicinale. Une Terre Nouvelle.
 
Palmarès des 5 meilleures hymnes
sur la Création dans la Bible
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Dieu pourvoit à toutes les créatures (Psaume 104 (103))
...tous comptent sur toi pour leur donner en temps voulu la nourriture : tu donnes, ils ramassent ; tu ouvres ta main, ils se rassasient...
Louez le Seigneur sur la terre (Psaume 148)
...qu’ils louent le nom du SEIGNEUR, car son nom est sublime, lui seul, sa splendeur domine la terre et les cieux...
Un temps pour chaque chose (Qohélet (Ecclésiaste) 3, 1-8)
...un temps pour enfanter et un temps pour mourir, un temps pour planter et un temps pour arracher le plant...
Le Verbe s'est fait chair (Jean 1, 1-18)
...le Verbe était Dieu. Il était au commencement tourné vers Dieu. Tout fut par lui, et rien de ce qui fut, ne fut sans lui...
Hymne au Christ cosmique  (Colossiens 1, 12-23)
...il est l’image du Dieu invisible, Premier-né de toute créature, car en lui tout a été créé, dans les cieux et sur la terre...
 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
 


Note:
Cette compilation fut préparée par M. Norman Lévesque, théologien et environnementaliste. Ce texte peut être reproduit ailleurs, et nous vous remercions de citer la source : Lévesque, Norman. (2014). "Bible: les versets écologiques", [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] .
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 21:01

"L'écologie, de la Bible à nos jours" : une synthèse du livre
par Serge Lellouche :
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] 
Patrice de Plunkett
L'écologie, de la Bible à nos jours :
pour en finir avec les idées reçues
(L'Oeuvre, 2008)   
Né à Paris en 1947, PP est journaliste, blogueur, ami du Mont Saint-Michel et de la casquette irlandaise. Excepté quelques raccords de ma part, les formulations dans cette synthèse reprennent celles du livre...   S.L.
 
Introduction : «Habemus papam...ecologistum ?» s'interrogeait la revue L'Ecologiste trois semaines après le conclave de 2005, dans un numéro où elle publiait une lettre de Joseph Ratzinger à cette même revue, dans laquelle le cardinal appelait à un dialogue fructueux entre la théologie catholique et « les diverses pensées écologiques ».
De part et d'autre, l'idée de «papes verts» suscita quelque étonnement, chez des personnes qui voyaient plus le catholicisme comme un musée (des préjugés du bon vieux temps) que comme une force de contestation. Nombre d'Européens sont imprégnés du lieu commun selon lequel l'économie qui saccage l'environnement « a été engendrée par la Bible ».
D'où ce livre-enquête, qui regarde le judéo-christianisme du point de vue de l'écologie, et l'écologie du point de vue du judéo-christianisme. Il vise à comprendre ce que la Bible dit du rôle de l'homme dans l'univers, et à décrire le rôle que jouent aujourd'hui les chrétiens vis-à-vis du système qui surexploite la Terre - et quel rôle ils pourraient jouer, s'ils prenaient au sérieux le christianisme.
 
L'écologie, de la Bible à nos jours
 
La Bible a-t-elle pollué le monde?
L'homme extérieur à la Création est une idée fausse, dangereuse, qui est venue d'un peu partout sauf de la Bible. Pourtant, la grande accusée aujourd'hui, la « mère de toutes les pollutions », ce serait l'Ecriture juive : la Bible, qui aurait entraîné une civilisation prédatrice «judéo-chrétienne». Le «multipliez-vous et dominez la terre» a suffi à installer cette idée, lancée par l'universitaire américain Lynn White dans un célèbre article de 1967 (The Historical roots of the Ecological Crisis, dans la revue Science), et répétée ensuite en boucle dans les médias.
L'air du temps accuse la Bible? Ce n'est pas la faute de la Bible : c'est la faute des chrétiens, ou de nombre d'entre eux, qui depuis trois siècles, ont bel et bien imaginé être «au-dessus» du monde naturel. Des générations de chrétiens ont vécu dans l'idée d'une scission entre le corps et l'âme, le corps (mauvais) servant aux nécessités physiques et économiques, du reste profitables, et l'âme restant une tour d'ivoire réservée aux dames : on lui consacrait des livres pieux ornés de roses et de dentelles. On pouvait donc exploiter ici-bas, en comptant bien être excusés là-haut. Cette idée est tout simplement le contraire du christianisme et du vrai message de la Bible.
Les livres de la Bible hébraïque sont la méditation progressive d'une expérience qui court sur deux millénaires. La Bible est la germination d'une expérience initiale : «Le thème de la Création n'est pas posé d'un seul coup. Il traverse l'histoire avec Israël... L'exil de Babylone fut le véritable moment où la Création devint le thème dominant» (Joseph Ratzinger, Au commencement Dieu créa le ciel et la terre, Fayard, 1986). L'idée d'une création du monde en sept jours ne doit pas prêter à une lecture fondamentaliste. Les sept jours sont une image, nécessaire à un message unique en son genre : si notre monde a eu un début, c'est que Dieu l'a crééSi le monde persiste, c'est que Dieu le crée encore à la minute présente. Il le crée à tout instant : «Dieu dans sa bonté renouvelle chaque jour continuellement l'acte de Création», dit la liturgie juive du matin. Dieu crée le monde, et il crée l'humanité pour être son «associé dans l'oeuvre de la Création», soulignera la Michnah (Traité Chabbat, 10).
Si le récit biblique de la Création fait l'objet d'attaques aujourd'hui, c'est qu'il a une série d'impacts sur le débat moderne. Il dit que l'univers n'est pas né du hasard, mais d'une puissance unique : d'une Personne. La Création ne se confond pas avec son Créateur. Donc la nature n'est pas une déesse, et l'on peut être écologiste sans être adorateur d'une idole.
Le verset 2 de la Genèse («Or la terre était vide et vague...»), se départit de la cosmogonie effrayante de la culture babylonienne, et ouvre une autre vision : à l'origine il n'y a pas deux forces (en lutte) mais une seule, celle du Créateur. Le monde n'est pas maléfique : «Dieu vit que cela était bon», scande la Genèse après la séparation des terres et des mers, la création du foisonnement d'êtres vivants dans les eaux et sur la terre. La Genèse nous dit que le monde n'est pas une «bataille de démons», mais une création de la Raison divine.
Dieu crée l'homme et la femme «à son image et ressemblance» (26, 1). L'humain est doté de la conscience : il n'est donc pas une bête ; mais il a la même origine matérielle que les animaux. Dieu crée cet être de raison à partir du sol : la poussière terrestre, la glèbe, en hébreu haadamah, d'où le nom «Adam». L'homme et ses descendants font indissolublement partie de la Création. Ils en seront toujours solidaires.
Une partie des écologistes imputent le mauvais usage des pouvoirs humains au livre de la Genèse, à cause du verset 26 et des cinq suivants, et des expressions «assujettir», «dominer», «soumettre», qui pourtant dans l'hébreu ancien sont des figures de style qui n'ont pas le sens que leur donne le français. Le procès qui devrait être fait aux cosmogonies païennes est fait à la Bible. Or dans celle-ci, Dieu, ayant créé Adam, lui confie la Création («jardin d'Eden») pour la «cultiver» et la «garder». L'homme était le jardinier de la Terre, son gérant pacifique. Puis la rébellion d'Adam l'a éloigné du Créateur, brisant l'harmonie entre l'homme et la Création... La liberté donnée à l'homme a dégénéré en violence, Dieu en a pris acte, mais ce n'est pas Lui qui a instauré cette violence. Par le péché originel, Adam et Eve se rebellent contre leur condition de créature et l'homme vit désormais dans l'illusion qu'il peut tout faire et sans limites : «Pour celui qui veut être Dieu, l'autre devient à son tour limitation, rival, menace. La relation avec l'autre devient mutuelle accusation, lutte. (…) La relation avec le monde se modifie également, elle devient relation de pilleur à pillé, de piétineur à piétiné.» (J.Ratzinger, op. Cit.).
La prophétie en était faite au chapitre 11 (1,9) de la Genèse à travers le mythe de la Tour de Babel : projet de développement purement matériel, chantier engendré par la technique. Alors, dit la Genèse, Dieu intervient en détruisant le système de Babel par la dispersion des hommes «sur toute la surface de la Terre». Il veut empêcher les hommes de croire qu'«aucun dessein n'est irréalisable».
Le Deutéronome appelle les Hébreux à observer le sabbat prescrit par les Dix Commandements. Il se fonde sur le «repos» de Dieu au Septième Jour, cœur de la Création du monde. Pour célébrer le Créateur en accordant repos à la Création, le livre du Lévitique institue une année «sabbatique» de jachère : tous les sept ans, les récoltes seront considérées comme la propriété de tous, riches, pauvres, étrangers, esclaves, et le surplus sera abandonné aux «bêtes du pays». L'idée aurait de quoi faire rêver les écologistes sociaux du XXIe siècle : non seulement repos à la terre, mais remise de toutes les dettes... Dans la tradition juive, le sabbat est «la fête de toute la Terre» et il «reflète le monde à venir».
De même, Job est interpellé : «Où étais-tu quand Je fondais la Terre ?». Job, le croyant, admet que la raison de l'univers ne vient pas de l'homme : «Je sais que tu es tout-puissant : ce que tu conçois, tu peux le réaliser. J'étais celui qui voile tes plans» (Job 42, 2-3).
Le livre des Psaumes est un sommet de la poésie mystique. La Création connaît son Créateur, dit le psaume 18. Le psaume 71 (72) chante le Roi de Paix qui libérera les pauvres de l'oppresseur. Il chante aussi le cosmos qui fait partie de son Royaume : car le «social», la nature et l'espérance mystique sont inséparables. Même élan cosmique dans le psaume 97 (98). Dans le psaume 64 (65), le monde entier est dans les mains du Créateur ; le psaume 103 (104) est un hymne à Dieu pour la nature, et le psaume 148 offre à Dieu la louange de toutes ses créatures. Il y a une fraternité de la nature et de l'homme, puisqu'elle et lui ont un même père. La nature est chaudement présente aussi dans le Cantique des cantiques.
La grande majorité des croyants juifs ne suivront pas Jésus, à cause de ce que Jésus dit de lui-même. Il se tenait sur la montagne en prenant «la place de la Torah». La conséquence inéluctable fut le drame du Golgotha... Mais selon les Evangiles et le livre des Actes des apôtres, le Golgotha permet la résurrection de Jésus. De cette résurrection du Christ, Paul va déduire une vision du monde sans précédent : «Tous revivront dans le Christ», écrit-il aux Corinthiens, avant d'écrire aux Romains que « la Création entière » est concernée par cette promesse : «La Création attend avec impatience la révélation des enfants de Dieu (…) Nous savons en effet que maintenant encore la Création gémit et souffre les douleurs de l'enfantement» (Romains 8, 19-23). La Création tout entière est solidaire dans l'espérance d'une vie nouvelle dans le Christ : «Dans sa bienveillance, il projetait de saisir l'univers entier, ce qui est au ciel et ce qui est sur terre, en réunissant tout sous un seul chef, le Christ» (Eph. 1, 9-10). «Il est le commencement, le premier-né d'entre les morts, puisqu'il devait avoir en tout la primauté : car Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total» (Col. 1, 15-20).
Ces textes sont la clé de la foi chrétienne. Ils ont une dimension cosmique sans équivalent. Il ne s'agit plus (comme dans la pensée grecque) de libérer le spirituel du matériel, mais de faire entrer toute la création, en chair et en os, dans le salut divin.
Deux mille ans plus tard, la promesse chrétienne de Paul est toujours une folie : des Occidentaux déclarent croire à la réincarnation hindouiste, plutôt que d'espérer la résurrection «comme ma grand-mère». «L'Incarnation est l'acte suprême de toute l'histoire du monde, l'acte qui réalise jusqu'à sa perfection souveraine la Création de Dieu (…) Le Christ est la Parole de Dieu au monde, et la Parole que le monde dit à Dieu» (Divo Barsotti, La parole et l'esprit (l'exégèse spirituelle), Téqui, 1977).
 
Au Moyen Âge : «la verdure, plus belle que tout...»
Parler d'écologie médiévale n'est pas un anachronisme. «Tu trouveras plus dans les forêts que dans les livres : les arbres et les rocs t'enseigneront des choses qu'aucun maître ne te dira», écrit Bernard de Clairvaux. Dans son ordre, celui des cisterciens, entrer dans la vie monastique se dit en ce temps-là : «aller sous les arbres». L'atmosphère des cathédrales évoque celle des forêts : ombre et futaie des piliers, verticalité, rais de lumière... Sur la verrière de la cathédrale de Chartres, la généalogie du Christ est exprimée par un végétal inouï.
Toutes les Ecritures sont peuplées d'arbres. L'Evangile se sert d'arbres pour mettre en valeur les enseignements du Christ. Le Moyen Age y est sensible. Il va même qualifier la Croix d'«arbre dont le Christ lui-même est le fruit», et cette vision inspirera les mystiques chrétiens durant deux millénaires. Et le dernier chapitre de l'Apocalypse de Jean décrit la Jérusalem céleste : «Au milieu de la place de la ville, entre les deux bras du fleuve, il y a des arbres de vie qui fructifient douze fois, une fois par mois : et leurs feuilles peuvent guérir les païens» (Ap. 22, 2).
Au XIIe siècle, le mystique Guerric d'Igny dit au Christ : «Tu es le véritable jardinier, toi qui est le cultivateur, le créateur et le gardien de ton jardin, toi qui plantes par ton verbe, qui irrigues par ton esprit, qui fait croître la vertu (…) Tu es le jardinier du monde entier, le jardinier du ciel». Pour l'homme du Moyen Age, tout est symbole, et le sensible exprime quelque chose du spirituel : «Nulle chose n'est trop humble pour figurer le sublime et le glorifier. La noix signifie le Christ : l'amande savoureuse est sa nature divine ; l'enveloppe verte et charnue qui la recouvre, c'est son humanité ; le bois de la coquille, c'est la croix. Ainsi tout sert à élever la pensée vers ce qui est éternel» (Johan Huizinga, L'automne du Moyen Age, Rééd. Payot, 1980). Ce symbolisme transfigure tout et ouvre sur le mystère du salut.
Le jardin médiéval est un parterre de symboles, toujours «clos» par un mur de pierre. Au centre du jardin, il y a toujours une fontaine, symbole de la vie éclose de la terre créée par Dieu. La fontaine est aussi le symbole de la mère du Christ homme et Dieu. Sur le vitrail de Chartres, Marie est près du sommet de l'arbre de Jessé, portant le Christ comme sa fleur. Le botaniste se fait poète mystique : regardant une fleur bleue qui se nomme la grenadille, il découvre que ses filaments, son style, ses cinq étamines font penser aux instruments de la Passion du Christ : le fouet, la colonne, la couronne, les clous, la lance! Il l'appellera «fleur de la Passion».
Au XIIe siècle, voici la marraine de l'écologie moderne : l'abbesse rhénane Hildegarde de Bingen, à la fois théologienne, prédicatrice, psychologue, musicienne, médecin, pharmacologue, herboriste. Elle proclame la solidarité du chrétien avec tout le vivant, «le visible et l'invisible», et décrit l'homme comme un microcosme au centre de la Création. Placé au sommet de la nature, il est formé de la même matière qu'elle ; il a donc le devoir de protéger le reste de la Création : «Ceux qui ont foi en Dieu honoreront la stabilité du monde... Nous n'avons pas d'autre endroit où poser le pied. Si nous abandonnons ce monde, nous serons détruits par les démons et privés de la protection des anges» (Le livre des œuvres divines, Albin Michel, 1989). Pour l'abbesse, la vitalité et la fécondité de la nature sont une force globale, issue de la Création divine. Hildegarde la baptise viriditas (verdeur). A ses yeux, la verdeur du monde et la sanctification des humains ont la même source, qui est le jaillissement permanent de l'amour divin. Cette femme d'exception, célèbre dans toute la chrétienté, meurt en septembre 1179.
De son côté, et dans le contexte du grand essor essor économique des XIIe et XIIIe siècles, François appartient à la classe sociale montante : celle des marchands italiens. Ses «noces» avec l'idéal de pauvreté n'en auront que plus de sens. Par vocation, les franciscains parcourant les routes mendient leur pain, pour s'en remettre à l'insécurité totale, c'est à dire à la Providence de Dieu. Ils ont rompu avec toute propriété pour n'avoir rien à faire avec le maniement de l'argent. Dès l'origine de l'ordre, François et ses compagnons, citadins, étaient allés chercher l'inspiration au fond des bois de la Porziuncola ; le Cantique de frère soleil, écrit par François en 1224 après qu'il ait reçu les stigmates, passera dans le patrimoine de l'humanité. Comment un astre, ou un élément, peuvent-ils être frère ou sœur de l'humanité? La réponse est dans la Genèse : le soleil, l'eau et l'homme ont un même Père, un même Créateur. Le franciscain Bonaventure donnera une forme théologique à l'intuition de François : «Toutes les créatures de ce monde sensible conduisent au Dieu éternel l'âme du sage et du contemplatif (…) elles sont les images de la source, de la lumière, de la Plénitude éternelle, du souverain Archétype. Ce sont les signes qui nous ont été donnés par le Seigneur lui-même» (Itinéraire de l'âme à Dieu, trad. Berthaumier, Paris, 1857). Sitôt écrit son Cantique du soleil, François envoie les frères mineurs le chanter dans les villes. Le cantique a d'abord célébré le Créateur à travers ses créatures. Ensuite il appelle les humains au pardon et à la paix : tout est lié.
François prêche à toute créature : « ''Restez ici sur la route à m'attendre, pendant que j'irai prêcher à nos frères les oiseaux...'' Il entra dans le champ. Et à peine eut-il commencé son sermon que tous les oiseaux se réunirent pour l'écouter. Ils se tenaient immobiles, bien qu'en se déplaçant le saint les frôlât de sa tunique ; pas un ne bougea... ''Mes petits frères les oiseaux, nombreux sont les liens qui nous rattachent à Dieu. Quant à vous, votre devoir est de le louer partout et toujours, à cause de la liberté que vous avez de voler où il vous plaît, à cause de cette double et triple robe et de ce beau plumage coloré que vous portez...''» (Fioretti de saint François d'Assise, trad. Omer Englebert, Denoël, 1945). Bien connue est aussi l'histoire de sa rencontre avec le loup de Gubbio : «Frère loup, si tu consens à faire la paix, j'obtiendrai que jusqu'à la fin de ta vie les habitants de cette ville te donnent chaque jour à manger, de sorte que tu n'aies plus faim, car je sais que c'est la rage de la faim qui te pousse à commettre ces méfaits...» (Fioretti, op. Cit.).
Cette affection totale envers les animaux est l'une des marques de l'ordre. Thomas de Celano, le biographe de François, écrit que l'amour du poverello pour toutes les créatures s'enracine dans la Bible : le psaume 21, par exemple, dit : «Je suis un ver plutôt qu'un homme» ; or cette phrase s'applique à la Passion ; donc le ver, qui est le plus méprisé des animaux, a la dignité infinie d'être une image du Christ.
 
Ceux qui ont décidé que le monde était un chantier
Dès la fin du XVIIe siècle, la rumeur commence à se répandre que la science et la théologie sont deux choses incompatibles. Ce siècle, et plus encore le suivant, rompt avec le sens biblique de la Création. Descartes, qui se croit encore chrétien, cantonne Dieu dans un rôle inaugural. L'homme cartésien n'est pas responsable devant le Créateur, et le monde devient sa chose. Ainsi l'exprime Descartes dans le Discours de la méthode (1637) : «Au lieu de cette philosophie spéculative qu'on enseigne dans les écoles, on peut en trouver une pratique, par laquelle, connaissant la force et les actions du feu, de l'eau, de l'air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature». Le fantasme moderne est posé, ouvrant la voie à une société technicienne sourde au mystère de l'existence. En 1748, Julien la Mettrie pousse plus loin que Descartes ; il supprime le Créateur inutile, ôte l'âme, et prône, dans L'homme-machine, un matérialisme total. Les conditions intellectuelles sont réunies pour transformer le monde naturel (et le monde humain) en un chantier d'exploitation, par un capitalisme industriel inscrit dans le sillage des fondateurs du libéralisme économique.
Le XIXe siècle est celui de «la grande transformation» (Karl Polanyi), où l'activité économique se «désenchâsse» de tous les contrepoids sociaux et entreprend de transformer les royaumes et républiques en société de marché. Adam Smith, convaincu que la vie se résume à une confrontation des égoïsmes, va baptiser «lois naturelles de l'économie» les mythes fondamentaux du libéralisme.
De son côté, rejoignant la théorie de Malthus, Ricardo accuse la croissance démographique de nuire aux profits et condamne les aides aux indigents, car elles favorisent, dit-il, les «naissances non-souhaitables».
L'effet de la révolution industrielle est dévastateur humainement, socialement, et sur les paysages. Chateaubriand qui avait aimé la campagne anglaise en 1793 est choqué de ce qu'il voit dès 1822. Quant à Astolphe de Custine, la vision de ce monde de machines lui donne une angoisse métaphysique : «Je me crois soustrait à la libre influence du Créateur, enchaîné à côté de la nature dans l'empire de la magie, et prisonnier dans un monde secondaire, image parfaite et affligeante, misérable singerie des œuvres de la Providence...» (Mémoires de voyages, Vézard, 1830). Face aux plaines bouleversées, aux arbres malades, au jaillissement de flammes sur terre et dans le ciel, Michelet croit assister à un spectacle de guerre de l'homme contre l'être, ou le martyre de la nature suppliciée par la technique.
Les Lumières sont l'univers mental dont procède ce système économique, ce «sublime» matérialiste et scientiste du XVIIIe siècle, qui était censé jaillir des énergies prométhéennes de l'humanité. Voltaire avait consacré une part notable de son œuvre à éradiquer la foi en la Bible. Avant Adam Smith, il déclarait que l'intérêt général se confond avec l'intérêt privé, celui des hommes de commerce. Le Mondain est un poème-pamphlet contre le livre de la Genèse : «Le paradis terrestre est où je suis» dit Voltaire. La Création originelle avait le défaut d'empêcher le négoce. Ainsi se fera-t-il la caution d'une bourgeoisie anticléricale.
A partir de 1880, un second courant «bourgeois», le darwinisme social, né en Angleterre, bousculera la vision chrétienne de l'homme dans le monde, aboutissant à l' «eugénisme» de Francis Galton, et à l'idée de Spencer d'une «sélection des plus aptes», appliquée à tous les domaines de la société. Dès les années 1900, le libéralisme et l'inégalitarisme constituent un couple inséparable.
Si les chrétiens sont coupables de quelque chose, c'est de s'être mis intellectuellement hors jeu au XVIIIe siècle, à la veille de la révolution industrielle. Il n'y a pas de défaites innocentes.
En pleine industrialisation, chez les catholiques européens, la morale bourgeoise se substitue à l'Evangile. L'accent est mis sur la charité privée beaucoup plus que sur l'action collective. Dans la plupart des cas, surtout en France, les catholiques se laissent confondre par le capitalisme sauvage qui est non seulement une machine d'injustice sociale, mais de déchristianisation en profondeur. Tout particulièrement depuis la Commune de Paris en 1871, la bourgeoisie catholique craint que la montée du prolétariat ne mette en péril la stabilité des affaires. On est loin, si loin du Dieu de la Genèse...
Néanmoins, tous les chrétiens ne s'aveuglent pas sur la nature du système économique. Dès 1830-40 apparaissent en Europe des revues et des courants catholiques sociaux. Alban de Villeneuve-Bargemont fonde une «économie politique chrétienne» axée sur les coopératives et les mutuelles. Frédéric Ozanam, jeune bourgeois lyonnais bouleversé par le sang répandu lors de l'insurrection des canuts, affirme que le droit au travail est «naturel et divin» selon la théologie catholique, et ne peut donc être laissé à la merci du marché. En Rhénanie, l'évêque de Mayence, Mgr Ketteler, mise sur le syndicalisme ouvrier face à la concentration du capital, et va chercher dans la pensée médiévale (saint Thomas d'Aquin) une idée révolutionnaire : la destination universelle des biens, qui plus tard servira de socle au combat de Jean-Paul II et de Benoît XVI pour une écologie chrétienne.
 
(Dans le chapitre suivant sont décrits quelques uns des grands enjeux écologiques et énergétiques du 21ème siècle : le réchauffement climatique, les travaux du GIEC ; le pic de la production de pétrole ; l'écroulement de la biodiversité ; le business des OGM ; l'état des océans...)
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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 21:01

Comment l'être humain détruit la planète.


On détruit notre planète :  surconsommation, mode de consommation, croissance économique, capitalisme......L'excès de consommation et le mode de consommation a un prix environnemental et humain. Tous les niveaux de vie sont concernés.

"Les riches sont inéluctablement coupables et responsables tout à la fois, les pauvres sont coupables mais nullement responsables.

Les riches la détruisent en amont, en confisquant, en s'appropriant les ressources et le bien, en capitalisant et en exhortant à la sainte procréation... 

Les riches détruisent la Planète en ayant grand besoin d'une multitude d'esclaves, de démunis, de sujets pour la main d'œuvre de la production agricole, manufacturière, industrielle et autres

Les pauvres., ils détruisent la Planète en aval et, comble de l'ironie et de l'injustice, avec un effet dévastateur proportionnel à leur effectif, à leurs urgences, à leur misère économique et culturelle."

Les riches fabriquent des pauvres et la surpopulation détruit la Terre

Les écologistes, affligés par l’épuisement des ressources et le déclin des écosystèmes, font remarquer qu’il nous faudra deux planètes ou plus pour survivre. Dans un autre domaine, ces deux planètes existent déjà, tout le monde sait bien qu’il y a une planète des riches et une autre des pauvres. La première, usurpée, n’est pas pour nous déplaire… 

Un milliard de riches occupe l’Amérique du Nord, l’Europe, l’Australie, le Japon et un club très privé de privilégiés qui règnent tyranniquement sur les pays du tiers monde.Ce milliard de riches cache aussi sa misère (qu’on ne saurait voir) : quart monde dormant sur les trottoirs des quartiers boursiers, Enfants de Don Quichotte s’adonnant aux joies du camping urbain, gastronomes des restos du cœur, etc. 

Le solde de la communauté terrienne, soit un peu plus de 5 milliards et demi de gens dont le pauvre destin est joué d’avance, croupit dans le reste (et les restes) du Monde. Le premier Monde s’approprie (en tout bien tout honneur !) les 7/10 de l'énergie, les 4/5 du bois et autant des produits de la pêche, les 3/4 des métaux, les 5/6 des crédits d'éducation, les 9/10 des budgets de recherche et de développement, possède les 3/4 des automobiles, neuf avions sur 10, etc. 

Voilà des chiffres bien peu consensuels et équitables qui prouvent l’excessive mainmise du milliard de privilégiés dont la liberté de puiser et d’épuiser ne s’arrête pas où commence celle des autres 6 milliards soumis au diktat. 

Nous garantissons ainsi aux plus pauvres de continuer à stagner, voire à s’enfoncer, dans leur état de pauvreté. En termes d’empreinte écologique insoutenable, un Nord-américain ou un Français valent combien d’Africains ? L'État américain le moins densément peuplé qu’est le Wyoming (510 000 habitants) émet plus de CO2 que 69 pays en développement réunis et totalisant 357 millions de personnes.


◄ Apocalypse 11:18 ►

  Louis Segond Bible

Les nations se sont irritées; et ta colère est venue, et le temps est venu de juger les morts, de récompenser tes serviteurs les prophètes, les saints et ceux qui craignent ton nom, les petits et les grands, et de détruire ceux qui détruisent la terre.

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Message  Arlitto Jeu 09 Juin 2016, 21:02

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Population Mondiale
7 427 832 622 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
62 219 331 Naissances cette année
279 698 Naissances aujourd'hui
26 055 759 Décès cette année
117 130 Décès aujourd'hui
36 163 572 Croissance démographique cette année
162 568 Croissance démographique aujourd'hui

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Gouvernement et Économie
$ 7 971 230 504 Dépenses gouvernementales mondiales 
de soins médicaux aujourd'hui
$ 6 983 430 409 Dépenses gouvernementales mondiales 
engagées dans l'éducation aujourd'hui
$ 3 434 818 559 Dépenses gouvernementales mondiales 
engagées dans l'armée aujourd'hui
32 074 722 Voitures produites cette année cette année
62 453 959 Vélos produites cette année
98 597 479 Ordinateurs vendus cette année

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Société et Médias
1 108 089 Nouveaux titres publiés cette année
352 213 533 Tirages de journaux aujourd'hui
470 534 Téléviseurs vendus aujourd'hui
3 929 702 Téléphones mobiles vendus aujourd'hui
$ 144 334 587 Argent dépensé en jeux vidéo 
dans le monde aujourd'hui
3 386 275 506 Internautes dans le monde
159 965 555 117 E-mail envoyés aujourd'hui
3 126 264 Articles postés sur les blogs aujourd'hui
445 794 701 "Tweets" envoyé aujourd'hui
3 367 402 963 Recherches sur Google aujourd'hui

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Environnement
2 260 652 Hectares de forêt détruite cette année
3 043 449 Terres arables perdues en raison
de l'érosion du sol cette année (ha)
16 136 688 746 Emissions de CO2 cette année (tons)
5 216 361 Désertification cette année (hectares)
4 256 715 Produits chimiques toxiques déchargés
par les industries cette année (tonnes)

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Alimentation
769 259 201 Gens sous-alimentés dans le monde
1 626 349 074 Gens en surpoids
653 629 378 Personnes obèses dans le monde
21 853 Personnes mortes de faim aujourd'hui
$ 356 528 148 Argent dépensé pour des maladies liées
à l'obésité aux Etats-Unis aujourd'hui
$ 135 088 254 Argent dépensé en programmes de perte
de poids aux Etats-Unis aujourd'hui

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Eau
4 723 257 041 Eau consommée cette année (mil. de litres)
366 036 Deaths caused by water related
diseases cette année
649 927 868 Personnes n'ayant pas accès
à un point d'eau potable
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Energie
279 913 708 Energie employée aujourd'hui (MWh), dont:
226 728 871 - provenant de sources non-renouvelables
53 184 837 - provenant de sources renouvelables
2 089 915 184 664 Energie solaire atteignant
la Terre aujourd'hui (MWh)
59 902 273 Pétrole pompé aujourd'hui (barils)
1 150 245 146 093 Pétrole restant (barils)
13 693 Jours restants à la fin du pétrole
1 123 257 131 832 Gaz restant (boe)
59 119 Jours restants à la fin du gaz
4 358 356 346 798 Charbon restant (boe)
150 288 Jours restants à la fin du charbon
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Santé
5 642 718 Décès dus à des maladies
contagieuses cette année
3 303 924 Décès d'enfants de moins
de 5 ans cette année
18 260 692 Avortements cette année
149 431 Décès de mères durant
un accouchement cette année
38 163 101 Personnes infectées par le VIH/SIDA
730 702 Décès causés par le VIH/SIDA cette année
3 569 883 Décès causés par le cancer cette année
426 357 Décès causés par la malaria cette année
10 816 550 991 Cigarettes fumées aujourd'hui
2 172 913 Décès causés par la cigarette cette année
1 087 142 Décès provoqués par alcool cette année
466 114 Suicides cette année
$ 173 887 846 087 Dépenses pour drogues cette année
586 755 Décès dus à des accidents
de la route cette année


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